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21/10/2022 | FRANCE | N°443535

France | France, Conseil d'État, Formation spécialisée, 21 octobre 2022, 443535


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 31 août 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du ministre de l'intérieur du 31 mai 2019 lui refusant l'accès aux données susceptibles de la concerner figurant dans le fichier des personnes recherchées et intéressant la sûreté de l'Etat ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui communiquer les informations la concernant figurant dans ce fichier et de les effacer ;

3°) de mettre à la charge de l'Et

at une somme de 3 000 euros à verser à Me Ridoux, son avocat, au titre de l'article L. 76...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 31 août 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler la décision du ministre de l'intérieur du 31 mai 2019 lui refusant l'accès aux données susceptibles de la concerner figurant dans le fichier des personnes recherchées et intéressant la sûreté de l'Etat ;

2°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de lui communiquer les informations la concernant figurant dans ce fichier et de les effacer ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros à verser à Me Ridoux, son avocat, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de la sécurité intérieure ;

- la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, modifiée ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2010-569 du 28 mai 2010 ;

- le décret n° 2018-687 du 1er août 2018 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une séance à huis-clos, d'une part, Mme A... et Me Ridoux, son avocat, et d'autre part, le ministre de l'intérieur et des outre-mer et la Commission nationale de l'informatique et des libertés, qui ont été mis à même de prendre la parole avant les conclusions ;

Et après avoir entendu en séance :

- le rapport de Mme Nathalie Escaut, conseillère d'Etat,

- et, hors la présence des parties, les conclusions de M. Clément Malverti, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. En vertu de l'article 31 de la loi du 6 janvier 1978, les traitements de données à caractère personnel mis en œuvre pour le compte de l'Etat et intéressant la sûreté de l'Etat, la défense ou la sécurité publique sont autorisés par arrêté du ou des ministres compétents, pris après avis motivé de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL), publié avec l'arrêté autorisant le traitement. Ceux de ces traitements qui portent sur des données mentionnées au I de l'article 6 de la même loi doivent être autorisés par décret en Conseil d'Etat pris après avis motivé la Commission, publié avec ce décret. Un décret en Conseil d'Etat peut dispenser de publication l'acte réglementaire autorisant la mise en œuvre de ces traitements ; le sens de l'avis émis par la CNIL est alors publié avec ce décret.

2. L'article L. 841-2 du code de la sécurité intérieure prévoit que le Conseil d'Etat est compétent pour connaître, dans les conditions prévues au chapitre III bis du titre VII du livre VII du code de justice administrative, des requêtes concernant la mise en œuvre du droit d'accès aux données à caractère personnel et intéressant la sûreté de l'Etat qui sont contenues dans les traitements mis en œuvre pour le compte de l'Etat, dont la liste est fixée par l'article R. 841-2 du même code. Figure notamment au nombre de ces traitements le fichier des personnes recherchées pour les seules données intéressant la sûreté de l'Etat mentionnées au 8° du III de l'article 2 du décret du 28 mai 2010 susvisé.

3. Le droit d'accès aux traitements intéressant la sûreté de l'Etat et la défense, entrant dans le champ du titre IV de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique et aux libertés, était régi, à la date de la décision attaquée, par l'article 41 de cette loi, désormais repris à son article 118, qui dispose que "Par dérogation aux articles 39 et 40, lorsqu'un traitement intéresse la sûreté de l'Etat, la défense ou la sécurité publique, sous réserve de l'application des dispositions du chapitre XIII, le droit d'accès s'exerce dans les conditions prévues par le présent article pour l'ensemble des informations qu'il contient. / La demande est adressée à la commission qui désigne l'un de ses membres appartenant ou ayant appartenu au Conseil d'Etat, à la Cour de cassation ou à la Cour des comptes pour mener les investigations utiles et faire procéder aux modifications nécessaires. Celui-ci peut se faire assister d'un agent de la commission. Il est notifié au requérant qu'il a été procédé aux vérifications. / Lorsque la commission constate, en accord avec le responsable du traitement, que la communication des données qui y sont contenues ne met pas en cause ses finalités, la sûreté de l'Etat, la défense ou la sécurité publique, ces données peuvent être communiquées au requérant. ".

4. Il résulte des dispositions combinées de l'article L. 841-2 du code de la sécurité intérieure, rappelées au point 2, et de l'article 41 de la loi du 6 janvier 1978, citées au point 3, qu'un requérant n'est recevable à saisir le Conseil d'Etat sur le fondement de l'article L. 841-2 que s'il a, au préalable, saisi la CNIL d'une demande d'accès indirect à un traitement et que si cette dernière l'a informé du refus de communication opposé par le responsable du traitement ou n'a pas répondu dans le délai imparti.

5. Il ressort des pièces du dossier que, si Mme A... a saisi, le 23 mai 2019, le ministre de l'intérieur d'une demande d'accès aux données susceptibles de la concerner figurant dans le fichier des personnes recherchées et intéressant la sureté de l'Etat, qui a été rejetée par une décision du 31 mai 2019, elle n'a pas saisi la CNIL d'une demande d'accès indirect à ce fichier. Il résulte de ce qui a été dit au point 4 que, faute d'avoir saisi au préalable la CNIL d'une demande d'accès aux informations susceptibles de la concerner, dans le fichier des personnes recherchées et intéressant la sûreté de l'Etat, la requérante n'est pas recevable à contester le refus qui lui a été opposé par le ministre de l'intérieur. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions de Mme A... doivent être rejetées, y compris ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée à la commission nationale de l'informatique et des libertés.

Délibéré à l'issue de la séance du 11 octobre 2022 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président de la formation spécialisée, présidant ; M. Thomas Andrieu, conseiller d'Etat et Mme Nathalie Escaut, conseillère d'Etat-rapporteure.

Le président :

Signé : M. Rémy Schwartz

La rapporteure :

Signé : Mme Nathalie Escaut

Le secrétaire :

Signé : M. Valéry Cerandon-Merlot


Synthèse
Formation : Formation spécialisée
Numéro d'arrêt : 443535
Date de la décision : 21/10/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 21 oct. 2022, n° 443535
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Nathalie Escaut
Rapporteur public ?: M. Clément Malverti
Avocat(s) : RIDOUX

Origine de la décision
Date de l'import : 30/10/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2022:443535.20221021
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