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22/12/2016 | TOGO | N°123/16

Togo | Togo, Cour suprême, Chambre judiciaire, 22 décembre 2016, 123/16


Texte (pseudonymisé)
A l’audience publique ordinaire de la chambre judiciaire de la Cour suprême, tenue au Siège de la Cour à Lomé, le jeudi vingt-deux décembre deux mille seize, est intervenu l’arrêt suivant :

LA COUR,

Sur le rapport de Monsieur Kuma LOXOGA, conseiller à la chambre judiciaire de la Cour suprême ;

Vu l’arrêt N°318/15 rendu en matière civile le 23 juillet 2015 par la Cour d’Appel de Lomé ;

Vu la requête à fin de pourvoi de maître Malia KELOUWANI, conseil de la demanderesse au pourvoi ;

Vu le m

émoire en réponse de maître Odadjé HOUNNAKE, conseil des défendeurs au pourvoi ;

Vu le mémoire ...

A l’audience publique ordinaire de la chambre judiciaire de la Cour suprême, tenue au Siège de la Cour à Lomé, le jeudi vingt-deux décembre deux mille seize, est intervenu l’arrêt suivant :

LA COUR,

Sur le rapport de Monsieur Kuma LOXOGA, conseiller à la chambre judiciaire de la Cour suprême ;

Vu l’arrêt N°318/15 rendu en matière civile le 23 juillet 2015 par la Cour d’Appel de Lomé ;

Vu la requête à fin de pourvoi de maître Malia KELOUWANI, conseil de la demanderesse au pourvoi ;

Vu le mémoire en réponse de maître Odadjé HOUNNAKE, conseil des défendeurs au pourvoi ;

Vu le mémoire en réplique de maître KELOUWANI, conseil de la demanderesse au pourvoi ;

Vu les conclusions écrites de Monsieur le Procureur Général près la Cour Suprême ;

Vu les autres pièces de la procédure ;

Vu la loi organique N°97-05 du 06 mars 1997 portant organisation et fonctionnement de la Cour Suprême et le décret N°82-50 du 15 mars 1982 portant code de procédure civile ;

Ouï le conseiller Kuma LOXOGA en son rapport ;

Nul pour maître KELOUWANI, absent et non représenté, conseil de la demanderesse au pourvoi ;

Ouï maître Odadjé HOUNNAKE, conseil des défendeurs au pourvoi ;

Le Ministère Public entendu ;

Et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Statuant en matière civile et en état de cassation sur le pourvoi formé le 30 octobre 2015 par maître Malia KELOUWANI, avocat à la Cour à Lomé, agissant au nom et pour le compte de la collectivité KOSSI-AGBAVI représentée par dame Aj AP et Au AK, contre l’arrêt N°318/2015 rendu le 23 juillet 2015 par la chambre civile de la Cour d’appel de Lomé qui a infirmé en toutes ses dispositions, l’ordonnance de référé sur assignation n° 01/2013 rendu le 7 janvier 2013 par le président du Tribunal de première instance de deuxième classe d’Ak, et rétracté, en conséquence, l’ordonnance à pied de requête n° 83/2011 du 20 octobre 2011 à l’endroit des appelants dame AQ Aw et autres, tous acquéreurs de parcelles auprès des sieurs Ae AT et Ah Ad Af, mandataires de la collectivité KOSSI-AGBAVI ;

EN LA FORME

Attendu que tous les actes de la procédure ont été faits dans les forme et délai de la loi ; qu’il suit que le pourvoi est recevable ;

AU FOND

Attendu que des énonciations de l’arrêt infirmatif attaqué et d’autres éléments du dossier, il ressort que, courant années 1996 à 2010, les nommés Af Ah Ad et Af AT Ae, ont successivement géré les biens immobiliers de la collectivité KOSSI-AGBAVI en leur qualité de mandataires suivant procurations générales enregistrées à l’inspection des grandes entreprises le 29 octobre 1996 pour le premier et à la direction générale des impôts pour le second, ainsi qu’il ressort des déclarations de maître Batékoué DOVI, notaire, qui a établi lesdites procurations ; que, pendant cette période, les nommés AQ Aw, Bd Bc AZ, Bh AX, Aa Y AH, HOUNKPE SAGO, Af Ag B, Yao Bf AI BB, Al AO, Ay Bb AN, Av AZ, Az AW, Bj AR, Ab Am X Y, Ba AL, Ap AH, Ao Bi, Ax BC AV, At Aq AM épouse AG, Ar Ai épouse AS, At C, Ap Be AJ, Bg AY et Aj AG, ont acquis par voie d’achat, des parcelles de terrain auprès de la collectivité KOSSI-AGBAVI représentée par ses mandataires susnommés ; que dame Aj AP et Au AK, désignés le 21 septembre 2010 comme nouveaux mandataires de la collectivité Z Af, remettant en cause les ventes de terrain opérées par leurs prédécesseurs, ont obtenu du président du tribunal de première instance d’Ak, une ordonnance à pied de requête n° 83/2011 du 20 octobre 2011 les autorisant « à enlever les clôtures et bâtiments inachevés érigés » sur le domaine de la collectivité KOSSI-AGBAVI ; qu’estimant qu’ils ont acquis leurs lots de terrain auprès des mandataires régulièrement désignés par la collectivité KOSSI-AGBAVI et que les nouveaux mandataires désignés 9 à 13 ans après la nomination des premiers ne peuvent remettre en cause des droits régulièrement acquis, les acquéreurs sus indiqués ont introduit une action en référé aux fins de rétractation de l’ordonnance à pied de requête susvisée ; que, par ordonnance N°01/2013 du 7 janvier 2013, le président du tribunal d’Ak les a déboutés de leurs demandes, fins et conclusions ; que saisie de l’appel interjeté de cette dernière ordonnance par les acquéreurs, la Chambre civile de la Cour d’appel de Lomé a, par l’arrêt dont pourvoi, infirmé en toutes ses dispositions, la décision du premier juge, et statuant à nouveau, a rétracté l’ordonnance à pied de requête n° 83/2011 du 20 octobre 2011 à l’endroit des appelants, tous acquéreurs des parcelles auprès des sieurs Ae AT et Ah Ad Af, mandataires de la collectivité KOSSI-AGBAVI au moment de leurs acquisitions ;

Sur le premier moyen

Attendu que la dénaturation des faits s’entend de l’interprétation erronée par les juges du fond d’une clause claire et précise d’un acte écrit qui leur est soumis en lui donnant un sens qu’il n’a pas ou en le lisant autrement qu’il est écrit, ou, c’est le fait pour le juge de modifier, sous prétexte de l’interpréter, le sens clair et précis d’une clause d’un contrat ou d’une disposition légale ;

Attendu que la demanderesse au pourvoi fait grief à l’arrêt entrepris de ce que, pour statuer comme elle l’a fait, la Cour d’appel de Lomé s’est fondée essentiellement sur les actes notariés en date des 03 septembre 1989 et 28 octobre 1996 par lesquels les sieurs AT Ae et Ah Ad Af ont été désignés mandataires de la collectivité KOSSI-AGBAVI, alors qu’il s’agit des actes obtenus frauduleusement en trompant la vigilance du notaire qui, par « déclaration notariée » en date du 13 février 2001 les a annulés purement et simplement et qu’en prenant en compte lesdits actes frappés d’une nullité absolue les juges d’appel ont dénaturé les faits de la cause ;

Mais attendu que pour statuer comme ils l’ont fait, les juges d’appel ont ainsi énoncé :

« Attendu qu’il n’est pas contesté que suivant actes notariés en date des 03 septembre 1989 et 28 octobre 1996 dressés par maître Batékoué DOVI, les nommés AT Ae et Ah Ad Af ont été désignés mandataires de la collectivité KOSSI-AGBAVI ;
« Qu’il n’est pas contesté non plus qu’en 1999, le notaire, a la diligence des membres de la collectivité KOSSI-AGBAVI, a, suivant acte en date du 04 mai 2010, annulé ces précédentes procurations données aux sieurs AT Ae et Ad Ah Af, et désignait dorénavant TOSSOU à leur place ; que, la question qui se pose est celle de déterminer le sort réservé aux actes posés au nom de la collectivité KOSSI-AGBAVI par les mandataires révoqués ;
«Attendu que dès lors que les membres de la collectivité ne nient pas avoir constitué les susnommés, vendeurs des appelants, mandataires, tous les actes posés au nom de la collectivité leur sont opposables » ;

Attendu que de par cette motivation et eu égard à la définition de la dénaturation des faits, le grief de la dénaturation n’existe nullement en la présente cause en ce que les juges d’appel n’ont fait que constater les faits constants en l’espèce, au regard des pièces versés aux débats, notamment les actes notariés dont ils ont souverainement apprécié la portée juridique, encore que l’appréciation de la portée juridique d’une convention n’est pas susceptible d’être critiquée par le grief de dénaturation ;

Attendu qu’ainsi, c’est à juste titre que les juges d’appel ont ainsi décidé en ce que conformément aux dispositions des article 1317 et 1319 du code civil, c’est dans le cadre d’une procédure judiciaire que sont réglés tous les incidents nés de la contestation, par une partie, de l’authenticité des documents produits et non par la volonté ou la déclaration, quoique solennelle du notaire auteur desdits documents, surtout que les actes litigieux sont relatif à des intérêts particuliers ;

Qu’il suit que le premier moyen n’est pas fondé et doit être rejeté ;

Sur le second moyen en ses trois branches réunies

Attendu qu’aux termes de l’article 43 du code de procédure civile, « Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au soutien de sa prétention » tandis que conformément aux dispositions de l’article 1134 du code civil, « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi… » et que selon l’article 1351 du même code « l’autorité de la chose jugée n’a lieu qu’à l’égard de ce qui a fait l’objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties et formée par elles contre elles en la même qualité. » ;

Attendu que la demanderesse au pourvoi reproche à l’arrêt critiqué d’avoir rétracté l’ordonnance n° 83/2011 du 20 octobre 2011 et déclaré opposables aux membres de la collectivité KOSSI-AGBAVI, les actes frauduleux posés par les sieurs AT Ae et Ah Ad Af, alors que, non seulement les défendeurs au pourvoi n’ont rapporté la moindre preuve de ce que leurs vendeurs étaient mandataires réguliers de la collectivité KOSSI-AGBAVI, et qu’aucune convention de représentation n’existe entre elle et ces derniers, mais aussi et surtout que les actes litigieux ont été annulés par l’arrêt n° 265/2001 rendu le 27 décembre 2001 par la même cour d’appel de Lomé et qui a acquis l’autorité de la chose jugée ;

Mais attendu que l’obligation pour les défendeurs au pourvoi de faire la preuve que leurs vendeurs étaient mandataires régulier, l’existence d’une convention de représentation entre ces derniers et la collectivité KOSSI-AGBAVI, ainsi que l’annulation des actes litigieux par l’arrêt 265/2001 du 27 décembre 2001 sont des questions intrinsèquement liées au premier moyen et trouvent leurs réponses dans les développements consacrés à ce moyen qui, rappelons-le, n’est pas fondé ;

Qu’il convient de rejeter également le second moyen comme non fondé ;

Sur le troisième moyen

Attendu que la demanderesse au pourvoi conteste l’arrêt déféré en ce que, alors que l’arrêt n° 265/2001 rendu le 27 décembre 2001 par le Cour d’appel de Lomé, a définitivement réglé le problème de la représentation juridique de la collectivité KOSSI-AGBAVI, l’arrêt attaqué rendu par la même cour valide les procurations rejetées, entachant ainsi sa décision du grief de la contrariété de jugements ;

Mais attendu que, s’il est vrai que le moyen tiré de la contrariété de jugements peut être soulevé contre le second jugement au cas où la fin de non-recevoir tirée de l’autorité de la chose jugée est opposée en vain, il n’en demeure pas moins que ce moyen, pour être accueilli, les deux décisions rendues en dernier ressort, soient inconciliables et la contrariété constatée ;

Attendu que l’examen de l’arrêt n° 265/2001 du 27 décembre 2001 ne fait apparaître nulle part que la Cour d’appel de Lomé a définitivement réglé le problème de représentation juridique de la collectivité KOSSI-AGBAVI, mais plutôt ladite cour, en rendant cet arrêt, avait statué sur une demande de résolution de la vente de terrain consentie au sieur Ac BD et sur le droit de propriété et avait dans son dispositif, annulé le jugement n° 202/1999, et évoquant, avait , entre autres dispositions, dit et jugé que le terrain sur lequel a porté la vente litigieuse est et demeure la propriété de la collectivité KOSSI-AGBAVI représentée par Ad Ah Af –KOSSI ; que, pour faire rectifier l’arrêt n° 265/2001 susvisé par la même cour dans son arrêt n°232/2002 du 26 décembre 2002, la demanderesse au pourvoi avait prétendu et soutenu que ladite cour dans son premier arrêt « a en outre, précisé que la collectivité KOSSI-AGBAVI est représentée par Ad Ah BA alors que ce dernier , ancien mandataire de son état, est décédé depuis…. » ;

Qu’il en résulte dès lors que les procurations querellées n’ont jamais été rejetées ou annulée comme le prétend la demanderesse au pourvoi de sorte que le grief de contrariété de jugements invoqué n’existe pas, les deux décisions étant parfaitement conciliables ; qu’ainsi, le troisième moyen n’est pas fondé et doit être rejeté ;

Attendu que le pourvoi n’est fondé en aucun de ses trois moyens ; qu’il y a lieu de le rejeter ;

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement, publiquement, en matière civile et en état de cassation ;

EN LA FORME

Reçoit le pourvoi ;

AU FOND

Le rejette comme non fondé ;

Prononce la confiscation de la taxe de pourvoi ;

Condamne la demanderesse au pourvoi aux dépens ;

Ordonne que mention du présent arrêt soit faite en marge ou au pied de la décision critiquée ;

Ainsi fait, jugé et prononcé par la Chambre Judiciaire de la Cour Suprême, en son audience publique ordinaire du jeudi vingt-deux décembre deux mille seize (22-12-2016) à laquelle siégeaient :

Monsieur Essozinam ADI-KPAKPABIA, Conseiller à la Chambre Judiciaire de la Cour Suprême, PRESIDENT ;

Messieurs Badjona SAMTA, Ananou Galley Gbeboumey EDORH, Kuma LOXOGA et Léeyé Koffi BLAMCK, tous quatre Conseillers à ladite Chambre, MEMBRES ;

En présence de Monsieur An A, Deuxième Avocat Général près la Cour Suprême ;

Et avec l’assistance de Maître Awié ATCHOLADI, Attaché d’Administration, Greffier à ladite Cour, GREFFIER ;

En foi de quoi, le présent arrêt a été signé par le Président et le Greffier

POURVOI N°164/RS/15 DU 30 OCTOBRE 2015

PRESENTS : MM
ADI-KPAKPABIA: PRESIDENT
SAMTA, EDORH, LOXOGA, BLAMCK Membres
KANTCHIL-LARRE: M. As
AU : GREFFIER


Synthèse
Formation : Chambre judiciaire
Numéro d'arrêt : 123/16
Date de la décision : 22/12/2016

Parties
Demandeurs : Collectivité KOSSI-AGBAVI représentée par le dame Afi APELETE et sieur Michel TOSSOU (Me Malia KELOUWANI)
Défendeurs : Dame NOUMONVI Philomène et autres (Me Odadjé HOUNNAKE)

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;tg;cour.supreme;arret;2016-12-22;123.16 ?
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