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26/03/2010 | ROUMANIE | N°2154/CCPI/2010

Roumanie | Roumanie, Haute cour de cassation et de justice, Chambre civile et de propriété intellectuelle, 26 mars 2010, 2154/CCPI/2010


L'on examine les pourvois formés par les requérants N.O., N.M. et N.D. et par l'accusée S.C.B.S.A. de Târnaveni contre la décision no73 A du 26 mars 2009 de la Cour d'appel de Bucarest - IXe section civile et pour des causes concernant la propriété intellectuelle.
Les débats ont eu lieu au délai du 19 mars 2010 du procès et ont été consignés dans la minute de l'audience de ce délai, cette minute faisant partie de la présente décision.
Afin de se donner le temps de délibérer dans les conditions de l'art. 260 alinéa 1 du Code de procédure civile et pour donner aux par

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L'on examine les pourvois formés par les requérants N.O., N.M. et N.D. et par l'accusée S.C.B.S.A. de Târnaveni contre la décision no73 A du 26 mars 2009 de la Cour d'appel de Bucarest - IXe section civile et pour des causes concernant la propriété intellectuelle.
Les débats ont eu lieu au délai du 19 mars 2010 du procès et ont été consignés dans la minute de l'audience de ce délai, cette minute faisant partie de la présente décision.
Afin de se donner le temps de délibérer dans les conditions de l'art. 260 alinéa 1 du Code de procédure civile et pour donner aux parties la possibilité de déposer leurs conclusions écrites, la Haute Cour a ajourné la prononciation au 26 mars 2010.
Après délibérations,
LA COUR,
Vu la présente affaire, constate ce qui suit :
Par la requête enregistrée au numéro 289/12.01.1995 au Tribunal de la Ville de Bucarest, IVe section civile, le requérant N.N.M. assigne en justice les intimées S.C.I. de M.N. et R. - I.M.N.R. et S.C.B.S.A., demandant au tribunal d'obliger les intimées aux : paiement des droits en espèces, représentant l'obligation fixe de récompense , conformément à la Règle no 53, 1er partie de l'Arrêté du Gouvernement 152/1992, 1e Annexe, avec l' indexation et les intérêts afférents jusqu' au paiement effectif ; la conclusion avec le requérant de la note de négociation prévue par la IIe partie, Annexe 1, règle 53 de l'Arrêté du Gouvernement 152/1992, ces droits revenant au requérant en sa qualité d'auteur de l'invention pour laquelle fut émis le Brevet d'Invention no52193, « Procédé et installation pour séparer les particules en suspension dans les milieux fluides à température élevée et pour récupérer la chaleur physique de ces milieux ».
Le requérant soutient que le titulaire du brevet est le défendeur I.N.M.R., mais que l'invention a été appliquée par la défenderesse S.C. B. S.A., qui a obtenu de ce fait des avantages économiques de près de 5,7 milliards de lei durant la période d'application de 1980-1990.
Le requérant précise qu'il n'a reçu, à cette heure, aucune récompense, malgré les nombreuses demandes formulées en ce sens.

La sentence civile no 112 du 22 février 1996 du Tribunal de Bucarest a admis d'exception de prescription du droit à l'action, avec pour conséquence le rejet de l'action comme prescrite.

La décision civile no 21 A/29.01.1997, rendue par la Cour d'appel de Bucarest - IIIe section civile, admet l'appel, dont s'est pourvu le requérant, en supprimant la sentence appelée et renvoyant la cause au même tribunal pour une solution.
Pour en disposer ainsi, l'instance d'appel a retenu en essence que, par l'art. 66 de la Loi 64/1991, les auteurs de l'invention ont été ramenés au délai d'exercice de leur droit à l'action pour leurs prétentions pécuniaires concernant l'application des inventions et que le requérant avait formulé l'action en attente à l'intérieur du délai de 3 ans suivant l'entrée en vigueur de cet acte normatif.
La décision civile no 3983 du 26 novembre 1997 rendue par la Cour Suprême de Justice maintient la décision de la cour d'appel.
Pour en disposer ainsi, l'instance de recours a retenu en essence que la première instance s'était prononcée uniquement sur l'exception, comme le demandait la procédure, sans analyser les preuves administrées et sans se prononcer sur le fond de l'affaire.
C'est la raison pour laquelle l'instance d'appel, estimant justifié l'appel du requérant concernant la prescription, a supprimé la sentence et a disposé le renvoi de l'affaire pour en juger le fond. Même si le requérant a ajouté certaines conclusions concernant le fond, en plus de celles concernant l'exception, l'important est ce qui a été retenu par l'instance et les raisons pour lesquelles elle a rejeté l'action.
En ce qui concerne le recours déclaré par la défenderesse, l'on retient l'infondé de celui-ci concernant la circonstance selon laquelle, sur l'objet de l'action, agit une loi spéciale - Loi no 64/1991 - entrée en vigueur en janvier 1992 et ramenant dans les délais les personnes en droit de former de telles prétentions. Il est erroné de soutenir que, en vertu de la Loi 64/1991, le terme général de prescription de 3 ans, fixé par le Décret 167/1958, aurait été modifié, car la loi en question n'a effectué qu'une remise au terme de 3 ans des auteurs d'inventions. Il ne saurait être question d'appliquer l'art. 19 du Décret no 167/1958, parce que la remise dans les délais n'est pas une demande de la partie, étant accordée par la loi sans nulle condition.

La sentence civile no688 du 23 septembre 1998 du Tribunal de Bucarest - IIIe section civile a partiellement admis l'action du requérant, disposant d'obliger l'accusée S.C. B. S.A de Târnaveni à 100.000 lei de frais de justice au requérant.
Pour en disposer ainsi, l'instance a retenu ce qui suit :
Conformément au certificat d'inventeur no 52193/12.07.1969, le requérant est l'auteur de l'invention « Procédé et installation pour séparer les particules en suspension dans les milieux fluides à haute température et pour récupérer la chaleur physique de ces milieux » et la bénéficiaire de cette invention est l'accusée S.C. B. SA. Dans le sens des prévisions de l'art. 66 de la Loi 64/1998, cette défenderesse est obligée au paiement des droits en espèces dus au requérant, en sa qualité d'inventeur, pour la période du 1er octobre 1995-1er juin 1998.
Pour la période ultérieure au 1er juillet 1998, à propos des droits pécuniaires dus au requérant pour l'application de son invention par l'accusée, l'on retient, en vertu de l'art. 66 alinéa 2 de la Loi 64/1991, l'obligation de celle-ci de négocier avec le requérant, les droits pécuniaires qui lui sont dus.
Comme il ne résulte pas du probatoire administré que l'invention ait aussi été appliquée par la défenderesse S.C. I.M.N.R. S.A., l'action dirigée contre cette défenderesse est jugée infondée.

Par sa décision civile no 83 du 21 février 2000, la Cour d'appel de Bucarest - IVe section civile a admis l'appel déclaré par la défenderesse S.C B. S.A. de Târnaveni, disposant de changer la sentence en appel, dans le sens d'en écarter la mention concernant l'obligation de la défenderesse de négocier les droits en espèce dus au requérant pour l'application de son invention ; l'appel formé par le requérant a été rejeté comme infondé.
Pour en disposer ainsi, l'instance d'appel a retenu que :
Dès lors que l'instance a établi une obligation fixe de paiement de droits pécuniaires dus à l'inventeur pour appliquer son invention, la possibilité de les négocier pour la même période était exclue. Quant à la période suivante, ces négociations sont conditionnées par l'application de l'invention par la société défenderesse. Ce qui plus est, le requérant a indiqué qu'il sollicitait les droits en espèces qui lui étaient dus pour la période 1980-1990 d'application de l'invention.
Pour ce qui est de la prescription du droit à l'action, l'on retient que ce problème a été réglé de façon irrévocable par la décision civile no 3983/1997 de la Cour suprême de justice.
Pour ce qui est de l'appel formé par le réclamant, l'on retient qu'il n'était pas fondé, la première instance n'ayant pas rejeté comme infondée la demande dirigée contre la défenderesse S.C. I.N.M.R. SA pour manque de qualité processuelle passive, mais sur le fond, ce qui signifie que l'instance a reconnu à cette défenderesse, sa qualité processuelle.
Par rapport aux prévisions de l'art. 66 alinéa 2 de la Loi no 64/1991, l'obligation de négocier et de payer des droits pécuniaires dus à l'inventeur, pour les inventions appliquées et partiellement récompensées ou non récompensées, jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi, cette obligation donc revient à la société qui a appliqué l'invention. La règle 53 de la HG no 152/1992 ne modifie pas l'aspect processuel et ne pourrait d'ailleurs le faire, vu le rapport entre ces deux catégories d'actes normatifs et le contenu de l'art. 66 alinéa 2 de la dite loi.

Par la décision civile no 1602 du 14 mars 2001, rendue par la Cour suprême de justice, furent admis les recours déclarés dans cette cause, en disposant de casser la décision attaquée et la sentence de la première instance, avec renvoi de la cause au même tribunal pour être rejugée.
Pour en disposer ainsi, l'instance de recours a essentiellement retenu que par la Loi no 64/1991, une procédure préalable à la présentation en justice avait été instituée et qu'elle supposait des négociations entre parties intéressées. Ce n'est que dans l'hypothèse de l'échec d'une telle démarche, que la personne estimée lésée dans ses droits légitimes devait s'adresser au juge.
Dans la présente affaire, le requérant n'a pas prouvé que des négociations aient été lancées avec la société bénéficiaire de l'invention.
D'autre part, il a été retenu que, selon les prévisions du Décret no884/1967, en vigueur à la date ou l'invention a été enregistrée, la durée de protection de l'invention faisant l'objet du brevet était de 15 ans, à partir de la date de constitution du dépôt réglementaire. Ce même terme est confirmé par l'art. 66 alinéa 1 de la Loi no64/1991.
L'instance a en même temps retenu que le requérant réclamant avait toujours soutenu que l'obligation d'être dédommagé pour l'invention appliquée par la S.C. B. S.A. de Târnaveni revenait aussi, solidairement, à la titulaire de brevet S.C. I.N.M.R. S.A. de Bucarest, conformément aux prévisions de la Règle 53 de l'Arrêté du Gouvernement no 152/1992 et que cette défense n'avait pas été examinée par l'instance de fond.

Contre cette décision, le réclamant a exercé la voie d'attaque extraordinaire de la contestation en annulation.
La contestation ainsi formulée a été rejetée par la décision civile no 2366 du 12 juin 2002, rendue par la Cour Suprême de Justice, en retenant que les raisons invoquées par le réclamant contestataire ne s'inscrivaient pas dans les limites des prévisions légales pour l'exercice de cette voie d'attaque.

Par sa sentence civile no 180 du 17 février 2003, le Tribunal de Bucarest - IIIe section civile a admis l'exception de prématurité de la demande, rejetant la demande comme prématurément introduite.
La conclusion rendue le 7 avril 2003 a rejeté la demande de corriger l'erreur matérielle du réclamant, l'instance retenant que les conditions de l'art. 282 indice 1 du Code de procédure civile n'étaient pas remplies. Le litige a été réglé par la voie de l'exception de prématurité, situation dans laquelle - conformément à l'art. 137 du C.pr.civ. - il est devenu inutile d'étudier le fond de la cause.
Par sa décision civile no 417 du 15 septembre 2003, la Cour d'appel de Bucarest - IIIe section civile a rejeté comme infondés les appels formés par le réclamant contre la sentence et la conclusion.

Par la décision civile no 4597 du 17 juin 2004, la Cour Suprême de Justice a admis le recours dont le réclamant s'est pourvu, disposant de casser la décision requise et de renvoyer la cause pour que soient rejugées les pourvois en appel.
Pour en disposer ainsi, l'instance de recours a retenu en essence que :
L'instance d'appel avait mal appliqué les prévisions de l'art.70 de la Loi no 64/1991 et l'Arrêté du Gouvernement no 152/1992 sans analyser toutes les critiques formulées par l'appelant-réclamant.
L'exception de prématurité de l'action en justice a été invoquée par le tribunal qui, en vertu des indications de l'arrêt de cassation, devait vérifier que la procédure de négociation ait eu lieu avant de constater si le requérant justifiait son action. Le fait d'invoquer et admettre l'exception après administration de la preuve d'expertise technique et l'octroi d'un délai pour discuter des objections n'est pas une violation des dispositions de l'art. 268 alinéa 3 du C. proc. pén.
La condition de négocier était prévue, à la date de la prononciation de la sentence civile no 180/2003, par l'art. 70 de la Loi no 64/1991 republiée et la manière de négocier les droits dus aux inventeurs pour l'application de leurs inventions, partiellement récompensées ou non récompensées du tout à la date d'entrée en vigueur de la loi, était fixée par la règle 53 de l'Arrêté du Gouvernement no152/1992.
Conformément à l'art. 70 de la loi mentionnée, les droits en espèces sont négociés par l'inventeur avec l'unité (entreprise, société) qui a appliqué l'invention, ce qui fait que le droit du requérant ne pouvait être affecté par les conditions de négociation que dans ses relations avec la défenderesse S.C.B.S.A. de Târnaveni et non pas dans celles concernant la défenderesse S.C.I.M.N.R.S.A. - unité titulaire du brevet d'invention.
Selon la règle 53 de l'Arrêté du Gouvernement no152/1992, celui qui avait l'obligation de déclencher la négociation avec la S.C. B. S.A., était le requérant, seulement cette règle fixait des obligations à la charge de chacun des partenaires de négociation, or les actes invoqués par le requérant attestent qu'avant d'introduire l'action en justice, il avait, lui, adressé à la défenderesse la demande no 565, demandant d'être récompensé pour son invention. Dans sa demande, il ne précisait pas le montant de la somme exigée et ne complétait pas la note de calcul, conformément à la Règle 53 de l'Arrêté du Gouvernement no 152/1992, mais il annexait une adresse précisant les économies nettes enregistrées pendant 5 ans. L'accusée n'a pas répondu à la demande du requérant et en cours de procès, elle a soutenu que son droit, à lui, était prescrit.
L'instance de recours a encore retenu qu'à la date ou la solution de l'appel a été rendue, la procédure de négociation préalable n'était plus une condition pour le lancement de l'action en justice, car l'Arrêté du Gouvernement no 152/1992 avait été abrogée par l'Arrêté du Gouvernement no 499/11.04.2003 ; ce dernier acte normatif ne réglementait pas la procédure des négociations prévue à l'art. 70 alinéa 3 de la Loi no64/1991 republiée, norme qui contient les prévisions de l'art. 66 alinéa 2 dans la forme de loi antérieure à sa modification et republication.
En recevant l'affaire pour la rejuger, la Cour d'appel de Bucarest a constitué le dossier 3517/2004, enregistré au rôle de la IIIe section civile.
Par la conclusion de séance du 10 janvier 2005, l'affaire a été retirée du rôle de cette section et renvoyée pour un nouveau procès à la IXe section nouvellement créée, spécialisée dans la solution des affaires de propriété intellectuelle.
La conclusion de séance de l'instance d'appel, rendue le 9 juin 2005, a rejeté la demande de l'appelant requérant, réclamant de corriger les omissions de la conclusion de séance du 19 avril 2005 et a accordé aux parties un terme pour prendre connaissance du rapport d'expertise effectué à cette étape de la procédure.
Le 28 juin 2005, l'appelant s'est pourvu en cassation contre la minute de l'audience, indiquant qu'il avait aussi formulé une demande de rectification qui avait été illégalement rejetée.

La Haute Cour de cassation et de Justice (HCCJ) a rejeté comme inadmissible, par sa décision civile no 9680 du 23 novembre 2005, le recours ainsi formé, retenant essentiellement que la minute attaquée avait un caractère préparatoire et, conformément aux prévisions de l'art. 299 du Code de proc. civile, elle ne saurait être attaquée autrement qu'avec la décision devant être prononcée par l'instance d'appel.
Contre cette décision de l'instance de recours, l'appelant requérant a utilisé la voie d'attaque extraordinaire de la contestation en annulation, rejetée comme inadmissible, par la décision no 7389 du 22 septembre 2006 de l'instance suprême. Pour en disposer ainsi, l'instance a retenu en essence que l'instance de recours ne pouvait pas avoir omis par erreur d'analyser une raison de recours, vu que, ayant constaté l'inadmissibilité de cette voie de recours, selon la loi, elle n'a analysé aucune des raisons de recours. Il a aussi été retenu qu'en multipliant l'exercice des voies d'attaques inadmissibles, le requérant contestataire faisait tergiverser le jugement de l'affaire sur le fond.
Le 6 octobre 2006, l'appelant N.M. a exercé la voie d'attaque extraordinaire de révision contre la décision civile no 7389/2006 rendue par la HCCJ.

Par la décision no1880 du 27 février 2007 la H.C.C.J. a rejeté comme inadmissible la demande en révision ainsi formée, retenant essentiellement que, aussi longtemps que les voies extraordinaires d'attaque exercées par le demandeur en révision ont été rejetées par voie d'exception, la condition légale d'admissibilité n'était pas remplie, la décision attaquée par révision devant évoquer le fond de l'affaire.

Le défendeur au pourvoi formait dans le même dossier une demande de rectification de la décision civile no 1880/2007, invoquant comme fondement légal les prévisions de l'art. 281 ind. 1 alinéa 2 du Code de proc. civ.
La décision civile no481 du 29 janvier 2008 de la H.C.C.J rejetait comme inadmissible la demande de rectification ainsi formée.
En cours de procès, l'on a pris acte de la transmission de la qualité processuelle de l'intimée accusée S.C. I. de M.N. et R.S.A. à son successeur de droit I.N. de Recherche-Développement pour M.N. et R. et il a été communiqué à l'instance que le décès de l'appelant-requérant était survenu le 20 juillet 2007.
Par la minute du 8 mai 2008, il a été disposé de la suspension de l'affaire, en vertu des prévisions de l'art. 243 point 1 du Code proc. civile, jusqu'à la déposition de la preuve concernant les héritiers - successeurs en droit - du requérant.
Le 14 janvier 2009, les héritiers du requérant N.O., N.M. et N.D. ont formé une demande de ressaisir le tribunal de l'affaire, en déposant le certificat d'hérédité no 75/03.07.2008 délivré par le BNP « N ».

Par sa décision civile no 73 du 26 mars 2009, la Cour d'appel de Bucarest - IXe section civile et pour les causes de propriété intellectuelle a rejeté comme inadmissible la demande de dédommagements moraux directement formée en appel, elle a rejeté comme infondée l'exception de manque de qualité processuelle passive de l'accusé I.M.N.R., elle a admis les appels formés par le requérant et continués par ses héritiers contre la sentence civile no 180/2003 et la conclusion du 17 avril 2003 prononcés par le Tribunal de Bucarest - IIIe section civile, elle a annulé la sentence et la conclusion et, évoquant le fond, a partiellement admis l'action, a obligé l'accusée S.C. B. S.A. au paiement aux requérants de la somme de 1.484. 680 lei représentant les récompenses et frais liés à l'invention faisant l'objet du brevet d'invention 52.193/12 juillet 1969, ainsi que l'actualisation de ces droits jusqu'au 3 juin 2005 ; elle rejette comme infondée l'action concernant l'accusée I.N.M.R.
Pour en décider ainsi, la cour d'appel a retenu ce qui suit :
Le pourvoi en instance pour la solution des appels en attente a eu lieu suite à la cassation, par l'instance de recours, de la décision antérieure concernant ces appels.
La décision de cassation, obligatoire pour l'instance appelée à rejuger, conformément aux prévisions de l'art. 315 alinéa 1 du Code de proc. civ., a établi que les erreurs du précédent procès en appel concernant cette affaire furent de ne pas avoir constaté comme remplie la condition d'actualité du droit du requérant à l'action et de ne pas avoir appliqué les prévisions de l'art. 297 du Code de proc. civ.
A la date où fut rendue la décision de cassation, tout comme à celle où l'affaire a été enregistrée au rôle de l'instance d'appel pour être rejugée, les prévisions de l'art. 297 du Code de proc. civ. avaient le contenu suivant : « si la première instance a rejeté ou annulé la demande de mise en examen sans entrer dans l'analyse du fond et si l'instance d'appel, ayant trouvé l'appel justifié, a annulé la décision attaquée, elle évoquera le fond et rejugera le procès, en prononçant une décision définitive ».
Dans les conditions où l'instance première a réglé l'affaire par la voie d'une exception - celle de prématurité de l'action formée - il est évident que l'instance de recours a renvoyé la cause en appel pour que soit évoqué le fond, conformément aux possibilités offertes par la décision de cassation et aux compétences fixées par la norme de procédure mentionnée.
D'autre part, il a été constaté, par la décision rendue au mois de janvier 2006 par la Cour européenne des droits de l'homme, dans l'affaire Nicolau contre la Roumanie, que la procédure de jugement de la cause en attente avait eu une durée excessive, violant ainsi les exigences de l'art. 6 alinéa 1 de la Convention européenne de défense des droits et libertés fondamentales de l'homme.
Ceci étant, bien que les prévisions de l'art. 297 alinéa 1 du Code de procédure civile aient actuellement (à la date de solution de l'appel) un contenu différent de celui qui était le leur à la date du pourvoi en appel - dans le sens que l'évocation du fond devrait être le fait de la première instance, qui avait conclu l'affaire sans entrer dans l'analyse de ce fond - la Cour estime que, à la lumière des exigences de l'art. 6 alinéa 1 de la Convention susmentionnée, en rapport avec l'art. 20 alinéa 2 de la Constitution de la Roumanie, il est impératif de procéder à l'évocation du fond par l'instance d'appel, qui a jugé et approuvé l'administration du probatoire utile à un tel procès, compte tenu du cadre législatif en vigueur à la date où furent prises ces mesures procédurales.
La liquidation, en ce moment- ci, de la sentence attaquée, - liquidation qu'impose la décision de cassation, comme quoi la condition d'actualité du droit à l'action du requérant - avec renvoi de la cause à la première instance pour être rejugée - ne ferait que prolonger la durée du procès, par la reprise des procédures concernant le fond et par la prononciation d'une solution attaquable en appel et en recours, ce qui équivaudrait à ignorer pratiquement la décision de l'instance européenne, qui constatait dès le début de l'année 2006, le caractère excessif de la durée du procès en attente.
Vu les considérations exposées et les exigences de l'art. 315 alinéa 1 du Code de proc. civile, la cour a donné toute son efficacité à ce qui a été fixé par la décision de cassation et, en appliquant les prévisions de l'art. 297 alinéa 1 du Code de proc. civile, rapporté à l'art. 6 alinéa 1 de la Convention européenne de défense des droits et libertés fondamentales de l'homme, a admis l'appel, disposant l'annulation de la sentence et de la conclusion afférente. En évoquant le fond, elle a retenu ce qui suit :
Il est incontestable que le réclamant est l'auteur de l'invention « Procédé et installation pour séparer les particules en suspension dans les milieux fluides aux températures élevées et pour récupérer la chaleur physique de ces milieux », le brevet de l'invention étant néanmoins délivré à l'antécesseur de l'accusé I.M.N.R., conformément à la législation en vigueur à la date où l'invention a été enregistrée, respectivement, selon le Décret no 884/1967.
En vertu de l'art. 20 alinéa 1 du Décret mentionné, le requérant avait - en sa qualité d'inventeur - le droit à des récompenses patrimoniales, ce même droit étant aussi réglementé en faveur de l'inventeur, par l'art. 37 alinéa 1 de la Loi no62/1974, cet acte normatif abrogeant le Décret no 884/1967.
L'art. 66 alinéa 2 de la Loi no 64/1991 - devenu art. 71 alinéa 3, suite aux modifications successives et à la republication de l'acte normatif - établit le droit des inventeurs à réclamer et recevoir les droits en espèces correspondant à cette qualité qui n'a pas été intégralement récompensée par la législation antérieure, c'est-à-dire par la Loi no 62/1974 et par le Décret no 884/1967.
Cette même disposition légale, en vigueur à la date où fut lancée la procédure en attente, établit sans équivoque que l'obligation concernant le droit de l'inventeur, à savoir de payer les droits pécuniaires qui correspondent à l'invention enregistrée selon la législation antérieure, cette obligation donc incombe à la société qui applique l'invention.
En vertu de l'art. 58 alinéa 1 de la Constitution de la Roumanie « Le Parlement est l'organe représentatif suprême du peuple roumain et l'unique autorité législative du pays et conformément à l'art. 107 alinéas 1 et 2 de la même loi fondamentale « Le Gouvernement adopte des décisions et ordonnances. Les décisions sont émises pour organiser l'application des lois ».
La règle 53 de l'Arrêté du Gouvernement no 152/1992, éditée pour l'application de l'art. 66 alinéa 2 de la Loi no 64/1991, n'a pas la force juridique nécessaire pour modifier ou compléter la loi, selon les compétences institutionnelles établies par les réglementations énoncées, mais, en plus, elle ne contient même pas de prévisions en ce sens.
Le 1er alinéa, - soulignant le caractère de reliquat des obligations de versement de récompenses aux inventeurs pour leurs inventions, réalisées et enregistrées au nom d'unités (entreprises, sociétés) qui les employaient, - précise que « ces obligations sont des restes de paiement, dus au fait que l'Etat, représenté par les sociétés titulaires de brevet et par d'autres sociétés ayant appliqué les inventions, n'avait pas rempli ses obligations. » La référence à ces entreprises est faite de façon évidente à propos de leur qualité de représentantes de l'Etat, qui avait l'obligation de faire ces paiements et non pas à une obligation actuelle à la charge de l'unité titulaire de brevet de remplir des obligations restantes dans le contexte de la loi en vigueur.
Conformément à l'art. 71 alinéa 3 de la Loi no 64/1991 republiée, « les droits en espèces dus aux inventeurs pour les inventions brevetées, partiellement appliquées, récompensées ou non récompensées jusqu'à la date de l'entrée en vigueur de cette loi, seront négociés par l'inventeur et l'unité qui a appliqué l'invention ».
Ceci étant, dans le contexte législatif actuel, la défenderesse I.M.N.R. n'a aucune obligation de payer les droits matériels réclamés par le requérant dans la cause en attente, une telle obligation n'étant fixée par le législateur à la charge exclusive de l'unité qui a appliqué l'invention.
Les prévisions de l'art. 46 de l'Arrêté du Conseil des Ministres no 2250/1967 pour l'application du Décret no884/1967, invoquées par le requérant dans l'argumentaire de sa prétention, selon laquelle l'unité titulaire du brevet aurait aussi l'obligation de payer à l'inventeur des droits, ne sont pas applicables au cas présent, la réglementation respective n'étant plus en vigueur, puisqu'elle a été abrogée en 1974, en même temps que le Décret mentionné.
Le probatoire administré dans cette cause atteste que l'ancienne Usine chimique de Târnaveni - antécesseur de l'accusée S.C. B. S.A. - est l'entreprise qui a appliqué, entre 1980-1990 l'invention dont le requérant est l'auteur, le fait étant d'ailleurs confirmé par les défenses des accusés.
L'invention réalisée par le requérant a été enregistrée le 12 juillet 1969 - date de remise du brevet d'invention et du certificat d'inventeur no 52193 - sous l'empire du Décret no 884/1967, - le dépôt réglementaire à cet effet étant constitué le 9 octobre 1968.
L'art. 66 alinéa 1 de la Loi no 64/1991, telle qu'elle a été rédigée lors de son entrée en vigueur, fixe expressément que « les brevets d'invention accordés antérieurement à l'entrée en vigueur de la dite loi ont la durée de validité conférée par la loi qui était applicable lors de leur émission ».
Selon l'art. 17 alinéa 1 du Décret applicable à la date de l'enregistrement de l'invention, « la durée de protection d'une invention pour laquelle un brevet a été accordé est de 15 ans, à partir de la date de constitution du dépôt réglementaire de la demande ».
La même durée de protection de 15 ans a été accordée par la Loi ultérieure no 62/1974, art. 24.
Conformément au principe général de droit tempus regit actum et aux réglementations mentionnées, le brevet d'invention et le certificat d'inventeur no 51293, délivrés le 12.07. 1969, ont bénéficié de protection dans le laps de temps compris entre le 9 octobre 1968 et le 9 octobre 1983, la validité des actes juridiques en question cessant à cette date.
Les prétentions du requérant ne sont donc fondées que pour la période du 1er janvier 1980 au 9 octobre 1983, l'inventeur n'étant plus en droit de recevoir par la suite de récompense pour son invention.
Les modifications apportées à l'art. 66 alinéa 1 de la Loi no 64/1991 par la Loi no 203/2002, suite à la reconduction à 20 ans de la période de protection accordée aux brevets d'invention antérieurement enregistrés, ne changent rien aux droits du requérant, car la modification de la loi ne se rapporte nullement et sans équivoque aux « brevets d'invention accordés antérieurement à l'entrée en vigueur de la dite loi et valables sur le territoire de la Roumanie, mais pas à ceux dont la validité avait expiré au moment de l'entrée en vigueur de la Loi no 64/1991.
Pour ce qui est de la modalité de calcul - par expertise - des droits pécuniaires dus au requérant, la cour constate ce qui suit :
Il ressort du rapport d'expertise et des ajouts ultérieurs qui lui furent apportés par l'expert désigné par les instances, que les éléments pris en considération pour déterminer le montant des droits en espèces dus au requérant sont ceux qui, selon l'annexe 1 de l'Arrêté du Gouvernement no 152/1992, devaient être mis en valeur par les parties dans la procédure de négociation -dans la mesure où celle-ci aurait abouti à un accord.
Le fait que l'instance ait retenu la majoration de 50% de la récompense due à l'inventeur au moment de l'application de son invention, selon un calcul d'expert, est justifié par la circonstance que l' invention respective a été appliquée non seulement en Roumanie, mais aussi à l'étranger, ce qui prouve son importance technique, conformément à l'art. 36 de l'A.C.M. no 2250/1967 - norme applicable désormais selon les prévisions du point 5 de la « Note de calcul » de l'annexe 1 de l'Arrêté du Gouvernement no 152/1992, corroborées aux prévisions de l'alinéa 1 de la Règle 53 de la même H.G. - se rapportant aux droit matériels dus aux inventeurs conformément aux lois antérieures, comme partie composante des droits en espèces auxquels se rapporte l'art. 66 alinéa 2 de la Loi no 64/1991.
L'actualisation de la récompense pour la période comprise entre la date où elle devait être payée et celle du procès concernant ces droits de l'inventeur - actualisation critiquée par les intimés -défendeurs dans le cadre des objections contre l'expertise - se justifie parfaitement dans les conditions où, par le point 3 de la « Note de négociations » (2e partie de l'annexe 1 de l'Arrêté du Gouvernement no 152/1992), l'on fixait le droit de l'inventeur de prétendre un supplément représentant les intérêts des créances qu'il possède - par l'effet de l'art. 66 alinéa 2 de la Loi no 64/1991 - contre l'unité ayant appliqué l'invention.
Même si l'Arrêté du Gouvernement no 152/1992, approuvant le Règlement d'application de la Loi no 64/1991 , était abrogée à la date où la décision requise était rendue, la Cour a tenu compte du contenu de la Règle no 53 et de l'annexe 1 de celle-ci, car les exigences du requérant reposaient sur ces dispositions normatives - en vigueur à la date du pourvoi - et le règlement actuel d'application du même document normatif, approuvé par l'Arrêté du Gouvernement no 547/2008, ne contient pas de dispositions concernant la procédure de mise en valeur des droits en espèces, dus pour les inventions partiellement récompensées ou non récompensées avant l'entrée en vigueur de la Loi no 64/1991. Les dispositions mentionnées furent utilisées pour une estimation des prétentions du requérant, en tant que critères objectifs pour déterminer le montant des dédommagements dus à l'inventeur. Des prévisions de l'art. 71 alinéa 3 de la Loi no 64/1991 republiée, il résulte que les droits reconnus aux inventeurs par cette loi ont la nature juridique de dédommagements, vu qu'il s'agit de récompenses, qui auraient dû être payées il y a longtemps et que les entreprises d'Etat devant les verser étaient demeurées passives de façon injustifiée.
Vu que la présente décision fixe - conformément aux prévisions de l'art.71 alinéa 3, corroboré à l'art. 63 de la Loi no 64/1991 - le montant des droits en espèces dus à l'inventeur N.M. pour l'application de l'invention « Procédé et installation pour séparer les particules en suspension dans les milieux fluides aux températures élevées et pour récupérer la chaleur physique de ces milieux » et ceci pour la période de janvier 1980 - octobre 1983, l'inventeur étant ainsi dédommagé pour l'application de l'invention mentionnée par la S.C.B.S.A. de Târnaveni, il n'y a plus aucune raison d' obliger cette dernière entreprise à conclure une note de négociation concernant les mêmes droits.
Par voie de conséquences, le deuxième chef d'accusation est estimé infondé.
Contre cette décision se sont pourvus en recours aussi bien les requérants N.O., N.M. et N.D., en leur qualité d'héritiers du requérant décédé N.M., que la défenderesse S.C.B.S.A de Târnaveni.
1. Les requérants réclamants ont fondé leur demande sur les dispositions de l'art. 304 point 9 du Code de procédure civile.
Dans le développement des motifs de leur pourvoi, les requérants indiquent que :
Par l'action introduite en 1995, l'auteur entendait poursuivre en justice solidairement, aussi bien l'unité qui a effectivement appliqué le brevet, que l'unité titulaire du brevet, conformément à la législation en vigueur à la date d'émission de celui-ci.
La base légale d'une telle action en justice solidaire est la règle 53 de l'Arrêté du Gouvernement no 152/1992 concernant le règlement d'application de la Loi no 64/1991, qui prévoit que :
« Dans le sens de l'art. 66 alinéa 2 de la loi, sont compris dans les droits en espèces dus à l'inventeur, pour ses inventions non récompensées ou partiellement récompensées jusqu'à la date d'entrée en vigueur de la loi, tous les droits matériels prévus par les lois antérieures, y compris l'équivalent en espèces des autres droits légaux résultat de sa qualité d'auteur de l'invention appliquée dans l'économie nationale.
Ces obligations pécuniaires sont restantes du fait que l'Etat, représenté par les entreprises titulaires de brevet d'invention et par d'autres entreprises ayant appliqué les inventions, n'a pas rempli ses obligations légales et contractuelles résultant de l'acte de cession qu'implique le droit de délivrer les brevets ».
Malgré ceci, la cour d'appel n'a reconnu à cet acte normatif qu'une valeur déclarative, estimant que nulle obligation de paiement ne découlait pour les entreprises titulaires du brevet, celles-ci n'étant que des représentantes de l'Etat et ce dernier n'étant pas obligé à payer des dédommagements.
Il a aussi été invoqué que les arrêtés gouvernementaux étaient émises pour faire appliquer la loi, une loi ne pouvant être complétée ni modifiée par cette voie.
On ne saurait mettre en relation la Règle 53 avec les prévisions de l'art.66 alinéa 2 de la loi, autrement que par une interprétation théologique des textes, pour deviner la volonté du législateur au moment de leur adoption.
Il est incontestable que le législateur a souhaité instituer une série de mesures à caractère réparateur pour les inventeurs n'ayant pas été récompensés des brevets appliqués dans l'économie nationale, qui ont produit des bénéfices et avantages.
Le système imaginé par le législateur reposait sur l'exécution des obligations restantes par l'Etat, mais l'art. 66 alinéa 2 de la loi ne prévoyait qu'une partie de ce système, respectivement la solution à l'amiable, par négociation, des prétentions de l'auteur d'un brevet, négociation qui pouvait concerner l'entreprise qui a appliqué l'invention et qui a bénéficié des avantages découlant de son application.
Pour le cas où le stade de négociation n'est plus abordable, comme dans la présente affaire, il existe une voie, prévue par l'art. 61 de la loi, version initiale, prévoyant la compétence de l'instance juridique pour la solution des litiges découlant de l'application des brevets.
L'obligation de compenser revient à l'Etat, représenté à cet effet par les unités titulaires de brevet et par celles qui ont appliqué le brevet.
C'est là une obligation solidaire légale dans le sens de l'art. 1041 du Code civil. Les requérants demandent que soit admis le recours, que soit partiellement modifiée la décision attaquée, dans le sens que le défendeur I.M.N.R. soit aussi obligé au paiement solidaire de la somme de 1.484.680 lei, au titre de dédommagements.
2. La requérante défenderesse fonde son pourvoi sur les dispositions de l'art. 304 pt.3 du Code de procédure civile, invoquant ce qui suit :
Par sa conclusion no478 du 13 février 2009, le Tribunal Commercial de Mures a disposé au sujet de la requérante d'ouvrir la procédure d'insolvabilité par faillite.
Conformément à cette décision, le liquidateur judiciaire a notifié aux créditeurs de la société en faillite, qu'ils devaient enregistrer, avant le 13 mars 2009 leurs demandes d'admission des créances sur la fortune de la débitrice.
Les requérants de cette affaire-ci, qui figuraient dans les évidences comptables de la société, ont reçu une notification et ont déposé dans les délais au dossier de l'affaire leur déclaration de créance, formulant en même temps une contestation contre le tableau préliminaire de créance.
Cette situation permet d'appliquer les prévisions de l'art.36 de la Loi no 85/2006, prévoyant que :
A partir de la date d'ouverture de la procédure sont suspendues de droit toutes les actions juridiques ou extra-juridiques visant la réalisation de créances contre le débiteur ou contre ses biens.
Cette disposition légale est une norme impérative, d'ordre public, ayant pour but de concentrer tous les litiges portant sur la fortune du débiteur sous la compétence exclusive du syndic de faillite désigné pour la procédure d'insolvabilité, conformément à l'art. 6 de la Loi no 85/2006. Le principe de célérité de la procédure d'insolvabilité, énoncé à l'art. 5 alinéa 2, offre une dispense d'adaptation de la conduite usuelle, qui consiste à attendre la décision finale rendue par l'instance investie et devenue incompétente.
En vertu de l'art.304 pt. 3 du Code de procédure civile, la requérante demande l'admission du recours et la cassation de la décision civile no 73 du 26 mars 2009.
La requérante a annexé au dossier une série de documents attestant la situation juridique invoquée dans la motivation de son pourvoi.
Les intimés requérants ont déposé au dossier un mémoire, demandant le rejet du recours de la défenderesse, avec la motivation qu'elle aurait fait preuve de mauvaise foi tout au long du procès, puisqu'elle n'avait informé aucune instance de l'ouverture de la procédure d'insolvabilité pendant une période dépassant les 2 années, ce qui permet de déduire qu'elle avait renoncé au bénéfice accordé par les prévisions de l'art. 6 de la loi sur l'insolvabilité.
La requérante défenderesse invoque ainsi sa propre turpitude. D'autre part, comme elle n'est pas la seule défenderesse de cette cause, la suspension du procès n'est pas justifiée.
Par sa demande de suspension du procès, la défenderesse ne saurait « saboter le cadre processuel » d'autant plus que la poursuite du procès et la solution de la cause, en contradictoire avec toutes les parties, n'aurait aucune répercussion négative sur la fortune de la débitrice, car toute tentative d'exécution forcée serait paralysée par l'invocation de la loi des faillites.
Les deux recours sont infondés et seront rejetés pour les considérations suivantes :
1. La critique d'illégalité formée par les requérants - réclamants demandeurs en vertu de l'art. 304 pt.9 du Code de proc. civile est infondée.
Conformément à l'art. 66 alinéa 2 de la Loi no 64/1991 - actuellement art. 71 alinéa 3 de la loi modifiée et republiée - « les droits en espèces dus à l'inventeur pour ses inventions brevetées, appliquées, non récompensées ou partiellement récompensées avant l'entrée en vigueur de la présente loi, seront négociés entre l'inventeur et l'entreprise qui a appliqué l'invention »
La règle 53 de l'Arrêté du Gouvernement no 152/1992 prévoyait que :
« Dans le sens de l'art.66 alinéa 2 de la loi, sont compris dans les droits en espèces dus à l'inventeur pour ses inventions récompensées ou partiellement récompensées avant l'entrée en vigueur de la loi, tous les droits matériels prévus par les lois antérieures, y compris l'équivalent en espèces des autres droits légaux découlant de la qualité d'auteur de l'invention, appliquée dans l'économie nationale.
Ces obligations de paiement sont restantes du fait que l'Etat, -représenté par les entreprises titulaires du brevet d'invention et par les autres entreprises ayant appliqué les inventions, - n'a pas rempli les obligations légales et contractuelles qui résultent de l'acte de cession conclu concernant le droit de délivrer un brevet ».
Le texte précédemment reproduit ne saurait être interprété, comme le soutiennent les requérants, dans le sens d'une obligation solidaire de paiement des dédommagements, obligation instituée entre l'entreprise titulaire du brevet d'invention et celles qui l'ont appliquée.
Cette règle, qui ne fait qu'expliquer le texte de loi, indique la raison pour laquelle, la nouvelle loi des brevets d'invention a prévu comme mesure réparatrice, la possibilité d'accorder des droits en espèces aux inventeurs ayant cédé leur droit de délivrer un brevet et dont les inventions ont été appliquées dans l'économie roumaine sous le régime d'actes normatifs antérieurement abrogés.
La raison en est que l'Etat - représenté à l'époque communiste par les unités économiques d'Etat - bénéficiait de l'application des inventions et en obtenait des avantages économiques, sans pour autant récompenser comme il se doit les inventeurs, sans l'activité inventive desquels, ces avantages n'auraient pas existé.
L'article 66 alinéa 2 de la Loi no 64/1991, dans la rédaction contemporaine de l'Arrêté du Gouvernement no 152/1992, prévoyait clairement et sans équivoque que les droits en espèces des inventeurs seront négociés entre l'inventeur et l'entreprise qui applique leur invention.
L'entreprise qui applique l'invention pouvait être la titulaire de brevet même, une autre entreprise ayant appliqué l'invention avec l'accord de la titulaire ou les deux.
C'est la raison pour laquelle la règle 53 de l'Arrêté du Gouvernement no 152/1992 faisait référence aux « unités titulaires de brevet » et à « d'autres unités ayant appliqué l'invention », la prémisse de l'application de l'invention par celui qui accorde des dédommagements étant sous-entendue.
Dans la situation où l'unité titulaire de brevet n'aurait pas appliqué l'invention, nulle base légale ne l'obligeait à payer aux inventeurs les droits pécuniaires dont l'art.66 alinéa 2 prévoit expressément qu'ils soient négociés entre l'inventeur et l'unité qui applique l'invention.
Puisque l'on retient dans cette affaire que le défendeur I.M.N.R., titulaire de brevet, n'a pas appliqué l'invention, il n'a pas été légalement tenu au paiement de dédommagements, ceux-ci étant exclusivement fixés à la charge de la défenderesse S.C.B.S.A., concernant laquelle il a été retenu, en vertu des preuves administrées, qu'elle avait appliqué l'invention.
2. La critique d'illégalité formée par la défenderesse S.C.B.S.A., en vertu de l'art. 304 pt.3 du Code de proc. civile, ne saurait être acceptée non plus.
Même si l'on invoque les dispositions de l'art. 304 pt.3 du Code de proc. civile, la compétence de la Cour d'appel de Bucarest - IXe section civile et pour des causes concernant la propriété intellectuelle de juger cet appel n'est pas contestée et l'on ne soutient pas que le syndic des faillites puisse juger de cette voie d'attaque dans le présent litige de propriété intellectuelle.
Ce qui est en fait critiqué, c'est l'erreur de continuer le procès au lieu de le suspendre, ce qui permet de situer la critique dans les dispositions de l'art. 304 pt.5 C.pr.civ.
En vérité, même si la procédure d'insolvabilité avait été lancée contre la défenderesse, la suspension du jugement en appel, conformément à l'art. 36 de la Loi no 85/2006, ne s'imposait pas.
La requérante soutient qu'ayant déclenché la procédure d'insolvabilité le 12 octobre 2007, les appelants avaient pour seule possibilité légale de demander l'enregistrement de la créance sur sa fortune.
Cette affirmation n'est pas recevable car, antérieurement à la solution de l'appel, les appelants ne pouvaient pas prétendre avoir une créance certaine, liquide et exigible, qu'ils pouvaient espérer réaliser sur la fortune de la débitrice.
Ce n'est qu'après la solution définitive du présent litige que l'on pouvait établir si la défenderesse S.C.B.S.A. avait la qualité d'entreprise ayant appliqué l'invention, si elle possédait cette qualité seule ou aux côtés du défendeur I.M.N.R. et donc, si elle pouvait être obligée à des dédommagements et de quel montant.
Le fait qu'entre temps les appelants aient inscrit leur créance, constatée par décision de la Cour d'appel, dans la masse des créanciers est une affaire d'exécution et ne saurait être une raison de cassation ou modification de la décision.
La Cour d'appel a donc correctement poursuivi son procès, indépendamment du fait que la défenderesse requérante aie eu intérêt à communiquer à l'instance la circonstance du déclenchement de la procédure d'insolvabilité ; or, elle ne l'a pas fait, soutenant, sans nulle raison, que cette tâche revenait aux appelants.
Vu ces considérations, constatant que ne sont incidents dans cette affaire ni les dispositions de l'art. 304 pt.9, ni les dispositions de l'art. 304 pt.5 du Code de procédure civile, en vertu de l'art. 312 du Code de procédure civile, la Haute Cour maintient la décision et rejette les deux pourvois comme non fondés.
POUR CES RAISONS
AU NOM DE LA LOI
DECIDE

Rejette comme non fondés les pourvois formés par les demandeurs N.O., N.M. et N.D. et par la défenderesse S.C. B. S.A. de Târnaveni contre la décision no 73 A du 26 mars 2009 de la Cour d'appel de Bucarest - IXe section civile et pour des causes concernant la propriété intellectuelle.
Irrévocable.
Rendue en audience publique, aujourd'hui, le 26 mars 2010.


Synthèse
Formation : Chambre civile et de propriété intellectuelle
Numéro d'arrêt : 2154/CCPI/2010
Date de la décision : 26/03/2010
Sens de l'arrêt : Rejet

Analyses

Invention. Droits dus à l'inventeur

L'article 66 alinéa (2) de la Loi no 64/1991, dans la rédaction contemporaine de l'Arrêté gouvernementale no 152/1992, prévoit clairement et sans équivoque que les droits en espèces dus aux inventeurs seront négociés entre les inventeurs et l'entreprise qui applique l'invention. L'entreprise ayant appliqué l'invention pouvait être le titulaire du brevet même, une autre entreprise ayant appliqué l'invention avec l'accord de la titulaire ou les deux. C'est la raison pour laquelle, dans la règle 53 de la A.G.no152/1992 il est fait référence aux « Unités titulaires de brevet » et à « d'autres unités ayant appliqué l'invention », la prémisse de l'application de l'invention par celui qui accorde des dédommagements étant sous-entendue. Si l'unité (entreprise, société) titulaire de brevet n'a pas appliqué l'invention, nulle base légale ne l'oblige à payer les droits en espèce dus aux inventeurs, droits dont l'art. 66 alinéa (2) prévoit expressément qu'ils sont négociés entre l'inventeur et l'unité qui a appliqué l'invention.


Parties
Demandeurs : N.O., N.M. et N.D
Défendeurs : S.C. B. S.A. de Târnaveni

Références :

Décision attaquée : Cour d'Appel de Bucarest, 26/03/2009


Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ro;haute.cour.cassation.justice;arret;2010-03-26;2154.ccpi.2010 ?
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