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17/03/2010 | ROUMANIE | N°1540/CCAF/2010

Roumanie | Roumanie, Haute cour de cassation et de justice, Chambre de contentieux administratif et fiscal, 17 mars 2010, 1540/CCAF/2010


Le 12.03.2010, on examine le pourvoi déclaré par la S.C. « O.I. » SRL de Salaj contre la sentence n° 352 du 2.07.2009 de la Cour d'Appel de Cluj - Section commerciale, de contentieux administratif et fiscal.
Les débats furent notés dans la minute de l'audience de cette date, mais la prononciation de la décision a été remise à ce jour du 17.03.2010.

LA COUR,

Vu le présent pourvoi;
Après l'examen des travaux du dossier, constate ce qui suit:

1. Saisie de l'instance de fond

Par sa requête adressée à la Cour d'Appel de Cluj-Napoca, la réclama

nte S.C. ,,O. I." SRL a assigné en justice les accusés Ministère des finances publiques, Agenc...

Le 12.03.2010, on examine le pourvoi déclaré par la S.C. « O.I. » SRL de Salaj contre la sentence n° 352 du 2.07.2009 de la Cour d'Appel de Cluj - Section commerciale, de contentieux administratif et fiscal.
Les débats furent notés dans la minute de l'audience de cette date, mais la prononciation de la décision a été remise à ce jour du 17.03.2010.

LA COUR,

Vu le présent pourvoi;
Après l'examen des travaux du dossier, constate ce qui suit:

1. Saisie de l'instance de fond

Par sa requête adressée à la Cour d'Appel de Cluj-Napoca, la réclamante S.C. ,,O. I." SRL a assigné en justice les accusés Ministère des finances publiques, Agence nationale d'administration fiscale et Direction générale des finances publiques de Salaj, demandant de disposer, après l'administration des preuves et la solution du fond: d'annuler la Décision n° 74 du 10 mars 2009, émise par le M.F.P.,l' A.N.A.F. et la Direction générale de solution des contestations, décision rejetant sa propre contestation contre la Décision d'imposition n° 1552 du 7 avril 2005, comme illégale et infondée, avec pour conséquence d'annuler les impôts retenus au titre de créance susmentionné, représentant TVA et accessoires, respectivement l'impôt sur le profit et accessoires, d'un montant total de 810.361 lei; avec dépens de justice, conformément à l'art. 274 et aux suivants du Code de procédure civile, formés de la taxe de timbre, du timbre judiciaire, de l'honoraire d'avocat etc.
Dans la motivation de son action, la réclamante indiquait que la TVA et l'impôt sur le profit, fixés par les organes fiscaux suite au contrôle effectué et soldé par la décision d'impôt n°1552/2005, n'étaient pas dus, car la détermination de ces sommes était erronée, donnant aux textes de loi une interprétation restrictive et extrapolant sur des actes normatifs ultérieurs, n'ayant pas d'incidence en l'espèce.
Elle indiquait que l'organe de contrôle avait saisi en même temps les organes d'enquête pénale, ceux-ci ayant conclu au non lieu pour l'administrateur de la société.

La réclamante soutenait que la société avait procédé légalement en déduisant les frais en matériaux de construction, utilisés pour les travaux réellement effectués, les dépenses respectives étant liées à la réalisation des revenus.

De plus, la comptabilité de la société avait retenu tous les documents opératifs justificatifs, ainsi que les documents financiers et comptables, conformément à la Loi n° 82/1990.

L'on mettait aussi en évidence que les factures contenaient les éléments essentiels, respectivement les coordonnées des fournisseurs, le nom des matériaux, la quantité, le prix, le cachet. Cet aspect n'avait pas été contesté par l'organe fiscal, sauf le fait que, parfois, faisaient défaut les coordonnées du délégué et les données concernant les moyens de transport, la signature du bénéficiaire à la réception. Le fait d'invoquer le manque de qualité du document justificatif des factures émises par les fournisseurs, sans prendre en compte le sens de l'art. 4 alinéas (1) et (6) lettre m) de l'O.U.G. (Ordonnance d'Urgence du Gouvernement) n°217/1999 pour modifier et compléter l'O.G. n° 70/1994 concernant l'impôt sur le profit, était une faute grave et une interprétation partisane de cet acte normatif.

De l'avis de la réclamante, les manquements constatés sont des déficiences à encadrer dans le texte permissif du pt. 119 du Règlement d'application de la comptabilité.

Quant au fait de ne pas avoir accordé la non déductibilité de TVA, comprise dans les factures de ravitaillement émises dans l'année 2000, la réclamante soutient que les organes fiscaux n'avaient pas tenu compte là du cadre légal concernant la définition du ,,document justificatif" et du fait que la société, en sa qualité de bénéficiaire, n'avait ni la possibilité, ni l'habilitation légale pour vérifier le fournisseur, en sa qualité de personne payant une TVA.

2. Solution de l'instance de fond

Par sa sentence n° 352 du 2. 07. 2009 de la Cour d'Appel de Cluj a été rejetée l'action formée par la réclamante S.C. « O. I. » SRL contre le Ministère des finances publiques, l'Agence nationale d'administration fiscale et la Direction générale des finances publiques de Salaj.
Afin de rendre cette décision, l'instance de fond a retenu que, par son action introductive, la réclamante contestait la décision d'impôt n°1552 du 7 avril 2005, émise par l'Activité d'inspection fiscale au sein de la D.G.F.P. de Salaj.
L'instance a retenu que les organes fiscaux avaient fait certaines constatations concernant des opérations commerciales de ravitaillement en matériaux de construction réalisées par la société et pour lesquels les fournisseurs des marchandises avaient émis des factures, jugées ultérieurement comme fictives.
La contestation de la réclamante a été rejetée par la décision n° 74 du 10 mars 2009, émise par le Ministère des finances publiques, l'Agence nationale d'administration fiscale, la Direction générale de solution des contestations.
L'instance a retenu que, dans l'espèce de l'impôt sur le profit, la facture, en tant que document comptable justificatif, devait comprendre tous les éléments prévus au point 119 du Règlement comptable, y compris les données d'identification du délégué, des données concernant les moyens de transport, la date et l'heure de l'expédition, ainsi que la signature à la réception de la marchandise.
L'instance a constaté de l'analyse du probatoire, que les factures fiscales en cause n'avaient pas été complétées de toutes les données et de tous les éléments prévus au formulaire à régime spécial d'inscription et numérotage, retenant aussi que, par leur Décision n° V du 15 janvier 2007, les Chambre Réunies de la Haute Cour de Cassation et de Justice, avaient statué que la TVA ne pouvait être déduite et que l'on ne pouvait diminuer la base imposable pour fixer l'impôt sur le profit, dans la situation où les documents justificatifs présentés ne contenaient ou ne fournissaient pas toutes les informations prévues par les dispositions légales en vigueur au moment où était effectuée l'opération pour laquelle on sollicitait une déduction de TVA.

3. La voie d'attaque exercée

C'est contre cette décision que s'est pourvue la réclamante S.C. « O. I. » SRL , en demandant l'admission du pourvoi, la cassation de la sentence attaquée, un nouveau jugement de la cause et l'admission de la demande, ainsi que l'annulation de la Décision n° 74 du 10.03. 2009, émise par l'A.N.A.F. et, en subsidiaire, la cassation de la sentence et le renvoi de la cause pour un nouveau procès.
Dans l'exposé des motifs de recours, la solution de l'instance de fond est critiquée parce que:
- l'état des faits n'a pas été objectivement retenu. L'instance de fond a retenu l'inexistence des Notes de réception pour les factures de l'Annexe 1, du rapport d'inspection, mais sa conclusion est erronée, car ces notes de réception existaient dans la comptabilité de la S.C. ,,O. I." SRL, mais n'avaient pas été prises en considération par les organes fiscaux, étant tenues pour ,,afférentes à des factures jugées comme fausses". On invoque aussi que les travaux de construction existaient matériellement, puisque des réceptions finales par le bénéficiaire avaient été dressées, comme il résulte du Rapport d'expertise technique afférent au dossier pénal.
- l'interprétation de la norme de droit a été restrictive, bien que le texte incident ne retienne pas de formule impérative. Vu que le pt. 119 du Règlement d'application de la Loi de la comptabilité n° 82/1991 prévoit à l'alinéa 2, que « les documents justificatifs comprennent généralement, les principaux éléments suivants... », la requérante estime que ce syntagme ne signifie pas que l'on puisse écarter les factures ne contenant pas toutes les données contenues dans le document et que le législateur dût prévoir aussi une sanction pour le non respect de la forme;
- est devenue incidente une nouvelle forme de droit ultérieure à un état antérieur des faits.
L'instance de fond a aussi invoqué la Décision n° V du 15.01.2007 des Chambres Réunies de la Haute Cour de Cassation et de Justice, même si elle n'est plus incidente à une période ultérieure au contrôle.

4. La solution de l'instance de recours

Après examen des motifs du pourvoi et des dispositions légales incidentes dans l'affaire, la Haute Cour admettra le pourvoi déclaré, mais pour les considérations suivantes:

Le litige concerné par la solution de l'instance de fond visait à établir à la charge de la réclamante des obligations de paiement représentant la TVA, l'impôt sur le profit, des majorations de retard et pénalités afférentes, partant du fait que les organes du fisc avaient jugé certaines factures, mises en évidence dans l'Annexe n°1 du Rapport d'inspection fiscale, comme ne remplissant pas les qualités du document justificatif, parce que les opérations économiques et financières avec ces sociétés commerciales là n'avaient pas été effectuées.

Les affirmations des parties sur ce sujet furent diamétralement opposées et l'instance de fond s'est limitée à une invocation des dispositions de l'art. 21 alinéa (4) lettre f), art. 145 alinéa 8 lettres a) et b) du Code fiscal, des dispositions de l'art. 6 alinéa (2) de la Loi n° 92/1991 et de la Décision n° V du 15.01.2007 de la Haute Cour de Cassation et de Justice, mais sans analyser concrètement dans quelle mesure les factures fiscales dressées dans l'année 2000 étaient ou non des documents justificatifs, au sens de la loi.

Conformément à l'art. 261 alinéa (1) du Code de procédure civile, la sentence de l'instance de fond doit comprendre, entre autres, les raisons de fait et de droit qui ont constitué la conviction de l'instance et celles pour lesquelles furent écartées les affirmations des parties.

Ce texte a consacré le principe selon lequel les décisions doivent être motivées et le non respect de ce principe est un motif de cassation, conformément à l'art. 304 pt. 7 du Code de procédure civile, le rôle du texte étant d'assurer une bonne administration de la justice, y compris pour que les instances supérieures puissent exercer le contrôle judiciaire.

D'ailleurs, même la Cour Européenne des Droits de l'Homme (voir la cause Achina contre la Roumanie, la cause Gheorghe contre la Roumanie) souligne le rôle de la motivation d'une décision dans le respect de l'art. 6 paragraphe (1) de la Convention européenne des droits de l'homme et elle indique que le droit à un procès équitable ne saurait être tenu pour effectif, si les affirmations des parties n'étaient pas examinées par l'instance, celle-ci ayant l'obligation de procéder à un examen effectif des moyens, arguments et éléments de preuve ou du moins de les juger...

Ne pas motiver une décision et ne pas présenter les arguments ayant écarté les affirmations des parties, équivaut à ne pas étudier le fond de l'affaire.

Le fait que les Chambres Réunies de la Haute Cour de Cassation et de Justice aient présenté en l'espèce une décision dans l'intérêt de la loi n'exempte pas le juge d'une cause de motiver sa décision et d'analyser les affirmations des parties, en se rapportant directement à la situation des faits et à celle de droit.

C'est pourquoi, en vertu de l'art. 312 alinéas (3) et (5) du Code de procédure civile, rapporté à l'art. 20 de la Loi n° 554/2004, le pourvoi déclaré sera admis, la sentence attaquée sera cassée et la cause renvoyée à la même instance pour être rejugée.

POUR CES MOTIFS
AU NOM DE LA LOI
LA COUR DIT:

Admet le pourvoi déclaré par la S.C. « O. I. » SRL de Salaj contre la sentence n° 352 du 2 juillet 2009 de la Cour d'Appel de Cluj - Section commerciale, de contentieux administratif et fiscal.
Casse la sentence attaquée et renvoie la cause à la même instance pour être rejugée.
Définitive.
Rendu en audience publique, aujourd'hui, le 17 mars 2010.


Synthèse
Formation : Chambre de contentieux administratif et fiscal
Numéro d'arrêt : 1540/CCAF/2010
Date de la décision : 17/03/2010

Analyses

Arrêt. Obligation de motiver. Garantie du droit à un procès équitable.

Les dispositions de l'art. 261 alinéa (1) du Code de procédure civile ont consacré le principe selon lequel les décisions doivent être motivées et le fait de ne pas respecter ce principe est un motif de cassation, selon l'art. 304 pt. 7 du Code de procédure civile, le rôle du texte étant d'assurer une bonne administration de la justice et la possibilité d'exercer le contrôle judiciaire. Le fait que dans l'espèce, les Chambres Réunies de la Haute Cour de Cassation et de Justice ont rendu une décision dans l'intérêt de la loi, n'exempte pas le juge d'une affaire de motiver son arrêt et d'analyser les affirmations des parties, en rapport direct avec la situation de fait et avec celle de droit.


Parties
Demandeurs : S.C. « O.I. » SRL
Défendeurs : Ministère des finances publiques, Agence nationale d'administration fiscale et Direction générale des finances publiques de Salaj

Références :

Texte attaqué : Cour d'Appel de Cluj (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 13/02/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ro;haute.cour.cassation.justice;arret;2010-03-17;1540.ccaf.2010 ?
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