Le Ministère Public - Parquet près la Haute Cour de Cassation et de Justice est représenté par le procureur - I.C.D.
L'on examine le pourvoi déclaré par le Parquet près la Cour d'appel de Bucarest contre la sentence pénale n°316 du 3 novembre 2009 de la Cour d'Appel de Bucarest - 1ère section pénale, concernant l'intimé contestataire N.G.
Est présent l'intimé contestataire, en état d'arrestation, assisté par l'avocat désigné d'office G.C.
Procédure de citation légalement remplie.
Ayant constaté qu'il n'existe pas d'autres questions préalables, en vertu de l'art. 38513 alinéa 1 du Code de procédure pénale, la Haute Cour accorde la parole aux débats.
Ayant la parole, le représentant du Ministère Public soutient le recours tel qu'il a été motivé par écrit, demandant son admission, la cassation de la sentence attaquée et le rejet de la contestation d'exécution formée par le contestataire N.G., indiquant que l'instance de fond avait disposé à tort de modifier l'amende pénale appliquée au contestataire par l'Etat le condamnant, puisque ne sont pas incidentes dans l'affaire les dispositions de l'art. 144 alinéa 1 lettre b de la Loi n° 302/2004, vu l'Accord passé entre la Roumanie et la République Italienne, sur le transfert des personnes condamnées, accord ratifié par la Loi n° 83/2006.
Le défenseur de l'intimé contestataire pose des conclusions de rejet du pourvoi comme infondé, soutenant que l'instance de fond avait correctement adopté l'amende pénale appliquée au contestataire.
L'intimé contestataire demande, ayant la parole, le rejet du pourvoi qui a été transféré sous condition de ne pas aggraver la peine.
LA COUR,
Vu le présent pourvoi ;
En vertu des travaux du dossier, constate ce qui suit :
Par la sentence pénale n° 314 du 3 janvier 2009, prononcée au dossier n° 8310/2/2009 (2082/2009), la Cour d'Appel de Bucarest, 1ère Section pénale a admis la contestation d'exécution formée par le condamné N.G. contre la sentence pénale n°146 du 19 mai 2009 de la Cour d'Appel de Bucarest - 1ère section pénale pour empêchement à l'exécution.
En vertu de l'art. 144 lettre b et de l'art. 146 alinéas 1 et 2 de la Loi n°302/204 a adapté l'amende de 460.575 euros, à la somme de 50.000 lei, qui est l'amende maximale prévue par la législation pénale roumaine.
Maintient les autres dispositions de la sentence contestée.
L'honoraire de 100 lei du défenseur d'office sera supporté par le Ministère de la Justice.
Le contestataire N.G. a demandé de réduire le montant de l'amende de 460.575 euros à 50.000 lei, le maximum d'amende pénale prévu par la législation roumaine et a affirmé qu'il n'avait pas eu le droit à un procès équitable dans l'Etat où il avait été condamné.
L'instance de fond a jugé la contestation fondée, estimant incident le cas prévu à l'art. 461 lettre c du Code de procédure pénale, à savoir qu'il existe un empêchement d'exécution. Elle a aussi jugé incidentes les dispositions de l'art. 144 lettre b et de l'art. 146 de la Loi n° 302/2004 sur la coopération judiciaire internationale en matière pénale, qui oblige les instances roumaines à adapter les peines incompatibles avec la législation roumaine. Or, dans la législation roumaine, la peine d'amende maximale est d'un montant de 50.000 lei (art.53 pt.1 lettre C du Code pénal), celle-ci correspondant à la gravité des actes pénaux commis par le condamné.
Pour ce qui est de la critique concernant la décision le condamnant, l'instance l'a jugée tardive et ne pouvant être posée que dans la procédure de transfert du condamné.
Contre cette sentence, s'est pourvu en cassation le Parquet près la Cour d'Appel de Bucarest, qui l'a critiquée pour illégalité. L'on soutient, essentiellement, que la base juridique de l'art. 144 alinéa 1 lettre b de la Loi n° 302/2004, en vertu de laquelle l'instance de fond avait modifié l'amende appliquée par l'Etat de la condamnation, n'était pas applicable dans l'affaire. Il est dit qu'entre la Roumanie et la République Italienne, un accord de transfert des personnes condamnées avait été conclu et ratifié par la Loi n° 83/2006, prévoyant que les deux parties appliquent pour la réalisation du transfert la procédure prévue à l'art. 9 paragraphe 1 lettre a de la Convention, ce qui exclut var voie de conséquences la possibilité de changer la condamnation de la personne transférée. La possibilité d'adoption de la peine n'est prévue que dans deux hypothèses : quand la nature ou la durée de la peine est incompatible avec la législation nationale, mais non pas quand le montant, dans le cas d'une peine pécuniaire, est incompatible.
Il est donc demandé d'admettre le recours, de casser la sentence et, pour le fond, de rejeter la contestation d'exécution comme infondée.
Examinant la sentence contestée par le prisme des critiques formulées par le Parquet et des dispositions légales en la matière, la Haute Cour constate que le recours est fondé pour les considérations suivantes :
Conformément à l'art. 144 alinéa 1 de la Loi n° 302/2004, les autorités de l'Etat roumain ont l'obligation :
a) Soit de continuer l'exécution de la condamnation immédiatement ou, en vertu d'une décision de justice, dans les conditions énoncées par l'art. 146.
b) Soit de changer la condamnation, par une décision de justice, en remplaçant ainsi la peine appliquée dans l'Etat de la condamnation par une peine prévue dans la législation roumaine pour la même infraction, aux conditions prévues à l'art. 146.
Ces dispositions légales sont identiques à celles prévues à l'art. 9 paragraphe 1 de la Convention Européenne concernant le transfert des personnes condamnées, ratifiée par la Loi n° 76/1996.
La Roumanie et la République Italienne ont conclu un accord sur le transfert des personnes condamnées, accord ratifié par la Loi n° 83/2006, qui prévoit expressément à l'art. 6 alinéa 1, que les deux parties appliquent pour réaliser ce transfert la procédure prévue à l'art. 9 paragraphe 1 lettre a de la Convention, excluant donc la possibilité de changer la condamnation de la personne transférée.
La base juridique de l'art. 144 alinéa 1 lettre b de la Loi n° 302/2004, en vertu duquel l'instance judiciaire a modifié l'amende pénale appliquée par l'Etat de la condamnation, n'est donc pas applicable dans l'affaire.
L'art. 10 alinéa 1 pt. 2 de la Convention Européenne sur le transfert des personnes condamnées, article auquel il est fait référence dans l'art 9. pt. 1 lettre a prévoit pourtant la possibilité d'adapter la peine dans l'hypothèse où la nature ou la durée de celle-ci serait incompatible avec la législation de l'Etat d'exécution.
Analysant le contenu de la norme juridique (reprise à l'art. 146 alinéa 1 de la Loi n° 302/2004), l'on constate en premier lieu, que ce n'est pas une obligation instituée à la charge de l'instance judiciaire, mais une vocation que l'on confère au condamné.
Il est vrai que l'art. 146 alinéa 3 de la Loi n°302/2004 prévoit la possibilité de changer la condamnation après le transfert de la personne condamnée, mais il convient de remarquer que le transfert est le résultat d'un accord entre deux Etats et que l'Etat de la condamnation y a donné son accord, en tenant compte y compris de la procédure choisie par l'Etat roumain par la sentence pénale n° 146/2008, respectivement de continuer l'exécution.
Deuxièmement, la possibilité d'adapter la peine est prévue dans deux hypothèses seulement : si la nature ou la durée de la peine est incompatible avec la législation nationale, mais non pas lorsque le montant, en cas de peine pécuniaire, serait incompatible.
Cette interprétation, à savoir que l'amende pénale ne saurait être adaptée à la législation nationale, est aussi confirmée par l'existence au sein de la Loi n° 302/2004 (Titre VII, Chapitre 2, 4e section) de dispositions spéciales sur la reconnaissance et l'exécution réciproque des sanctions pécuniaires.
Ainsi l'art. 1871 41 alinéa 1 prévoit-il que les autorités judiciaires roumaines d'exécution reconnaissent une décision de justice sans autres formalités et prennent sur le champs toutes les mesures nécessaires à son exécution, à l'exception du cas où l'on constate qu'il convient d'appliquer l'une des raisons de non reconnaissance ou non exécution.
La Loi n° 302/2004 prévoit une seule situation où l'instance judiciaire (autorité judiciaire d'exécution, conformément à l'art. 1871 35) peut modifier la sanction pécuniaire, respectivement l'hypothèse prévue à l'art.1871 43 alinéa 1, qu'il s'agisse de faits n'ayant pas été commis sur le territoire de l'Etat émettant la condamnation. Alors, seulement l'instance judiciaire peut décider de réduire le montant de la peine au montant maximal prévu pour des actes similaires par la loi roumaine, lorsque les faits sont de la compétence des instances roumaines.
Ces dispositions ont été appliquées suite à la Décision-cadre du Conseil 2005/214/JAI, du 24.02.2005 (art.8 alinéa 1) et la seule situation où une amende pénale puisse être modifiée n'est pas applicable dans l'affaire.
De ce fait, en vertu de l'art. 38515 pt. 2 lettre d du Code de procédure pénale, la Haute Cour admet le recours, casse la sentence et en rejugeant, rejette la contestation à l'exécution comme infondée.
En vertu de l'art. 192 alinéa 2 du Code de procédure pénale, le contestataire sera obligé au paiement des frais de justice avancés par l'Etat pour le fond. Au recours, les frais de justice demeurent à la charge de l'Etat.
POUR CES RAISONS
AU NOM DE LA LOI
DECIDE :
Admet le pourvoi déclaré par le Parquet près la Cour d'Appel de Bucarest contre la sentence pénale n°316 du 3 novembre 2009 de la Cour d'Appel de Bucarest - 1ère Section pénale, concernant l'intimé contestataire N.G.
Casse la sentence attaquée et suite à un nouveau jugement sur le fond :
Rejette comme infondée la contestation à l'exécution formée par le contestataire contre la sentence pénale n°146 du 19 mai 2009 de la Cour d'Appel de Bucarest - 1ère section pénale.
Oblige l'intimé contestataire au paiement de la somme de 400 lei de frais de justice à l'Etat, dont 200 lei représentent l'honoraire du défenseur désigné d'office. La somme sera avancée sur les fonds du Ministère de la Justice et des Libertés Civiques.
Définitive.
Rendue en audience publique, aujourd'hui, le 11 février 2010.