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30/06/2005 | ROUMANIE | N°5756/CCPI/2005

Roumanie | Roumanie, Haute cour de cassation et de justice, 30 juin 2005, 5756/CCPI/2005


On examine le recours formé par la défenderesse la société commerciale (S.C.) «A.» S.A. Craiova contre l'arrêt civil no. 2890 du 15.09.2004 de la Cour d'Appel de Craiova, la Chambre civile.
Les débats ont été enregistrés dans la minute du 16 juin 2005, qui est partie intégrante du présent arrêt, et la prononciation a été ajournée pour le 30 juin 2005.
LA COUR
Sur le recours présent;
Vu les documents du dossier, constate :
Par l'action introduite le 22.10.2002, au Tribunal de Dolj, les demandeurs R.A., M.A., R.V., D.A., M.M., M.I., P.P., B.M., L.P. ont formÃ

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On examine le recours formé par la défenderesse la société commerciale (S.C.) «A.» S.A. Craiova contre l'arrêt civil no. 2890 du 15.09.2004 de la Cour d'Appel de Craiova, la Chambre civile.
Les débats ont été enregistrés dans la minute du 16 juin 2005, qui est partie intégrante du présent arrêt, et la prononciation a été ajournée pour le 30 juin 2005.
LA COUR
Sur le recours présent;
Vu les documents du dossier, constate :
Par l'action introduite le 22.10.2002, au Tribunal de Dolj, les demandeurs R.A., M.A., R.V., D.A., M.M., M.I., P.P., B.M., L.P. ont formé action en justice la défenderesse S.C.«A.» S.A. Craiova pour l'annulation comme illégale de l'arrêt no. 1012 du 17.10.2002, rendu par la défenderesse.
Dans la motivation de l'action, les demandeurs ont montré que l'immeuble demandé à la défenderesse pour être restitué en nature, en conformité avec la procédure de la Loi no. 10/2001, immeuble qui est l'actuel siège de celle-ci, a appartenu jusqu'en 1959 à leur auteur R.G., dont il a été confisqué dans le même année, à la suite d'une condamnation, par la sentence pénale no. 632 du 15.10.1959 du Tribunal Militaire de Craiova.
Ultérieurement, par l'arrêt de la Cour Suprême de Justice no. 2466 du 29.11.1997, l'auteur des demandeurs a été réhabilité et la peine complémentaire de la confiscation de la fortune a été enlevée, en appréciant ainsi que l'immeuble situé à Craiova, a été confisqué sans juste titre.
Par l'arrêt civil no. 102 du 3 mars 2004 le Tribunal de Dolj a admis l'action introduite par les demandeurs, a annulé l'arrêt no. 1012 du 17.10.2002, rendu par la défenderesse S.C. «A.» S.A.Craiova et a décidé la restitution, en nature, aux demandeurs, de l'immeuble situé a Craiova, composé d'un terrain en surface de 241 m2 et de la construction située sur celui-ci, en surface de 167 m2, tels comme ils apparaissent identifiés et délimités dans le schéma annexée au rapport d'expertise, dressé par l'expert technique ing. D.V.
Pour décider ainsi, l'instance de fond a établi que les biens en discussion (terrain et construction) sont inclues dans la catégorie des biens pris sans juste titre par l'État, suite à la décision pénale no. 2466 du 27.10.1997 de la Cour Suprême de Justice, après l'admission du recours en annulation, formé contre la sentence pénale no. 632 du 16.10.1959 du Tribunal Militaire de Craiova.
Dans une telle situation, on n'applique pas les dispositions de l'art. 27 de la Loi no. 10/2001, comme la défenderesse a soutenu, mais la mesure de la restitution en nature, selon la règle instituée par les articles 7 et 9 de la Loi no. 10/2001 et l'art. 20 de la même loi, avec le respect de la procédure prévue par l'art. 24.
De plus, l'instance de fond a retenu que, la défenderesse ne peut pas invoquer la bonne foi en ce qui concerne l'obtention du bien, suite à sa privatisation, parce que dans le processus de privatisation, celle-ci est seulement l'acheteuse de quelques actions et non du bien dans son entier, de la part de l'État, par l'intermédiaire de l'ancien administrateur (F.P.S.- Fond de la Propriété d'État), bien transféré dans son patrimoine par l'État, de manière non valable.
Contre cet arrêt la défenderesse S.C.«A.» Craiova S.A. a formé appel, soutenant que l'arrêt est illégal et mal fondé pour les motifs suivants:
- de manière erronée, on a apprécié que la défenderesse ne peut pas opposer aux demandeurs un juste titre tant que dans son patrimoine, le bâtiment et le terrain sont relevés dans l'annexe au contrat de privatisation, ainsi que dans le certificat d'attestation du droit de propriété;
- la valeur des actions transmises reflète la valeur du patrimoine obtenu au cours du processus de privatisation;
- la défenderesse a manifesté la bonne foi. Par contre, les demandeurs n'ont formé aucune autre action antérieurement à 1994, quand le processus de privatisation a commencé; ils n'ont pas utilisé la voie de l'action en annulation, dans le délai réglementé par l'art. 46 alinéas 5 de la Loi no. 10/2001, leur droit étant prescrit. Ainsi, ceux-ci n'ont le droit qu'aux mesures reparatoires par équivalence, selon l'art. 27 de la Loi no. 10/2001.
La Cour d'Appel de Craiova - la Chambre civile - par l'arrêt no. 2890 du 15 septembre 2004, a rejeté comme mal fondé l'appel formé par la défenderesse S.C. «A.» Craiova S.A. contre l'arrêt civil no. 101 du 3 mars 2004 rendu par le Tribunal de Dolj.
Pour décider ainsi, la Cour a retenu, en essence, que l'immeuble sollicité pour être restitué aux demandeurs se trouve dans la catégorie des immeubles prévus par l'art. 2 alinéas 1 lettre b de la Loi no. 10/2001, respectivement immeubles pris par «la confiscation de la fortune suite aux arrêts de condamnation pour des infractions de nature politique, prévues par la législation pénale, commises comme manifestation vis-à-vis du système totalitaire communiste».
Or, par l'arrêt de condamnation, l'auteur R.G. a été arbitrairement privé de sa propriété et vis-à-vis du fait que par l'arrêt pénal no. 2466/1997 de la Cour Suprême de Justice, R.G. a été exonéré et la peine complémentaire de la confiscation de la fortune a été enlevée, la première instance a correctement apprécié que le droit de propriété de l'auteur a été de nouveau obtenu par les demandeurs.
L'instance a aussi rejeté comme mal fondé les critiques se référant à la bonne foi de la défenderesse, à la conclusion du contrat de privatisation, parce que le processus de privatisation de la défenderesse a débuté en 1994 et il s'est finalisé en 1998. De plus, la défenderesse a été de bonne foi à la conclusion du contrat de privatisation, mais par la prise des actions de la société, elle s'est assumée la responsabilité et le risque pour tout le patrimoine social.
Même si la défenderesse possède un certificat d'attestation des droits de propriété pour le terrain et la construction se trouve dans son patrimoine, par la comparaison des titres, on a retenu que le titre des demandeurs est mieux caractérisé, puisqu'il est antérieur et les dispositions de la Loi no. 10/2001 donnent priorité au principe de la restitution en nature.
Vis-à-vis du fait que les demandeurs détiennent un titre de propriété mieux caractérisé que celui de la défenderesse, qu'il y a la possibilité de dédommager celle-ci par le vendeur, respectivement A.V.A.S. (l'ancien F.P.S.), la Cour a apprécié qu'il ne s'impose plus l'analyse de l'exception de la prescription du droit a l'action des demandeurs, prévus par l'art. 46 alinéas 5 de la Loi no. 10/2001.
Contre cet arrêt, la défenderesse S.C. «A.» S.A. Craiova a formé recours, invoquant les motifs prévus par l'art. 304 les points 9 et 10 du Code de procédure civile, soutenant, en essence, que l'instance d'appel a analysé la demande comme une action en revendication de droit commun et non pas comme une action qui dérive de la Loi no. 10/2001. Elle ne s'est pas prononcée sur la défense invoquée. Ainsi, étant donné qu'il s'agit d'une société privatisée dans son intégralité, la société ne fait plus partie de la catégorie des institutions détentrices prévues par l'art. 20 de la Loi no. 10/2001, obligées à la restitution en nature ou aux dédommagements par équivalence. De plus, l'instance ne s'est pas prononcé sur la bonne foi et elle n'a pas analysé la défense formulée selon l'art. 46 alinéas 5 de la Loi no. 10/2001, dans le sens que les demandeurs n'ont pas usé de l'action en annulation des actes de privatisation, leur droit étant prescrit.
Le recours n'est pas fondé.
Dans l'espèce, il a resulté du probatoire administré, que le passage de l'immeuble en discussion dans la propriété de l'État a été fait suite à la sentence pénale no. 632 du 16.10.1959 du Tribunal Militaire de Craiova, par laquelle l'auteur des demandeurs R.D.G. a été condamné pour l'infraction de manigance contre l'ordre sociale, prévue par l'art. 209 point 1 du Code pénale et à la peine complémentaire de confiscation de la fortune.
Ultérieurement, par l'arrêt pénal no. 2466 du 29 octobre 1997 rendu par la Cour Suprême de Justice (ainsi dénommée à cette date-là), on a admis le recours en annulation formé par le procureur général, on a cassé la sentence pénale no. 632 du 16.10.1959 du Tribunal Militaire de Craiova et l'arrêt pénal no. 218 du 8 janvier 1960 du Tribunal Militaire de la 2-ème Région, en disposant l'exonération de du R.D.G. pour la commission de l'infraction prévue par l'art. 209 le point 1 du Code pénal, en enlevant aussi la peine complémentaire de la confiscation de la fortune.
Par l'expression «immeubles pris abusivement», dans le sens de l'art. 2 alinéa (1) lettre b de la Loi no. 10/2001, on entend les immeubles pris par la confiscation de la fortune, suite à un arrêt de condamnation pour des infractions de nature politique, prévues par la législation pénale, commises comme manifestation de l'opposition vis-à-vis du système totalitaire communiste.
Par suite, on ne peut pas retenir que l'immeuble a été pris par l'État avec juste titre.
Selon l'art. 20 alinéa (1) de la Loi no. 10/2001, la société commerciale détentrice est obligée de restituer en nature l'immeuble, même si le bien est inclus dans son patrimoine, par privatisation, avec le respect des dispositions légales, si l'immeuble a été pris par l'État sans juste titre.
Dans l'espèce, c'est incontestable que la défenderesse S.C. «A.» S.A. Craiova s'est privatisée, tel qu'il résulte de l'annexe au contrat de privatisation no. 610/1994 et du certificat d'attestation du droit de propriété série DJ no. 0007 émis par le Conseil Départementale de Dolj, par l'achat des actions, avec le respect des dispositions légales.
L'évidence de l'immeuble dans le patrimoine de la défenderesse ne présente aucune relevance dans l'affaire, parce que l'une des conditions, essentielle pour l'application de l'art. 27 de la Loi no. 10/2001 qui limite le droit des demandeurs aux mesures reparatoires établies par équivalence, est que le bien ait été pris par l'État avec juste titre.
Étant donné que dans le cadre du processus de privatisation, la partie qui s'est pourvue en cassation, S.C.«A.» S.A. Craiova a acheté des actions, comme il résulte du contrat de vente - achat no. 610 du 21.12.1994 et non pas des actifs, on ne s'applique ni les dispositions de l'art. 46 de la Loi no. 10/2001 invoquées par la partie qui s'est pourvue en cassation.
Sous l'incidence de ce texte peuvent se placer seulement les actes juridiques d'aliénation des biens avec titre particulier, y compris ceux dressées pendant le processus de privatisation, mais pas la privatisation par l'achat des actions ou des parties sociales détenues par l'État ou les unités administratives territoriales, parce que l'objet de ceux-ci n'est pas représenté par les actifs immobiliers de la société, mais par le droit de propriété sur la partie du capital social détenu par l'État.
La privatisation par des actions ou des parties sociales appartenant à l'État n'a pas représenté en même temps une aliénation des biens immeubles.
La mesure de la restitution en nature de l'immeuble des demandeurs a été correctement établie par la première instance, maintenue en appel, ainsi que, le recours, mal fondé, selon l'art. 312 l'alinéa (1) du Code de procédure civile, sera rejeté.
On va disposer la restitution vers la défenderesse S.C. «A.» S.A. Craiova de la caution en somme de 5.000.000 lei - recepissée no. 2603/253360102 du 9 juin.
En conformité avec l'art. 274 du Code de procédure civile, la défenderesse S.C.»A.» S.A. Craiova sera obligée de payer aux demandeurs solidaires M.A. et R.A. la somme de 7.200.000 lei avec titre des frais de jugement en recours.
PAR CES MOTIFS
AU NOM DE LA LOI
LA COUR DIT:
Rejette comme mal fondé le recours formé par la défenderesse S.C. «A.» S.A. Craiova contre l'arrêt no. 2890 du 15 septembre 2004 de la Cour d'Appel de Craiova, la Chambre civile.
Dispose la restitution vers la défenderesse de la caution en somme de 5.000.000 lei- recipissée no. 2603/253360102 du 9 mai 2005 délivrée par CEC Craiova.
Oblige la défenderesse de payer la somme de 7.200.000 lei avec titre des frais de jugement en recours, aux demandeurs solidaires M.A. et R.A.
Irrévocable.
Rendu en audience publique, aujourd'hui le 30 juin 2005.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5756/CCPI/2005
Date de la décision : 30/06/2005
Chambre 1 Civile
Sens de l'arrêt : Rejet

Analyses

Immeuble pris par l'État à la suite d'un arrêt pénal de condamnation pour une infraction de nature politique. Demande de restitution en nature fondée sur la Loi no. 10/2001.

L'État n'a pas eu un juste titre pour l'immeuble pris à la suite d'un arrêt pénal de condamnation pour une infraction de nature politique. Par conséquence, l'immeuble se restitue en nature aux personnes ayant droit, par la société commerciale détentrice, même si celle-ci a été privatisée, non pas par l'achat de l'immeuble, comme actif, mais par l'achat des actions (la Loi no. 10/2001).


Parties
Demandeurs : R.A., M.A., R.V., D.A., M.M., M.I., P.P., B.M., L.P.
Défendeurs : S.C. « A. » S.A. Craiova

Références :

Décision attaquée : Cour d'Appel de Craiova, 15 septembre 2004


Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ro;haute.cour.cassation.justice;arret;2005-06-30;5756.ccpi.2005 ?
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