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21/11/2001 | MAROC | N°M2279

Maroc | Maroc, Cour suprême, 21 novembre 2001, M2279


Texte (pseudonymisé)
Arrêt n° 2279
Du 21/11/2001
Dossier n° 1467/1999
Sources du Code de commerce - Usages commerciaux - Recommandation du président de l'association professionnelle: non.

La simple recommandation émanant du Bureau administratif de l'Association professionnelle des commerçants de produits alimentaires ne saurait être assimilée à un usage commercial.
La cour a décidé à juste titre de rejeter l'exception de l'attaquant. Car si la défenderesse en pourvoi le fournissait régulièrement en vinaigre, de 1971 à 1980, fait reconnu expressément par lui et non contesté p

ar elle, il n'a pas établi l'existence d'une convention, ou d'un usage commercial o...

Arrêt n° 2279
Du 21/11/2001
Dossier n° 1467/1999
Sources du Code de commerce - Usages commerciaux - Recommandation du président de l'association professionnelle: non.

La simple recommandation émanant du Bureau administratif de l'Association professionnelle des commerçants de produits alimentaires ne saurait être assimilée à un usage commercial.
La cour a décidé à juste titre de rejeter l'exception de l'attaquant. Car si la défenderesse en pourvoi le fournissait régulièrement en vinaigre, de 1971 à 1980, fait reconnu expressément par lui et non contesté par elle, il n'a pas établi l'existence d'une convention, ou d'un usage commercial obligeant l'intimée à l'approvisionner. Ce qu'il a produit afin de prouver l'existence de l'usage commercial s'avère une simple recommandation.
AU NOM DE SA MAJESTE LE ROI
La Cour,
Attendu qu'il ressort des pièces versées au dossier, et de l'arrêt de renvoi après cassation, rendu le 07/01/99 par la Cour d'appel de Casablanca, qu'en date du 06/06/82, le demandeur, Aît Aa Ab, a introduit une requête près le tribunal de première instance de Casablanca, exposant que la société Unigral Cristal le fournissait depuis 1971 en vinaigre, régulièrement, et en grande quantité. Qu'elle a cependant cessé de le faire depuis le 20/08/80, de manière unilatérale.
Le produit en question n'étant pas disponible sur le marché, l'arrêt d'approvisionnement lui a occasionné des préjudices matériels considérables. Sollicitant du tribunal de sommer ladite société, sous astreinte, de reprendre ses fournitures en sa faveur, avec les quantités habituelles et à des prix raisonnables.
Le tribunal a rendu son jugement, rejetant la demande. La Cour d'appel a annulé ce jugement, et levé l'interdiction sous astreinte, et ce après évocation.
Le recours de la société Unigral Cristal a abouti à la cassation de l'arrêt attaqué par la Cour suprême en date du 07/06/95, et au renvoi de l'affaire et des parties à saisir la même juridiction afin d'y statuer à nouveau, laquelle a rendu un arrêt décidant la confirmation du jugement de première instance, objet du présent recours.
Sur le premier moyen, pris pour la violation des droits de la défense:
Attendu que l'attaquant reproche à l'arrêt le fait que l'alinéa relatif à l'ordonnance de dessaisissement a été biffé, et ne mentionne pas la prise de l'ordonnance; et que la défense de l'appelant ne l'a pas reçue alors que l'affaire était en l'état. Surtout qu'il s'agit d'une procédure écrite en phase d'appel, que les parties et leurs défenses devaient en être notifiées, et que le juge rapporteur ne peut en être exempt, selon l'article 335 du Code de procédure civile.
Cependant, attendu que l'affaire a été enrôlée en plusieurs audiences, contradictoirement, jusqu'à ce qu'elle fut en état d'être jugée, et mise en délibéré. Que le fait que l'ordonnance de dessaisissement ne soit pas rendue, laisse le champ libre aux parties pour adjoindre d'autres conclusions et preuves. En outre, l'attaquant n'a pas indiqué dans le moyen le préjudice subi suite à l'absence de la formalité précitée. Le moyen s'avère donc dénué d'intérêt.
Sur le moyen relatif au défaut de base légale:
Attendu que l'attaquant reproche à l'arrêt le défaut de base légale. Arguant qu'il a affirmé durant toutes les étapes qu'il s'approvisionnait auprès de la défenderesse en pourvoi en vinaigre depuis 1966; qu'il était donc un client traditionnel et reconnu par elle comme un client respectant ses engagements envers elle. Que la société a affirmé par le biais de ses responsables sa disposition à reprendre son approvisionnement, selon les constats datés du 18/07/90 et 28/10/94. Qu'elle n'en est pas moins tombée dans la contradiction, puisque après ces affirmations, (...) que ce dernier n'a pas été en mesure d'établir l'existence d'un accord ou un usage commercial obligeant l'intimée à l'approvisionner. Alors qu'au contraire, l'opération entre bien dans le cadre des usages commerciaux, et l'appelante demeure obligée, conformément à la recommandation du président de l'Association professionnelle des commerçants de produits alimentaires, dans laquelle ce dernier atteste que la relation liant les deux parties engage l'intimée à l'approvisionner en vinaigre.

Que l'appelant a établi, par le biais d'un document valide, que la relation liant les parties entre dans le cadre de l'usage commercial, lequel n'a nul besoin d'être écrit ou codifié, il suffit qu'il soit en vigueur dans la même branche. Que l'arrêt attaqué a contrevenu à la loi en écartant la preuve littérale émanant d'une partie compétente, qui démontre l'existence d'usage en l'espèce, preuve irrévocable en matière d'usage commercial.
D'autre part, l'attaquant a relevé que l'arrêt en question a été rédigé dans ses pages 1, 6 et 7, d'une écriture différente de celle des pages 2, 3 et 4, ce qui permet des doutes sur la validité dudit arrêt.
Cependant, attendu que (l'usage commercial), qui figure parmi les sources du Code commercial, régissant, dans certains cas, les obligations et les relations légales nées entre les commerçants à l'occasion de leurs opérations commerciales, constitue selon la doctrine, une sorte de généralisation de certaines pratiques et comportements auxquels ont recours ces commerçants à l'occasion de ces opérations, d'une manière habituelle et notoire, au vu et au su de tout le monde, aboutissant à la naissance du sentiment que cet usage les oblige, même s'il n'est pas écrit.
Attendu que d'une part, la Cour de renvoi est tenue de statuer, comme elle l'a fait remarquer dans ses motifs, sur le point de droit tranché par la Cour suprême, conformément à l'article 369 du code de procédure civile. D'autre part, alléguer l'existence de l'usage ne suffit pas, encore faut-il le prouver d'une manière péremptoire. La Cour a pertinemment répondu aux allégations invoquées par l'attaquant afin d'établir l'usage commercial en disant:«attendu que l'appelant n'a pas été en mesure de prouver l'existence d'une convention ou d'un usage commercial engageant l'intimée à l'approvisionner en vinaigre; ce qu'il a produit afin de prouver l'existence de l'usage commercial s'avère une simple recommandation émanant du bureau administratif de l'Association professionnelle des commerçants des produits alimentaires, adressée à un quelconque service lui demandant d'intervenir en vue de régler son problème avec l'intimée...»
Attendu que même si la défenderesse le fournissait régulièrement en vinaigre, de 1971 à 1980, fait reconnu expressément par lui et non contesté par elle, il n'a pas établi l'existence d'une obligation, d'une convention, ou d'un usage commercial obligeant l'intimée à l'approvisionner. Car les opérations conclues durant cette période s'effectuaient sous forme de contrats ponctuels, s'éteignant dès livraison de la marchandise et paiement. Sous cet angle, comme il a été établi par les juges de fond à la lumière des pièces versées au dossier, et en l'absence de convention, d'un usage ou d'une habitude, ou de ce qui peut être induit de la nature de ces opérations, la défenderesse n'était pas obligée à l'approvisionner, comme il n'était pas tenu, en contrepartie, de se fournir auprès d'elle.
Attendu que la recommandation susvisée dont s'est prévalu l'attaquant, n'exprime que l'avis de son émetteur, et n'oblige nullement la justice à une quelconque interprétation des contrats et obligations. Elle ne saurait donc se substituer aux attestations délivrées par les institutions professionnelles officielles, telles que les chambres de commerce et d'industrie, disposant des critères de validité et de force de preuve. Car l'association en question n'est pas habilitée à délivrer ce genre d'attestation, sans compter que litige concerne la fabrication du savon et non les produits alimentaires.
L'attaquant, par ailleurs, reproche à l'arrêt le fait que les juges de fond n'ont pas répondu à ses exceptions issues des pièces produites, copies de correspondances, factures, etc., ainsi que de la doctrine islamique marocaine.
Cependant, si la loi, l'usage et la jurisprudence constituent les sources de base des règles juridiques, donc obligeantes pour la justice, il n'en est pas de même des thèses doctrinales, la doctrine étant un simple moyen d'interprétation de ces sources. La Cour n'était tenue de répondre qu'aux exceptions concluantes dans l'action. L'arrêt objet du pourvoi en cassation est donc sainement et suffisamment motivé, et le moyen demeure dénué de fondement.
Quant à la défiance relative à la transcription de l'arrêt attaqué, qui serait différemment manuscrite, il y a lieu de rappeler que dès lors que ledit arrêt remplit toutes les conditions formelles dûment requises, et notamment les dispositions de l'article 345 du Code de procédure civile, ceci n'a aucun effet sur sa validité en tant que document authentique. Ce qui implique que le dernier volet du troisième moyen n'est pas à prendre en considération.

PAR CES MOTIFS
la Cour suprême décide le rejet de la demande.


Synthèse
Numéro d'arrêt : M2279
Date de la décision : 21/11/2001
Chambre commerciale

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;2001-11-21;m2279 ?
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