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16/07/1998 | MAROC | N°A735

Maroc | Maroc, Cour suprême, 16 juillet 1998, A735


Texte (pseudonymisé)
AU NOM DE SA MAJESTE LE ROI
La Cour suprême,
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Attendu que Mr A.S requiert l'annulation, pour excès de pouvoir, de la décision prise par Mr le ministre de l'intérieur en date du 13 septembre 1991 ordonnant son expulsion du Maroc, ainsi que l'annulation de la décision prise, le même jour, par le directeur général de la sécurité nationale qui a exécuté la décision ministérielle sus-indiquée. Il soutient que le jour de l'édiction de la décision attaquée était détenu à la prison centrale de Kénitra, purgeant une pein

e de réclusion perpétuelle rendue par la chambre criminelle de la cour d'appel de Ca...

AU NOM DE SA MAJESTE LE ROI
La Cour suprême,
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Attendu que Mr A.S requiert l'annulation, pour excès de pouvoir, de la décision prise par Mr le ministre de l'intérieur en date du 13 septembre 1991 ordonnant son expulsion du Maroc, ainsi que l'annulation de la décision prise, le même jour, par le directeur général de la sécurité nationale qui a exécuté la décision ministérielle sus-indiquée. Il soutient que le jour de l'édiction de la décision attaquée était détenu à la prison centrale de Kénitra, purgeant une peine de réclusion perpétuelle rendue par la chambre criminelle de la cour d'appel de Casa, dans une affaire politique; qu'il a été avisé, par son avocat, au bureau du directeur de la prison de sa libération, qu'après avoir quitté la prison, il a été surpris par une voiture l'amenant vers l'aéroport Rabat-Salé où la décision de son expulsion lui a été notifiée, une décision contraire aux réalités historiques dans la mesure où ses ancetres sont arrivés à Tanger depuis cinq siècles comme réfugiés, après avoir quitté l'Andalousie, et contraire aussi à la réalité même de sa vie qu'il a consacré à la défense de la cause nationale, que sa vie avant, comme après l'indépendance prouve sa marocanité; que sa nationalité marocaine, sa vraie nationalité, a été déjà, contestée par les autorités du protectorat, mais en vain.
Attendu que le requerant soulève que la décision attaquée n'est pas fondée sur des faits réels et préétablis, qu'elle viole le principe de l'illégalité de l'expulsion d'un citoyen ainsi qu'elle constitue une usurpation du pouvoir d'un état étranger de même que les pouvoirs juridictionnel, législatif et royal dans la mesure où la décision attaquée recèle le fait qu'il a violé, à maintes reprises et d'une façon dangereuse, la sécurité interne et externe de l'Etat alors que si la violation de la sécurité interne est établie, la violation de la sécurité externe ne l'est pas dans la mesure où la compétence de statuer sur ce chef d'inculpation relève du tribunal militaire de même que le dol exercé sur les autorités marocaines pour ce qui est de son acquisition de la nationalité marocaine, n'est pas vérifié dans la mesure où le dol ne se présume que pour une personne ne disposant pas réellement de la nationalité marocaine alors que lui, est marocain et sa marocanité est établie par la lettre adressée par le Ministère de la Justice en date du 23/2/1956 au Président du Conseil des Ministres, en sus du fait que la décision de son emprisonnement pour distribution des tracas politiques, sachant que la contestation de la nationalité marocaine n'a été que le fait des autorités de protectorat français alors que le fait qu'il porte la nationalité Brésilienne n'est pas vérifié, de même qu'il ne le prive pas de sa nationalité d'origine et ne justifie pas son expulsion, que sa réclamation de la nationalité française était pour des raisons précises qui ne sont pas de nature à le priver de sa nationalité et surtout que la loi relative à la nationalité marocaine ne fait pas de l'acquisition d'une ou plusieurs nationalités étrangères un facteur de dessaisissement du citoyen marocain de sa nationalité d'origine, que les principes généraux de droit, dans les Etats civilisés, n'autorisent pas l'expulsion d'un citoyen, un principe du reste, confirmé par la Déclaration Internationale des Droit de l'Homme et la Convention Internationale relative aux droits civiles et politiques. Que tout citoyen, ne peut être expulsé sauf s'il a commis un acte constitutif d'une violation de la sécurité de l'Etat ou de l'ordre public ou tout au moins si sa commission de ses actes est présumée avec l'obligation que l'acte sus indiqué soit commis juste avant la décision d'expulsion et non après plusieurs années comme c'est le cas pour lui dans la mesure où il a été détenu pour longtemps et après avoir purgé sa peine, il s'est vu en face d'une décision d'expulsion alors que l'article 31 du code de la nationalité marocaine dispose que la nationalité d'origine peut être établie par tout moyens de même que l'article 39 du même code impose à l'Etat qui conteste la nationalité marocaine alléguée par une personne, d'intenter un recours contre lui via le ministère public pour établir le contraire, ce qui signifie que la décision attaquée usurpe le pouvoir juridictionnel et le pourvoir royal et législatif . En effet aucun détenu ne peut être libéré, conformément au principe de l'autorité de la chose jugée, qu'après l'édiction d'une loi de grâce, alors qu'il n'existe aucune décision royale dans ce sens.
Attendu que le mémoire en défense, présenté par le ministre d'Etat à l'intérieur, soulève que le requérant reconnaît expressément que ses parents portent la nationalité brésilienne, de même qu'il reconnaît expressément qu'il a précédemment présenté une demande pour acquérir la nationalité française , que par suite le requérant est tenu de présenter ces documents officiels prouvant sa nationalité marocaine, surtout qu'il ne dispose pas d'un jugement rendu par un tribunal compétent prouvant sa nationalité, ce que signifie que Mr. B-S reste un étranger aux yeux des autorités marocaines compétentes, que vu le fait qu'il a été jugé et condamné conformément aux dispositions du code pénale relatives à la violation de la sécurité de l'Etat et de l'ordre public, la décision de son expulsion et juste et légale.
1) En ce qui concerne l'exception soulevée par le représentant du requerant, visant la non prise en considération du mémoire en réplique de l'administration qui n'a pas présenté ses conclusions qu'après la prise de deux ordonnances de dessaisissement et son avertissement conformément aux dispositions de l'article 366 du C.P.C qui considère que l'administration est réputée avoir acquiescé aux faits exposés dans la requête s'elle fait défaut en dépit de son avertissement.
Attendu qu'il est établie, des pièces du dossier, que le représentant du requerant a reçu le mémoire en défense de l'administration, discuté son contenu, et lors de sa plaidoirie, exposer son point de vue, en sus du fait que l'acquiescement de l'administration aux faits contenus dans la requête, conformément aux dispositions de l'article 366 du C.P.C, dans le cas où elle fait défaut n'entraine pas a fortiori l'annulation automatique de la décision attaquée dans la mesure où la juge administratif reste toujours qualifié pour contrôler la légalité de l'acte attaqué à la lumière des pièces et documents contenus au dossier, qu'il échet de considérer l'exception soulevée par le requérant dans ce cadre comme inopérante.
2- En ce qui concerne la légalité de la décision attaquée
Attendu que la fond du litige, exposée devant la chambre administrative, ne concerne pas l'établissement ou non de la nationalité marocaine du requérant comme nationalité d'origine, et qui relève de la compétence des autorités déterminées par le code de la nationalité marocaine, selon les cas et conformément aux règles contenues dans le dahir du 19 septembre 1958 relatif au code de la nationalité marocaine, mais le litige présenté dans le cadre du recours en annulation pour excès de pouvoir, vise l'appréciation et le contrôle de la décision attaquée concernant l'expulsion du requérant du territoire marocain pour motif de la commission d'actes qui touchent à la sécurité et à l'ordre public .
Attendu que si le requérant s'attache au fait qu'il est marocain de nationalité, et que la décision de son expulsion n'était pas légale, il reste que l'administration conteste le fait de son acquisition de la nationalité marocaine comme nationalité d'origine, qu'il s'agit d'un litige qui sort du cadre de la compétence de la chambre administrative comme juge d'excès de pouvoir.
Attendu que le présent litige n'a pas de relation avec le dispositif du paragraphe 2 de l'art.36 du code de la nationalité marocaine qui dispose que la Cour Suprême est compétente pour statuer sur les demandes en annulation des décisions administratives relatives à la nationalité pour excès de pouvoir, de même qu'il ne s'agit pas de l'exception de la question de nationalité avant de statuer sur une contestation juridictionnelle conformément aux dispositions de l'article 37 du même code du fait de l'inexistence d'aucun recours tendant à la reconnaissance ou non reconnaissance de la nationalité marocaine du requérant pour dire qu'il faut renvoyer l'obligation de statuer jusqu'à épuisement de la question sur la base de la procédure prévue à l'article 38 et suivant jusqu'à l'article 42 du dit code, qu'il s'agit d'un recours formulé contre une décision administrative tendant à l'expulsion du requerrant du territoire national.
Attendu que vu le litige né entre l'administration d'une part, qui justifie la décision d'expulsion du requerrant par le fait qu'il dispose de la nationalité brésilienne suite au fait que ses parents disposent de cette nationalité et du fait de sa commission d'actes touchant à la sécurité et l'ordre public au Maroc, et le requerant d'autre part, qui s'attache au fait qu'il dispose de la nationalité marocaine comme nationalité d'origine en dépit de la présomption de sa disposition de la nationalité brésilienne, il est nécessaire de recourir à l'autorité juridictionnelle compétente pour en statuer, et en l'absence de documents officiels décisifs émanant des autorités marocaines compétentes qu'elles soient administratives ou juridictionnelles, relatifs au sujet de la nationalité, la décision d'expulsion du requerrant du territoire national reste une décision légale.
Attendu que suite à tout ce qui précède, la décision attaquée n'est pas entachée d'aucun excès de pouvoir qu'il echet de rejeter la demande à la lumière des données et éléments déduits du dossier et des circonstances entourant le litige sus-visé.
PAR CES MOTIFS
La Cour suprême rejette la demande d'annulation.


Synthèse
Numéro d'arrêt : A735
Date de la décision : 16/07/1998
Chambre administrative

Analyses

Décision d'expulsion - sa justification.

1) L'acquiescement de l'administration aux faits exposés dans la requête introductive ne peut être déduit automatiquement par le simple défaut de réponse de celle-ci. Le juge dispose du ppouvoir d'apprécier l'existence ou l'absence de tels faits suivant les pièces et documents du dossier. 2) L'absence de vices entachant la décision attaquée d'illégalité suscite le rejet du recours.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1998-07-16;a735 ?
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