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27/05/1998 | MAROC | N°P1362

Maroc | Maroc, Cour suprême, 27 mai 1998, P1362


Texte (pseudonymisé)
AU NOM DE SA MAJESTE LE ROI
La Cour,
Après délibérations, conformément à la loi.
Vu la requête produite par le demandeur au pourvoi par l'intermédiaire de son avocat.
Sur le cinquième moyen de cassation pris de la violation des dispositions des articles 409 et 410 et suivants du code de procédure pénale, en ce que l'arrêt attaqué lorsqu'il a annulé le jugement de première instance pour prononcer une condamnation pénale et des réparations civiles, a violé lesdits articles du code de procédure pénale-et a touché à l'action publique alors que le jugement de premiÃ

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AU NOM DE SA MAJESTE LE ROI
La Cour,
Après délibérations, conformément à la loi.
Vu la requête produite par le demandeur au pourvoi par l'intermédiaire de son avocat.
Sur le cinquième moyen de cassation pris de la violation des dispositions des articles 409 et 410 et suivants du code de procédure pénale, en ce que l'arrêt attaqué lorsqu'il a annulé le jugement de première instance pour prononcer une condamnation pénale et des réparations civiles, a violé lesdits articles du code de procédure pénale-et a touché à l'action publique alors que le jugement de première instance a déjà acquis force de chose jugée en matière pénale, puisqu'il ne fut pas l'objet d'appel de la part du Ministère public, le seul appel qui fut interjeté est celui de la partie civile uniquement-Ainsi l'article 410 a été violé puisqu'il stipule que l'appel de la partie civile se limite, pour la cour d'Appel , à lui permettre d'examiner les intérêts civils de l'appelant- De ce fait, les motivations de la cour d'appel sont fausses et contraires à la loi et à la jurisprudence d'où que l'arrêt attaqué encourt la cassation.
Vu l'article 410 du code pénal.
Attendu que les dispositions de cet article montrent que l'appel interjeté par la partie civile permet à la cour d'Appel d'examiner uniquement les intérêts civils de l'appelant -
Attendu qu'il apparaît de la lecture de l'arrêt attaqué que la cour d'Appel a eu entre ses mains l'appel de la partie civile à l'encontre du jugement qui a acquitté les prévenus de l'accusation d'escroquerie. La cour a annulé le jugement de l'acquittement et a prononcé une condamnation pénale estimant que l'appel est interjeté par l'auteur de la citation directe qui a le droit d'exposer toute l'affaire devant la juridiction d'appel, étant donnée que c'est lui qui a mis l'action publique et l'action civile en mouvement-
En réalité la victime d'une infraction en droit pénal possède le droit de mettre en mouvement l'action publique par le biais de la citation directe, mais son pouvoir s'arrête à la mise en mouvement de cette action qui doit être continuée par le Ministère public puisqu'elle est la partie publique au procès pénal, la partie civile reste intéressée par ses intérêts civils-
Ainsi l'appel possède un effet dévolutif qui permet à la cour d'Appel d'examiner l'affaire objet de l'appel dans son intégralité, mais cet effet dévolutif est tributaire de la qualité de son auteur et la nature des intérêts qu'il défend-tel est le sens des articles 409 et suivants du code de procédure pénale-
Attendu que la partie civile a été la seule partie au procès à faire appel du jugement d'acquittement, la cour d'Appel en condamnant les prévenus auparavant acquittés malgré l'absence d'appel de la part du Ministère Public, a méconnu les principes juridiques de l'effet dévolutif de l'appel et a violé les dispositions de l'article 410 du code de procédure pénale et son arrêt encourt la cassation.
Par ces motifs
Casse l'arrêt rendu par la Cour d'Appel de Kenitra et renvoie l'affaire devant la même juridiction autrement composée pour qu'elle soit jugée à nouveau conformément à la loi.
Driss Mazdgri : Président
Aziza SENHAJI : Conseiller
Med B : Conseiller
Med A : Conseiller
Med JAY : Conseiller
Amina JIRARI : Avocat général
Jamila MAGHRAOU : Greffier
Commentaire de l'arrêt n° 1362/3
Daté du 27/5/1998
Dossier pénal n° 273/3/3/97
Par Monsieur Mohamed BERRAHALI conseiller auprès de la Cour suprême
L'arrêt en question essaie de répondre au problème posé à savoir quels sont les effets de l'appel ou du pourvoi en cassation effectués par la partie civile sur l'action publique qu'elle a mise en mouvement elle-même par le biais d'une citation directe-Autrement dit l'appel ou le pourvoi en cassation formé par la partie civile limite-t-il le pouvoir de la cour d'Appel ou de la Cour Suprême à l'examen exclusif des intérêts civils relevant de l'action civile ou peut-il s'étendre à l'examen de l'action publique puisque c'est la partie civile qui l'à mise en mouvement.
L'article 410 du code de procédure pénale stipule que «l'appel de la partie civile ou du civilement responsable limite le pouvoir de la cour d'Appel à l'examen exclusif des intérêts civils de l'appelant et lui permet d'apprécier la réalité des faits à l'origine des dommages en cause. De ce fait, le jugement rendu suite à cet appel qu'il accorde les demandes civiles ou les refuse ne peut produire aucun effet sur l'action pénale puisque le jugement pénal a acquis la force de la chose jugée.
Ainsi lorsque la partie civile interjète appel et qu'elle ait été seule à l'origine de la mise en mouvement de l'action publique, il n'est pas permis à la cour d'appel de juger l'action publique et ne peut examiner que l'action civile conformément à l'article 410 du code de procédure pénale-De ce fait le jugement d'acquittement prononcé en première instance a acquis la force de la chose jugée.
Le législateur a permis à la victime de demander des réparations du dommage qui lui est causé, devant les instances judiciaires répressives- Il a un double choix:
- soit il s'adresse au juge répressif lorsque le Ministère public a mis en mouvement l'action publique.
- Soit en s'adressant directement au juge d'instruction ou au tribunal lorsqu'il se constitue partie civile et qu'il met en mouvement l'action pénale par le biais de la citation directe.
- Cette possibilité qui est accordée à la partie civile est une exception à une double règle.
1) la demande des réparations civiles est de la compétence de la justice civile.
2) La mise en mouvement de l'action publique relève de la compétence du Ministère public .
De ce fait il n'est pas permis d'élargir le cadre juridique des exceptions à ces règles.
Ainsi le sens de l'article 585 du code de procédure pénale abonde dans la même direction.
« Il suffit de déclarer se pouvoir en cassation pour que l'affaire soit examinée par la cour suprême»
la Cour de cassation est tenue de prendre en compte la qualité de l'auteur du pourvoi.
Mai lorsque le pourvoi est formé par le Ministère public, la cour suprême examine l'action publique.
Les effets du pourvoi formé par la partie civile ou le civilement responsable se limitent aux intérêts civils relevant de l'action civile.
De ce fait l'arrêt attaqué a contredit le sens du principe de l'effet dévolutif de l'appel lorsqu'il a annulé la décision d'acquittement malgré le fait que le parquet n'ait pas interjeté appel.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P1362
Date de la décision : 27/05/1998
Chambre pénale

Analyses

Le droit de la victime de mettre en mouvement l'action publique par le biais de la citation directe voit ses effets s'arrêter après la mise en mouvement de cette action devant la juridiction, alors que la parquet garde le pouvoir de l'accompagner jusqu'au jugement, la victime reste maître de l'action civile. L'appel possède un effet dévolutif qui permet à la cour d'appel de réexaminer l'affaire dans son intégralité-mais cet effet est soumis à la qualité e l'auteur de l'appel et aux intérêts de son action.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1998-05-27;p1362 ?
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