La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/12/1997 | MAROC | N°P2443

Maroc | Maroc, Cour suprême, 11 décembre 1997, P2443


Texte (pseudonymisé)
AU NOM DE SA MAJESTE LE ROI
La Cour Suprême,
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Sur la première partie du deuxième moyen pris d'insuffisance de motifs et motifs viciés en ce que lors de la lecture du rapport d'expertise il apparaît que l'expert s'est totalement éloigné de la mission technique qui lui avait été assignée et l'a outrepassé au point qu'il s'est érigé en juge auditionnant les parties et les témoins ce qui ne relevait nullement de sa mission, et qu'ainsi il a écrit -sous libellé « Constatation et preuve de l'occupation ou la non occupati

on par l'inculpé d'une parcelle du domaine forestier »- ce qui suit « Après la ...

AU NOM DE SA MAJESTE LE ROI
La Cour Suprême,
Après en avoir délibéré conformément à la loi,
Sur la première partie du deuxième moyen pris d'insuffisance de motifs et motifs viciés en ce que lors de la lecture du rapport d'expertise il apparaît que l'expert s'est totalement éloigné de la mission technique qui lui avait été assignée et l'a outrepassé au point qu'il s'est érigé en juge auditionnant les parties et les témoins ce qui ne relevait nullement de sa mission, et qu'ainsi il a écrit -sous libellé « Constatation et preuve de l'occupation ou la non occupation par l'inculpé d'une parcelle du domaine forestier »- ce qui suit « Après la constatation et l'audition du prévenu et des témoins, j' ai questionné le représentant de l'administration des eaux et forêts sur la réalité des faits du moment que ledit prévenu les a niés. ..et, pour ses motifs il est possible de déclarer que le prévenu n'a pas occupé la parcelle forestière objet du litige ». Mais comme la mission de l'expert est strictement technique elle ne peut avoir des conséquences sur tout ce qui relève de la compétence des magistrats qui ont seuls le droit de discuter du fond du dossier dans son cadre juridique et que la cour qui s'est basée sur l'enquête réalisée par l'expert lors de laquelle il a auditionné les parties et les témoins, a mal motivé sa décision et l'a exposée à la cassation.
Vu les articles 347 et 352 du code de procédure pénale,
Attendu que suivant l'article 347 en son septième alinéa et l'article 352 en son deuxième alinéa dudit code, toute décision de justice doit être motivée en fait et en droit sinon elle est nulle et que le manque de motifs ou la motivation viciée équivaut un défaut de motifs.
Attendu que l'arrêt attaqué, après avoir infirmé le jugement de première instance qui avait condamné le prévenu pour le délit de labour d'une parcelle forestière sans autorisation, a déclaré sa relaxe en se contentant de la motivation suivante: « attendu que l'administration des eaux et forêts n'a pas produit à l'appui de son rapport une carte délimitant le domaine forestier et qui comprendrait la parcelle objet du litige, ce qui a amené la cour à ordonner une expertise foncière réalisée par l'expert Aït Ab Aa suivant arrêt n° 0744 en date du 6/3/96 et qui a conclu que le prévenu n'a occupé indûment aucune parcelle du domaine forestier située dans la région objet du litige, et qu'ainsi le jugement de première instance n'était pas conforme et qu'il y a lieu de l' infirmer et de statuer à nouveau en prononçant la relaxe de l'inculpé »
Attendu que l'arrêt n° 744 du 6/3/96 désignant l'expert a prévu que sa mission consiste à se déplacer sur les lieux et les décrire de manière précise quant à leur nature, leurs limites et leur superficie tout en précisant s'ils faisaient partie ou non du domaine forestier et en citant les bases sur lesquelles il s'est fondé pour mener à bien sa mission.
Attendu qu'à l'examen du rapport d'expertise dressé par monsieur Aït Ab Aa expert désigné, pris comme base essentielle dans la motivation de l'arrêt attaqué, il y apparaît qu'il est arrivé à la conclusion que l'inculpé n'a occupé indûment aucune parcelle dépendant du domaine forestier objet du litige en se fondant pour ce sur les déclarations des témoins qu'il a auditionnés sur place, les déclarations de l'inculpé et les déclarations du représentant de l'administration des eaux et forêts sans se préoccuper sur des points de base de l'arrêt qui l'a désigné
Attendu que la cour, en se basant sur ledit rapport d'expertise pour prendre sa décision malgré le fait que la mission de l'expert était strictement technique et ne lui donnait nullement le droit d'interférer dans tout ce qui a trait au fond du litige en auditionnant l'inculpé, et les témoins sur des faits autres que ceux relevant du volet technique de sa mission, le fond du litige relevant de la compétence exclusive de la justice qui a seule le droit de le discuter dans son cadre légal pour arriver à constituer son intime conviction, qu'en statuant ainsi la cour a mal motivé son arrêt et l'expose à la cassation .
PAR CES MOTIFS :
Et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de pourvoi proposés, La Cour Suprême casse et annule l'arrêt attaqué rendu par la cour d'appel d'AGADIR le 13/11/1996 dans le dossier correctionnel n°4604/95 et renvoie l'affaire et les parties devant la même cour autrement composée pour qu'il y soit de nouveau statué conformément à la loi et sans qu'il soit besoin de statuer sur les dépens,
La cour ordonne la transcription du présent arrêt sur les registres de la cour d'appel qui a rendu la décision cassée ainsi que sa mention à la marge de ladite décision.
Ainsi l'arrêt a été rendu et lu à l'audience publique tenue à la date susmentionnée à la salle des audiences ordinaires de La Cour Suprême la formation était constituée de:
Tahar SMIRES Présient
Mohamed HLIMI Cosseiller
Mohamed KADIRI Cosseiller
Adbelmalek BORJ Cosseiller
Hakima SHISSEH Cosseiller
Hassan BAKALI Avocat Général
Sharifa ALAOUI Greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P2443
Date de la décision : 11/12/1997
Chambre pénale

Analyses

La cour - l'expert - sa mission - l'ordonnance le désignant

L'expert désigné par le tribunal doit se limiter à la mission qui lui a été confiée par l'ordonnance de désignation en vue d'aider ledit tribunal dans la reconnaissance des faits qui relèvent de sa compétence. Il n'est pas permis à l'expert d'aiditionner les parties et les témoins pour établir des faits qui relèvent de la compétence du tribunal.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1997-12-11;p2443 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award