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03/10/1996 | MAROC | N°A662

Maroc | Maroc, Cour suprême, 03 octobre 1996, A662


Texte (pseudonymisé)
Arrêt n°662
Du 03 Octobre 1996
Dossier nº278/5/1/95
Autorité publique. Responsabilité. Fondement de cette responsabilité.
Responsabilité de l'autorité publique d'une mine explosive à risque. La victime n'est pas tenue de prouver la faute.
AU NOM DE SA MAJESTE LE ROI
La Cour;
Après délibération conformément à la loi ;
Attendu qu'il résulte des pièces du dossier et de l'arrêt pourvu en cassation rendu par la cour d'appel d'Agadir le 28/04/1994, dans le dossier nº6/93, que les héritiers de la défunte ZKEM Ac, cités dans la requête de cassation, ont i

ntroduit une action contre l'Etat marocain en la personne de Monsieur le Premier Ministre, da...

Arrêt n°662
Du 03 Octobre 1996
Dossier nº278/5/1/95
Autorité publique. Responsabilité. Fondement de cette responsabilité.
Responsabilité de l'autorité publique d'une mine explosive à risque. La victime n'est pas tenue de prouver la faute.
AU NOM DE SA MAJESTE LE ROI
La Cour;
Après délibération conformément à la loi ;
Attendu qu'il résulte des pièces du dossier et de l'arrêt pourvu en cassation rendu par la cour d'appel d'Agadir le 28/04/1994, dans le dossier nº6/93, que les héritiers de la défunte ZKEM Ac, cités dans la requête de cassation, ont introduit une action contre l'Etat marocain en la personne de Monsieur le Premier Ministre, dans laquelle ils sollicitent de juger en leur faveur le paiement des indemnités pour les dommages subis par eux à cause de la mort de la défunte précitée à la suite de l'explosion d'une mine mise sous la voiture qui l'embarquait au lieu dit "Laksir", province de Tan-Tan, à proximité de la tente où elle se dirigeait pour rendre visite à ses proches tel qu'il ressort des indications contenues dans le procès verbal de la Gendarmerie Royale de Talmazoune - Centre, en date du 26/12/1988, sous le nº19 ;
Après accomplissement des formalités, le tribunal de première instance a laissé l'entière responsabilité à la charge de l'Etat et l'a condamné au paiement des dédommagements déterminés dans le jugement du premier ressort, lequel jugement a été confirmé au niveau de l'appel ;
En ce qui concerne le premier moyen :
Attendu que l'agent judiciaire du Royaume, agissant au vu d'une délégation écrite émanant de Monsieur le Premier Ministre, reproche à l'arrêt attaqué le fait d'avoir violé l'article 404 du Code des Obligations et Contrats qui détermine les moyens de preuve reconnus par la loi en matière civile, alors que le tribunal s'était basé dans la preuve de la matérialité de l'accident sur une simple photocopie du Procès Verbal de la Police Judiciaire, or ce genre de procès verbal ne revêt pas la même force probatoire devant la juridiction civile en application d'une jurisprudence antérieure de la Cour Suprême qui a prévu en particulier que les procès verbaux de la Police Judiciaire ne sont pris en considération pour application que devant la juridiction pénale et qu'ils ne constituent pas une preuve devant la juridiction civile;
Mais attendu que lorsque le tribunal s'était basé dans la preuve de la matérialité de l'accident sur le procès verbal de la Police judiciaire (Gendarmerie Royale),selon le constat fait par le rédacteur lors de son déplacement sur les lieux où l'explosion a eu lieu, ledit tribunal aurait de ce fait pris en considération un preuve écrite, tandis que l'appréciation de la teneur de ce procès verbal relève de son pouvoir discrétionnaire en tant que tribunal du fond ;
Ainsi, tant qu'il n'a pas été établi qu'il a été soulevé un élément déterminé et inspiré de l'affaire susceptible de rendre suspecte la véracité des énonciations consignées dans le procès verbal en question, le moyen invoqué demeure fondé sur une simple contestation de la conviction du tribunal au sujet de la teneur du procès verbal ;
La cour suprême n'a pas de contrôle à exercer dans de pareil cas et il n'y a donc pas de violation comme invoqué, le moyen est alors sans fondement ;
Attendu que la pourvoyante reproche à l'arrêt objet du recours le défaut de fondement et la violation des dispositions de l'article 79 du Code des Obligations et Contrats, car en se référant aux pièces, il résulte que la défunte, auteur de la succession des pourvus en cassation, a été atteinte au cours de l'accident qui lui a coûté la vie lorsqu'elle se trouvait à bord d'une voiture appartenant à son père, dont le conducteur a dévié du chemin réservé aux voitures et a emprunté une zone montagnarde vierge et dépeuplée, sans se soucier de la sécurité des personnes à bord de sa voiture ;
D'où sa responsabilité réelle et établie pour défaut de lien de causalité entre le préjudice subi et l'action de l'Etat, tant que l'erreur n'émane pas de celui-ci;
Cependant, attendu que la responsabilité de l'Etat, selon l'article 79 invoqué, est établie en deux cas :
Premièrement :
la responsabilité des dommages causés directement par le fonctionnement de son administration, c'est à dire la responsabilité sans faute ;
Deuxièmement :
c'est la responsabilité résultant de la faute de service ;
En se référant aux dispositions de l'arrêt attaqué et des pièces prises en considération et de ce que confirme le moyen invoqué, il ressort que la défunte, auteur de la succession des pourvus en cassation, a connu la mort lorsqu'une bombe s'est explosée au-dessous de la voiture à bord de laquelle elle se trouvait; L'Administration n'a pas contesté que c'était elle-même qui avait déposé cette bombe, sans signaler pour autant l'interdiction d'y accéder ;
En confirmant le jugement du premier ressort, la cour a alors adopté les motivations qui y sont évoquées dans lesquelles il est indiqué qu'attendu que les demandeurs ont établi par le procès verbal produit, dressé par la Police judiciaire que la victime est décédée à la suite de l'explosion d'une mine au-dessous de la voiture qui l'embarquait et que l'Etat est responsable de la sécurité des personnes; Par voie de conséquence il n'y a pas de violation comme invoqué dans le moyen soulevé tant que la responsabilité en pareil cas ne nécessite pas la survenance de la faute ;
Le moyen invoqué est donc sans fondement valable ;
Au sujet du troisième moyen :
Attendu que le pourvoyant en cassation reproche à l'arrêt objet du recours le manque de motivations qui est équivalent au défaut de motivations, puisque le pourvoyant en cassation a soulevé des arguments juridiques consistant à ce que les pourvus en cassation n'ont pas établi la matérialité de l'accident par une preuve juridique, en plus de défaut de responsabilité de l'Etat, de l'établissement de la responsabilité du conducteur de la voiture à bord de laquelle se trouvait la victime ;
De même que le pourvoyant en cassation a invoqué que les dédommagements jugés sont trop excessifs, mais que la cour a répondu à ces arguments d'une façon générale sans indiquer le motif de leur rejet
Mais attendu, d'une part, que la cour s'était basée pour établir la matérialité de l'accident sur le procès verbal de la police judiciaire qui a constitué dans cette affaire une preuve écrite comme indiqué lors de la réponse au premier moyen invoqué ;
Attendu, d'autre part, que la cour comme signalé lors de la réponse au deuxième moyen invoqué s'était basée pour apprécier la responsabilité sur ce qui lui a été établi concernant le fait que l'accident est survenu directement de l'explosion d'une mine et qu'il n'y a pas de doute que c'est l'Administration qui l'avait posée sans qu'il y ait aucun signal d'interdiction d'y accéder ;
Attendu, en troisième lieu, que le simple fait d'invoquer la non-réponse quant à l'argument d'exagération dans l'évaluation des dédommagements, est un motif valable pour ce qui est du ressort de l'appréciation des juges du fond, d'autant qu'il s'agit d'un simple dédommagement moral ;
Le moyen invoqué, avec toutes ses sections, est alors dépourvu de fondement ;
PAR CES MOTIFS
La Cour Suprême rejette la requête et condamne aux dépens le pourvoyant en cassation.
Ainsi rendu l'arrêt et prononcé en l'audience publique tenue à la date sus-indiquée, en la salle ordinaire des audiences de la Cour Suprême de Rabat, par la Cour composée de:
F M. Mohamed Montassir Daoudi, Président de la Chambre Administrative,
F MM. Mustapha Moudaraa, Mohamed Bouramdane et Saadia Belmir, Ahmed Dinia,conseillers,
F en présence de M. Abdelhamid Lahrichi, avocat général
F et avec l'assistance de M. Aa Ab, secrétaire greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : A662
Date de la décision : 03/10/1996
Chambre administrative

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1996-10-03;a662 ?
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