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04/01/1996 | MAROC | N°A1

Maroc | Maroc, Cour suprême, 04 janvier 1996, A1


Texte (pseudonymisé)
Arrêt nº1
Du 04 Janvier 1996
Dossier n° 10267/94
Excès de pouvoir - violation de la force de chose jugée.
L'Administration ne peut pas se fonder sur les mêmes actes et faits qui ont été déclarés non établis par le tribunal et au sujet desquels la justice répressive a ordonné l'acquittement du requérant la méconnaissance de la force de la chose jugée par l'administration entache sa décision de radiation de l'intéressé des cadres de la gendarmerie royale, d'inégalité.
AU NOM DE SA MAJESTE LE ROI
La Cour,
Après délibération conformément à la loi;

Attendu que monsieur Ab A Ben Ac sollicite, à cause de l'abus du pouvoir, d'annuler la décision p...

Arrêt nº1
Du 04 Janvier 1996
Dossier n° 10267/94
Excès de pouvoir - violation de la force de chose jugée.
L'Administration ne peut pas se fonder sur les mêmes actes et faits qui ont été déclarés non établis par le tribunal et au sujet desquels la justice répressive a ordonné l'acquittement du requérant la méconnaissance de la force de la chose jugée par l'administration entache sa décision de radiation de l'intéressé des cadres de la gendarmerie royale, d'inégalité.
AU NOM DE SA MAJESTE LE ROI
La Cour,
Après délibération conformément à la loi;
Attendu que monsieur Ab A Ben Ac sollicite, à cause de l'abus du pouvoir, d'annuler la décision prise par Monsieur le Premier Ministre, le 23/10/1992, sous le nº6631/11141, portant radiation de l'intéressé des cadres de la Gendarmerie Royale, lequel dès réception de la décision, en date du 13/05/1994, il a formulé un recours en grâce auprès de Monsieur le Commandant en Chef de la Gendarmerie Royale, sollicitant de renoncer à ladite décision, lequel recours est resté sans suite. Il a précisé dans sa requête qu'il s'était engagé dans les cycles de la Gendarmerie Royale en 1980, qu'il avait toujours accompli son devoir avec dévouement et fidélité conformément au serment prêté par lui, qu'il a été accusé injustement et sans nul motif valable d'avoir participé au trafic du Kif et du C et qu'un jugement a été prononcé à son encontre par le tribunal de première instance de Rabat, le 27/05/1992, l'ayant condamné;
Au niveau de l'appel, la Cour d'Appel a annulé le jugement précité et a déclaré son acquittement total de toutes les charges retenues à son encontre tel qu'il ressort du dossier correctionnel nº2593/92, mais qu'en dépit de ceci, il fut surpris de la décision de sa radiation des cadres de la Gendarmerie Royale;
Attendu que le requérant reproche la décision dont l'annulation est sollicitée le fait d'avoir violé la force de la chose jugée, car on ne peut pas le condamner à une peine pour un fait dont il fut innocenté par la justice, d'autant que la Cambre Administrative près la Cour Suprême avait fait plusieurs jurisprudences en pareilles matières;
Attendu que dans ses conclusions de réponse, l'Administration avait invoqué dans ses arguments en la forme l'irrecevabilité de la requête du fait que la décision prise à l'encontre du requérant était pertinente et justifiée par les actes et la conduite de l'auteur qui n'étaient par conformes à la profession à laquelle il appartenait, à savoir le corps de la Gendarmerie Royale, qui exige une série de conditions et de qualités de discipline, de bonne moralité, de sérénité, d'honnêteté et de droiture, auxquelles le requérant ne répondait pas et qui s'adonnait au trafic de stupéfiants;
En ce qui concerne l'argument invoqué, en la forme, par l'Administration portant sur l'irrecevabilité de la requête :
Attendu que l'Administration a soulevé l'irrecevabilité de la requête puisque le requérant a formulé son recours en grâce à une autorité non habilitée, que la demande a eu donc lieu hors du délai légalement imparti, d'autant que la décision objet du recours a été prise par Monsieur le Premier Ministre sur la base du Dahir chérifien n°1-92, du 09/10/1992, portant délégation de pouvoirs concernant l'Administration de la Défense Nationale à laquelle appartient le requérant, alors que celui-ci avait introduit son recours au Commandant en Chef de la Gendarmerie Royale;
Mais attendu que d'autre part, les actions en annulation sont entamées contre des décisions et non pas contre des personnes;
Attendu qu'en conséquence, le fait d'adresser le recours en grâce à une autorité administrative autre que celle ayant pris la décision à annuler, ne signifie pas que ce recours n'est pas recevable, mais celui-ci produit ses effets de droit au même titre que s'il a été adressé à l'instance administrative concernée;
Attendu que, d'autre part, la lettre objet du recours en grâce date du 08/06/1994,et que le recours en annulation porte la date du 08/08/1994, que rien n'obligeait le requérant à attendre la réponse de l'Administration concernant son recours avant d'entamer son action en annulation, que ceci implique que la demande avait été présentée dans le délai légalement prévu et qu'il convient alors de dire que l'argument soulevé par l'Administration n'est pas pertinent;
Quant à la légalité de la décision objet du recours :
Attendu qu'il a été établi au vu des pièces du dossier et de la reconnaissance de l'Administration elle-même que le requérant poursuivi pour le délit de trafic de Kif et de C et qui fut condamné au niveau du premier ressort, a fait l'objet d'un arrêt correctionnel au niveau de l'appel, en date du 11/06/1992, dans le dossier n°2593/1992, prononcé par la cour d'appel de Rabat, ayant annulé le jugement de première instance dans sa partie portant sa condamnation et après évocation, la cour a déclaré son acquittement des faits lui ayant été reprochés;
Attendu que puisque la juridiction correctionnelle l'a acquitté des charges retenues à son encontre, l'Administration n'aurait pas dû se baser sur les mêmes faits et actes pour rendre sa décision objet du recours, laquelle décision portait radiation de l'intéressé des cadres de la Gendarmerie Royale;
Attendu que le non respect par l'Administration de la force de la chose jugée découlant de l'arrêt correctionnel d'appel sus-indiqué et sa persistance à condamner le requérant malgré la preuve de son acquittement des faits qui lui ont été attribués, rend la décision de l'Administration entachée d'abus du pouvoir et par conséquent passible d'annulation ;
PAR CES MOTIFS
La Cour Suprême annule la décision objet du recours.
Ainsi rendu l'arrêt et prononcé en l'audience publique tenue à la date sus-indiquée, en la salle ordinaire des audiences de la Cour Suprême de Rabat, par la Cour composée de :
M. Montassir DAOUDI, Président de la Chambre Administrative,
MM. Mustapha MOUDARRAA, Mohamed BOURAMDANE et Saadia BELMIR, Ahmed DINIA conseillers,
en présence de M. Abdelhamid LAARICHI, avocat général
et avec l'assistance de M. Aa B, secrétaire greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : A1
Date de la décision : 04/01/1996
Chambre administrative

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1996-01-04;a1 ?
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