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30/11/1995 | MAROC | N°A515

Maroc | Maroc, Cour suprême, 30 novembre 1995, A515


Texte (pseudonymisé)
Arrêt n°515
Du 30 novembre 1995
Dossier nº9/95
Expropriation pour utilité public - plein contentieux.
Compétence de la juridiction globale dans le domaine de l'expropriation, de l'indemnisation et l'autorisation de prendre possession moyennant paiement ou consignation de dédommagement de réserve;
AU NOM DE SA MAJESTE LE ROI
La Cour,
Après délibération conformément à la loi ;
Attendu que Monsieur Ad Ab Ac B sollicite, à cause de l'excès du pouvoir l'annulation du décret n°2.94.277, rendu le 24 mai 1994 publié au bulletin officiel n°4262, portant déclar

ation d'expropriation pour utilité publique en vue de créer un lotissement pour habitat à ...

Arrêt n°515
Du 30 novembre 1995
Dossier nº9/95
Expropriation pour utilité public - plein contentieux.
Compétence de la juridiction globale dans le domaine de l'expropriation, de l'indemnisation et l'autorisation de prendre possession moyennant paiement ou consignation de dédommagement de réserve;
AU NOM DE SA MAJESTE LE ROI
La Cour,
Après délibération conformément à la loi ;
Attendu que Monsieur Ad Ab Ac B sollicite, à cause de l'excès du pouvoir l'annulation du décret n°2.94.277, rendu le 24 mai 1994 publié au bulletin officiel n°4262, portant déclaration d'expropriation pour utilité publique en vue de créer un lotissement pour habitat à Af C Ae, préfecture de Ag Ah, et désignation des parcelles de terrain nécessaires à cet effet, y compris le terrain objet du titre foncier n°03.64.151; Il a fondé son recours sur les cinq motifs cités dans sa requête, sollicitant d'annuler le décret en question ;
Attendu que l'agent judiciaire du Royaume à répondu par un mémoire dans lequel il précise qu'il représente le premier Ministre et le Ministre de l'Habitat pourvus en cassation et a sollicité de rejeter le recours ;
En ce qui concerne le deuxième moyen pour sa priorité :
Attendu que le requérant reproche au décret individuel objet du recours en annulation sa violation de l'article premier du décret réglementaire nº2.82.382, du 16/04/1983 portant application de la loi nº7/81 relative à l'expropriation pour utilité publique, car le décret objet du recours n'indique pas qu'il a été pris sur proposition du Ministre concerné ;
Cependant, attendu qu'il résulte des pièces du dossier que le décret pourvu en cassation prévoit dans son préambule qu'il a été pris sur proposition du Ministre de l'Habitat et que le motif n'était donc pas conforme à la réalité ;
En ce qui concerne le premier moyen :
Attendu que le requérant reproche au décret objet du recours en annulation le fait qu'il ne repose sur aucun fondement valable, car le décret se réfère à un projet de décret qui a déjà été annulé par la cour Suprême, en vertu de son arrêt objet du dossier administratif n°91-10132, du 04/06/1992, pour le fait que ledit projet n'a pas été pris sur proposition du Ministre concerné; Le décret objet du recours est donc sans fondement puisqu'il repose sur un projet de décret annulé ;
Mais, attendu qu'en plus du fait que l'arrêt de la Cour Suprême invoqué ne concerne qu'un recours portant sur l'expropriation d'un autre terrain appartenant à une personne autre que le requérant, rien dans la loi n'empêche l'Administration de rattraper le vice de forme ayant affecté le projet de décret pour le fait de ne pas avoir été pris sur consultation de la partie concernée, et rien n'empêche alors l'Administration de redresser la situation dans le décret définitif tel le cas en la présente affaire, puisque le décret attaqué prévoit la mention sus-indiquée comme précisé dans la réponse au moyen précité ;
D'autant plus que tant que le requérant ne conteste pas la véracité de toutes les autres mesures de forme sur lesquelles repose le décret objet du recours en annulation, tout ce qu'il invoque demeure sans effet et le motif est alors dépourvu de fondement ;
En ce qui concerne le quatrième motif :
Attendu que le requérant reproche à l'arrêt objet du recours en annulation le défaut d'utilité publique sur laquelle le décret a été fondé, car celui-ci indique que l'objectif de l'expropriation consiste à réaliser un lotissement, alors que le requérant est en mesure de réaliser le même projet au lieu de l'Administration, d'autant qu'il avait déjà préparé un projet touristique sur la parcelle de terrain expropriée et qu'il était possible que son projet aurait pu réaliser une utilité meilleure ;
Mais, attendu qu'il résulte de la révision du décret objet de l'annulation que l'utilité publique sur la base de laquelle il a été décidé de procéder à l'expropriation de la parcelle de terrain appartenant au pourvoyant consiste en la réalisation d'un lotissement d'habitat à Af C Ae, préfecture de Skhirat ;
Attendu que même si on suppose que le requérant avait l'intention de créer un projet touristique sur la parcelle de terrain expropriée, l'utilité publique recherchée demeure au dessus de toutes considérations personnelles tant que l'Administration avait respecté et observé les assises de cette utilité, ne s'en était pas écartée et n'avait pas dévié lors de l'usage de son pouvoir dans ce domaine; Le but de l'Administration n'était pas de priver le requérant de son terrain pour des objectifs autres que l'utilité publique pour laquelle l'expropriation a eu lieu ;
Le motif allégué est alors sans fondement ;
En ce qui concerne le troisième motif :
Attendu que le requérant reproche au décret objet du recours en annulation le fait de ne pas avoir observé le principe de l'égalité, puisque deux propriétaires de deux parcelles de terrains voisinant celle du requérant ont été autorisés à réaliser deux projets touristiques, que l'un d'eux a même quasiment achevé les travaux de constructions et que l'exception des terrains de ses deux voisins de l'expropriation porte atteinte au principe d'égalité entre les citoyens ;
Cependant, attendu que le fait pour l'Administration de se passer de certaines parcelles de terrains à exproprier au profit de certains propriétaires et le maintien d'autres terrains ne signifie pas qu'elle a violé le principe de l'égalité entres les citoyens, mais qu'elle a plutôt exercé son pouvoir discrétionnaire dans la détermination de ses besoins réels en terrains nécessaires pour réaliser des objectifs d'intérêt général qu'elle cherche à concrétiser, sauf s'il a été établi que l'Administration s'était passée de certaines parcelles de terrain nécessaires et importantes pour la réalisation de son projet et que son objectif réel était de priver des propriétaires de leurs terres bien qu'elle n'en avait pas besoin pour atteindre l'intérêt général escompté, mais qu'elle entendait par son acte réaliser une spéculation sur la différence entre le prix d'achat et le prix de vente au détriment de l'intérêt des propriétaires en question; Or, ceci n'a pas été établi en la présente affaire ;
Il convient donc de dire que le motif invoqué est sans effet.
En ce qui concerne le cinquième motif :
Attendu que le requérant reproche au décret attaqué le fait d'avoir violé les dispositions de l'article 2 de la loi nº7-81 relative à l'expropriation pour utilité publique, lequel article prévoit qu'on procède à l'expropriation par jugement judiciaire, alors que le décret objet du recours prévoit l'expropriation sur la base de ce qui a été soulevé ci-dessus des parcelles de terrain désignés dans le tableau selon l'article premier du décret; Ceci constitue un empiètement sur les attributions du pouvoir judiciaire et un excès du pouvoir ;
Cependant, attendu que la compétence de la juridiction globale en matière d'expropriation pour utilité publique (Articles 18 et 19 de la loi 7-31) consiste en la compétence de juger le transfert de la propriété, d'en déterminer l'indemnisation, de donner l'autorisation de prise de possession moyennant paiement ou dépôt de consignation de réserve, tel que le précisent les articles précités et que rien dans le décret objet du recours en annulation n'indique sous quelque forme que ce soit l'exercice de l'une des attributions judiciaires sus-mentionnées et que ce qui a été prévu par ledit décret ne dépasse pas les domaines de compétence de l'Administration au niveau de la déclaration d'utilité publique et de la désignation des biens immobiliers nécessaires à cet effet; Ce qui a été soulevé par le requérant concernant le dépassement de la compétence ne repose en conséquence sur aucun fondement valable ;
PAR CES MOTIFS
La Cour Suprême rejette la requête.
Ainsi rendu l'arrêt et prononcé en l'audience publique tenue à la date sus-indiquée, en la salle ordinaire des audiences de la Cour Suprême de Rabat, par la Cour composée de:
F M. Mohamed Montassir DAOUDI, Président de la Chambre,
F M. Mohamed EL KHATTABI,Mustapha MouDARAA, Saadia BELMIR et Mohamed BOURAMDANE, conseillers,
F en présence de M. Abdelhamid LAAHRICHI, avocat général
F et avec l'assistance de M. Aa A, secrétaire greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : A515
Date de la décision : 30/11/1995
Chambre administrative

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1995-11-30;a515 ?
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