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09/11/1995 | MAROC | N°A471

Maroc | Maroc, Cour suprême, 09 novembre 1995, A471


Texte (pseudonymisé)
Arrêt n°471
Du 09 novembre 1995
Dossier nº10309/93
Dahir du 2 Mars 1973 - Champ d'application.
Mutation de propriété de biens soumis au Dahir du 02 mars 1973 au profit de l'Etat marocain.
Le simple fait qu'un bien immobilier ou une partie de ce bien se trouve hors du périmètre urbain ne constitue pas une preuve suffisante que c'est une propriété agricole ou destinée à l'agriculture pour qu'elle soit soumise aux dispositions du Dahir du 2 mars 1973. Si l'Administration n'établit pas l'existence de cette condition, sa décision de le soumettre aux dispositions de la lo

i précitée serait alors entachée d'excès du pouvoir.
Article 1 du Dahir du ...

Arrêt n°471
Du 09 novembre 1995
Dossier nº10309/93
Dahir du 2 Mars 1973 - Champ d'application.
Mutation de propriété de biens soumis au Dahir du 02 mars 1973 au profit de l'Etat marocain.
Le simple fait qu'un bien immobilier ou une partie de ce bien se trouve hors du périmètre urbain ne constitue pas une preuve suffisante que c'est une propriété agricole ou destinée à l'agriculture pour qu'elle soit soumise aux dispositions du Dahir du 2 mars 1973. Si l'Administration n'établit pas l'existence de cette condition, sa décision de le soumettre aux dispositions de la loi précitée serait alors entachée d'excès du pouvoir.
Article 1 du Dahir du 2 mars 1973.
AU NOM DE SA MAJESTE LE ROI
La Cour,
Après délibération conformément à la loi ;
Attendu que MM. Ag Ac et consorts dont les noms figurent sur leurs requête qu'ils ont présenté en date du 07/04/1993, dans laquelle ils sollicitent, pour excès du pouvoir, d'annuler l'arrêté interministériel pris le 14/08/1973, par les ministres de l'Intérieur, de l'Agriculture et des Finances sous le nº846-73, publié au bulletin officiel le 18/08/1973, en vertu duquel la parcelle de terrain appartenant aux requérants dans l'indivis, dite " Tabla", objet du titre foncier nº11776, a été désignée parmi les terrains dont la propriété a été mutée au profit de l'Etat en vertu du Dahir du 2 mars 1973 ;
Les requérants invoquent que leur terrain précité n'a jamais été à caractère agricole ni susceptible d'être agricole, mais qu'il se trouve au sein d'une zone d'habitat de Af et se compose de plusieurs lotissements depuis plus de cinquante ans ;
Les requérants ont produit quatre actes concernant des ventes des parcelles dudit terrain extraites en tant que lotissement destiné à la construction de logements;
Le plus ancien de ces actes date du mois d'août 1932 et le plus récent date du mois de mars 1933 ;
De même que les requérants ont invoqué une photocopie du Bulletin Officiel sur lequel a été publié l'arrêté objet du recours en annulation et une attestation délivrée par le Conservateur de la Propriété Foncière de Casablanca ;
Attendu que Monsieur l'agent judiciaire du Royaume, agissant sur la base d'une délégation écrite, a répondu, au nom de MM. les Ministres dont l'arrêté est objet du recours en annulation, que les superficies vendues en vertu des quatre actes invoqués par les requérants ne dépassent pas dans l'ensemble 5785 mètres carrés sur un total de 17 hectares environ qui représentent la superficie globale du terrain en litige, que ceci n'est pas susceptible de faire perdre au terrain en question son aspect agricole, ni de le rendre à usage d'habitat ;
La règle en est que le procès verbal initial de la propriété qui demeure la meilleure preuve pour confirmer ou infirmer le caractère agricole de la propriété;
Ainsi, si on se réfère au procès verbal descriptif dressé au cours de la saison agricole 72-73, on constate que la superficie agricole ensemencée était de l'ordre de 12 hectares; C'est ce qui a été établi aux services techniques compétents du Ministère de l'Agriculture qui avaient procédé à une enquête technique sur les lieux, puisqu'il a été indiqué qu'au vu du procès verbal de prise de possession nº53, du 25 août 1973, le terrain objet du titre foncier nº11775 S se trouvait dans la commune rurale de Dar Bouazza et que la majeure partie de sa superficie était agricole ;
Monsieur l'agent judiciaire du Royaume a produit à cet effet une photocopie de la lettre du Directeur Provincial de l'Agriculture de Casablanca, sous le nº1891, en date du 12/10/1993, ainsi qu'une photocopie de la lettre émanant de l'Ingénieur Chef du Service Topographique de Ab Ah, Ae Ad, Casablanca sous le n°431, du 24/09/1993 et des photocopies d'autres documents au nombre de 12 qui représentent, selon Monsieur l'agent judiciaire du Royaume, un procès verbal de délimitation du terrain en litige et de sa nature, tout en faisant remarquer que le terrain en question n'est transformée en zone d'habitat qu'en 1985, c'est à dire l'année au cours de laquelle le plan d'aménagement de la Wilaya du Grand Casablanca, a vu le jour ;
Les requérants ont répliqué par la confirmation de la teneur de leur requête ;
En ce qui concerne la légalité de l'arrêté objet du recours :
Vu l'article premier du Dahir du 2 mars 1973 relatif au transfert de la propriété des biens immobiliers agricoles ou destines à l'agriculture appartenant à des étrangers au profit de l'Etat, se trouvant totalement ou partiellement hors des périmètres urbains, appartenant à des personnes étrangères physiques ou morales ;
Attendu qu'il résulte de l'article sus-indiqué que parmi les conditions à remplir pour une propriété soumise au Dahir du 2 mars 1973 précité, celle consistant à ce que la propriété en question soit agricole ou susceptible de l'être;
Attendu que les 12 pièces invoquées par l'Administration dont un procès verbal portant délimitation du bien immobilier et description précise ne sont autres que des photocopies ne revêtant aucun aspect officiel et ne comportant aucune signature des services qui les avaient émis; Les énonciations qui y sont consignées n'ont donc pas d'effets sur le litige ;
Attendu, d'autre part, que la photocopie du procès verbal relatif à la situation et la possession de la propriété en litige, dressé sous le nº53, ne comporte que des renseignements succincts et des indications limitées portant sur le bien objet du titre foncier nº11775/S qui appartenait au pourvoyant ;
Attendu qu'en outre, la lettre nº1891 adressée par le Délégué régional de l'Agriculture de Casablanca à Monsieur le Ministre de l'Agriculture ne repose, à son sens, sur aucune enquête technique effectuée sur les lieux comme le prétend l'Administration, mais c'est plutôt une simple réponse fondée totalement sur un procès verbal de bornage de la propriété indiquée dans l'attendu antérieur ;
Il s'agit d'un procès verbal nul comme démontré ci-dessus et tout ce qui repose sur un fondement nul est nul ;
Attendu, d'autre part, que le troisième document invoqué, c'est à dire la lettre nº431, expédiée le 24/09/1983 par l'Ingénieur chef des Services Topographiques de Ab Ah Ae Ad, Casablanca, indique seulement qu'une partie du terrain objet du litige se trouve dans le périmètre urbain de Casablanca et qu'une partie est hors de ce périmètre, selon le décret publié au Bulletin Officiel n°3091, du 26/01/1972, mais n'indique pas si le terrain objet du titre foncier n°11776/S est agricole, susceptible de l'être ou pas à la date de promulgation l'arrêté objet du recours, car le simple fait qu'une propriété ou une partie de cette propriété se trouve hors du périmètre urbain ne constitue pas une preuve suffisante qu'il s'agit d'une propriété agricole ou destinée à l'agriculture ;
Le document sus-mentionné reste alors sans effet en l'action ;
Attendu qu'il résulte de ce qui a été exposé ci-dessus que l'arrêté interministériel objet du recours a violé les dispositions de l'article premier du Dahir du 02 mars 1973, lorsqu'il a inclus le terrain des requérants, objet du titre foncier nº11776/S parmi les terrains dont la propriété doit être transférée à l'Etat bien que l'une des conditions ne se trouvent pas remplies tel que prévu par l'article premier précité, c'est à dire que le terrain soit agricole ou destinée a l'agriculture; Or, ceci n'a pas été prouvé par l'Administration et rend donc son arrêté entaché d'excès du pouvoir.
PAR CES MOTIFS
La Cour Suprême annule l'arrêté interministériel objet du recours.
Ainsi rendu l'arrêt et prononcé en l'audience publique tenue à la date sus-indiquée, en la salle ordinaire des audiences de la Cour Suprême de Rabat, par la Cour composée de:
F M. Maxime AZOULAY, Président de la Chambre Administrative,
F M. Mohamed MONTASSIR DAOUDI, Mohamed EL KHATTABI, Mustapha MouDARAA, Mohamed BOURAMDANE, conseillers,
F en présence de M. Abdelhamid LAAHRICHI, avocat général
F et avec l'assistance de M. Aa A, secrétaire greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : A471
Date de la décision : 09/11/1995
Chambre administrative

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1995-11-09;a471 ?
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