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30/12/1965 | MAROC | N°C175

Maroc | Maroc, Cour suprême, 30 décembre 1965, C175


Texte (pseudonymisé)
175-65/66 30 décembre 1965 13644
Ab Ac Ag et Ad Ac Ag c/Bouchaïb ben Ahmed ben Aa.a.
Rejet du pourvoi formé contre un arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 30 mars 1963. La Cour.
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, pris de la violation de la loi, notamment des dispositions de l'article 427 du Code des obligations et contrats, et du manque de base légale;
Vu ledit article, aux termes duquel les écritures portant obligation de personnes illettrées ne valent que si elles ont été reçues par notaires ou par officiers publics à ce autorisés.
Attendu qu'il résulte des énonci

ations de la décision des premiers juges et de l'arrêt confirmatif d'appel a...

175-65/66 30 décembre 1965 13644
Ab Ac Ag et Ad Ac Ag c/Bouchaïb ben Ahmed ben Aa.a.
Rejet du pourvoi formé contre un arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 30 mars 1963. La Cour.
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, pris de la violation de la loi, notamment des dispositions de l'article 427 du Code des obligations et contrats, et du manque de base légale;
Vu ledit article, aux termes duquel les écritures portant obligation de personnes illettrées ne valent que si elles ont été reçues par notaires ou par officiers publics à ce autorisés.
Attendu qu'il résulte des énonciations de la décision des premiers juges et de l'arrêt confirmatif d'appel attaqué qu'à la suite d'une réquisition déposée le 11 septembre 1945 à la conservation foncière par Ai Ac Ag, en vue de l'immatriculation d'un terrain sis à Af A Aj, tribu des Ah Ae, qu'il justifiait avoir acquis de son père, suivant acte homologué du 21 juin 1936, Ad et Ab Ac Ag, sours consanguines du requérant, ont fait opposition pour. réclamer les droits indivis qu'elles tiendraient de leur père; qu'à ces fins elles invoquent l'existence d'un accord entre parties, matérialisé par une transaction intervenue le 21 mars 1958, et, ont produit un acte de notoriété du 14 mai 1958 attestant ladite transaction;
Attendu que les demanderesses au pourvoi reprochent aux juges d'appel d'avoir déclaré l'opposition mal fondée aux motifs que la transaction du 21 mars 1958 serait sans valeur par application de l'article 427 du dahir des obligations et contrats, Ai étant illettré bien que sachant signer, alors d'une part, qu'aux termes dudit article ne sont considérées comme illettrées que
les personnes ne sachant pas signer, et, que d'autre part, il est acquis aux débats que l'acte du 21 mars 1958 est revêtu de la signature de Ai Ac Ag;
Mais attendu que par personne illettrée il faut entendre celle qui ne sait ni lire ni écrire, même si elle a appris, par un procédé purement manuel, à tracer son nom.
Que les dispositions restrictives de l'article 427 précité s'appliquent donc à toutes les écritures portant obligation de personnes illettrées, même si ces écritures sont revêtues de la signature de ces dernières, rien dans la loi ne permettant d'établir une distinction entre ceux qui savent tracer leur nom et ceux qui n'ont pas cette faculté; que cet article, qui constitue une exception aux règles générales édictées par les articles précédents sur la force probante des actes sous seing privé, tend à ce que le contenu des actes auxquels interviennent des personnes illettrées soit expliqué à ces dernières, afin qu'elles puissent en prendre une entière et parfaite connaissance avant de donner leur consentement par une déclaration sans équivoque et authentiquement constatée;
Attendu dans ces conditions que la Cour d'appel de Rabat après avoir décidé, par une appréciation de fait qui échappe au contrôle de la Cour suprême, que Ai était illettré, a pu sans encourir les griefs du pourvoi, déclarer que l'acte de transaction signé par lui le 21 mars 1958 était dénué de valeur en vertu de l'article 427 du dahir des obligations et contrats et a ainsi donné une base légale à sa décision;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé;
PAR CES MOTIFS
Rejette le pourvoi.
Président : M. Deltel.__Rapporteur : M. Mendizabal.__Avocat général : M. Ruolt.__Avocats : MM. Benatar, Costa.
Observations
Certains arrêts de la Cour d'appel de Rabat (31 janv. 1939, Rec. 1939 p. 62; 12 mars 1949 Rec. 1950 p. 349, Rev. mar. dr. 1949 p. 98) avaient décidé que «doivent être considérées comme illettrées au sens de l'art . 427 C. obi. Contr. non pas les personnes qui ne savent ni lire ni écrire, mais exclusivement celles qui ne savent pas signer ». Une telle interprétation est contraire à l'esprit du texte et au but poursuivi par le législateur. En effet, le fait pour une personne de savoir tracer son nom ne lui donne pas pour autant la possibilité de vérifier par elle-même le contenu de l'acte qu'elle signe; ce qui importe c'est qu'elle puisse, selon la formule de l'arrêt rapporté, prendre de cet acte une entière et parfaite connaissance avant de donner son consentement. Il convient donc de qualifier d'illettrée la personne qui ne sait ni lire ni écrire même si elle a appris par un procédé purement manuel à tracer son nom.
La même solution avait d'ailleurs déjà été adoptée par un arrêt précédent de la Cour suprême (v. supra arrêt n°14) qui décidait qu'un acte signé d'une personne illettrée ne saurait servir de commencement de preuve par écrit.
Il semble d'autre part que les dispositions de l'art 427 devraient s'appliquer également lorsqu'une personne lettrée en arabe est appelée à donner son consentement à un acte établi en français et vice versa.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C175
Date de la décision : 30/12/1965
Chambre civile

Analyses

PREUVE__Preuve par écrit__Acte sous seing privé__Illettré.

Aux termes de l'article 427 du Code des obligations et contrats les écritures portant obligation de personnes illettrées ne valent que si elles ont été reçues par notaires ou par officiers ministériels a ce autorisé.Par personne illettrée il faut entendre celle qui ne sait ni lire ni écrire, même si elle a appris par un procédé purement manuel à tracer son nom. Les dispositions restrictives de l'article 427 précité s'appliquent donc à toutes les écritures portant obligation de personnes illettrées, même si ces écritures sont revêtues de la signature de ces dernières, rien dans la loi ne permettant d'établir une distinction entre ceux qui savent tracer leur nom et ceux qui n'ont pas cette faculté; cet article qui constitue une exception aux règles générales édictées par les articles précédents sur la force probante des actes sous seing privé tend à ce que le contenu des actes auxquels interviennent des personnes illettrées soit expliqué à ces dernières afin qu'elles puissent en prendre une entière et parfaite connaissance avant de donner leur consentement par une déclaration sans équivoque et authentiquement constatée.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1965-12-30;c175 ?
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