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06/08/1965 | MAROC | N°C242

Maroc | Maroc, Cour suprême, 06 août 1965, C242


Texte (pseudonymisé)
242-64/65 6 août 1965 14 994
Ab Ac Aa Ad et Compagnie d'Assurances Générales.
Rejet du pourvoi formé contre un arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 13 mai 1963.
La Cour ,
SUR LES TROIS MOYENS REUNIS :
Attendu qu'il résulte de la procédure et des énonciations de l'arrêt attaqué (Rabat 15 mai 1963) que dame Aa, ayant été blessée alors qu'elle était au service, comme domestique, des époux Guillaume, a assigné ces derniers, ainsi que la Compagnie d'assurances Générales, en paiement des prestations prévues par la législation sur les accidents du travail;
Attend

u qu'il est reproché à l'arrêt qui, avant dire droit, a ordonné une mesure d'instruct...

242-64/65 6 août 1965 14 994
Ab Ac Aa Ad et Compagnie d'Assurances Générales.
Rejet du pourvoi formé contre un arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 13 mai 1963.
La Cour ,
SUR LES TROIS MOYENS REUNIS :
Attendu qu'il résulte de la procédure et des énonciations de l'arrêt attaqué (Rabat 15 mai 1963) que dame Aa, ayant été blessée alors qu'elle était au service, comme domestique, des époux Guillaume, a assigné ces derniers, ainsi que la Compagnie d'assurances Générales, en paiement des prestations prévues par la législation sur les accidents du travail;
Attendu qu'il est reproché à l'arrêt qui, avant dire droit, a ordonné une mesure d'instruction pour rechercher les circonstances de l'accident et le taux d'invalidité en découlant, d'avoir d'une part admis que le défaut de déclaration régulière de l'accident n'emportait pas nullité de la procédure et que dès lors la juridiction avait été régulièrement saisie dans le cadre de la législation sur les accidents du travail, alors qu'une telle déclaration constitue une formalité substantielle expressément prévue par la loi dont les dispositions sont d'ordre public, et d'avoir d'autre part, non sans se contredire, et en violation du dahir du 25 juin 1927 et dénaturation des conventions passées entre parties, tout en constatant qu'en l'espèce les employeurs n'étaient pas assujettis à la législation sur les accidents du travail et n'y avaient pas adhéré, jugé que la substitution de l'assureur à l'assuré devait être totale, et ainsi mis implicitement à la charge de ce dernier les frais et indemnités résultant de l'accident, au motif que les employeurs s'étaient garantis auprès de la compagnie d'assurances contre les accidents du travail dont leurs domestiques pourraient être victimes, alors que, ainsi qu'il était soutenu dans des conclusions demeurées sans réponse, les employeurs ne pouvaient s'engager à titre
bénévole qu'à concurrence de leurs engagements en souscrivant volontairement une police d'assurance, et que la victime ne bénéficiait pas des stipulations contractuelles, et en tous cas n'en pouvait bénéficier que dans la mesure de leurs prévisions;
Mais attendu d'une part que c'est à bon droit que la Cour d'appel a déclaré que le défaut de déclaration ne saurait emporter, faute de disposition légale le prévoyant, une déchéance quelconque du droit de la victime de réclamer paiement des indemnités auxquelles elle pouvait prétendre, dès lors que tous renseignements utiles concernant l'accident pouvaient être réunis par ailleurs;
Attendu d'autre part que l'arrêt relève que, suivant contrat en cours de validité lors de l'accident, les employeurs s'étaient garantis auprès de la Compagnie d'Assurances Générales contre les risques d'accidents du travail dont leurs domestiques pourraient être victimes, l'article 1er de ce contrat stipulant que cette garantie couvrait les risques mis à la charge des employeurs par la législation sur les accidents du travail;
Attendu que, de ces constatations, les juges du second degré ont pu, répondant ainsi aux conclusions prises, hors de toute dénaturation et par une exacte application de l'article 4 bis du dahir du 25 juin 1927 permettant aux employeurs non assujettis d'adhérer à la législation sur les accidents du travail, déduire que l'assureur ne pouvait échapper à l'obligation légale qui lui incombait de supporter les frais et indemnités résultant de l'accident, exactement comme si ladite législation était applicable, dès lors que la victime consentait à être indemnisée sur ces bases, et que par suite, nonobstant le fait que le salaire annuel déclaré était inférieur à celui réellement perçu, la substitution de l'assureur à l'assuré devait être totale, la loi disposant qu'aucune déchéance ne peut être opposée par l'assureur à la victime, même pour insuffisance d'assurance;
D'où il suit qu'aucun des moyens ne peut être accueilli;
PAR CES MOTIFS
Rejette le pourvoi.
Président : M. Bourcelin.__Rapporteur : M. Morère.__Avocat général : M. Guillot.__Avocats : MM. Tsaros, Petit, Sabas.
Observations
I.-Tout accident du travail doit être déclaré dans les 48 heures par l'employeur ou par son préposé, dans les formes prévues à l'art. 16 Dh. 25 juin 1927 tel que modifié en la forme par Dh. 6 fév. 1963. Cette obligation est sanctionnée pénalement par l'art. 352 dudit dahir. D'autre part, la victime peut faire la même déclaration pendant un délai de 2 ans, c'est-à-dire jusqu'à l'expiration de la prescription de son action en réparation forfaitaire (art. 15).
Sous réserve de la prescription, l'absence de déclaration n'entraîne pas l'irrecevabilité de cette action. En effet, l'employeur ne saurait échapper à son obligation en invoquant sa propre faute, et la victime ne peut se voir reprocher de n'avoir pas accompli une formalité que la loi ne lui impose pas (V. dans le même sens : Civ. 18 mars 1903 et 4 août 1906, D.C. 1904.161).
II.-Les gens de maison autres que ceux «dont la fonction principale est d'assurer la conduite
d'un véhicule automobile» ne bénéficient pas de plein droit de la législation sur la réparation des accidents du travail (art. 8 Dh. 6 fév. 1963 susvisé). Toutefois, aux termes de l'art. 1 Dh. 25 juin 1927
«concernant la faculté d'adhésion à la législation sur les accidents du travail», tout employeur non assujetti à cette législation peut se placer volontairement sous le régime de celle-ci «pour tous les accidents qui surviendraient à ses ouvriers, employés ou domestiques, par le fait ou à l'occasion du travail ». Cette adhésion doit en principe être déclarée par l'employeur et acceptée par le salarié dans les formes prévues aux articles 1 et 2 dudit dahir. Mais même en l'absence de ces formalités, la souscription par l'employeur d'un contrat d'assurance couvrant les risques d'accident du travail dont ses ouvriers, employés ou domestiques peuvent être victimes, emporte obligation pour l'assureur de supporter les frais et indemnités résultant de l'accident exactement comme si la législation sur la réparation des accidents du travail était applicable; cette obligation n'existe cependant qu'à la double condition que le contrat d'assurance prévoie que l'indemnisation pourra être effectuée sur la base de cette législation et que la victime accepte d'être indemnisée sur cette base (art. 4 bis ajouté au Dh. 25 juin 1927 par Dh. 26 août 1941).
III.-Il résulte de l'arrêt rapporté que lorsque ces deux conditions sont réunies, et nonobstant les clauses contraires du contrat d'assurance, le Dh. 6 fév. 1963 se trouve applicable en toutes ses dispositions et notamment en son art. 234 aux termes duquel «l'assureur est substitué à l'employeur même insuffisamment assuré, pour le service de la totalité de la rente », sauf recours de l'assureur contre lui.
Malgré les termes dudit arrêt l'insuffisance d'assurance ne doit pas être confondue avec la déchéance (v. Rép. civ. V° Assurances terrestres, n. 704 et 705); mais, même s'il s'était agi d'une déchéance, l'assureur, par application de l'art. 341 Dh. 6 fév. 1963, n'aurait pu l'opposer à la victime (v. supra note sous l'arrêt n°119).


Synthèse
Numéro d'arrêt : C242
Date de la décision : 06/08/1965
Chambre civile

Analyses

1°ACCIDENT DU TRAVAIL-Défaut de déclaration-Action en réparation-Recevabilité .2°ACCIDENT DU TRAVAIL-Employeur non assujetti-Adhésion volontaire-Assurances-Obligations de l'assureur.3° ACCIDENT DU TRAVAIL-Assurances-Insuffisance-Salaire déclaré inférieur au salaireréel-Inopposabilité à la victime.

1° Le défaut de déclaration d'un accident du travail ne prive pas la victime du droit de réclamer la réparation forfaitaire de sont préjudice.2° Lorsqu'un patron non assujetti à la législation sur la réparation des accidents du travail a néanmoins souscrit une police d'assurances couvrant les risques mis à la charge des employeurs par cette législation, l'assureur ne peut échapper à l'obligation de réparer, conformément aux dispositions du dahir du 25 février 1927, le dommage subi par la victime, dès lors que celle-ci a consenti à être indemnisée sur cette base.3° Par suite, la substitution de l'assureur doit être totale nonobstant le fait que le salaire déclaré par l'employeur dans le contrat d'assurances était inférieur au salaire réellement versé à la victime.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1965-08-06;c242 ?
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