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29/06/1965 | MAROC | N°C328

Maroc | Maroc, Cour suprême, 29 juin 1965, C328


Texte (pseudonymisé)
328-64/65 29 juin 1965 18 729
Aa Ab Ac Ad c/Banque Commerciale du Maroc.
Cassation d'un arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 25 avril 1964.
La Cour ,
SUR LE MOYEN UNIQUE :
Vu les articles 791, 792, 798, 806 et 807 du Code des obligations et contrats, ensemble l'article 2 du dahir du 18 mai 1959 sur la profession d'avocat;
Attendu que le dépositaire, tenu de restituer au déposant ou à la personne indiquée pour la recevoir, la chose qu'il a reçue, répond de celui qu'il s'est substitué, sans autorisation, dans la garde du dépôt;
Attendu qu'il résulte des énonciat

ions de l'arrêt confirmatif attaqué que dame Aa Ab Ac Ad remit à la Banque Comme...

328-64/65 29 juin 1965 18 729
Aa Ab Ac Ad c/Banque Commerciale du Maroc.
Cassation d'un arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 25 avril 1964.
La Cour ,
SUR LE MOYEN UNIQUE :
Vu les articles 791, 792, 798, 806 et 807 du Code des obligations et contrats, ensemble l'article 2 du dahir du 18 mai 1959 sur la profession d'avocat;
Attendu que le dépositaire, tenu de restituer au déposant ou à la personne indiquée pour la recevoir, la chose qu'il a reçue, répond de celui qu'il s'est substitué, sans autorisation, dans la garde du dépôt;
Attendu qu'il résulte des énonciations de l'arrêt confirmatif attaqué que dame Aa Ab Ac Ad remit à la Banque Commerciale du Maroc, en vue de leur échange contre des actions nouvelles, un certain nombre de titres compris dans un certificat nominatif; que, l'opération accomplie, la banque remit le nouveau certificat à Me O. avocat; que prétendant que ce dernier, à qui elle n'avait donné aucun mandat, avait par erreur adressé ce document à une autre cliente portant le même nom, dame Aa a assigné la banque qu'elle tenait pour responsable de la perte de la chose remise en dépôt;
Attendu que l'arrêt a rejeté la demande aux motifs que si la banque avait commis une erreur en remettant le certificat à une personne sans mandat, cette erreur n'était pas fautive, dame Aa, en laissant subsister sur le premier certificat le cachet de Me O., ayant conféré à ce dernier, qui en sa qualité d'avocat n'avait d'ailleurs pas à justifier de ses pouvoirs, une apparence de mandat, et qu'au surplus l'erreur commise n'était pas la cause directe du dommage;
Or attendu que la Cour d'appel n'a pu ainsi statuer qu'en violation des textes susvisés, dès lors d'une part qu'en laissant subsister sur le certificat le cachet de Me O., dame Aa n'avait pu donner à ce dernier des pouvoirs apparents de nature à tromper la banque, dès lors d'autre part que les avocats ne sont dispensés de justifier de leurs pouvoirs que lorsqu'ils agissent dans l'exercice de leur profession, ce qui n'était pas le cas en l'espèce, et dès lors enfin que la banque dépositaire devait répondre de la faute génératrice du dommage commise par le tiers qu'elle s'était substitué dans l'exécution de ses obligations;
PAR CES MOTIFS
Casse,
Président : M. Bourcelin.__Rapporteur : M. Voelckel.__Avocat général : M. Neigel.__Avocats : MM. Pérez, Razon.
Observations
I.-Le contrat intervenu entre une banque et le client qui lui a confié la garde de ses titres tient à
la fois du dépôt et du mandat (v. Nouv. Rép. V° Banques et établissements financiers, n. 181 et s.). : le banquier a les obligations d'un dépositaire en ce qu'il est tenu notamment de restituer les titres mêmes identifiés par leur numéro, qui lui ont été remis (sauf le cas de compte courant), et ce à tout moment, sur simple demande du client (art. 804 et 794 C. obl. contr.); il a les obligations d'un mandataire dans la mesure où il lui incombe d'encaisser le montant de coupons ou des titres amortis, de souscrire une augmentation de capital ou de vendre les droits correspondants, ou encore, comme en l'espèce, de procéder aux échanges décidés par la société.
Mais, qu'il agisse en qualité de dépositaire ou en qualité de mandataire, le banquier encourt à l'égard de son client une responsabilité identique; en effet, selon l'art. 909 C. obl. contr., le mandataire salarié «répond des choses qu'il a reçues à l'occasion de son mandat d'après les dispositions des art. 791, 792 et 807 relatives à la responsabilité du dépositaire ». Dès lors il était sans intérêt pour la solution du pourvoi que la Cour suprême adopte, comme elle l'a fait en l'espèce, la qualification de dépôt plutôt que celle de mandat.
II.-Aux termes de l'art. 2 Dh. 18 mai 1959 sur l'organisation du barreau et l'exercice de la profession d'avocat, «les foncions de l'avocat consistent :
1° A donner des conseils et des consultations en matière juridique.
2° A assister, défendre et représenter les parties en justice. A cet effet, l'avocat est habilité, sauf exception prévue par la loi, à faire tout acte, à remplir toute formalité, à intervenir dans toute mesure d'instruction et ce sans avoir à produire une procuration.
3° A poursuivre l'exécution des décisions de justice.
Il ne peut, sans pouvoir écrit, dénier l'écriture, déférer le serment, mais il peut, sans pouvoir spécial, faire ou accepter des offres, aveux ou consentement, donner mainlevée de toute saisie et d'une manière générale faire tous actes même comportant l'abandon ou la reconnaissance d'un droit ».
Ces dispositions qui confèrent à l'avocat des pouvoirs plus étendus que ceux accordés aux avoués par la loi française (comp. notamment : Rép. pr. civ. V° Avoué, par Joseph de Lafournière, n. 101; et art. 352 C. proc. civ. Français) sont d'interprétation stricte. Dès lors, comme le rappelle l'arrêt rapporté, c'est seulement lorsqu'il agit dans les limites de ses attributions professionnelles, et encore sous réserve des exceptions prévues à l'art. Susvisé, que l'avocat est dispensé de justifier de son mandat.
III.-Le dépositaire et le mandataire salariés répondent «de toute cause de perte ou de dommage contre laquelle il était possible de se prémunir» (art. 807 C. obl. contr.).
Il convenait donc de décider si la banque aurait pu normalement se prémunir contre l'erreur qui avait consisté pour elle à remettre le nouveau certificat nominatif à un tiers non mandataire de son client, c'est-à-dire de déterminer si elle était ou non fondée à invoquer une apparence de mandat, et plus précisément de rechercher si l'apparence crée par son client était suffisante pour que la banque ait pu légitimement croire à la qualité de mandataire de ce tiers (v. T. I note sous l'arrêt n°56, p. 104). En statuant comme elle l'a fait la Cour suprême a exercé son contrôle sur ce point en fonction des constatations des juges d'appel. Un tel contrôle n'est qu'un cas particulier de celui que le juge de cassation exerce sur l'appréciation de la faute (v. Besson n. 1925).


Synthèse
Numéro d'arrêt : C328
Date de la décision : 29/06/1965
Chambre civile

Analyses

1° BANQUE-Garde de titres-Responsabilité-Certificat nominatif remis à un tiers non mandataire du client.2° MANDAT-Mandat apparent-Constatations insuffisantes.3°AVOCAT-Mandat-Avocat agissant en dehors de l'exercice de sa profession-Procuration nécessaire.

1° Le banquier chargé de la garde des titres de son client répond de leur perte conformément aux dispositions des articles 791, 792 et 807 du Code des obligations et contrats lorsque, après avoir procédé à leur échange, il a remis par erreur à un tiers le certificat nominatif correspondant.2° Les avocats ne sont dispensés de justifier de leur qualité de mandataire que lorsqu'ils agissent dans l'exercice de leur profession.3° L'empreinte du cachet d'un avocat sur un certificat nominatif de titres remis à une banque par un client de celle-ci ne suffit pas à conférer à cet avocat une apparence de mandat.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1965-06-29;c328 ?
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