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03/02/1965 | MAROC | N°C166

Maroc | Maroc, Cour suprême, 03 février 1965, C166


Texte (pseudonymisé)
166-64/65 3 février 1965 13 050
Ae Ac Ad Af Ag c/société «Hans Mehr ».
Rejet du pourvoi formé contre un arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 14 novembre 1962.
La Cour ,
SUR LE MOYEN UNIQUE :
Attendu qu'il résulte de la procédure et des énonciations de l'arrêt confirmatif attaqué (Rabat 12 novembre 1962) que Ag a acheté à la firme Hans Mehr de Hambourg une certaine quantité de cotonnades; que le contrat de vente stipulait dans ses clauses particulières dactylographiées un paiement «contre documents» alors que, selon les stipulations et conditions imprimées au

verso, il était prévu que serait établi dans un délai de dix jours un accréditif i...

166-64/65 3 février 1965 13 050
Ae Ac Ad Af Ag c/société «Hans Mehr ».
Rejet du pourvoi formé contre un arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 14 novembre 1962.
La Cour ,
SUR LE MOYEN UNIQUE :
Attendu qu'il résulte de la procédure et des énonciations de l'arrêt confirmatif attaqué (Rabat 12 novembre 1962) que Ag a acheté à la firme Hans Mehr de Hambourg une certaine quantité de cotonnades; que le contrat de vente stipulait dans ses clauses particulières dactylographiées un paiement «contre documents» alors que, selon les stipulations et conditions imprimées au verso, il était prévu que serait établi dans un délai de dix jours un accréditif irrévocable à défaut duquel le vendeur serait en droit de vendre ailleurs la marchandise au frais de l'acheteur; que Ag n'ayant pas ouvert l'accréditif Hans Mehr l'a assigné en résolution de la vente et en paiement de dommages-intérêts;
Attendu qu'il est reproché à l'arrêt d'avoir, par dénaturation de la convention liant les parties, accueilli cette demande, alors que la mention «paiement contre documents» dérogeant aux clauses imprimées du contrat faisait la loi des parties et qu'il ne pouvait sans contradiction être décidé à la fois que le paiement se ferait comptant contre documents à l'arrivée et qu'il ferait l'objet avant le débarquement d'une traite acceptée et d'un crédit documentaire irrévocable;
Mais attendu que la Cour d'appel relève justement que l'accréditif ne constitue pas le paiement mais une garantie de négociation de la traite qui ne doit être acceptée que contre remise des documents; qu'ayant ainsi constaté qu'il n'existait entre elles aucune contradiction, elle n'a fait qu'appliquer les diverses clauses du contrat dont le sens était clair et précis et qu'elle n'a pas dénaturées;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé;
PAR CES MOTIFS
Rejette le pourvoi.
Président : M. Bourcelin.__Rapporteur : M. Voelckel.__Avocat général : M. Neigel.__Avocats : MM. Hazan, Razon.
Observations
La lettre de change tirée sur l'acheteur par le chargeur vendeur d'une marchandise transportée
par mer, s'appelle «traite documentaire» parce qu'elle est accompagnée de divers documents : le connaissement, la facture et la police d'assurance, auxquels s'ajoutent éventuellement un certificat de qualité, de provenance ou de quantité dressé dans le pays exportateur et constatant l'état de la marchandise à l'embarquement, une facture consulaire indiquant l'origine des marchandises en vue de l'établissement des droits de douane à l'arrivée, les licences d'exportation et d'importation, etc. .
Cette traite peut facilement être escomptée au profit du vendeur puisque la détention des documents qui y sont annexés confère au porteur un gage sur les marchandises qu'il représente, alors que d'autre part la provision est constituée par le prix de vente de ces marchandises (v. Lescot et Roblot, n. 519 et 520).
Les modalités de l'acceptation de cette lettre de change et du paiement par le tiré du prix qui y figure dépendent des clauses du contrat de vente. Lorsque celui-ci contient la clause acceptation contre documents, l'acheteur tiré doit accepter la traite contre remise des documents, après avoir vérifié leur régularité et leur conformité avec les stipulations de la convention conclue entre lui et le vendeur tireur, mais sans pouvoir exiger d'attendre le débarquement des marchandises pour en contrôler la quantité et l'état. Au contraire, la clause paiement contre document permet au tiré de différer son acceptation jusqu'à l'arrivée du navire et à la vérification de la cargaison; mais, contrairement à ce que semble indiquer le dernier «attendu» de l'arrêt rapporté, l'acheteur ne reçoit dans ce cas les documents qu'après paiement effectif de la traite au lieu d'en disposer dès l'acceptation (. Lescot et Roblot n. 522 et s.).
Quel que soit le procédé adopté par les parties, l'opération n'est pas sans risque pour le vendeur
: en effet l'acheteur peut être insolvable ou être tenté de refuser d'exécuter un contrat que la baisse des cours a rendu désavantageux pour lui. C'est pourquoi, afin de garantir le vendeur contre la carence de l'acheteur, les contrats de vente maritime prévoient généralement que ce dernier devra dans un délai déterminé faire ouvrir par une banque un crédit destiné à couvrir le paiement de la traite.
Ce crédit documentaire, appelé parfois «accréditif », est dit révocable lorsque le banquier se réserve le droit de le révoquer en cas de décès, d'incapacité ou de faillite de l'acheteur, voire même en cas d'inquiétudes sur sa solvabilité. Il est dit irrévocable lorsque le banquier s'interdit d'opposer au vendeur les exceptions nées des rapports de banquier à client qu'il a avec l'acheteur, et s'engage à invoquer seulement celles tenant à l'inexécution par le vendeur de ses propres obligations envers l'acheteur, c'est-à-dire celles que l'acheteur pourrait invoquer lui-même (v. Rép. com. V° Crédit documentaire, par Aa Ab, n. 80 et s.).


Synthèse
Numéro d'arrêt : C166
Date de la décision : 03/02/1965
Chambre civile

Analyses

VENTE-Vente maritime-Paiement contre documents-Crédit documentaire-Clauses non contradictoires.

Un crédit documentaire ne constitue pas une modalité de paiement mais une garantie de paiement.Par suite, un contrat de vente peut sans contradiction contenir dans ses conditions particulières une clause de «paiement contre documents », et stipuler dans ses conditions générales que l'acheteur devra ouvrir un accréditif irrévocable faute de quoi le contrat sera résolu à la demande du vendeur.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1965-02-03;c166 ?
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