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25/06/1964 | MAROC | N°P1674

Maroc | Maroc, Cour suprême, 25 juin 1964, P1674


Texte (pseudonymisé)
Rejet du pourvoi formé par Ae Ab contre un jugement rendu le 12 décembre 1963 par le tribunal de première instance de Rabat qui l'a condamnée à 36 dirhams d'amende pour jet d'immondices, à 15 jours d'emprisonnement et 500 dirhams d'amende pour outrage à agent dépositaire de la force publique, ainsi qu'à payer à Ac Ad la somme de 500 dirhams à titre de dommages-intérêts.
25 juin 1964
Dossier n°16502
La Cour,
SUR LES DEUX MOYENS DE CASSATION REUNIS , pris « de la violation de l'article 224 du Code pénal, du manque de base légale et de l'insuffisance de motifs »,

le premier, en ce que le jugement attaqué aurait prononcé une condamnation du ch...

Rejet du pourvoi formé par Ae Ab contre un jugement rendu le 12 décembre 1963 par le tribunal de première instance de Rabat qui l'a condamnée à 36 dirhams d'amende pour jet d'immondices, à 15 jours d'emprisonnement et 500 dirhams d'amende pour outrage à agent dépositaire de la force publique, ainsi qu'à payer à Ac Ad la somme de 500 dirhams à titre de dommages-intérêts.
25 juin 1964
Dossier n°16502
La Cour,
SUR LES DEUX MOYENS DE CASSATION REUNIS , pris « de la violation de l'article 224 du Code pénal, du manque de base légale et de l'insuffisance de motifs »,
le premier, en ce que le jugement attaqué aurait prononcé une condamnation du chef d'outrage
par paroles à agent dépositaire de la force sans constater que la prévenue avait eu conscience du caractère outrageant de ses propos, alors qu'en l'absence d'intention délictuelle l'infraction ne pouvait être retenue;
le second, en ce que ledit jugement se serait borné à constater que l'outrage s'adressait, par delà la personne outragée, à sa fonction elle-même, alors que l'outrage n'est punissable que s'il est commis dans l'exercice ou à l'occasion des fonctions :
Attendu que la décision du tribunal de paix, dont le jugement attaqué adopte les motifs, énonce
que Ac Ad qui n'était pas en service et n'était pas revêtu de son uniforme, mais dont la qualité de gardien de la paix était connue de la prévenue, a été injurié par celle-ci en ces termes :
«Va mettre le tablier que tu portes dans les excréments pour devenir un homme, voilà ce que tu vaux, toi et, ceux qui t'emploient »;
Attendu que les invectives ainsi relatées par les juges du du fond présentent en elles-mêmes un caractère injurieux qui implique normalement l'intention outrageante de leur auteur; que dès lors, en l'absence de conclusions tendant à faire juger que la prévenue ne se serait pas rendue compte de la portée ou du sens de ses paroles, la décision de condamnation n'avait pas à être spécialement motivée sur ce point;
Attendu, d'autre part, que l'outrage est considéré comme commis à l'occasion de l'exercice de l'une des fonctions visées à l'article 224 du Code pénal, soit lorsqu'il est déterminé par un acte de cette fonction, soit lorsque, comme en la cause, par suite d'une invective englobant les supérieurs hiérachiques de la personne outrage il vise et atteint nécessairement la fonction elle-même;
D'où il suit qu'en l'absence de violation dudit article 224 les moyens ne sont pas fondés;
PAR CES MOTIFS
Rejette le pourvoi formé par Ae Ab contre le jugement du 12 décembre 1963 du tribunal de première instance de Rabat.
Président : M. Deltel.-Rapporteur : M. Colombini.-Avocat général : M. Ruolt.-Avocats : MM. Petit, Lanfranchi.
Observations
I.-Sur le premier point.-« L'élément moral de l'outrage consiste, de la part de l'inculpé, dans la volonté ou plutôt dans l'intention d'offenser. Le délit n'est ainsi constitué que par l'esprit d'outrage... Mais il suffit que les paroles, gestes ou menaces aient, par eux-mêmes, un caractère outrageant, pour faire présumer l'intention délictueuse, sans qu'il soit nécessaire de relever expressément cet élément dans le jugement ou l'arrêt de condamnation » (Garraud, 1, t. 4, n°1646; V. dans le même sens, Garçon, Art. 222 à 225, nos 200 s.; Rép. crim, V° Outrage, par Aa Af, nos 73 s, 90).
En l'espèce, les invectives avaient en elles-mêmes, objectivement, un caractère injurieux et outrageant.
Par suite, il appartenait à la prévenue de rapporter la preuve de ce que cette intention coupable n'existait pas et, en l'absence de conclusions sur ce point, le tribunal n'avait pas à motiver spécialement sa décision sur cette intention (Mêmes références).
Il.-Sur le deuxième point.-« L'outrage est reçu à l'occasion ou à raison de la fonction lorsqu'il est déterminé par cette fonction elle-même ou par l'un des actes accomplis par le magistrat ou le fonctionnaire en sa qualité d'homme public » (Garraud,op. Cit, n°1632). Il est évident que lorsque l'outrage englobe les supérieurs hiérarchiques de la personne à laquelle il est adressé, il vise et atteint nécessairement la fonction elle-même.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P1674
Date de la décision : 25/06/1964
Chambre pénale

Analyses

1° INJURE-Eléments constitutifs-Invectives-Intention de nuire-Constatations. 2° OUTRAGE-Outrage envers les personnes revêtues d'un caractère public-Outrage à l'occasion des fonctions-Eléments constitutifs.

1° Lorsque les invectives relatées par les juges du fond présentent en elles-mêmes un caractère injurieux qui implique normalement l'intention outrageante de leur auteur, leur décision de condamnation, en l'absence de conclusions tendaut à faire juger que le prévenu ne se serait pas rendu compte de la portée ou du sens de ses paroles, n'a pas à être spécialement motivée sur ce point.2° L'outrage est considéré comme commis à l'occasion de l'exercice de l'une des fonctions visées à l'article 224 du Code pénal de 1913, soit lorsqu'il est déterminé par un acte de cette fonction, soit lorsque, par suite d'une invective englobant les supérieurs hiérarchiques de la personne outragée, il vise et atteint nécessairement la fonction elle-même.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1964-06-25;p1674 ?
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