La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/07/1963 | MAROC | N°P1451

Maroc | Maroc, Cour suprême, 22 juillet 1963, P1451


Texte (pseudonymisé)
Irrecevabilité partielle et rejet du pourvoi formé par Aa Ab contre un arrêt rendu le 21 mars 1963 par la Chambre d'accusation de la Cour d'appel de Rabat qui, sur renvoi après cassation, l'a renvoyé devant le tribunal régional de Tanger pour abus de confiance.
22 juillet 1963
Dossier n°13313
La Cour,
SUR LA RECEVABILITE;
Attendu que les arrêts d'une Chambre d'accusation renvoyant un inculpé devant une juridiction non criminelle relèvent du contrôle du juge de cassation, soit en la forme, lorsqu'ils ne satisfont pas aux conditions essentielles de leur existence léga

le par suite de la violation de formalités substantielles ou des droits de...

Irrecevabilité partielle et rejet du pourvoi formé par Aa Ab contre un arrêt rendu le 21 mars 1963 par la Chambre d'accusation de la Cour d'appel de Rabat qui, sur renvoi après cassation, l'a renvoyé devant le tribunal régional de Tanger pour abus de confiance.
22 juillet 1963
Dossier n°13313
La Cour,
SUR LA RECEVABILITE;
Attendu que les arrêts d'une Chambre d'accusation renvoyant un inculpé devant une juridiction non criminelle relèvent du contrôle du juge de cassation, soit en la forme, lorsqu'ils ne satisfont pas aux conditions essentielles de leur existence légale par suite de la violation de formalités substantielles ou des droits de la défense, soit au fond, conformément à l'article 574 (alinéa 2) du Code de procédure pénale, en celles de leurs dispositions définitives que la juridiction de renvoi n'aura pas le pouvoir de modifier;
Que dès lors, le pourvoi formé par Grawitz contre l'arrêt infirmatif de la Chambre d'accusation le renvoyant devant le tribunal correctionnel, est recevable en tant que cet inculpé fait grief à l'arrêt
attaqué d'avoir été rendu en violation des droits de sa défense et des règles de procédure relatives à l'instruction de l'affaire; que ce pourvoi se trouve au contraire irrecevable en tant que le demandeur prétend fonder une exception de prescription sur la date de remise des marchandises qui n'est pas nécessairement celle de leur détournement, et conteste sa qualité de mandataire de société Neutan, de tels griefs, mélangés de fait et de droit, visant des dispositions relatives à l'infraction qu'il sera loisible au tribunal correctionnel d'apprécier;
D'où il suit que seuls les deux premiers moyens du demandeur peuvent être examinés;
SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION, pris de la « violation de l'autorité de la chose jugée, des droits de la défense, défaut de motifs et manque de base légale, violation de l'article 219 du Code de procédure pénale, en ce que l'arrêt attaqué ne constate pas que la Chambre d'accusation de la Cour d'appel de Rabat ait statué après notifications à chacune des parties et à son conseil de la date à laquelle l'affaire serait appelée à l'audience, et qu'en fait semblable notification n'a pas eu lieu ».
Attendu que l'article 219 du Code de procédure pénale donne aux parties et à leurs conseils la faculté de produire des mémoires jusqu'à la veille de l'audience de la Chambre d'accusation en permettant à cet effet auxdits conseils de prendre au préalable connaissance du dossier, mais n'édicte aucune obligation de notifier à ces parties ou à leurs conseils la date de l'audience de cette juridiction; qu'il appartient donc à chaque partie de se renseigner sur la marche de la procédure pour pouvoir déposer son mémoire en temps utile, et que seul le fait pour une partie d'avoir été mise dans l'impossibilité d'user de la faculté que lui accorde l'article 219 est de nature à porter atteinte aux droits de sa défense;
Attendu qu'il résulte des pièces de la procédure que le demandeur s'est fait délivrer le 15 mars 1962 par l'intermédiaire de Me Bruno son mandataire, une expédition de l'arrêt de cassation du 15 février 1962 portant renvoi de l'affaire devant la Chambre d'accusation de la Cour d'appel de Rabat; qu'ainsi s'étant en mesure pendant un an de faire prendre connaissance du dossier et de déposer tout mémoire utile jusqu'à la veille de l'audience que cette Chambre d'accusation a tenue le 21 mars 1965 Grawitz ne saurait invoquer une violation des droits de sa défense;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé;
SUR LE SECOND MOYEN DE CASSATION, pris de la « violation de l'autorité de la chose jugée, excès de pouvoir, défaut de motif et manque de base légale, en ce que, par l'arrêt attaqué la Chambre d'accusation de la Cour d'appel de Rabat, statuant sur renvoi après cassation d'un arrêt de la Chambre d'accusation de la Cour d'appel de Tanger qui avait été censuré pour avoir omis de vider le débat dont elle avait été saisie par voie d'appel d'une ordonnance de non-lieu à la suite duquel elle avait ordonné, par un arrêt préparatoire du 8 décembre 1959, un complément d'information, a renvoyé l'inculpé devant le tribunal régional de Tanger pour le motif que ce complément d'information aurait été superfétatoire, alors que la juridiction de renvoi ne pouvait se prononcer qu'au vu du complément d'information précédemment reconnu nécessaire et qu'elle a à tort déclaré inutile en méconnaissance de l'autorité de la chose jugée » :
Attendu que la Chambre d'accusation de la Cour d'appel de Tanger, statuant sur l'appel interjeté par la Société Neutan partie civile contre l'ordonnance de non-lieu intervenue notamment en faveur de Grawitz, avait le 8 décembre 1959 rendu un premier arrêt ordonnant un supplément d'information; que cette décision n'a pas été affectée par l'arrêt de cassation du 15 février 1962 qui ne concernait que l'arrêt prononcé le 30 mai 1961, après exécution dudit supplément d'information dont la Chambre d'accusation de la Cour d'appel de Rabat, désignée comme juridiction de renvoi, a pu prendre connaissance;
Qu'en déclarant que la situation « actuelle » des parties et leur impossibilité de produire d'autres documents probants rendaient superfétatoire « un complément d'information », cette Chambre d'accusation s'est bornée à constater surabondamment l'inutilité d'une nouvelle mesure d'instruction, et n'a fait ainsi qu'user du pouvoir souverain d'appréciation qui lui appartient en la matière, sans encourir les griefs formulés par le demandeur;
Qu'ainsi ce moyen, qui manque partiellement en fait, est inopérant;
PAR CES MOTIFS
Dit le pourvoi partiellement irrecevable; le rejette pour le surplus.
Président : M. Deltel.-Rapporteur : M. Zehler.-Avocat général : M. Ruolt.-Avocats : MM. Bruno, Bayssière.
Observations
I.-Sur les premier et deuxième points.-V. la note sous l'arrêt n°971 du 14 déc. 1961, Rec. Crim. t.3. 57.
II.-Sur le troisième point.-L'art. 219 C. Proc. Pén. Prescrit que :
« Les parties et leurs conseils jusqu'à la veille de l'audience sont admis à produire des mémoires qu'ils communiquent au ministère public et aux autres parties ».
« Pour l'établissement de ces mémoires, les conseils peuvent prendre communication, soit au greffe de la Chambre d'accusation du dossier comprenant les réquisitions du parquet général, soit au cabinet d'instruction de la copie prévue à l'article 86 ».
« Les mémoires sont déposés au greffe de la Chambre d'accusation et visés par le greffier avec l'indication du jour de dépôt ».
L'art. 215 du même Code prévoit que: « La chambre d'accusation se réunit sur convocation de son président ou à la demande du ministère public toutes les fois qu'il est nécessaire » et l'art. 220, que : « Les débats se déroulent sans publicité; la Cour statue en Chambre du conseil, après rapport du conseiller commis et examens des réquisitions écrites déposées par le parquet général et des mémoires produits par les parties ».
Aucun texte ne fait obligation à la Chambre d'accusation de notifier aux parties la date de son audience. Or cette obligation ne peut résulter que de la loi puisqu'il n'appartient qu'au législateur de fixer les formes et le délai des notifications. Ainsi, en France, l'art. 197 C. Proc. Pén, mod. Ordon. 4 juin 1960, prescrit que : « Le procureur général notifie par lettre recommandée à chacune des parties et à son conseil la date à laquelle l'affaire sera appelée à l'audience. La lettre recommandée destinée à une partie est envoyée à son domicile élu ou, à défaut, à la dernière adresse qu'elle a donnée ».
Un délai minimum de quarante-huit heures en matière de détention préventive, et de cinq jours en toute autre matière, doit être observé entre la date de l'envoi de la lettre recommandée et celle de l'audience ».
« Pendant ce délai, le dossier, comprenant les réquisitions du procureur général, est déposé au greffe de la Chambre d'accusation et tenu à la disposition des conseils des inculpés et des parties civiles ».
En l'absence d'une telle disposition dans la législation marocaine aucune notification n'est effectuée et chaque partie doit donc se renseigner elle-même sur la marche de la procédure pour pouvoir déposer son mémoire en temps utile. Seul le fait par une partie d'avoir été mise dans l'impossibilité d'user de la faculté que lui accorde l'art. 219 serait de nature à porter atteinte aux droits de sa défense (V. en ce sens, Le Poittevin, Art. 218, n°34; Comp. en France, Crim. 3 mars 1898, B.C. 95; 28 avr. 1933, B.C. 90; 24 mai 1960, B.C. 279, D. 1960, somm. 111) et entraînerait la cassation de la décision.
III.-Sur le quatrième point.-V. La note sous l'arrêt n°1344 du 7 mars 1963.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P1451
Date de la décision : 22/07/1963
Chambre pénale

Analyses

1° CASSATION-Décisions susceptibles de pourvoi-Chambre d'accusation-Arrêt de renvoi devant une juridiction autre que le tribunal criminel-Pourvoi en cassation-Recevabilité- Conditions.2° CHAMBRE D'ACCUSATION-Arrêt de renvoi devant une juridiction autre que le tribunal criminel-Pourvoi en cassation -Recevabilité-Conditions.3°-CHAMBRE D'ACCUSATION-Procédure-Mémoires des parties et de leurs conseils- Production jusqu'à la veille de l'audience-Obligation de notifier aux parties la date de l'audience (non).4° CHAMBRE D'ACCUSATION-Supplément d'information-Opportunité-Appréciation souveraine .

1° et 2° L'arrêt de Chambre d'accusation renvoyant un inculpé devant une juridiction autre que le tribunal criminel relève du contrôle du juge de cassation, soit en la forme, lorsqu'il ne satisfait pas aux conditions essentielles de son existence légale par suite de la violation de formalités substantielles ou des droits de la défense, soit au fond, conformément à l'article 574, alinéa 2, du Code de procédure pénale, en celles de ses dispositions définitives que la juridiction de renvoi n'aura pas le pouvoir de modifier.Les griefs qui visent les dispositions relatives à l'infraction qu'il sera loisible à la juridiction de renvoi d'apprécier, sont en conséquence irrecevables.3° L'article 219 Code de procédure pénale, s'il donne aux parties et à leurs conseils la faculté de produire des mémoires jusqu'à la veille de l'audience de la Chambre d'accusation en permettant à cet effet auxdits conseils de prendre au préalable connaissance du dossier, n'édicte aucune obligation de notifier à ces parties ou à leurs conseils la date de l'audience de cette juridiction.Il appartient donc à chaque partie de se renseigner sur la marche de la procédure pour pouvoir déposer son mémoire en temps utile et seul le fait pour une partie d'avoir été mise dans l'impossibilité d'user de la faculté que lui accorde l'article 219 est de nature à porter atteinte aux droits de la défense.4° La Chambre d'accusation apprécie souverainement l'opportunité d'ordonner une information complémentaire.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1963-07-22;p1451 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award