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22/05/1963 | MAROC | N°P1389

Maroc | Maroc, Cour suprême, 22 mai 1963, P1389


Texte (pseudonymisé)
Cassation partielle sur les pourvois formés par A B, salières Jean Paul et la compagnie Ag Ak d'Assurances contre un jugement rendu le 18 juin 1962 par le tribunal de première instance de Casablanca.
22 mai 19863
Dossiers n°11634, 11635 et 11636
La Cour,
........................................
SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION, en sa première branche:
Attendu que par la décision confirmative attaquée, A conducteur d'une ambulance appartenant à salières, assuré par la compagnie Ag Ak d'Assurances, a été condamné à 12 dirhams d'amende pour inobservation, à Casab

lanca. d'un signal d'arrêt (feu rouge);
Attendu que les demandeurs invoquent à l...

Cassation partielle sur les pourvois formés par A B, salières Jean Paul et la compagnie Ag Ak d'Assurances contre un jugement rendu le 18 juin 1962 par le tribunal de première instance de Casablanca.
22 mai 19863
Dossiers n°11634, 11635 et 11636
La Cour,
........................................
SUR LE PREMIER MOYEN DE CASSATION, en sa première branche:
Attendu que par la décision confirmative attaquée, A conducteur d'une ambulance appartenant à salières, assuré par la compagnie Ag Ak d'Assurances, a été condamné à 12 dirhams d'amende pour inobservation, à Casablanca. d'un signal d'arrêt (feu rouge);
Attendu que les demandeurs invoquent à l'encontre de cette décision un défaut de réponse à leurs conclusions et une fausse application de l'article 11, dernier alinéa, de l'arrêté viziriel du 24 janvier 1953 qui, selon eux, ne subordonnerait pas à la condition qu'elles soient en service la priorité de passage qu'il accorde aux ambulances;
Attendu que cette priorité est fondée sur l'urgence qui s'attache aux secours à apporter aux malades ou blessés et doit être signalée aux autres usagers de la route au moyen d'un avertisseur spécial; que dès lors qu'ils n'assurent aucun service de secours les conducteurs des ambulances ne peuvent se prévaloir de leur priorité particulière;
Attendu en conséquence, qu'en condamnant A pour inobservation du signal d'arrêt (feu rouge), aux motifs « que l'ambulance, lors de l'accident, n'effectuait aucun service d'urgence justifiant une circulation prioritaire; que A, son conducteur, devait donc se plier aux règles ordinaires de la circulation et attendre le feu vert pour s'engager dans le carrefour », le tribunal de paix dont les motifs ont été expressément adoptés par la décision attaquée, a fait une exacte application tant de l'article 11. dernier alinéa, de l'arrêté viziriel du 24 janvier 1953, que de l'article 24 de l'arrêté municipal permanent de la ville de Casablanca du 14 juin 1948, modifié le 28 mai 1952 et maintenu
en vigueur par application de l'article 23 du dahir du 19 janvier 1953; qu'il a ainsi suffisamment répondu aux conclusions déposées par les demandeurs sur ce point;
Attendu que la condamnation prononcée contre A pour l'inobservation du signal d'arrêt étant légalement justifiée par la constatation qu'il ne se trouvait pas en service, les griefs des demandeurs, pris d'une fausse application du dernier alinéa de l'article 11 de l'arrêté viziriel du 24 janvier 1953, d'une dénaturation des témoignages, d'un défaut de réponse à conclusion et qui ne concernent que l'usage par le conducteur de l'ambulance du signal avertisseur spécial, se trouvent inopérants;
Attendu, d'autre part, qu'il est vainement reproché aux juges du fond d'avoir, pour les écarter, dénaturé les déclarations de Aa Ab et Aa Ac ainsi que les attestations déposées par les demandeurs relativement aux transports que l'entreprise salières, propriétaire de l'ambulance, devait effectuer le jour de la collision;
Qu'en effet les juges d'appel ont la libre appréciation de la portée et de la sincérité des éléments
de preuve qui leur sont fournis, et n'ont pas inexactement reproduit les termes des attestations ou déclarations prétendument dénaturées;
SUR LE SIXIEME MOYEN DE CASSATION , propre à A:
Attendu que l'article 7 du dahir du 25 juin 1927 sur la réparation des accidents du travail ne subordonne nullement la recevabilité de l'action de la victime d'un accident du travail contre le tiers responsable à la condition que la procédure d'accident du travail soit terminée ou prescrite, mais dispose seulement qu'en ce cas la juridiction saisie doit surseoir à statuer sur la demande de la victime;
Attendu, d'autre part, que tous ceux qui ont personnellement subi un dommage directement causé par une infraction peuvent porter leur action en réparation devant la juridiction répressive, notamment par voie de citation directe;
Attendu, en conséquence, qu'en déclarant irrecevable, en raison des dispositions de l'article 7
du dahir du 25 juin 1927, la citation directe délivrée à la dame Laurant notamment pour blessures involontaires, par A qui avait été blessé dans l'accident survenu entre son véhicule et celui conduit par la dame Laurent, le jugement confirmatif attaqué a violé, par fausse application, ledit article 7;
........................................
PAR CES MOTIFS
Casse et annule entre les parties au présent arrêt, le jugement du tribunal de première instance de Casablanca du 18 juin 1962, mais uniquement en ce qu'il a :
1° condamné A pour infraction aux dispositions de l'article 32 de l'arrêté Viziriel du 24 janvier 1953 sur la police de la circulation et du roulage;
2° déclaré non recevable la citation directe délivrée à Ad Am à la requête de
A, et relaxé Ad Am du chef de dépassement de la vitesse autorisée, la cassation
étant limitée sur ces deux points aux intérêts civils, faute de pourvoi du ministère public;
Rejette les pourvois pour le surplus.
Président: M. Deltel : Rapporteur : M. C :
M. Ruolt.-Avocats : M M. Aj Ai Al. Cagnoli.
Observations
1-sur le premier point. Aux termes de l'al. 2 de l'art. 11 arr. Viz.
24 janv. 1953 sur la police de la circulation et du roulage : «le conducteur est tenu, aux
bifurcations et croisées de chemins, de céder le passage au conducteur qui vient sur la voie située à sa droite» (V. la note (I) sous l'arrêt n°1219 du 8 nov. 1962). Mais l'al. 6 de cet art. Prescrit que : « En tous lieux, liberté et priorité de passage doivent être laissées aux ambulances, voitures de pompiers et véhicules de police secours ».
L'art.24 de l'arrêté municipal permanent de la ville de Casablanca du 14 juin 1948, modifié le
28 mai 1952 et maintenu en vigueur par l'art.23 Dh 19 janv.1953 sur la ploice, de la circulation et du roulage, prescrit d'autre part que : «Les véhicules des services d'incendie, les voitures dites «Police- secours», ainsi que les ambulances en service circulant à une vitesse non limitée, jouissent d'une priorité absolue; ils s'annoncent par le son d'un avertisseur spécial du type «Sapeurs-pompiers» dont l'usage leur est exclusivement réservé» Cet arr. mun. avait été pris en conformité de l'art.4 Dh. 4 déc.1934 sur la police de la circulation et du roulage et l'art.11 arr.viz. de même date. Au moment des faits, ces deux textes avaient été abrogés et remplacés par Dh. 19 janv.1953 et arr.viz. 24 janv.1953. l'art. 4 Dh.19 janv.1953 accorde un pouvoir réglementaire aux pachas, analogue à celui que leur conférait de Dh.4 déc.1934.Cet art.4 prévoit en effet que : «Des arrêtés du directeur des travaux publics ou, dans les villes érigées en municipalités, des pachas, ou dans les centres non constitués en municipalités, des caïds, pourront édicter les mesures locales ou temporaires nécessaires en vue d'assurer la commodité ou la sécurité de la circulation ou d'éviter les dégradations anormales de la voie publique. Ces arrêtés pourront limiter le poids des véhicules et limiter et même interdire provisoirement la circulation sur certaines sections de routes ou ouvrages d'art ».
Pour que le conducteur d'une ambulance puisse se prévaloir du droit de priorité exceptionnel prévu par l'art.11, der.al.arr.viz.24 janv.1953, il faut donc, d'une part, que l'ambulance ait été « en service » et, d'autre part, que cette priorité ait été signalée aux autres usagers au moyen de « l'avertisseur spécial ». Un arrêts (n°1578 du 5 mars 1964 publié dans ce volume) confirme cette interprétation en précisant d'ailleurs que les conducteurs d'ambulance qui assurent un service de secours ne sont pas pour autant dispensés de toute obligation de prudence et qu'ils ne peuvent faire attribuer la responsabilité d'une collision à la méconnaissance de leur droit de priorité par un autre usages de la route s'ils l'ont rendu inévitable par leur propre comportement fautif.
Dans le sens de l'arrêt ci-dessus rapporté, v, en France :
-en ce qui concerne l'obligation, pour le chauffeur d'une ambulance, de signaler son approche au moyen de l'avertisseur spécial : Paris, 8 nov 1962, D.1963.105.
-en ce qui concerne l'obligation pour ce même conducteur d'observer les règles générales de prudence : An, 6 janv.1960, D1961, somm.38; Paris.13 nov.1963, Gaz.pal.1964.1.144;
Sur la question des priorités spéciales, v.j.Bedour, précis des accidents d'automobiles, 4éd.p.129; André Perraud.Charmantier, Code de la route, 6°éd. n°66, p.57; Paul Monnier,Traité théorique et pratique de la responsabilité en matière d'accidents d'autombile, 2 éd.pp.523 s.
II.-Sur le deuxième point.-L'art.7 Dh.25 juin 1927 relatif à la réparation des accidents du travail, mod DH. 17 mai 1960, prescrivait que «Indépendamment de l'action résultant du présent dahir, la victime ou ses ayants droit conservent contre les auteurs de l'accident le droit de réclamer, conformément aux règles du droit commun, la réparation du préjudice causé.
Pour être recevable, l'action en responsabilité délictuelle devra être formée dans les trois ans de l'accident, mais le tribunal saisi de cette action doit surseoir à statuer jusqu'à ce que l'action résultant du présent dahir soit terminée à moins qu'elle ne soit prescrite ».
Il résulte de ces dispositions que la victime d'un accident du travail peut agir en réparation de son préjudice, selon les règles du droit commun de la responsabilité civile, contre le tiers auteur de cet accident. Elle a donc qualité pour se constituer partie civile devant la juridiction répressive (V. les
arrêts nos 939 du 2 nov.1961, Rec.crim.t. 3.24; 978 du 21 déc.1961, ibid.64 et 1613 du 16 avri.1964, publié dans ce volume). Mais aucune décision ne peut intervenir tant que la procédure d'accident du travail n'est pas terminée ou prescrite.
L'art. Susvisé crée donc une exception préjudicielle au jugement et non une exception préjudicielle à l'action (sur cette distinction, v.Rép.crim, V° Question préjudicielle, par A Ah et Af Ae, nos 4, 22 s; le Poittevin, Art.3 Appendice, Des questions préjudicielles, n°7s, 58 s, 206 s).


Synthèse
Numéro d'arrêt : P1389
Date de la décision : 22/05/1963
Chambre pénale

Analyses

1° CIRCULATION __ priorité __ ambulance __ conditions.2° ACCIDENT DU TRAVAIL - tiers responsable __ action de la victime ou de ses ayants droitengagée selon les règles du droit commun __ article 7 du dahir du 25 juin 1927 __ procédure d'accident du travail non terminée ni prescrite __ sursis à statuer __ irrecevabilité de l'action (non).

1° la priorité de passage accordée aux ambulances par l'article 11, dernier alinéa, de l'arrêté viziriel du 24 janvier 1953 est fondée sur l'urgence qui s'attache aux secours à apporter aux malades ou aux blessés et doit être signalée aux autres usagers de la route au moyen d'un avertisseur spécial.Dès lors qu'ils n'assurent aucun service de secours les conducteurs des ambulances ne peuvent se prévaloir de leur priorité particulière.2° l'article 7 du dahir du 25 juin 1927 relatif à la réparation des accidents du travail ne subordonne pas la recevabilité de l'action de la victime d'un accident du travail contre le tiers responsable à la condition que la procédure d'accident du travail soit terminée ou prescrite, mais dispose seulement qu'en ce cas la juridiction saisie de l'action de droit commun doit surseoir à statuer sur la demande de la victime.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1963-05-22;p1389 ?
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