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09/05/1963 | MAROC | N°P1380

Maroc | Maroc, Cour suprême, 09 mai 1963, P1380


Texte (pseudonymisé)
Cassation partielle, en ce qui concerne les intérêts civils seulement, le pourvoi formé par Ab, Moïses etJosé Ah Ae, ainsi que Ag Ae Ac, contre un arrêt rendu le 31 octobre 1962 par la cour d'appel de Tanger qui a prononcé l'acquittement de Ad Af du Saïdi du chef d'escroquerie sans statuer sur la demande en dommages-intérêts formulée par les demandeurs, parties civiles.
9 mai 1963
Dossier n°12073
La Cour,
Sur les deux moyens de cassation REUNIS, pris de la violation des formes substantielles de la
procédure, de la violation des droits de la défense, de la violatio

n des articles 304, 306, 415 et 430 du code de procédure pénale, et du manqu...

Cassation partielle, en ce qui concerne les intérêts civils seulement, le pourvoi formé par Ab, Moïses etJosé Ah Ae, ainsi que Ag Ae Ac, contre un arrêt rendu le 31 octobre 1962 par la cour d'appel de Tanger qui a prononcé l'acquittement de Ad Af du Saïdi du chef d'escroquerie sans statuer sur la demande en dommages-intérêts formulée par les demandeurs, parties civiles.
9 mai 1963
Dossier n°12073
La Cour,
Sur les deux moyens de cassation REUNIS, pris de la violation des formes substantielles de la
procédure, de la violation des droits de la défense, de la violation des articles 304, 306, 415 et 430 du code de procédure pénale, et du manque de base légale :
Attendu que, pour limiter son effet à certaines dispositions de la décision du premier juge, la déclaration d'appel doit exprimer la volonté du déclarant de restreindre à ces seules dispositions la portée de l'appel qu'il interjette : que d'autre part, lorsqu'elle statue non en vertu de cet effet dévolutif mais par voie d'évocation, la juridiction d'appel, investie des attributions du premier juge dont elle annule intégralement la décision, se trouve en conséquence tenue de juger au fond toutes les demandes dont il était saisi;
Attendu que par jugement en date du 28 mai 1962, le tribunal régional de Tanger a condamné
BenaïssaSaïdi à six mois d'emprisonnement avec sursis et 500 dirhams d'amende pour escroquerie, et
a ordonné une expertise pour déterminer le préjudice subi par les héritiers de Ab Ah Aa, parties civiles;
Que le même jour Af Ai a interjeté appel de ce jugement par une déclaration qui, bien que se bornant à mentionner les condamnations pénales prononcées, ne contenait néanmoins aucune formule restrictive permettant de limiter à ces seules condamnations la portée de l'appel, et aurait dû dès lors être considérée comme visant la totalité des dispositions pénales et civiles du jugement frappé d'appel;
Attendu qu'après avoir à l'audience du 17 octobre1962 refusé la parole à l'avocat des parties civiles au motif d'une prétendue limitation de l'appel de Af Ai aux seules dispositions pénales du jugement du 28 mai1962, la Cour d'appel de Tanger, par arrêt du 31 octobre1962, a annulé ce jugement pour vice de forme, et évoquant, a acquitté Af Ai au bénéfice du doute, sans se prononcer sur les intérêts civils, alors que tenue en vertu de l'évocation d'exercer les attributions du premier juge, il lui incombait au contraire de statuer au fond sur les actions pénale et civile, après avoir permis à toutes les parties, au besoin par le renvoi de l'affaire à une audience ultérieure, d'assurer la défense de leurs droits;
D'où il suit qu'en refusant la parole à l'avocat des parties civiles, puis en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel de Tanger a non seulement, en méconnaissance, des articles 304 et 306 du Code de procédure pénale, porté atteinte à la défense des droits des parties civiles, mais a en outre violé les dispositions de l'article 415 (alinéa 1er) du même Code relatives à l'évocation;
Que toutefois, en raison de la qualité de partie civile des demandeurs au pourvoi et de l'absence
de recours du ministère public, les effets de la cassation encourue se trouvent, par application de l'article 585 (alinéa 4) du Code de procédure pénale, limités aux intérêts civils;
PAR CES MOTIFS
Casse et annule entre les parties au présent pourvoi, mais uniquement en ce qui concerne les intérêts civils, l'arrêt de la Cour d'appel de Tanger du 31 octobre 1962.
Président : M. Deltel.-Rapporteur : M. Mendizabal.-Avocat général : M. Ruolt.-Avocat : Me Palama Navas.s.
Observations
1.-Sur le premier point.-L'effet dévolutif de l'appel est limité non seulement par la qualité de l'appelant, mais également par les termes de l'acte d'appel, lorsque celui-ci précise celles des dispositions du jugement contre lesquelles il est dirigé (v. la note (II) sous l'arrêt n°1317 du 7 févr.1963).
Ainsi, lorsque la déclaration d'appel du ministère public est expressément restreinte aux condamnations prononcées contre un prévenu, les juges d'appel ne peuvent examiner à nouveau les dispositions de la décision ayant acquitté un autre prévenu (Arrêt n°469 du 10 déc. 1959, Rec. Crim.t. 1. 154, Comp l'arrêt n°1094 du 29 mars 1962, Rec. Crim. T. 3. 199).
Mais l'appel ne peut être réputé limité à un ou plusieurs chefs de la décision du premier juge
que si l'appelant a formulé dans sa déclaration d 'appel une restriction d'une façon suffisamment précise pour qu'il n'existe aucun doute sur son intention.
La Chambre criminelle de la Cour de cassation a, dans le même sens que l'arrêt ci-dessus rapporté, décidé que « l'appel formé par le prévenu est, à moins de stipulations expresses contraires, dirigé à la fois contre les dispositions pénales et civiles » et que « les limitations et restrictions doivent ressortir nettement des termes de l'acte d'appel » (Crim. 26 mai1959, B.C. 276; v. également : Crim. 10 nov. 1870, B.C. 178; 15 mai 1875 B.C. 158; le poitte-vin, Art. 202, n°102).
II.-Sur les deuxième et troisième points.-Aux termes de l'art. 415 C. proc. Pén. : « lorsque le jugement est annulé pour violation ou omission non réparée des formes prescrites par la loi à peine de nullité, la juridiction d'appel évoque et statue sur le fond ».
« Il y a lieu également à évocation en cas d'infirmation d'un jugement par lequel la juridiction du premier degré s'était à tort déclarée incompétente ».
« Il en est de même en cas d'infirmation d'un jugement par lequel la juridiction du premier degré s'était à tort déclarée compétente ratione loci, à la condition toutefois que la juridiction du premier degré qui eut été normalement compétente ressortisse elle aussi à la juridiction d'appel saisie ».
En cas d'évocation, la juridiction du second degré est tenu de remplir directement le rôle des premiers juges et doit, ainsi que l'avait déjà précisé l'arrêt n°669 du 16 juin 1960 (Rec. Crim. T. I. 303) « statuer tant sur l 'action publique que sur l 'action civile » et elle peut, même en l'absence d'appel du ministère public, prononcer une condamnation pénale contre le prévenu (V. Crim. 3 juin 1935, B. C. 76; 14 nov. 1935, B.C. 231; 20 nov. 1958, B.C. 685).
Il a été jugé, dans le sens de l'arrêt ci-dessus rapporté, que lorsque la juridiction du second degré, saisie par les seuls appels du ministère public et du prévenu, évoque l'affaire, elle doit prononcer les pénalités fiscales requises par la Régie partie civile, même en l'absence de cette derniére (Crim. 9 déc. 1949. B. C. 331).


Synthèse
Numéro d'arrêt : P1380
Date de la décision : 09/05/1963
Chambre pénale

Analyses

1° APPEL-Effet dévolutif-Termes de l'acte d'appel.2° APPEL-Evocation-Pouvoirs de la juridiction d'appel.3° JUGEMENTS ET ARRETS-a) Violation de la loi-Appel-b) violation des droits de la défense-Jugement refusant la parole à l'avocat de la partie civile.

1° Pour limiter son effet à certaines dispositions de la décision du premier juge, la déclaration d'appel doit exprimer la volonté du déclarant de restreindre à ces seules dispositions la portée de l'appel qu'il interjette.La déclaration d'appel d'un prévenu qui ne mentionne que les condamnations pénales prononcées contre lui, mais ne contient aucune formule restrictive permettant de limiter à ces seules condamnations la portée de cette voie de recours, doit être considérée comme visant la totalité des dispositions pénales et civiles du jugement entrepris.2° et 3° lorsqu'elle statue non en vertu de l'effet dévolutif de l'appel; mais par voie d'évocation, la juridiction du second degré se trouve investie des attributions du premier juge dont elle annule intégralement la décision et doit en conséquence juger au fond toutes les demandes dont il était saisi.Viole les droits de la défense de la partie civile et les dispositions des articles 304, 306 et 415, alinéa 1er, du code de procédure pénale la juridiction d'appel qui, après avoir annulé pour vice de forme la décision du premier juge et évoqué l'affaire, refuse la parole à l'avocat de la partie civile au motif d'une prétendue limitation de l'appel du prévenu aux seules dispositions pénales du jugement entrepris alors que, tenue en vertu de l'évocation d'exercer les attributions du premier juge, il lui incombait au contraire de statuer au fond sur les actions pénale et civile après avoir permis à toutes les parties, au besoin par le renvoi de l'affaire à une audience ultérieure, d'assurer la défense de leurs droits.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1963-05-09;p1380 ?
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