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30/04/1963 | MAROC | N°C173

Maroc | Maroc, Cour suprême, 30 avril 1963, C173


Texte (pseudonymisé)
173-62/63 30 avril 1963 6916
Ae Ab Ac Ad c/Lombardo
Cassation d'un arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 2 juillet 1960.
La Cour,
SUR LE PREMIER MOYEN PRIS EN SA PREMIEEE BRANCHE :
Vu les articles 183 et 153 du dahir des obligations et contrats;
Attendu que, d'après le premier de ces textes, lorsque plusieurs personnes ont droit à une obligation indivisible sans qu'il y ait entre elles solidarité, le débiteur ne peut payer qu'à tous les créanciers conjointement, et chaque créancier ne peut demander l'exécution qu'au nom de tous et s'il y est autorisé par eux; que, se

lon le second texte concernant la solidarité entre créanciers, lorsque plus...

173-62/63 30 avril 1963 6916
Ae Ab Ac Ad c/Lombardo
Cassation d'un arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 2 juillet 1960.
La Cour,
SUR LE PREMIER MOYEN PRIS EN SA PREMIEEE BRANCHE :
Vu les articles 183 et 153 du dahir des obligations et contrats;
Attendu que, d'après le premier de ces textes, lorsque plusieurs personnes ont droit à une obligation indivisible sans qu'il y ait entre elles solidarité, le débiteur ne peut payer qu'à tous les créanciers conjointement, et chaque créancier ne peut demander l'exécution qu'au nom de tous et s'il y est autorisé par eux; que, selon le second texte concernant la solidarité entre créanciers, lorsque plusieurs personnes stipulent une seule prestation conjointement et par le même acte, elles sont censées avoir stipulé solidairement si le contraire n'est exprimé ou ne résulte de la nature de l'affaire;
Attendu qu'il résulte de la procédure et des énonciations de l'arrêt infirmatif attaqué qu'Ahmed
ben Mohamed a assigné Aa Af, demandant qu'il soit condamné à lui délivrer l'acte de vente du lot 23 sis au bloc B du lotissement «Derb El Kheir» et à déposer à la conservation foncière de Casablanca le bordereau d'inscription de cette vente; qu'à l'appui de sa requête il a produit un reçu établi le 4 février 1950 à son nom et au nom de son frère Maâti, et délivré par le mandataire de Lombardo;
Attendu que la Cour d'appel a déclaré la demande irrecevable au motif qu'Ahmed ben Mohamed n'a demandé l'exécution de la vente litigieuse qu'à son profit exclusif sans justifier de l'autorisation de son frère;
Or attendu que l'autorisation de Maâti ne pouvait être exigée, en vertu de l'article 183 du dahir des obligations et contrats, qu'en l'absence de solidarité entre les deux acquéreurs, et que, par application de l'article 153 du dahir des obligations et contrats, ce lien devait être présumé dès lors qu'ils avaient stipulé conjointement une seule prestation par le même acte dont les termes ne sont pas exclusifs d'un lien de solidarité;
D'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour a faussement appliqué l'article 183 du dahir des obligations et contrats et par suite violé ce texte ainsi que l'article 153 du même dahir;
PAR CES MOTIFS
Et sans qu'il y ait lieu l'examiner la seconde branche du premier moyen ni le second moyen,
Casse.
Président: M. Bourcelin.__Rapporteur : M. Azoulay.__Avocat général : M. Neigel.__Avocats : MM. Marmon, Thèbe.
Observations
Une obligation est indivisible lorsqu'elle n'est pas susceptible d'exécution partielle. L'indivisibilité peut résulter de la loi, tel est le cas de l'obligation née du nantissement (art. 1180 C. obl. contr.); elle peut résulter de la convention des parties stipulant, par exemple, dans l'intérêt du créancier, que le débiteur d'une somme d'argent devra payer le tout en une seule fois; elle peut enfin résulter de la nature de l'obligation : tel est le cas, le plus souvent, des obligations de faire, et tel était précisément le cas de l'espèce, puisque l'obligation consistait en la délivrance par le vendeur de l'unique acte de vente d'un immeuble acheté indivisément par deux acquéreurs.
La solidarité entre créanciers d'une même obligation n'existe que si elle résulte du contrat ou de
la loi, ou si elle est «la conséquence nécessaire de la nature de l'affaire »; elle ne se présume pas; «cependant lorsque plusieurs personnes stipulent une seule prestation conjointement et par le même acte, elles sont censées avoir stipulé solidairement, si le contraire n'est exprimé ou ne résulte de la nature de L'affaire» (art. 153 C. obl. contr.). Tel était également le cas en l'espèce, puisque l'immeuble avait été acquis indivisément par les deux acheteurs suivant un seul et même acte qui n'excluait pas la solidarité.
Or, les règles régissant l'obligation solidaire entre créanciers sont sur certains points différentes
de celles applicables à l'obligation indivisible. En particulier, tandis que, selon l'art. 154 C. obl. contr., chacun des créanciers solidaires peut réclamer seul au débiteur l'exécution de la totalité de l'obligation, au contraire, selon l'art. 183, le débiteur d'une obligation indivisible ne peut payer qu'à tous les créanciers conjointement et chaque créancier ne peut agir valablement contre lui qu'au nom de tous les autres et avec leur autorisation. Toutefois, prévoyant le cas où l'obligation est à la fois indivisible et solidaire entre les créanciers, ce même article dispose que dans cette hypothèse il faut appliquer les règles de la solidarité.
Bien qu'il n'ait pas justifié de l'autorisation de son coacquéreur et qu'il ait agi pour son propre compte, Ahmed ben Mohamed était donc recevable à réclamer seul au vendeur l'exécution de son obligation de délivrer l'acte de vente. En décidant le contraire, la Cour d'appel avait méconnu les dispositions des art. 153 et 183 C. obl. contr. et son arrêt encourait la cassation.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C173
Date de la décision : 30/04/1963
Chambre civile

Analyses

1° INDIVISIBILITE-Pluralité de créanciers-Poursuite exercée par un seul d'entre eux- Conditions.2° SOLIDARITE-Solidarité active-Sources-Prestation conjointe stipulée au profit de plusieurs créanciers.

1° et 2°Aux termes de l'article 183 du Code des obligations et contrats, lorsque l'obligation est indivisible, le débiteur ne peut payer qu'à tous les créanciers conjointement, et chaque créancier ne peut demander l'exécution qu'au nom de tous, et s'il y est autorisé par eux.Mais ces dispositions ne sont pas applicables lorsque l'obligation est solidaire entre les créanciers. Tel est le cas, selon l'article 153, alinéa 2, du Code des obligations et contrats, quand une prestation est stipulée au profit de plusieurs personnes par un même acte, à moins que le contraire ne soit exprimé ou ne résulte de la nature de l'affaire.En conséquence, doit être cassé l'arrêt qui, pour déclarer irrecevable la demande formée par l'un des acquéreurs conjoints d'un immeuble contre le vendeur en vue d'obtenir la délivrance de l'acte de vente et le dépôt du bordereau de celle-ci à la conservation foncière, énonce que cet acquéreur a demandé l'exécution de la vente à son seul profit sans justifier de l'autorisation de son coacquéreur.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1963-04-30;c173 ?
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