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21/02/1963 | MAROC | N°P1332

Maroc | Maroc, Cour suprême, 21 février 1963, P1332


Texte (pseudonymisé)
Cassation partielle sur les pourvois formés par Rekia bent Ali, Sfia bent EL Aj A Ad, Ahmed ben Aa Ab Al et Af Ab Aa contre un jugement rendu le 26 septembre 1962 par le tibunal de première instance de Am qui a sursis à statuer sur leurs constitutions de partie civile et a imparti à la Société Marocaine d'Assurances, assureur de Ah Ac, un délai de quinze jours pour exercer l'action prévue par le dahir du 25 juin 1927 relatif à la réparation des accidents du travail.
21 février 1963
Dossiers nos 11918, 11919, 11920 et 11921
La Cour,
SUR LA RECEVABILITE DES POURVOIS :
A

ttendu qu'en impartissant, à celle des parties qui avait contesté in limi...

Cassation partielle sur les pourvois formés par Rekia bent Ali, Sfia bent EL Aj A Ad, Ahmed ben Aa Ab Al et Af Ab Aa contre un jugement rendu le 26 septembre 1962 par le tibunal de première instance de Am qui a sursis à statuer sur leurs constitutions de partie civile et a imparti à la Société Marocaine d'Assurances, assureur de Ah Ac, un délai de quinze jours pour exercer l'action prévue par le dahir du 25 juin 1927 relatif à la réparation des accidents du travail.
21 février 1963
Dossiers nos 11918, 11919, 11920 et 11921
La Cour,
SUR LA RECEVABILITE DES POURVOIS :
Attendu qu'en impartissant, à celle des parties qui avait contesté in limine litis le caractère de
droit commun attribué à l'accident, un délai « pour exercer devant la juridiction compétente l'action en réparation des accidents du travail », et en décidant de surseoir à statuer jusqu'à expiration de ce délai, les juges d'appel ont reconnu la compétence de la juridiction des accidents du travail pour trancher la contestation relative au caractère de l'accident, et ont ainsi décliné en raison de la matière leur propre compétence à l'égard de cette contestation.;.
Qu'à ce titre leur décision entre dans la catégorie des jugements d'incompétence à raison de la matière qui statuent sur une exception soulevée avant toute défense au fond, et qui, en ce cas,
peuvent, en vertu des dispositions de l'article 572 du Code de procédure pénale, être frappés immédiatement de pourvoi.;.
D'où il suit que les pourvois, réguliers par ailleurs en la forme, se trouvent recevables.;.
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, pris en ses deux premières branches, de laviolation des règles de compétence et de la législation relative à la réparation des accidents du travail:
Attendu qu'en l'absence de disposition contraire de la loi, le juge répressif est compétent pour statuer sur les questions soulevées accessoirement à la poursuite;. qu'ainsi le juge de l'action étant celui de l'exception, il incombait aux juges d'appel d'apprécier en la cause si l'accident donnant lieu aux poursuites était ou non un accident du travail;.
Que d'autre part la Société Marocaine d'Assurances, assureur garantissant le prévenu pour les seuls dommages causés aux tiers par son camion, n'avait aucune qualité pour intenter une action en réparation des dommages résultant d'un éventuel accident du travail.;.
Que dès lors, en déclinant ainsi qu'il l'a fait sa compétence, et en impartissant à cet assureur un délai pour saisir la juridiction des accidents du travail, le jugement d'appel attaqué a respectivement violé les règles relatives à sa compétence et les articles 11 et 12 du dahir du 25 juin 1927 déterminant les personnes aptes à souscrire la déclaration qui constitue l'acte initial de la procédure en matière d'accident du travail.;.
D'où il suit que, sans qu'il soit nécessaire d'examiner la troisième branche du moyen, la décision attaquée encourt la cassation.;.
PAR CES MOTIFS
Casse et annule entre les parties le jugement du tribunal de Am en date du 26 septembre 1962, mais uniquement en celle de ses dispositions qui a sursis à statuer sur l'action civile, a imparti un délai à la Société Marocaine d'Assurances pour exercer devant la juridiction compétente l'action en réparation des accidents du travail, et a dit que, passé ce délai, il serait statué en l'état de la procédure.
Président : M. Deltel.-Rapporteur : M. Martin.-Avocat général : M. Ruolt.-Avocats : MM. Cohen, Pajanacci, Cagnoli.
Observations
I.-Sur le premier point.-Sous l'empire du C. instr. Crim, il avait été jugé que « Les dispositions
de l'art. 416 de ce Code, aux termes desquelles, en toute matière, le recours en cassation contre les jugements ou arrêts préparatoires, d'instruction ou interlocutoires, même contre les jugements ou arrêts rendus sur la compétence, ne sera reçu qu'après le jugement ou l'arrêt définitif sur le fond, ne sauraient recevoir application en ce qui concerne les jugements ou arrêts rendus . par une juridiction qui se déclare incompétente.;. qu'en effet, dans ce cas, cette décision mettant fin à la procédure, interrompt le cours de la justice » (crim. 6 mars 1957, D 1957.317.;. dans le même sens, v. Crim. 16 févr. 1943.;. 28 juin 1945, B.C. 73. 30 oct. 1946, B.C. 192. 3 août 1950, B.C. 232.;. 12 juin 1952, S. 1953.1.79.;. Rép. Crim, V° Cassation, par Ae Ag, n°105.;. note signée M.R.M.P. sous Crim. 16 juil. 1959, D. 1959. 449).
L'al. 1er de l'art. 572 C. proc. Pén, aux termes duquel : « Les décisions préparatoires ou interlocutoires ou statuant sur des incidents ou exceptions ne peuvent être frappées de pouvoir qu'après la décision rendue en dernier ressort sur le fond et en même temps que le pourvoi formé contre cette dernière décision », permet cependant de frapper de pourvoi immédiat la décision par laquelle la juridiction répressive se déclare incompétente en raison de la matière lorsque l'exception a été soulevée avant toute défense au fond.
II.-Sur les deuxième, troisième et quatrième points.-A. La juridiction répressive est en principe compétente pour trancher toutes les questions dont dépend la solution du procès dont elle est saisie.;. « Le juge de l'action est le juge de l'exception ».
Cette compétence n'est limitée que lorsque la loi attribue expressément la connaissance de l'une de ces questions à une autre juridiction.;. la question est alors préjudicielle (V. Le Poittevin, Art. 179 nos 31 à 37.;. Appendice à l'art. 3 : Des questions préjudicielles.;. Rép. Crim, V° Question préjudicielle, par Ak Ai et Jean Larguier.;. Donnedieu de Vabres, nos 1190 s..;. Stéfani et Levasseur, 2, nos 481 s..;. 594 s..;. Vitu, pp. 127 s.) Il n'en est pas ainsi en matière d'accident du travail et la juridiction répressive est par suite compétente pour déterminer si l'accident donnant lieu aux poursuites est ou non un accident du travail.
B.-L'art. 11, a) et e), Dh. 25 juin 1927 relatif à la réparation des accidents du travail prévoit que
la déclaration d'accident du travail doit être faite par « l'employeur ou l'un de ses préposés » et qu'elle « pourra être faite par la victime ou ses représentants jusqu'à l'expiration de la deuxième année qui suit l'accident » (V. actuellement les art.14, al. 2, et 15 Dh. 6 févr. 1963 portant modification en la forme du Dh. 25 juin 1927).
La compagnie d'assurances qui garantit la responsabilité civile d'un propriétaire de véhicule automobile sur route en cas d'accident causé à la personne ou aux biens des tiers, n'a aucune qualité pour intenter l'action en réparation d'un accident du travail. Par suite, en impartissant à l'assureur du prévenu un délai pour saisir la juridiction des accidents du travail, la décision attaquée avait violé les textes susvisés.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P1332
Date de la décision : 21/02/1963
Chambre pénale

Analyses

1°Définitives-Décision d'incompétence à raison de la matière-Exception soulevée avant toute défense au fond- Recevabilité du pourvoi immédiat. CASSATION-Décisions susceptibles de pourvoi-Décisions2° ACCIDENT DU TRAVAIL-a) Nature de l'accident-Appréciation par le juge répressif-b) Personne habilitée à souscrire une déclaration d'accident du travail.3° COMPETENCE-Principes généraux-Le juge de l'action est le juge de l'exception-Accident du travail-Appréciation par le juge répressif.4° JUGEMENTS ET ARRETS -Violation de la loi-Accident du travail.

1° En application de l'article 572, alinéa 1er, du Code de procédure pénale, la décision qui décline sa compétence à raison de la matière, sur une exception soulevée avant toute défense au fond, peut être frappée immédiatement de pourvoi.2°, 3° et 4° En l'absence de disposition contraire de la loi, le juge répressif est compétent pour statuer sur les questions soulevées accessoirement à la poursuite.Il est notamment compétent pour apprécier si l'accident donnant lieu aux poursuites est ou non un accident du travail.D'autre part, la compagnie d'assurances qui garantit la seule responsabilité civile en cas d'accident causé à la personne ou aux biens des tiers par un véhicule automobile n'a aucune qualité pour intenter une action en réparation des dommages résultant d'un éventuel accident du travail.Par suite, les juges répressifs qui décident que la juridiction des accidents du travail est seule compétente pour trancher la contestation relative au caractère de l'accident et déclinent leur propre compétence en raison de la matière à l'égard de cette contestation, en impartissant à l'assureur de la responsabilité civile du prévenu, auteur de l'accident, un délai pour saisir la juridiction des accidents du travail, violent les règles relatives à leur compétence et les articles 11 et 12 du dahir du 25 juin 1927 déterminant les personnes aptes à souscrire la déclaration qui constitue l'acte initial de la procédure en matière d'accidents du travail.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1963-02-21;p1332 ?
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