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20/12/1962 | MAROC | N°P1275

Maroc | Maroc, Cour suprême, 20 décembre 1962, P1275


Texte (pseudonymisé)
Rejet du pourvoi formé par Ad Ac Ad Aa Ab, partie civile, contre un jugement rendu le 26 avril 1962 par le tribunal régional de Tétouan qui a déclaré irrecevable son opposition à un jugement du 25 janvier 1962.
20 décembre 1962
Dossier n°10851
La Cour,
SUR LES TROIS MOYENS DE CASSATION REUNIS , pris par le demandeur de la contradiction de motifs, du manque de basse légale, de la violation des articles 373, 374 et subsidiairement 371 (alinéas 2 et 4) du Code de procédure pénale, en ce que les juges du fond, liés par la qualification de « jugement par défaut » donnée

au jugement de 25 janvier 1962, ont substitué à cette qualification celle d...

Rejet du pourvoi formé par Ad Ac Ad Aa Ab, partie civile, contre un jugement rendu le 26 avril 1962 par le tribunal régional de Tétouan qui a déclaré irrecevable son opposition à un jugement du 25 janvier 1962.
20 décembre 1962
Dossier n°10851
La Cour,
SUR LES TROIS MOYENS DE CASSATION REUNIS , pris par le demandeur de la contradiction de motifs, du manque de basse légale, de la violation des articles 373, 374 et subsidiairement 371 (alinéas 2 et 4) du Code de procédure pénale, en ce que les juges du fond, liés par la qualification de « jugement par défaut » donnée au jugement de 25 janvier 1962, ont substitué à cette qualification celle de « jugement réputé contradictoire » et ont écarté l'opposition de Ad Ac Ad Ac Ab :
Vu l'article 2 du dahir du 18 mai 1959 habilitant les avocats, sauf exceptions prévues par la loi, à représenter les parties en justice sans avoir à produire une procuration.;.
Attendu que le caractère « contradictoire » ou « par défaut » des jugements étant déterminé par
la loi, la qualification erronée donnée par les juges à leur décision demeure sans influence sur le caractère de cette décision et sur l'exercice des voies de recours.;.
Attendu que des énonciations du jugement du 25 janvier 1962, frappé d'opposition par Ad Ac Ad Ac Ab, il ressort que ce dernier, partie civile, cité à personne, s'était abstenu de comparaître personnellement à l'audience du 18 janvier 1962 mais y avait fait formuler et soutenir sa demande d'indemnisation par son avocat, ce qui impliquait nécessairement sa représentation en justice par application de l'article 2 du dahir susvisé du 18 mai 1959.;. que ses énonciations établissent indiscutablement que le jugement du 25 janvier 1962 n'avait pu, bien qu'il l'ait déclaré par erreur, statuer par défaut à l'égard d'une partie civile ainsi représentée, c'est à bon droit et sans se contredire que les juges saisis de l'opposition ont estimé pouvoir rectifier l'erreur commise et ont déclaré l'opposition non recevable.;.
Attendu que cette partie civile ayant fait conclure et développer ses moyens oralement à l'audience du 18 janvier 1962 par les soins de son avocat et ayant ainsi été représentée par ce mandataire légalement habilité, le jugement du 25 janvier 1962, aurait dû être déclarée «contradictoire» à son égard, au lieu de «réputé contradictoire» comme l'ont indiqué les juges saisis
de l'opposition.;. que cette appréciation inadéquate ne saurait toutefois faire grief au demandeur au pourvoi, puisqu'aucune de ces deux catégories de jugements n'est susceptible d'opposition.;.
Attendu enfin que la représentation de Ad Ac Ad Ac Ab à l'audience par
son avocat qui y a conclu et plaidé, et le caractère contradictoire qu'elle conférait au jugement du 25 Janvier1962, excluaient à l'égard de cette civile l'application des articles 373 et 374 du Code de procédure pénale relatifs à l'opposition aux jugements de défaut, et de l'article 371 (alinéas 2 et 4) du même Code, concernant les parties civiles non représentées.;.qu'il n'y a donc pas eu violation des textes légaux invoqués par le demandeur.;.
Qu'en conséquence les moyens présentés sont mal fondés.;.
PAR CES MOTIFS
Qui se substituent pour partie à ceux du jugement attaqué,
Rejette le pourvoi.
Président : M. Deltel.-Rapporteur : M. Mendizabal.-Avocat général : M. Ruolt.-Avocat : Me Sorger.r.
Observations
I.-Sur le premier point.-Aux termes de l'art. 2 Dh. 18 mai 1959 sur l'organisation du barreau et l'exercice de la profession d'avocat : « Les fonctions de l'avocat consistent : . 2° A assister, défendre et représenter les parties en justice. A cet effet, l'avocat est habilité, sauf exceptions prévues par la loi, à faire tout acte, à remplir toute formalité, à intervenir dans toute mesure d'instruction et ce, sans avoir à produire une procuration . »
L'art. 371 C. proc. Pén. Prévoit d'autre part que : « Si la personne régulièrement citée ne comparaît pas au jour et à l'heure fixés par la citation, elle est jugée par défaut, sauf les exceptions ci- après: »
« Si le prévenu demande que les débats aient lieu en son absence et si le tribunal n'estime pas nécessaire sa comparution personnelle, il est passé outre aux débats et le jugement est réputé contradictoire. »
« Nul n'est recevable à déclarer qu'il fait défaut dès lors qu'il est présent à l'audience. »
« Le prévenu régulièrement cité à personne qui ne comparaît pas sans justifier d'un motif légitime de non-comparution peut être jugé par décision réputée contradictoire. »
« Lorsqu'après un premier jugement préparatoire ou interlocutoire, rejetant contradictoirement ses conclusions sur un incident, le prévenu déclare faire défaut avant l'audition du ministère public, le jugement rendu sur le fond est contradictoire. »
«Il en est de même en cas de poursuites comprenant plusieurs chefs d'inculpation, si le prévenu accepte le débat contradictoire sur un ou plusieurs chefs et déclare faire défaut sur les autres »
«Les dispositions du présent article sont applicables à la partie civile et au civilement responsable »
La partie civile peut comparaître personnellement à l'audience ou s'y faire représenter par son avocat (Le Poittevin, Art. 185, nos 40 s..;. Art. 190, n°101) et une telle représentation rend le jugement contradictoire à son égard (Comp, en ce qui concerne le prévenu . l'arrêt n°816 février 1961, Rec. Crim.t.2.172).
II.-Sur le deuxième point.-La nature des jugements est déterminée par la loi et dépend, non de la volonté des parties ou des juges, mais uniquement des conséquences légales qui s'attachent aux circonstances dans lesquelles ils ont été rendus (Arrêts nos 980 du 4 janv. 1962, Rec. Crim. t. 3. 68.;. 1064 du 6 mars 1962, ibid. 166.;. 1069 du 15 mars 1962, ibid. 175.;. 1181 du 28 juin 1962, ibid. 285.;. 1469 du 24 oct. 1963 et 1657 du 11 juin 1964, publiés dans ce volume.;. le Poittevin, Art. 186, n°6.;. Garraud, 2, t, 5, n°1030.;. Crim. 15 mai 1896, B.C. 168.;. 28 JUIL. 1900, B.C. 257).
En conséquence, l'admission des voies de recours contre les jugements est subordonnée au véritable caractère de ces derniers et ne dépend pas du fait qu'ils énoncent avoir été rendus «contradictoirement » ou « par défaut ».
Ainsi, lorsqu'un jugement prétendu contradictoire est en réalité rendu par défaut, il est susceptible d'opposition (Arrêts nos 980, 1064, 1181 et 1469 précités.;. v. également : Crim. 25 nov. 1876, B.C. 232. 28 juil. 1900 précité) II appartient dans ce cas juges du second degré, saisis de l'appel formé dans le délai imparti au prévenu pour faire opposition, de surseoir à statuer tant que cette voie de recours demeure ouverte (Arrêt n°1181 précité). D'autre part, le pourvoi formé pendant le délai d'opposition contre une décision d'appel rendue en réalité par défaut à l'égard du demandeur se trouve irrecevable par application des dispositions de l'art. 571 C. proc. Pén. (Arrêts nos 472 du 10 déc. 1959, Rec. Crim. t. 1. 159.;. 775 du 15 déc. 1960, Rec. Crim. t.2. 116.;. 980 et 1064 précités.;. 1095 du 29 mars 1962, Rec. Crim. t.3. 204.;. 1116 du 19 avr. 1962, ibid. 231 et 1127 du 10 mai 1962, ibid. 236).
Au contraire, lorsqu'un jugement a été qualifié à tort « par défaut », il n'est pas susceptible d'opposition et les juges répressifs, saisis de l'opposition formée contre un tel jugement, doivent la déclarer irrecevable (Arrêt ci-dessus rapporté.;. Le Poittevin, Art. 186. n°6.;. Crim. 19 juil. 1929, B.C. 209).
Pour permettre à la Cour Suprême de vérifier si le caractère qui leur est attribué est conforme à la loi, les jugements et arrêts doivent, à peine de nullité, contenir des énonciations complètes, précises et non contradictoires, relatives à la comparution des parties (Arrêts nos 1069 du 15 mars 1962, Rec. Crim. t. 3. 175 et 1657 du 11 juin 1964, publié dans ce volume).


Synthèse
Numéro d'arrêt : P1275
Date de la décision : 20/12/1962
Chambre pénale

Analyses

1° AVOCAT-Représentation des parties-Nature contradictoire de la décision rendue à l'égard d'une partie civile représentée par un avocat.2° JUGEMENTS ET ARRETS-Jugement « contradictoire » ou « par défaut »-Nature déterminée par la loi et non par la volonté du juge-Conséquences.

1° et 2° L'article 2 du dahir du 18 mai 1959 habilitant les avocats. Sauf exceptions prévues par la loi, à représenter les parties en justice sans avoir à produire une procuration, il en résulte qu'une partie civile qui s'abstient de comparaître personnellement à l'audience mais y fait formuler et soutenir sa demande d'indemnisation par son avocat, est jugée contradictoirement.Le caractère « contradictoire » ou «par défaut » des jugements étant déterminé par la loi, la qualification erronée par les juges à leur décision demeure sans influence sur le caractère de cette décision et sur l'exercice des voies de recours.Par suite, les juges saisis d'une opposition de la partie civile contre un jugement qualifié à tort «par défaut » à son égard puisqu'elle avait été représentée à l'audience par son avocat, doivent rectifier l'erreur qu'ils ont commise et déclarer l'opposition irrecevable.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1962-12-20;p1275 ?
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