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09/10/1962 | MAROC | N°C6

Maroc | Maroc, Cour suprême, 09 octobre 1962, C6


Texte (pseudonymisé)
6-62/63 9 octobre 1962 6609
Ab Aa c/ Compagnie Ad Ac et compagnie d'assurances «L'Union et le Phénix Espagnol
Rejet du pourvoi formé contre un arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 13 décembre 1958.
La Cour,
SUR LE MOYEN UNIQUE
Attendu qu'il résulte de la procédure et des énonciations de l'arrêt attaqué (Rabat 13 décembre 1958) que Aa Ab, employé à la Compagnie Ad Ac, a été victime le 29 octobre 1953 d'un accident du travail; qu'il traversait la cour intérieure des bâtiments lors-qu'il reçut dans les yeux des projections de lait de chaux provenant d'un étage su

périeur; qu'il en résulta la perte totale de l'oil gauche et que Ab obtint une re...

6-62/63 9 octobre 1962 6609
Ab Aa c/ Compagnie Ad Ac et compagnie d'assurances «L'Union et le Phénix Espagnol
Rejet du pourvoi formé contre un arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 13 décembre 1958.
La Cour,
SUR LE MOYEN UNIQUE
Attendu qu'il résulte de la procédure et des énonciations de l'arrêt attaqué (Rabat 13 décembre 1958) que Aa Ab, employé à la Compagnie Ad Ac, a été victime le 29 octobre 1953 d'un accident du travail; qu'il traversait la cour intérieure des bâtiments lors-qu'il reçut dans les yeux des projections de lait de chaux provenant d'un étage supérieur; qu'il en résulta la perte totale de l'oil gauche et que Ab obtint une rente viagère et annuelle de 36 864 francs, attribuée suivant procès-verbal de conciliation du juge de paix de Casablanca du 31 mars 1956;
Attendu que le 8 septembre 1956 Aa Ab, invoquant l'article 20 du dahir du 25 juin 1927 et la faute inexcusable de son employeur, a actionné ce dernier devant le tribunal de première instance de Casablanca pour voir porter cette rente à 80 000 francs;
Attendu qu'après qu'il eût été débouté par le tribunal, sa demande a été déclarée irrecevable par l'arrêt attaqué;
Attendu qu'il est fait grief à cette décision d'avoir violé l'article 20 (4° alinéa) du dahir du 25 juin 1927 en déclarant la demande irrecevable au motif que la conciliation intervenue devant le juge de paix fixait définitivement les droits de la victime;
Mais attendu que cet article 20 dispose que «Lorsqu'il est prouvé que l'accident est dû à la faute inexcusable de l'employeur, l'indemnité due à la victime pourra être majorée par la juridiction compétente »; que cette juridiction était dans l'espèce le juge de paix qui a statué après avoir constaté l'accord des parties et que, à défaut de conciliation, aurait transmis le dossier au tribunal de première instance;
Attendu que l'ordonnance du juge de paix fixe «définitivement» les droits des parties, sous la seule réserve des recours institués par les articles 7 et 19 du dahir du 25 juin 1927;
D'où il suit que la Cour d'appel dont l'arrêt est régulièrement motivé, loin de violer le texte visé au pourvoi, en a fait au contraire une exacte application;
PAR CES MOTIFS
Rejette le pourvoi.
Président: M. Hauw.__Rapporteur : M. Zamouth.__Avocat général : M. Neigel.__Avocats : MM. Benzaquin, Ailhaud, Péronne.
Observations
Selon les dispositions de l'art. 311 Dh. 25 juin 1927 tel que modifié en la forme par Dh. 6 fév. 1963, lorsqu'un accident du travail a été causé par une faute inexcusable de la victime, le tribunal a le droit de diminuer la rente due à la victime ou à ses ayants droit. Inversement, selon les dispositions de l'art. 312, lorsque l'accident a été causé par une faute inexcusable de l'employeur ou de «ceux qu'il s'est substitué dans la direction », la rente peut être majorée par la juridiction compétente. A défaut d'autres indications, il apparaît que cette dernière expression renvoie nécessairement aux dispositions relatives à la procédure de fixation des rentes, c'est-à-dire aux art. 219 et 220. Il résulte du premier de ces articles que la rente est fixée définitivement par ordonnance du juge de paix soit lorsque les parties se sont conciliées, soit lorsque, malgré leur accord «sur la matérialité et le caractère professionnel de l'accident, le salaire réel, le salaire de base, le degré d'incapacité de la victime ou le pourcentage du salaire servant à la fixation de la rente des ayants droit, et le point de départ de la rente », la victime ou l'un de ses ayants droit refusent les propositions de rente qui leur sont faites; il résulte du second article que dans tous les autres cas le dossier est transmis par le juge de paix au tribunal de première instance qui se trouve saisi de plein droit par cette transmission et qui statue le cas échéant à charge d'appel (art. 258 et 224). Hors le cas le désaccord sur l'un des points ainsi limitativement énumérés à l'art. 219, l'application stricte de ces dispositions aboutirait à faire statuer définitivement le juge de paix sur les conflits relatifs uniquement à une demande de diminution ou d'augmentation de la rente pour faute inexcusable puisque, dans ces deux cas, le désaccord ne porte précisément que sur les propositions de rente faites à la victime ou à ses ayants droit (proposition de rente tenant compte d'une faute contestée de la victime ou ne tenant pas compte d'une faute prétendue de l'employeur).
Cependant tel ne paraît pas être le vou du dahir : en effet, selon l'art. 311 la diminution de rente pour faute inexcusable de la victime est décidée par le tribunal et il n'y a aucune raison pour que la compétence soit différente lorsqu'il s'agit d'une augmentation pour faute inexcusable de l'employeur.
Dès lors, malgré les obscurités du texte, il convient d'admettre que lorsque les parties sont en désaccord sur l'existence d'une faute inexcusable de la victime ou de l'employeur, le juge de paix n'a pas qualité pour statuer et doit se dessaisir en faveur du tribunal. C'est ce que décide l'arrêt rapporté.
Il résulte nécessairement de la solution ainsi adoptée que les parties qui se sont conciliées devant le juge de paix ne sont plus recevables à solliciter une diminution ou une majoration de la rente pour faute inexcusable de la victime ou de l'employeur.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C6
Date de la décision : 09/10/1962
Chambre civile

Analyses

ACCIDENT DU TRAVAIL-Rente-Majoration pour faute inexcusable de l'employeur- Procédure-Compétence.

Lorsqu'un accident du travail est dû à la faute inexcusable de l'employeur, la rente allouée à la victime peut être majorée par la juridiction compétente, c'est-à-dire, en cas d'accord des parties, par le juge de paix, et en cas de désaccord, par le tribunal de première instance saisi de plein droit sur transmission du dossier faite par le juge de paix.En conséquence, la victime d'un accident du travail n'est pas recevable à présenter devant le tribunal de première instance une demande de majoration de rente pour faute inexcusable de l'employeur lorsque, sur accord des parties, le juge de paix a déjà fixé les indemnités qui lui étaient dues.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1962-10-09;c6 ?
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