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20/03/1962 | MAROC | N°C138

Maroc | Maroc, Cour suprême, 20 mars 1962, C138


Texte (pseudonymisé)
138-61/62 20 mars 1962 6867
LacosteGaston
C/Société de Gérance des Ets Ae Af et compagnie d'assurances La Concorde.
Rejet du pourvoi formé contre un arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 2 juillet 1960.
La Cour,
SUR LE MOYEN UNIQUE
Attendu qu'il résulte de la procédure et des énonciations de l'arrêt attaqué (Rabat 2 juillet 1960) que Ag Ad, employé au service de la Société de Gérance des Ai Ae Af et qui résidait à Ac Ab Aj où son épouse est boulangère. a été victime, le 2 novembre 1955, sur la route d'Ouezzane, d'un accident de la circulation entraînant u

ne incapacité temporaire et une invalidité permanente ; qu'il reproche à l'arrêt attaqu...

138-61/62 20 mars 1962 6867
LacosteGaston
C/Société de Gérance des Ets Ae Af et compagnie d'assurances La Concorde.
Rejet du pourvoi formé contre un arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 2 juillet 1960.
La Cour,
SUR LE MOYEN UNIQUE
Attendu qu'il résulte de la procédure et des énonciations de l'arrêt attaqué (Rabat 2 juillet 1960) que Ag Ad, employé au service de la Société de Gérance des Ai Ae Af et qui résidait à Ac Ab Aj où son épouse est boulangère. a été victime, le 2 novembre 1955, sur la route d'Ouezzane, d'un accident de la circulation entraînant une incapacité temporaire et une invalidité permanente ; qu'il reproche à l'arrêt attaqué d'avoir écarté l'application à son profit de la législation sur les accidents du travail, au motif qu'il avait été détourné de son itinéraire dans un intérêt personnel, alors que l'accident s'est produit sur une voie qui constituait son itinéraire normal pour rejoindre sa résidence et le lieu de son travail ;
Mais attendu qu'après avoir énoncé le principe selon lequel l'indemnité est due si la victime blessée au cours du trajet de sa résidence au lieu de son travail ou durant le trajet de retour, dans la mesure où le parcours n'a pas été interrompu ou détourné pour un motif dicté par l'intérêt personnel de la victime, la Cour d'appel retient qu'en admettant que Lacoste soit venu d'Ouezzane comme il le prétend, il a en tout cas interrompu et détourné son trajet en donnant place dans sa voiture à l'ouvrier qui travaille dans sa boulangerie, en chargeant des sacs de farine déposés chez Boissot, puis en allant chercher 50 kilos de farine dans un autre magasin ; que la Cour d'appel en a justement déduit que l'accident s'est produit après une interruption du trajet de retour, dictée par l'intérêt personnel de la victime et sans aucune relation avec ses occupations à la société «Hamelle» ;
D'où il suit que la Cour d'appel n'encourt pas les griefs du pourvoi et que, par son arrêt régulièrement motivé, elle a donné une base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS
Rejette le pourvoi.
Président: M Hauw-Rapporteur: M Zamouth-Avocat général: M AB C Aa Ah
Observations
«L'assimilation» entre l'accident de trajet et l'accident du travail «ne vaut que dans la mesure où le parcours n'a pas été interrompu ou détourné pour un motif dicté par l'intérêt personnel et étranger aux nécessités essentielles de la vie courante, ou indépendant de l'emploi» (art 6, dernier al Dh 25 juin 1927 tel que modifié en la forme par le Dh 6 févr 1963). La disposition identique du droit français (art 415-1 C de la sécurité sociale) a donné lieu à une jurisprudence abondante dont voici une brève analyse ;
l'interruption ou le détour ne se présument pas et il appartient à l'adversaire de la victime d'en rapporter la preuve, même si l'accident s'est produit après l'expiration du délai normal du trajet de retour (Civ IV, 10 févr 1955, D.1956 23 ; Civ Rv, 19 avr 1956, B 357). Toutefois, lorsque le détour ou l'interruption sont établis, il incombe à la victime de prouver qu'ils étaient dictés par les nécessités essentielles de la vie courante ou qu'ils n'étaient pas indépendants de l'emploi ( Civ IV 4 mars 1965, D 1965.373 ; 29 mars 1966, B 349 22 avr 1966, B 377).
Ont été notamment considérés comme dictés par ces nécessités, les détours ou interruptions accomplis: en vue de l'achat de denrées alimentaires (Civ IV, 15 févr 1962, B 201 et D 1962, somm. 59 ; 10 janv 1963, D 1963.134), de lait diététique pour un nourrisson (Civ IV, 5 juil 1966, B 685) ; en vue de prendre un repas au restaurant, à la sortie du travail un samedi à midi avant un long trajet de retour (Civ IV, 17 janv 1963, B 71 et D 1963, somm 68) ; en vue de se rendre chez le coiffeur, alors qu'il était constaté que le salarié ne pouvait se faire couper les cheveux ni sur les lieux de son travail ni sur les lieux de sa résidence (Civ IV, 13 oct 1966, B 785). N'a pas été considéré comme tel le détour accompli par un salarié qui, après son travail, se rend chez un dentiste installé dans une localité située en dehors de la route reliant le lieu du travail à son domicile (Civ IV, 24 mai 1966, B 517) ; et ne sont pas considérés comme tels, sauf circonstances particulières, les arrêts dans un débit de boissons (v Rép soc, V° Accident du travail, par Georges Levasseur, n 993 et 994, et les décisions citées, notamment Ch réun, 27 avr 1956, D 1956.468, 1re espèce ; adde: Civ IV, 4 mai 1961, B 464 et D 1961, somm 115).
Ont été considérés comme n'étant pas «indépendants de l'emploi» les détours ou interruptions accomplis: par un ouvrier pour défendre un contremaître attaqué par des grévistes Civ IV, 5 févr 1954, B 88 et D somm 9) ; par un ouvrier pour participer à la réunion d'une commission dépendant du comité d'entreprise et dont il était membre (Civ IV, 14 janv 1954, D 1955, somm 9) ; par un ouvrier travaillant dans un atelier poussiéreux et démuni d'installation de nettoyage, en vue de prendre comme chaque jour une douche dans un jardin qui lui appartenait (Ch réun 27 avr 1956, préc, 2e espèce).


Synthèse
Numéro d'arrêt : C138
Date de la décision : 20/03/1962
Chambre civile

Analyses

ACCIDENT DU TRAVAIL-Accident de trajet-Conditions.

N'est pas assimilable à un accident du travail, l'accident survenu à un salarié pendant le trajet d'aller ou de retour entre sa résidence et le lieu du travail lorsque ce parcours a été détourné ou interrompu pour un motif dicté par l'intérêt personnel de la victime et étranger aux nécessités essentielles de la vie courante, ou indépendant de l'emploi. Donne en conséquence une base légale à sa décision la Cour d'appel qui, pour refuser le bénéfice de la législation sur les accidents du travail à l'employé d'une société victime d'un accident de la circulation entre le lieu du travail et sa résidence constate que la victime s'est détournée de son trajet pour charger des sacs de farine destinés à la boulangerie exploitée par son épouse.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1962-03-20;c138 ?
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