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22/06/1961 | MAROC | N°P893

Maroc | Maroc, Cour suprême, 22 juin 1961, P893


Texte (pseudonymisé)
Rejet du pourvoi formé par S. Ad contre un jugement rendu le 14 janvier 1961 par le tribunal de première instance de Ac qui l'a condamné à une amende avec sursis pour abandon de famille ainsi qu'à payer à B. Raymonde la somme de 25 000 francs à titre de dommages-intérêts.
22 juin 1961
Dossier n° 7384
La Cour,
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, en ses deux branches, pris de la violation des formes substantielles de procédure, violation de la loi interne, notamment des articles 347, 7°, 352, 2°, du Code de procédure pénale, ensemble de la loi française du 7 février 19

24 reprise par l'article 1er de la loi du 23 juillet 1942 et rendue applicab...

Rejet du pourvoi formé par S. Ad contre un jugement rendu le 14 janvier 1961 par le tribunal de première instance de Ac qui l'a condamné à une amende avec sursis pour abandon de famille ainsi qu'à payer à B. Raymonde la somme de 25 000 francs à titre de dommages-intérêts.
22 juin 1961
Dossier n° 7384
La Cour,
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION, en ses deux branches, pris de la violation des formes substantielles de procédure, violation de la loi interne, notamment des articles 347, 7°, 352, 2°, du Code de procédure pénale, ensemble de la loi française du 7 février 1924 reprise par l'article 1er de la loi du 23 juillet 1942 et rendue applicable au Maroc par le dahir du 12 janvier 1943, et plus particulièrement l'article 3 de cette loi, défaut ou insuffisance de motifs, manque de base légale,
« En ce que le jugement du 14 janvier 1961 a confirmé le jugement du 30 décembre 1959 qui a déclaré l'exposant coupable du délit d'abandon de famille, au motif que S. a acquiescé au jugement du tribunal de première instance de Ac confirmé par arrêt de la Cour du 8 mai 1957 ;
« Alors que d'une part le jugement du tribunal de première instance de Ac du 18 décembre 1956, auquel l'exposant n'a d'ailleurs pas acquiescé puisqu'il a été frappé d'appel, a infirmé et non pas confirmé par l'arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 8 mai 1957, lequel devait dès lors être signifié et rendu exécutoire par la procédure appropriée ;
« d'autre part ni le tribunal de paix ni le tribunal de première instance de Ac qui a adopté les motifs du précédent, n'ont répondu aux moyens de forme, concernant la production des titres, et de fond concernant l'élément intentionnel du délit » ;
Attendu que S. a été poursuivi du chef d'abandon de famille pour n'avoir pas versé à sa femme le montant intégral de la pension alimentaire de 50 000 franc par mois, au paiement de laquelle il a notamment été condamné par un jugement du tribunal de première instance de Ac , en date du 7 juillet 1954, devenu définitif ; que dans ces conditions les poursuites pénales, régulièrement engagées devant une juridiction du Maroc en vue de la répression d'un délit commis sur le territoire du Royaume, puisque la pension devait y être payée, n'étaient aucunement subordonnées à une procédure d'exequatur en France d'un arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 8 mai 1957, qui, à l'occasion d'une instance validité de saisie-arrêt, a déclaré mal fondée la thèse de S. tendant en raison de l'existence de revenus de biens communs à limiter à 40 000 francs la somme payable mensuellement en espèces ;
Attendu que le jugement d'appel attaqué déclare expressément confirmer par adoption de motifs la décision du premier juge qui précise « que le quantum d'une pension alimentaire et les revenus pouvant provenir d'une communauté de biens ne peuvent être confondus »; que dès lors il importe peu que par des énonciations surabondantes et erronées les juges d'appel aient inexactement qualifié l'arrêt du 8 mai 1957 et aient à tort fait mention d'un acquiescement de S.;
Attendu que la preuve n'étant rapportée ni d'un dépôt de conclusions devant la juridiction d'appel ni d'une reprise régulière devant cette juridiction des conclusions de première instance, S. ne saurait imputer aux juges d'appel une absence de réponse ou une omission de statuer ; qu'il ne peut, d'autre part, exciper de la non-production au parquet des titres de créance, cette production n'étant pas exigée à peine de nullité ;
Attendu, enfin, que le jugement de paix confirmé en appel par adoption de motifs énonce que S. « a bien commis les faits qui lui sont reprochés » et que l'énoncé de ces faits dans la prévention comporte le mot « volontairement »; que d'ailleurs, les juges répressifs ayant expressément refusé d'assimiler à la pension alimentaire les revenus pouvant provenir d'une communauté de biens, ce rejet de la prétention émise par S. de déduire de la pension à verser en espèces une somme de dix
mille francs qui aurait correspondu au loyer d'un immeuble commun, implique constatation du caractère volontaire du défaut de paiement de cette somme;
D'où il suit que le moyen est mal fondé en ses deux branches ;
PAR CES MOTIFS
Rejette le pourvoi.
Président : M Ab . - Rapporteur : M. Aa . - Avocat général : M Ruolt - Avocat : Me. George Lévy.
Observations
I.- Sur le premier point : Aux termes des al. 1er et 2 de l'art. 3 de la loi du 23 juil. 1942, relative à l'abandon de famille, r. a. Dh. 12 janv. 1943, « la pension ou les subsides déterminés par le juge seront payés ou fournis au domicile ou à la résidence de celui qui doit les recevoir, sauf décision contraire du juge ».
eret 2, sera celui du domicile ou de la résidence de la personne qui doit recevoir la pension ou bénéficier des subsides» ;
« Le tribunal compétent pour connaître des délits visés aux art. 1
Le délit d'abandon de famille se consomme dans le lieu où la pension doit être payée et les juridictions marocaines étaient compétentes pour connaître du délit commis par le prévenu, domicilié en France, puisque la pension devait être payée à Ac .
L'arrêt de la Cour d'appel de Rabat, juridiction marocaine, intervenu à l'occasion d'une instance en validité de saisie-arrêt, était exécutoire sur le territoire marocain et les poursuites pénales en abandon de famille n'étaient pas subordonnées à une procédure d'exequatur en France de cette décision.
Cet arrêt ne pouvait d'ailleurs avoir une influence sur les poursuites puisqu'il n'avait fait que rejeter un moyen du prévenu tendant à ce que la pension alimentaire à laquelle il avait été condamné soit réduite de 10 000 francs par mois en raison du fait que sa femme, bénéficiaire de la pension, aurait déjà perçu cette somme sur les loyers d'un immeuble commun.
II. -Sur les deuxième et troisième points: V. la note, troisième point, sous l'arrêt n° 787 du 5 janv. 1961.
III. -Sur le quatrième point : Si l'al. 3 de l'art. 3 de la loi du 23 juil. 1942 prévoit que « le titre de pension et tous actes de poursuites ou d'exécution auxquels il aurait été procédé devront être déposés entre les mains du procureur . en même temps que la plainte », cette disposition n'est pas prévue à peine de nullité (Crim. 4 mars 1958, B.C. 206 ; V. dans le même sens, sous l'empire de la loi 7 févr. 1924, modifiée par la loi 3 avr. 1928, Crim. 11 mai 1944, B.C. 121).
IV. -Sur les cinquième et sixième points : V. la note, deuxième point, sous l'arrêt n° 735 du 3 nov. 1960.


Synthèse
Numéro d'arrêt : P893
Date de la décision : 22/06/1961
Chambre pénale

Analyses

1° ABANDON DE FAMILLE - Abandon pécuniaire - Procédure - Poursuites engagées devant une juridiction marocaine - Pension payable au Maroc - Débiteur de la pension docmicilié en France - Procédure d'exequatur d'un arrêt statuant sur la validité d'une saisie-arrêt (non). 2° JUGEMENTS ET ARRETS - Omission de statuer - Conclusions des parties - Conditions. 3° CASSATION - Ouvertures à cassation - Omission de statuer. 4° ABANDON DE FAMILLE - Titre de créance - Absence de production -Nullité des poursuites (non).5° ABANDON DE FAMILLE - Abandon pécuniaire - Eléments constitutifs - Défaut volontaire de paiement - Constatation.6° JUGEMENTS ET ARRETS - Motifs suffisants - Abandon de famille.

1° Les poursuites pénales, engagées devant une juridiction marocaine en vue de la répression d'un délit d'abandon de famille commis sur le territoire du Royaume, puisque la pension devait y être payée, ne sont pas subordonnées, lorsque le débiteur est domicilié en France, à une procédure d'exequatur en France d'un arrêt d'une Cour d'appel marocaine qui, à l'occasion d'une instance en validité de saisie-arrêt, a déclaré mal fondée la thèse du prévenu tendant, en raison de l'existence de revenus de biens communs, à limiter la somme payable mensuellement en espèces.2° et 3° Lorsque la preuve n'est rapportée ni d'un dépôt de conclusions devant la juridiction d'appel ni d'une reprise régulière devant cette juridiction des conclusions de première instance, le prévenu ne saurait imputer aux juges d'appel une absence de réponse ou une omission de statuer.4° Le dépôt du titre de pension entre les mains du procureur du Roi en même temps que la plainte en abandon de famille n'est pas exigé à peine de nullité.5° et 6°La décision qui, en matière d'abandon de famille, énonce que le prévenu « a bien commis les faits qui lui sont reprochés », alors que l'énoncé de ces faits dans la prévention comporte le mot « volontairement », caractérise le défaut volontaire de paiement de la pension. De même, lorsque les juges répressifs ont refusé expressément d'assimiler à la pension alimentaire les revenus pouvant provenir d'une communauté de biens, le rejet de la prétention du prévenu de déduire de la pension à verser en espèces la somme qui aurait correspondu au loyer d'un immeuble commun, implique constatation du caractère volontaire du défaut de paiement de cette somme.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1961-06-22;p893 ?
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