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25/10/1960 | MAROC | N°C13

Maroc | Maroc, Cour suprême, 25 octobre 1960, C13


Texte (pseudonymisé)
13-60/61
Compagnie des Chemins de Fer du Maroc.
C/ Heritiers de Aa Ab Aa et compagnie d'assurances «La protectrice».
Cassation d'un arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 3 Novembre 1956.
La Cour,
SUR LE SECOND MOYEN:
Attendu qu'il résulte des éléments de la procédure et des énonciations de l'arrêt attaqué qu'à la suite d'un accident de la circulation survenu le 10 avril 1951 entre une automobile conduite par feu Aa Ab Aa assuré à la «Protectrice» et une automobile appartenant à la Compagnie des chemins de Fer du Maroc conduite par un de ces préposés Ad et

dans laquelle avait pris place l'ingénieur de la compagnie, Daumas, lesquels furent...

13-60/61
Compagnie des Chemins de Fer du Maroc.
C/ Heritiers de Aa Ab Aa et compagnie d'assurances «La protectrice».
Cassation d'un arrêt de la Cour d'appel de Rabat du 3 Novembre 1956.
La Cour,
SUR LE SECOND MOYEN:
Attendu qu'il résulte des éléments de la procédure et des énonciations de l'arrêt attaqué qu'à la suite d'un accident de la circulation survenu le 10 avril 1951 entre une automobile conduite par feu Aa Ab Aa assuré à la «Protectrice» et une automobile appartenant à la Compagnie des chemins de Fer du Maroc conduite par un de ces préposés Ad et dans laquelle avait pris place l'ingénieur de la compagnie, Daumas, lesquels furent tous deux grièvement blessés, est intervenu un jugement correctionnel répartissant les responsabilités à raison de trois quarts à la charge d'Hamadi et de un quart à la charge d'lbarra que la compagnie des Chemins de Fer du Maroc, ayant exercé le recours prévu à l'article 7 du dahir du 25 juin 1927, a réclamé au tiers responsable et a son assureur le remboursement des sommes exposées ainsi que sa substitution dans le service des rentes allouées que l'arrêt attaqué a refusé de faire droit à la demande de remboursement des trois quarts du montant de la contribution versée par la compagnie au Fonds de garantie à la suite de l'accident du travail survenu à l'ingénieur Daumas ;
Attendu que le pourvoi reproche à la Cour d'appel d'avoir ainsi statué alors que le tiers responsable doit réparer l'intégralité du préjudice subi et rembourser à l'employeur toutes les sommes exposées à la suite de l'accident en tenant compte du partage de responsabilité ;
Mais attendu que l'arrêt attaque relève à bon droit que les taxes destinées à l'alimentation du Fonds de garantie créé par l'article 25 du dahir du 25 juin 1927 constituent des contributions personnelles d'un caractère fiscal dues par le chef d'entreprise qui les acquitte, s'il est assuré, quand il paie sa prime et, s'il n'est pas assuré, lors de la fixation du capital constitutif que la Cour d'appel a pu dès lors valablement en déduire que l'accident étant l'occasion de l'exigibilité de la taxe n'en est pas la cause et que le tiers responsable ne peut être condamné à rembourser cette contribution ;
D'ou il suit que le second moyen ne l'eut être accueilli.
MAIS SUR LE PREMIER MOYEN:
Vu l'article 7 du dahir du 25 juin 1927 modifié par le dahir du 20 septembre 1946;
Attendu, en vertu de ce texte, que l'indemnité que la victime d'un accident du travail obtient, conformément au droit commun, de l'auteur de cet accident exonère le chef d'entreprise, à due concurrence des indemnités légales mises à la charge du tiers, des obligations qui lui incombent en vertu du texte précité, et que l'action contre le tiers responsable peut même être exercée par l'employeur ou son assureur pour faire valoir leurs droits propres ;
Attendu que la Cour d'appel, saisie du recours exercé par la Compagnie des chemins de Fer du Maroc pour faire valoir ses droits propres contre les Héritiers d'Hamadi conformément à l'article 7 alinéa 13 du dahir susvisé, a condamné ces derniers à rembourser à la Compagnie des Chemins de Fer du Maroc les trois quarts du montant des sommes versées à Ad son préposé, a motif que la victime n'avait pas réclamé à ce tiers l'indemnité de droit commun prévue par l'article 7, alinéa 1er ;
Or, attendu que la Compagnie des Chemins de Fer du Maroc exerçant contre le tiers responsable en vertu de l'alinéa 13 de l'article 7 du dahir du 25 juin 1927 l'action de la victime pour faire valoir ses droits propres, il appartenait aux juges du fond sur justification du préjudice subi par la victime d'évaluer le montant de la réparation qui aurait pu être mise à la charge du tiers selon le droit commun et à concurrence de laquelle ladite compagnie est en droit d'être exonérée ;
Qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a faussement appliqué donc violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS
Casse.
Président: M Mazoyer-Rapporteur: M Ammor-Avocat général: M CA B Ac, Cohen.
Observations
I-Le Fonds de garantie des victimes d'accident du travail prévu par les articles 317 et s Dh 25 juin 1927 tel que modifié en la forme par dh. 6 févr. 1963 (ex-art 25 Dh 25 juin 1927) est alimenté par une contribution des employeurs. Cette contribution est acquittée sous deux formes différentes, selon que l'employeur est ou n'est pas assuré: s'il est assuré, elle est recouvrée périodiquement par l'intermédiaire de la compagnie d'assurances en même temps que les primes, suivant un procédé analogue à celui qui est prévu pour le Fonds de garantie automobile (art 4 Dh 22 févr 1955) ; s'il n'est pas assuré, elle est liquidée en fonction du capital constitutif de la rente mise à sa charge après chaque accident du travail dont un de ses employés a été victime. L'arrêt rapporté décide que l'employeur non assuré ne peut réclamer au tiers responsable le remboursement de la contribution ainsi versée. La solution inverse soutenue par le demandeur au pourvoi aboutirait à défavoriser injustement les employeurs assurés qui ne pourraient prétendre à un tel remboursement elle se heurte, d'autre part, au caractère fiscal de la contribution qui constitue une taxe imposée aux employeurs, et au fait que, dès lors, l'accident qui en déclenche le paiement par l'employeur non assuré, n'est pas la cause mais l'occasion de ce paiement.
II-L'article 173 Dh 25 juin 1927 tel que modifié en la forme par Dh 6 févr 1963 (ex-art. 7, al. 13, Dh. 25 juin 1927) permet à l'employeur ou à son assureur d'exercer un recours de droit commun contre le tiers responsable, même en l'absence de recours de la victime. En pareil cas il appartient à la juridiction saisie: d'évaluer le préjudice subi par la victime appelée en déclaration de jugement commun (art 175 actuel ex-art. 7, al. 13), de statuer sur le partage de responsabilité, de fixer en fonction de ce partage l'indemnité à la charge du tiers, enfin d'exonérer à due concurrence de cette indemnité l'employeur ou son assureur des réparations forfaitaires légales versées à la victime (art 183 actuel-ex art. 7, al. 3).
Au lieu de procéder ainsi, la Cour d'appel avait, conformément à une décision antérieure de la juridiction répressive, implicitement évalué à trois quarts la responsabilité du tiers responsable, et à un quart celle de la victime, puis, sans évaluer le préjudice subi par celle-ci, ni fixer l'indemnité à la charge du tiers, elle avait condamné le tiers à rembourser, à l'employeur les trois quarts des sommes versées par ce dernier à la victime.
Une telle décision encourait la cassation pour violation des dispositions précitées. Il n'en eut été autrement que si la responsabilité avait été partagée, mon entre le tiers et la victime, mais entre le tiers et l'employeur ou l'un de ses préposés autre que la victime en effet, dans cette hypothèse prévue aux art. 172 (ex art. 7, al 1er) et 184 (ex art. 7 al. 4), «l'employeur est exonéré proportionnellement au taux de responsabilité du tiers», si bien qu'en l'absence de recours de la victime il n'est pas nécessaire d'évaluer le préjudice subi par celle-ci.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C13
Date de la décision : 25/10/1960
Chambre civile

Analyses

1°ACCIDENT DU TRAVAIL-Tiers responsable-Recours de l'employeur-Contribution versée au fonds de garantie-Remboursement par le tiers (non). 2°ACCIDENT DU TRAVAIL-Tiers responsable-Recours de l'employeur Exonération à due concurrence des indemnités mises à la charge du tiers.

1°La contribution que les employeurs sont tenus de verser pour alimenter le Fonds de garantie des victimes d'accident du travail a un caractère fiscal ; l'employeur assuré s'en acquitte lors du paiement des primes d'assurances, l'employeur non assuré s'en acquitte lors de la fixation du capital constitutif de la rente allouée à la victime ; dans ce dernier cas l'accident est donc l'occasion et non la cause du paiement de cette taxe, et le tiers responsable ne peut dès lors être condamné à en rembourser le montant.2°La juridiction saisie du recours droit commun exercé par l'employeur de la victime d'un accident du travail contre le tiers responsable de cet accident, doit, en cas de partage de responsabilité entre la victime et le tiers, exonérer l'employeur à due concurrence des indemnités mises à la charge du tiers elle ne peut, sans violer l'article 7 du dahir du 25 juin 1927, condamner le tiers à rembourser à l'employeur une fraction des indemnités par lui versées à la victime.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1960-10-25;c13 ?
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