La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/06/1960 | MAROC | N°C221

Maroc | Maroc, Cour suprême, 22 juin 1960, C221


Texte (pseudonymisé)
221-59/60 22 juin 1960 1817
Ae Af c/ Ab Aa.a.
Cassation d'un jugement du tribunal de première instance de meknès du 9 juillet 1958.
La Cour,
SUR LE PREMIER MOYEN
Vu l'article 451 du dahir des obligations et contrats.
Attendu que l'autorité de la chose jugée a lieu à l'égard, non seulement de ce qui en fait l'objet, mais encore de ce qui en est la conséquence nécessaire et directe ;
Attendu qu'il résulte des productions et du jugement attaqué que sous la direction de Heller, architecte, Ae a effectué, dans un immeuble appartenant à l'Office des Anciens Combattan

ts, des travaux de menuiserie que Ab a recouverts de peinture et que, la menuise...

221-59/60 22 juin 1960 1817
Ae Af c/ Ab Aa.a.
Cassation d'un jugement du tribunal de première instance de meknès du 9 juillet 1958.
La Cour,
SUR LE PREMIER MOYEN
Vu l'article 451 du dahir des obligations et contrats.
Attendu que l'autorité de la chose jugée a lieu à l'égard, non seulement de ce qui en fait l'objet, mais encore de ce qui en est la conséquence nécessaire et directe ;
Attendu qu'il résulte des productions et du jugement attaqué que sous la direction de Heller, architecte, Ae a effectué, dans un immeuble appartenant à l'Office des Anciens Combattants, des travaux de menuiserie que Ab a recouverts de peinture et que, la menuiserie défectueuse ayant été en partie refaite par Ae, Ab a été contraint à de nouveaux travaux que Ab, autorisé par le juge, a fait pratiquer une saisie-arrêt, entre les mains du propriétaire de l'immeuble sur toutes sommes que celui-ci devrait à l'entrepreneur de menuiserie pour sûreté du paiement du montant de son ouvrage dont il considérait que Ae était débiteur à son égard que, saisie au principal par Ae le tribunal de paix par jugement en date du 29 septembre 1955, a ordonné la mainlevée de cette saisie et condamné Ab à payer à Ae des dommages et intérêts, en raison de ce qu'aucun lien de droit n'existait entre eux et que la mesure conservatoire était abusive ;
Or, attendu que la décision attaquée, qui a condamné Ae à payer à Ab le montant
du prix de ses travaux, a refusé de reconnaître au jugement du 29 septembre 1955 force de chose jugée, au motif qu'il avait statué sur une demande dont l'objet n'était pas identique, les parties ayant au surplus des qualités différentes dans les deux procédures que le tribunal a violé ainsi les dispositions de l'article 451 du dahir des obligations et contrats et les principes régissant la matière ; qu'en effet les deux instances ayant même cause, avaient nécessairement pour conséquence directe de reconnaître un lien de droit entre Ae et Ab, le premier, demandeur à la mainlevée, déniant le droit de créance de Ab qui, demandeur à l'instance en paiement, prétendait à ce droit, les deux parties figurant aux deux instances en la même qualité de créancier et de débiteur ;
Que le moyen est fondé ;
PAR CES MOTIFS
et sans qu'il y ait lieu d'examiner les deuxième et troisième moyens,
Casse.
Président: M Drappier-Rapporteur: Mme A général: M Bocquet-Avocats: MM Portet, Narboni.
Observations
L'autorité de la chose jugée n'existe qu'à la triple condition «que la demande soit entre les mêmes parties et formée par elles et contre elles en la même qualité», «que la demande soit fondée sur la même cause», et «que la chose demandée soit la même» ; «elle ne s'attache qu'au dispositif du jugement et n'a lieu qu'à l'égard de ce qui en fait l'objet ou de ce qui en est la conséquence nécessaire et directe» (art 451 C obl. contr).
En l'espèce, bien que le demandeur à la première procédure ait été défendeur dans la seconde, les deux parties avaient agi dans chacune en la même qualité, l'une de débitrice, l'autre de créancière ; la première condition était donc réalisée. La seconde l'était également puisque la cause unique des deux demandes était la créance prétendue de Ab à l'égard de Ae. L'existence de la troisième condition était discutable, et l'arrêt rapporté mérite de sérieuses réserves de ce chef: la première demande avait seulement pour objet la mainlevée de la saisie pratiquée par le créancier, tandis que la seconde tendait à faire constater la réalité de la créance ; cependant, la décision qui avait ordonné la mainlevée de la saisie était fondée, non sur des motifs relatifs à celle-ci, mais uniquement sur la constatation de l'absence de la créance invoquée par le saisissant ; ne pouvait-on, dès lors, estimer que cette constatation avait autorité de chose jugée comme étant nécessairement et directement liée à l'objet principal de la décision sur la saisie? Envisageant une hypothèse voisine, M Ad Ac (Rép pr Civ, V° Chose jugée, n 157) estime précisément que le défendeur à l'action en paiement d'un capital peut invoquer l'exception de chose jugée lorsque, se fondant sur ce que le capital n'était pas dû, une décision précédente a rejeté la demande en paiement des intérêts (v cependant, Civ I, 27 déc 1963, B 478 qui, dans une espèce identique à celle de l'arrêt rapporté, adopte la solution inverse) mais un tel raisonnement n'aurait été valable dans la présente espèce que Si la juridiction appelée à se prononcer sur la mainlevée de la saisie avait été compétente ratione materiae pour connaître également de la demande en paiement or, tel n'était pas le cas puisque, à raison de son montant (109 dirhams), cette demande relevait de la compétence du tribunal de première instance jugeant en premier et dernier ressorts (art 16 C proc civ), tandis que la mainlevée de la saisie avait été ordonnée par le tribunal de paix statuant à charge d'appel, qui n'était pas compétent pour statuer sur l'existence d'une telle créance.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C221
Date de la décision : 22/06/1960
Chambre civile

Analyses

CHOSE JUGEE-Chose jugée au civil-Autorité sur le civil-Identité de qualité des parties- Identité d'objet-Etendue.

Lorsqu'un jugement devenu irrévocable a ordonné la mainlevée d'une saisie-arrêt au motif qu'aucun lien de droit n'existait entre le créancier saisissant et son prétendu débiteur, doit être cassé le jugement qui méconnaissant l'autorité qui s'attachait aux conséquence nécessaires et directes de la chose ainsi jugée, a reconnu l'existence de ce même lien de droit en condamnant le débiteur à verser au créancier la somme qu'il lui réclamait.


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1960-06-22;c221 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award