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12/02/1959 | MAROC | N°P201

Maroc | Maroc, Cour suprême, 12 février 1959, P201


Texte (pseudonymisé)
Cassation sur le pourvoi formé par la Cie d'Assurances « La France Africaine » contre un jugement correctionnel rendu le 15 juillet 1958 par le tribunal de première instance de Ao qui a déclaré irrecevable l'appel interjeté par ladite compagnie d'un jugement du tribunal de paix de Ao.
La Cour,
SUR LE MOYEN, en sa première branche, pris de la violation de l'article 189 du dahir formant Code de procédure civile, défaut de motifs et manque de base légale ;
Attendu que le jugement attaqué se borne à affirmer que : « l'appel interjeté par la Compagnie d'assurances seule est

irrecevable en ce qu'il porte sur le montant des dommages - intérêts al...

Cassation sur le pourvoi formé par la Cie d'Assurances « La France Africaine » contre un jugement correctionnel rendu le 15 juillet 1958 par le tribunal de première instance de Ao qui a déclaré irrecevable l'appel interjeté par ladite compagnie d'un jugement du tribunal de paix de Ao.
La Cour,
SUR LE MOYEN, en sa première branche, pris de la violation de l'article 189 du dahir formant Code de procédure civile, défaut de motifs et manque de base légale ;
Attendu que le jugement attaqué se borne à affirmer que : « l'appel interjeté par la Compagnie d'assurances seule est irrecevable en ce qu'il porte sur le montant des dommages - intérêts alloués à la partie civile ; que la Compagnie peut faire en son nom appel sur la substitution prononcée à son encontre, mais non sur le montant des condamnations prononcées à l'encontre de son assuré » ;
Attendu que ces affirmations ne sont assorties d'aucun motif ; que le tribunal ajoute, il est vrai, que la compagnie d'assurances « eut pu faire appel sous le nom de son assuré en usant de la clause de direction du procès » ; mais attendu qu'il s'agit là d'une simple suggestion qui n'est pas le soutien nécessaire du dispositif de la décision attaquée, et qu'il est en outre admis en jurisprudence qu'au cas de condamnation pénale de l'assuré, l'assureur ne peut en vertu de la clause de direction du procès imposer l'assuré, ou faire au nom de ce dernier contre son gré, ni un appel général, ni même un appel limité aux intérêts civils ;
D'où il suit qu'abstraction faite d'une considération surabondante inexacte, le jugement attaqué n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS
Casse et annule le jugement du tribunal correctionnel de première instance de Ao du 15 juillet 1958 ;
Et pour qu'il soit à nouveau statué conformément à la loi, renvoie la cause et les parties devant le tribunal correctionnel de première instance de Rabat.
Président : M. Ab. - Rapporteur : M. Aa. - Avocat général : M. Ah. -Avocats : MM. Laporte, Melia.
Observations
I. - Sur le premier point : « La base de la décision doit se trouver dans le rapprochement des faits constatés avec le texte de loi dont il est fait application ; si, de ce rapprochement, il résulte clairement que la loi a été violée ou faussement appliquée, il y a lieu à cassation pour violation de la loi ; mais quand les motifs ne permettent pas de reconnaître si les éléments de fait nécessaires pour justifier l'application de la loi se rencontrent en la cause, il y a manque de base légale » (Faye, n° 119).
Une décision manque de base légale lorsque, par exemple, les juges du fond ont condamné un prévenu sans que les circonstances de fait par eux relevées permettent à la Chambre criminelle de vérifier Si les éléments constitutifs de l'infraction se trouvent réunis (Crim. 23 juill. 1925, B.C. 236 ; 6 mars 1930, B.C. 71 ; 25 févr. 1932, B.C.51 ; 31 janv. 1946, B.C. 43 ; 3 juin 1948, B.C. 149) ou lorsqu'ils décident qu'une personne a commis une faute sans indiquer les faits qui la constituent (Civ. 10 nov. 1925, Gaz. Pal. 1926. 1. 41) ou lorsqu'ils omettent d'établir la relation de cause à effet entre la faute et le dommage (Civ. 22 nov. 1910, S. 1914. 1. 393).
Sur le manque de base légale, considéré comme un moyen de fond, dont les applications
sont très variées et qu'il ne faut pas confondre avec le défaut de motifs, vice de forme (Tournon, Le défaut de motifs, vice de forme des jugements, J.C.P. 1946. 1.553 ; Rép. pr. civ. V° Cassation, par Ac Al, n° 1454) V. Aj Am, La description du délit par le juge. note sous Crim. 7. janv. 1937, D.P. 1937. 1.53 ; Aj Am, Les énonciations nécessaires. base légale des jugements, J.C.P. 1946.1.541 Le Clec'h, Moyens de forme et moyens de fond devant la Cour de Cassation, J.C.P. 1947. 1.634 Le Clec'h, De l'insuffisance de motifs, manque de base légale des décisions judiciaires, J.C.P. 1948. 1. 690 ; Le Clec'h, Manque de base légale et violation de la loi en matière civile, J.C.P. 1948. 1. 720 Af Ap, Le manque de base légale, pierre de touche de la technique juridique, J.C.P. 1959.1.775 Glasson, Tissier et Morel, t. 3, n° 952 Morel, n° 665 ; Cuche et Vincent, n° 474 Ag Ai, La distinction du fait et du droit, n° 282 ; Le Clec'h, fasc. III, nos 259 s. Rép. Pr. civ. V° Cassation. par Ac Al, nos 1448 s. ; Rép. crim., V° Cassation, par Ae Ad, n° 343 ; Rép. civ. V° Cassation, par Ag Ai, n° 36 ; Nouv. rép. V° Cassation, n° 250.
II - Sur le deuxième point : V. An Ak et Perraud-Charmantier, Code des assurances, n°859 ; Mazeaud t. 3 n° 2676 et note 3, p. 874.
__________


Synthèse
Numéro d'arrêt : P201
Date de la décision : 12/02/1959
Chambre pénale

Analyses

1° APPEL CORRECTIONNEL - Qualité pour appeler - Assureur - Appel sur le montant des dommages-intérêts.2° ASSURANCES TERRESTRES - Obligations de l'assureur - Clause de direction des procès - Portée.

1° Manque de base légale l'arrêt qui se borne à affirmer que l'appel interjeté par la compagnie d'assurances seule est irrecevable en ce qu'il porte sur le montant des dommages-intérêts alloués à la partie civile.2° En cas de condamnation pénale de l'assuré, l'assureur ne peut, en vertu de la clause de direction du procès imposer à l'assuré, ou faire au non de ce dernier, contre son gré, ni un appel général ni même un appel limité aux intérêts civils


Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2019
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ma;cour.supreme;arret;1959-02-12;p201 ?
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