La Cour Suprême, Formation de contrôle, Chambre Administrative, en son audience publique ordinaire tenue au Palais de Justice à
Ai, le dix neuf novembre deux mil trois, a rendu l'arrêt suivant :
Vu l'ordonnance n° 60-048 du 22 juin 1960 fixant la procédure à suivre devant la Chambre Administrative de la Cour Suprême modifiée par
l'ordonnance n° 62-073 du 29 septembre 1962 ;
Vu les dispositions de l'article 02.02.04 du Code Général des Impôts annexé à la loi n° 00.005 du 22 décembre 1977 portant Loi des Finances
pour 1978 ;
Vu la loi n° 61-013 du 19 juillet 1961 portant création de la Cour Suprême modifiée par l'ordonnance n° 62-091 du 1er octobre 1962 et par la
loi n° 65-016 du 16 décembre 1965 ;
Vu la requête présentée par le sieur Ab Aa, représentant de la succession Heche et Girard et ayant pour conseil Maître Rambeloson Edmond,
Avocat à la Cour au lot 5 TA Ac Af, ladite requête enregistrée au greffe de la Chambre Administrative de la Cour Suprême le 29
octobre 2003 sous le n° 231/03-ADM et tendant à ce qu'il plaise à la Cour annuler la lettre non datée n° 129-MJ/CAB/2003 du Garde des Sceaux,
Ministre de la Justice suspendant l'exécution de l'arrêt n° 837 du 20 juin 2003 de la Cour d'Appel d'Antananarivo ayant condamné les sieurs
Ae Aa Marie Pierre à 18 mois d'emprisonnement ferme et à payer à la partie civile en l'occurrence les héritiers de Heche et Girard la
somme de 7.000.000.000 Fmg à titre de dommages-intérêts conjointement et solidairement avec le Cabinet Dejean Organisation et Gestion Ag et
ordonner son sursis à exécution ;
....................
Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Considérant que suivant jugement n° 5326 du 27 juillet 2001 du Tribunal correctionnel d'Antananarivo, les prévenus Ah Ad et Ae
Aa ont été renvoyés des fins de la poursuite et que le même tribunal s'est déclaré incompétent sur les intérêts civils sollicités par les
héritiers Heche et Girard ;
Que sur appels interjetés par le conseil de la partie civile et le Ministère Public, la Cour d'Appel d'Antananarivo par arrêt n° 837 du 20 juin
2003 a infirmé le jugement entrepris et statuant à nouveau, déclaré les prévenus coupables condamnant les sieurs Ae Aa Marie Pierre à
18 mois d'emprisonnement ferme et à sept milliards de francs malagasy solidairement et conjointement avec le Cabinet Dejean Organisation et
Gestion Sarl à la partie civile le sieur Ab Aa ;
Considérant que l'exécution de l'arrêt précité s'est heurtée à la suspension décidée par lettre sans date n° 129-MJ-CAB/2003 du Garde des
Sceaux, Ministre de la Justice jusqu'au prononcé de l'arrêt de la Chambre de cassation de la Cour Suprême ;
Considérant que par requête enregistrée le 29 octobre 2003, le sieur Ab Aa demande l'annulation pour excès de pouvoir et le sursis à
l'exécution de la décision dont s'agit ;
Sur le sursis à exécution :
Considérant qu'aux termes de l'article 52 de l'ordonnance n° 60048 du 22 juin 1960, l'octroi du sursis à exécution d'une décision
administrative n'est accordé qu'à titre exceptionnel sous la réunion de trois conditions cumulatives exigées par la loi et la jurisprudence à
savoir que la décision incriminée n'intéresse ni l'ordre ni la sécurité publique, que les moyens présentés sur le fond paraissent sérieux et
susceptibles d'entraîner l'annulation dudit et que le préjudice pouvant résulter en cas d'exécution est difficilement réparable voire
irréparable en argent ;
Considérant en effet que l'exécution de l'arrêt n° 837 du 20 juin 2003 n'intéresse en rien ni l'ordre ni la sécurité publics notamment le motif
tiré du risque de troubler «l'ordre public économique évoqué est inopérant en ce que le présent litige concerne un différend opposant, deux
simples particuliers ;
Que la suspension d'exécution d'une décision judiciaire porte atteinte au principe de la séparation des pouvoirs entre l'Exécutif et le
Judiciaire tout en violant l'article 55 de la loi n° 61.013 du 19 juillet 1961 en ce que les prévenus sont déchus de leur pourvoi faute de ne
pas se mettre en état ; qu'ainsi les moyens ainsi présentés s'avèrent sérieux ;
Que les préjudices pouvant résulter en cas d'exécution de ladite suspension sont irréparables eu égard à l'état de santé de la femme du
requérant nécessitant une évacuation sanitaire urgente et qui grèveraient lourdement les finances publiques en cas d'annulation de la décision
administrative litigieuse par l'allocation de dommages-intérêts ;
Considérant qu'il y a donc lieu d'ordonner le sursis à l'exécution de la décision n° 129-MJ-CAB/2003 du Garde des Sceaux, Ministre de la
Justice ;
PAR CES MOTIFS,
Décide :
Article 1 : il est ordonné le sursis à exécution de la décision n° 129-MJ/CAB/2003 du Garde des sceaux, Ministre de la Justice avec toutes les
conséquences de droit qui en découlent ;
Article 2 : les dépens sont réservés jusqu'en fin d'instance ;
Article 3 : expédition du présent arrêt sera transmise à Madame le Garde des Sceaux, Ministre de la Justice, à Monsieur le Directeur de la
Législation et du Contentieux et au requérant ;