La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/05/2021 | GABON | N°RANDOM2034845633

Gabon | Gabon, Cour de cassation, 11 mai 2021, RANDOM2034845633


Texte (pseudonymisé)
COUR DE CASSATION ARRET N° DEUXIEME CHAMBRE CIVILE (REJET) Audience publique du 11 mai 2021

Président : Constantin NGOUALI MOUELI RE...

COUR DE CASSATION ARRET N° DEUXIEME CHAMBRE CIVILE (REJET) Audience publique du 11 mai 2021 Président : Constantin NGOUALI MOUELI REPUBLIQUE GABONAISE, AU NOM DU PEUPLE GABONAIS
La Cour de cassation, Deuxième Chambre civile, a rendu l’arrêt suivant : Sur le pourvoi, dont la recevabilité est contestée, formé le 30 juillet 2020, par Maîtres Norbert ISSIALH et Solange YENOU, Avocats au barreau du Gabon, au nom et pour le compte de la société ADDAX PETROLEUM OIL et GAS GABON INC, en cassation d’un arrêt infirmatif rendu le 29 juin 2020, par la Cour d’Appel judiciaire de Port-Gentil, dans le contentieux qui oppose cette dernière à la Sarl ITALO GABONAISE, en abrégé SITAG, représentée par Me Léopold EFFAH ; La demanderesse invoque au soutien de son pourvoi, deux moyens de cassation ; Le premier moyen, qui est pris de la violation, fausse interprétation, fausse application de la loi, notamment des articles 12, 16, 349, 357 et 358 du code de procédure civile, 1134, 1135, 1142, 1149, 1168, 1181 et 1184 du code civil, est subdivisé en quatre branches ; Le second moyen, quant à lui, est pris, à la fois, d’un défaut de réponse à conclusion, d’une insuffisance de motif et de la violation de la loi, article 12 du code de procédure civile ; Sur quoi, la Cour ; Sur le rapport de M. Constantin NGOUALI MOUELI, Président de Chambre, les observations de Me Norbert ISSIALH, pour la demanderesse, celles de Me Léopold EFFAH, pour la défenderesse, et les conclusions de M. Guy Roger NZAMBA, Avocat Général ; Après en avoir délibéré conformément à la loi : Sur la recevabilité du pourvoi qui est contestée ; Attendu que la société SITAG a, dans son mémoire responsif conclu à l’irrecevabilité du pourvoi pour, d’une part, incompétence ratione materiae de la Cour de cassation, au motif pris de ce que l’arrêt querellé a été rendu en matière commerciale et que par voie de conséquence, seule la Cour Commune de Justice et d’Arbitrage [CCJA] est compétente comme juridiction de cassation, conformément aux articles 10, 13, 14 alinéa 3, et 15 du traité de l’OHADA et, d’autre part, pour absence de moyen de droit, articulé par le pourvoi ; Mais attendu, d’une part, qu’il résulte des dispositions du Traité OHADA, ci-dessus évoquées, que la CCJA est compétente pour se prononcer sur les décisions rendues par les juridictions d’Appel des Etats Parties dans toutes les affaires soulevant des questions relatives à l’application des Actes uniformes et des règlements prévus au présent Traité ; qu’en l’espèce, l’arrêt querellé ne soulève aucune contestation relative à l’application, ni des Actes uniformes, ni des règlements prévus dans le traité ; que d’autre part, contrairement aux affirmations de la société SITAG, le mémoire ampliatif de la société ADDAX articule des moyens de droit ; Qu’il suit de là que l’exception d’irrecevabilité soulevée n’est pas fondée ;
Sur le fond :
Attendu qu’il résulte des énonciations de l’arrêt attaqué que pour mettre fin à un différend né dans le cadre de leurs relations d’affaires, la société ADDAX PETROLEUM OIL et GAS GABON INC et la Sarl ITALO GABONAISE, en abrégé SITAG, ont signé en date du 02 juin 2012, un protocole d’accord transactionnel qui prévoyait que la société ADDAX s’engageait à octroyer à la société SITAG, la réalisation de deux plateformes PAD, et que tout retard du fait de cette dernière, dans la réalisation des travaux, pourrait faire l’objet d’une facturation de stand-by sur la base d’un montant de deux-cent-soixante-neuf millions [269.000.000] F.CFA, par mois, par référence au prix de réalisation d’un PAD K ;
Le 18 novembre 2013, soit dix [10] mois après la signature du protocole d’accord, la société ADDAX n’ayant pas respecté son engagement, la société SITAG saisissait le tribunal de première instance de Port-Gentil et obtenait la condamnation de la société ADDAX, par jugement du 15 mai 2015, confirmée par arrêt du 20 septembre 2017, à lui payer la somme de deux milliards, cinq-cent-trente-neuf millions, six-cent-vingt-deux mille, deux-cent-vingt (2.539.622.220) F.CFA, au titre du retard accusé dans l’attribution des deux PAD, conformément au protocole d’accord transactionnel ;
Le 09 janvier 2019, aucune réalisation de plateforme ne lui ayant toujours été confiée, la société SITAG saisissait à nouveau le tribunal de première instance de Port-Gentil qui la déboutait de l’ensemble de ses demandes, pour cette fois, demander la résolution du protocole d’accord transactionnel aux torts de la société ADDAX, contre la condamnation de cette dernière à lui payer la somme globale de trois milliards, deux-cent millions [3.200.000.000] F.CFA, au titre, entre autres, du manque à gagner sur la facturation des deux PAD, conformément au prix convenu dans le protocole d’accord transactionnel ;
Par arrêt présentement déféré à la censure de la Cour de céans, la société ADDAX PETROLEUM OIL et GAS GABON INC était condamnée au paiement de la somme de deux milliards, cinquante-un millions, huit-cent-vingt-deux mille, sept-cent [2.051.822.700] F.CFA ; Sur le premier moyen, en sa première branche : Attendu que la demanderesse fait grief à l’arrêt, d’une part, d’avoir été rendu le 29 juin 2020, par trois juges différents de ceux devant lesquels l’affaire avait été plaidée le 18 septembre 2019 et mise en délibéré à la deuxième audience de rentrée judiciaire, sans qu’il y ait eu au préalable rabat du délibéré et réouverture des débats ; alors, selon le moyen, qu’il résulte des articles 349 et 357 du code de procédure civile, qu’il appartient aux juges devant lesquels la cause a été débattue d’en délibérer et qu’en cas de changement survenu dans la composition du tribunal après l’ouverture des débats, ceux-ci doivent être repris ;
Mais attendu que l’arrêt querellé indique que des débats ont eu lieu le 18 mars 2020 devant une nouvelle formation de juges qui ont mis l’affaire en délibéré et l’ont renvoyée à l’audience du 29 juin 2020, au cours de laquelle ils ont rendu la décision ; que ces énonciations font présumer que les juges qui ont délibéré sont ceux devant lesquels la cause avait été débattue ; que le grief, ici formulé, n’aurait pu être opérant que si la nouvelle formation de juges s’était contentée, après que l’affaire eût été mise en délibéré par la première formation, de venir rendre la décision ;
Attendu qu’il est, d’autre part, fait grief à l’arrêt querellé d’avoir indiqué que l’affaire avait été appelée à l’audience du 18 mars 2020, au cours de laquelle de nouveaux débats ont eu lieu devant de nouveaux juges, et mise à nouveau en délibéré le 29 juin 2020 ; alors, selon le moyen, qu’à la date du 18 mars 2020, il n’y a jamais eu d’audience, et il n’y a jamais eu de réouverture de débats comme attesté par le greffier en chef ;
Mais attendu que les décisions juridictionnelles ont le caractère d’actes authentiques ; que la société ADDAX ne peut contester la véracité de la date de tenue d’une audience indiquée dans l’arrêt par simple attestation du greffier en chef qui, d’ailleurs, n’est que le dépositaire des minutes et archives au sein de la juridiction, alors que c’est le greffier de la chambre qui est supposé avoir retranscrit officiellement les débats à l’audience et rédigé l’arrêt querellé ; qu’elle aurait donc dû suivre la procédure d’inscription de faux réglementée par les articles 160 et suivants du code de procédure civile ;
D’où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur la deuxième branche du premier moyen ;
Attendu qu’il est fait grief à l’arrêt d’avoir condamné la société ADDAX PETROLEUM OIL et GAS GABON INC en se fondant sur une affirmation de la société SITAG, selon laquelle ADDAX préférait octroyer la réalisation des PAD à des sociétés concurrentes, alors, selon le moyen, que la société SITAG, n’a pas rapporté la preuve de son affirmation ; Mais attendu qu’il résulte de la lecture de la motivation de l’arrêt querellé, à la page 7, sur la résolution du protocole d’accord transactionnel, que pour statuer comme elle l’a fait, l’arrêt retient que la société ADDAX ne donne aucune raison, ni explication pour justifier l’inexécution de ses engagements ; Que par ce seul motif, et abstraction faite de l’affirmation, surabondante, qu’ADDAX préférait octroyer la réalisation des PAD à des sociétés concurrentes, la Cour d’appel a justifié sa décision ; Attendu que le moyen reproche par ailleurs à l’arrêt, d’avoir octroyé à la société SITAG, la somme de un milliard, cinq-cent-soixante-sept millions, cinq-cent-soixante-douze mille, sept-cent (1.567.572.700) F.CFA, au titre de la non-réalisation des deux PAD ; alors que ce poste de préjudice n’a jamais été chiffré, la société SITAG s’étant contentée de réclamer la somme globale de trois milliards, deux-cent-millions (3.200.000.000) F.CFA ;
Mais attendu que l’arrêt querellé renseigne à la page 3, sur l’exposé des prétentions des parties, que la somme globale réclamée par la société SITAG intégrait le manque à gagner sur la facturation des deux PAD, conformément au prix convenu dans le protocole d’accord transactionnel, par référence donc au prix d’un PAD K, soit la somme de sept-cent-soixante-dix-huit millions, sept-cent-trente-neuf, trois-cent-cinquante (778.739.350) F.CFA ;
D’où il suit que le moyen manque en fait ;
Sur la troisième branche du premier moyen ; Attendu que la demanderesse reproche à l’arrêt d’avoir prononcé la résolution du protocole d’accord transactionnel et condamné la société ADDAX à une lourde somme ; alors qu’il n’a pas été établi que la condition suspensive sous laquelle cette dernière s’était engagée, notamment que la réalisation des deux plateformes serait déterminée en fonction des besoins de forage de la société, avait été réalisée ;
Mais attendu, aux termes de l’article 1178 du code civil gabonais ancien, que dans les obligations conditionnelles suspensives comme en l’espèce, « la condition est réputée accomplie lorsque c’est le débiteur, obligé sous cette condition, qui en a empêché l’accomplissement » ; qu’il en résulte que c’est au débiteur de faire la preuve que la non-survenance de la condition ne résulte pas de sa faute, celle-ci pouvant être analysée comme une simple négligence ou un manque de diligence de sa part ; Que c’est donc à bon droit que les juges d’appel ont prononcé la résolution du protocole d’accord, après avoir constaté que la société ADDAX « ne donne aucune raison, ni explication pour justifier l’inexécution de ses engagements » ;
D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ; Sur la quatrième branche du premier moyen ; Attendu que la demanderesse fait également grief à l’arrêt d’avoir évalué le préjudice de la société SITAG par référence au prix du PAD K, sans aucune explication, au détriment du prix du PAD N, moins élevé, ce, en violation de la règle selon laquelle en cas de résolution du contrat, les dommages-intérêts dus au créancier sont en général de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé, qui ne peut être supérieur à 15 % du coût présumé de la construction ;
Mais attendu qu’aux termes des dispositions de l’article 1150 du code civil gabonais ancien, les dommages-intérêts dus au créancier en application de l’article 1149 évoqué par la société ADDAX et dont le débiteur est tenu, sont ceux qui ont été prévus ou qu’on a pu prévoir lors du contrat… ; sans qu’ils puissent être limités à 15% du coût présumé de la construction comme allégué par la société ADDAX qui ne précise d’ailleurs pas le fondement légal de cette limitation ; Que c’est donc à bon droit que les juges d’appel ont appliqué le prix du PAD K convenu par les parties elles-mêmes dans le protocole d’accord, au détriment de celui de PAD N, moins élevé ; D’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Sur le second moyen ; Attendu que la demanderesse reproche à l’arrêt, à la fois, un défaut de réponse à conclusion, en ce qu’il n’a pas répondu à ses arguments selon lesquels elle n’avait pas eu besoin de forage et que le matériel de la société SITAG avait été démobilisé depuis septembre 2012, d’une part, une insuffisance de motif pour avoir prononcé la résolution du protocole d’accord aux torts exclusifs de la société ADDAX, sans motivation réelle, d’autre part, et, enfin, d’avoir pour les mêmes raisons, statué infra petita ;
Mais attendu que pour être recevable, le moyen doit répondre à certaines exigences de rédaction ; qu’il ne doit, entre autres, mettre en œuvre qu’un seul cas d’ouverture ;
Attendu, en l’espèce, que dans son second moyen, la société ADDAX reproche à la Cour d'appel judiciaire de Port-Gentil, d'avoir à la fois omis de répondre à des conclusions, de ne pas avoir suffisamment motivé sa décision et d’avoir statué infra petita ;
Que le moyen étant complexe, il y a lieu de le déclarer irrecevable ;
PAR CES MOTIFS : Rejette l’exception d’incompétence soulevée par la société SITAG ; REJETTE également le pourvoi formé par la société ADDAX PETROLEUM OIL et GAS GABON INC ; Condamne la société ADDAX aux dépens ; Ainsi fait, jugé et prononcé par la Cour de cassation, Deuxième Chambre civile, siégeant au Palais de justice de Libreville, en son audience publique du mardi onze mai, deux-mille-vingt-un, à laquelle ont siégé :
M. Constantin NGOUALI MOUELI, Président de Chambre, Président ; M. MOMBO Alex, Président de Chambre, membre ; Mme A Ab Aa, ép. MBABIRI, Président de Chambre, membre ; Me OLABA Germaine, Greffier de la Chambre ; M. NZAMBA Guy Roger, Avocat Général ;
En foi de quoi, le présent arrêt a été signé après lecture faite par le Président de Chambre qui l’a rendu et le Greffier -/-


Synthèse
Numéro d'arrêt : RANDOM2034845633
Date de la décision : 11/05/2021

Origine de la décision
Date de l'import : 01/06/2022
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ga;cour.cassation;arret;2021-05-11;random2034845633 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award