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26/04/2011 | CONGO | N°036

Congo | Congo, Tribunal de commerce de brazzaville, 26 avril 2011, 036


- condamner solidairement la CCA et LCB à lui payer les sommes de 8.700.000 francs CFA en principal et 6.000.000 francs CFA à titre de dommages intérêts ;
- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant toutes voies de recours ;
- condamner la CCA et la LCB aux entiers dépens ; Qu'elle expose, à l'appui de sa requête que leur défunt père détenait à l'égard de l'Etat congolais, une créance payable à la Caisse Congolaise d’Amortissement (CCA) de
182.138.070 francs CFA ; Que la CCA a effectivement procédé à plusieurs paiements respectivem

ent de 500,000 francs CFA ; 8.502.623 francs CFA ; 20.000.000 francs CFA ; 17....

- condamner solidairement la CCA et LCB à lui payer les sommes de 8.700.000 francs CFA en principal et 6.000.000 francs CFA à titre de dommages intérêts ;
- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant toutes voies de recours ;
- condamner la CCA et la LCB aux entiers dépens ; Qu'elle expose, à l'appui de sa requête que leur défunt père détenait à l'égard de l'Etat congolais, une créance payable à la Caisse Congolaise d’Amortissement (CCA) de
182.138.070 francs CFA ; Que la CCA a effectivement procédé à plusieurs paiements respectivement de 500,000 francs CFA ; 8.502.623 francs CFA ; 20.000.000 francs CFA ; 17.325.866 francs CFA ; 17.647.501 francs CFA ; Qu'en date du 15 septembre 2006, la CCA a viré au titre du paiement de cette créance dans le compte LCB des établissements ECGB, dont le feu Daniel EBINA était propriétaire, la somme de 8.502.623 francs CFA ; Qu'ensuite, sans en aviser la requérante, la Congolaise des Banques a retiré sur le compte des établissements ECGB la somme de 8.700.000 francs CFA ; Qu'interrogé sur ce point, LCB a indiqué à la requérante qu'elle l'aurait fait sur instructions écrites de la CCA dans la mesure où feu Daniel EBINA serait redevable de l'ex UCB ; Que ce qui est le moins curieux, c'est que la LCB est incapable de produire, la fameuse correspondance de la CCA à la requérante ; Que mieux, saisie par la requérante, la CCA a été incapable de démontrer l'existence d'une dette de feu Daniel EBINA sur l'ex UCB ; Qu'ensuite après cet incident, la CCA a continué à payer sa créance comme si de rien n'était, en virant la somme de 17.325.866 francs CFA sur le même compte ; Que cela démontre à suffisance que ni feu EBINA Daniel, ni les établissements ECGB ne devaient un seul franc à l'UCB ; Qu'en réalité, la somme de 8.700.000 francs CFA a été distraite par la LCB ou la CCA ou la LCB, au préjudice de la requérante ; Que suite à cette saisie illégale, la requérante a saisi le juge des requêtes et obtenu une ordonnance sur requête ordonnant la mainlevée des saisies pratiquées par la CCA sur le compte LCB 189 248 01001 ; Que celle-ci a été signifiée à la LCB et à la CCA ; Que toutes les tentatives de règlement amiable de cette affaire, sont demeurées vaines ; Que c'est ainsi que la requérante a saisi la justice pour que justice soit faite ; Attendu que dans les conclusions en réponse n° 1, la Caisse Congolaise d’Amortissement (CCA) par le biais de son conseil maître Armand Robert OKOKO conclut in limine litis, à l'irrecevabilité de la présente procédure ; Qu'elle soutient que la présente procédure étant initiée contre la CCA qui est un établissement public, viole les dispositions des articles 396-2 et 399 du code de procédure civile, commerciale, administrative et financière dans la mesure où elle ne vise pas la réponse explicite ou implicite de l'administration ; Attendu que dans ses conclusions en réponse, la Congolaise des Banques, par l'intermédiaire
de son conseil, maître Jean Prosper MABASSI, conclut à l'exception de procédure tirée de la communication de pièces ; Qu'elle sollicite du Tribunal d'enjoindre la succession EBINA à communiquer sans délai les pièces à l'appui de ses prétentions ; Attendu que dans ses conclusions en réplique en date du 11 mars 2008, la succession EBINA conclut au rejet de l'irrecevabilité sollicitée par la CCA et explique que sur l'exception de communication de pièces soulevée par la LCB, satisfaction lui a été donnée car les pièces lui ont été communiquées le 10 mars 2008 ; Que sur rejet de l'irrecevabilité, la succession EBINA, à travers les écritures de son conseil maître Annick MONGO, argue d'abord que la CCA ne doit pas se contenter de dire qu'elle est un établissement public ; Qu'elle doit indiquer si elle est un établissement public à caractère administrative (EPA) ou un établissement industriel et commercial (EPIC) car selon la nature de l'établissement public, le régime juridique change ; Que la succession EBINA fait savoir ensuite que les articles 396 alinéa 2 et 399 du code de procédure civile, commerciale, administrative et financière cités par la CCA concernent les procédures administratives, or, en espèce, nous ne sommes pas en matière administrative, mais plutôt en matière commerciale ; Qu'elle fait savoir, enfin que la créance dont il est question ici à une nature commerciale car elle concerne une transaction avec un banquier dans la mesure où la LCB a bloqué la somme de 8.700.000 francs CFA à la demande de la CCA ; Que selon elle, conformément à l'article 93 alinéa 2 de la loi n° 19-99 du 15 août 1999 portant organisation du pouvoir judiciaire « les tribunaux de commerce sont juges de droit commun en première instance en matière de commerce. Ils sont compétents pour connaître :
- des contestations relatives aux engagements et transactions entre négociants, marchands, et banquiers etc. » ;
Qu'elle ajoute que l'article 94 alinéa 4 de la même loi déclare : « la loi répute acte de commerce : toute opération de change, banque et courtage... etc. » ; Qu'elle estime que l'opération de blocage de 8.700.000 opérée par la LCB sur instruction de la CCA étant une opération de banque, entre dans le champ de compétence du Tribunal de commerce ; Attendu que dans ses conclusions en réplique en date du 08 avril 2008, la CCA conclut non seulement au maintien de ses précédentes écritures mais également estime que les dispositions des articles 93 et 94 de la loi n° 19-99 du 15 août 1999 portant organisation de la justice au Congo ne doivent être pris en compte par le Tribunal car la CCA n'est pas une banque pour faire des opérations de change, de banque et de courtage ; Que selon l'article 1er de l'ordonnance n° 06-2001 du 05 février 2001, la CCA : est un établissement public à caractère financier, doté de la personnalité morale et de l'autonomie, dénommée Caisse Congolaise d’Amortissement ;
Attendu que dans ses conclusions en réplique en date du 25 avril 2008, la LCB, par l'intermédiaire de son conseil maître Prosper MABASSI conclut à l'irrecevabilité de l'action, au débouté de la demande reconventionnelle ; Que sur l'irrecevabilité, la LCB estime que la succession étant un groupement qui n'a ni personnalité juridique, ni même la capacité juridique ne peut donc ester en justice en son nom propre ; Que se faisant, elle viole les dispositions de l'article 481 du code de procédure civile, commerciale, administrative et financière qui dispose : « nul ne peut ester en justice s'il n'a qualité, capacité et intérêt à le faire» ; Qu'au soutien de son débouté, la LCB estime qu'à la lecture de l'interrogatoire historique du compte n° 18924801001 versé aux débats, il apparaît que la somme de 8.700.000 francs CFA a été débitée au profit de l'Union Congolaise de Banque (UCB), en remboursement de sa dette ; Qu'actuellement la CCA gère les intérêts de l'UCB, en sa qualité de syndic liquidateur ; Qu'en plus, la succession EBINA en se contentant de dire qu'il appartient à la CCA de prouver l'existence de sa dette, ne conteste pas sérieusement avoir contracté une dette auprès de l'ex- UCB ; Que pour la manifestation de la vérité le Tribunal de céans devra organiser soit un transport sur les lieux, soit une enquête à la barre ; Qu'enfin, au soutien de sa demande reconventionnelle, la LCB estime qu'en opérant un virement du compte ECGB de 8.700.000 francs CFA au profit de l'ex UCB, elle a agi dans le cadre du règlement de la dette intérieure comme banque payeur ; Que dans ce cadre, elle a donc agi sur les instructions du donneur d'ordre, qui est la CCA et qui est en même temps le syndic liquidateur de l'ex UCB ; Qu'elle n'a donc pas outrepassé ses pouvoirs en faisant comme elle l'a fait ; Que le Tribunal rejettera la demande en condamnation de 6.000.000 francs CFA, formulée à l'encontre de la concluante, par la succession EBINA, car non fondée en fait et en droit ; Qu'en revanche, la LCB estime que l'action intentée par la succession EBINA contre lui est tout simplement abusive et vexatoire ; Qu'elle sollicite que ladite succession soit condamnée à lui payer, reconventionnellement, la somme de 5.000.000 francs CFA ; Attendu que dans ses conclusions en réponse n° 3 en date du 03 janvier 2008, la succession EBINA donne réponse à la fois aux écritures de la CCA et de la LCB ; Que sur la réponse à la CCA, la succession EBINA estime que s'il est admis que la CCA est un établissement public à caractère financier, le paiement d'une créance commerciale par la CCA à travers une banque en faveur de la requérante, qu'ensuite l'opération de banque faite par la LCB à la demande de la CCA ne peut avoir un caractère administratif ;
Que la compétence du Tribunal de commerce est incontestable ; Que selon la succession EBINA, seuls les établissements public à caractère administratif sont soumis à la procédure administrative ; Que les établissements public à caractère financier ou industriel et commercial sont soumis au droit commercial et à la législation OHADA ; Que pour preuve, la CCA est toujours justiciable du Tribunal de commerce ; Que si la CCA ne veut pas conclure au fond, le Tribunal se prononcera sur la base de la requête introductive d'instance de la requérante ; Que sur la réponse donnée à la LCB, la succession EBINA conclut au rejet de l'irrecevabilité de l'action de la requérante et au débouté des arguments de la LCB et de sa demande reconventionnelle ; Qu'elle précise que la succession EBINA est représentée par EBINA Landry et que la succession dont il s'agit celle de EBINA Daniel ; Que les arguments de fond avancés par la LCB manquent de sérieux car une banque qui reçoit un virement au profit d'un client ne peut pas débiter le compte sans décision de justice et ce sur simple demande d'un tiers et sans autorisation du titulaire du compte ; Qu'en plus la créance que les établissements ECGB auraient eue sur l'UCB est imaginaire puisque la requérante a produit le relevé de compte de ces établissements au moment où l'UCB fermait, le compte est créditeur de 153.296.344 francs CFA et la CCA n'a jamais pu démontrer l'existence de cette créance ; Qu'à maintes reprises la CCA a promis produire à la requérante ses preuves, mais force est de constater qu'elle ne l'a jamais fait ; Qu'à cet effet, un procès-verbal de carence a été dressé par maître ONDONGO, huissier de justice suite à plusieurs rendez-vous infructueux ; Que cela démontre à suffisance que cette créance est imaginaire ; Qu'en demandant à la LCB de débiter le compte de la requérante, la CCA a commis une faute et en exécutant cet ordre la LCB en tant qu'établissement bancaire a aussi commis une faute ; Qu'enfin, la demande reconventionnelle faite par la LCB est injustifiée car une banque sérieuse ne peut pas débiter le compte d'un client sur ordre d'un syndic liquidateur sans décision de justice ; Attendu que dans ses conclusions en réplique en date du 15 septembre 2008, la CCA argue que l'action de la succession EBINA ne peut être recevable car il a été démontré que la loi organique créant la Caisse Congolaise d'Amortissement en fait un établissement public ; Attendu que dans ses écritures en réplique en date du 29 août 2008, la LCB insiste sur l'irrecevabilité de la succession EBINA et conclut mal fondé des prétentions de la succession EBINA ;
Qu'elle estime que, même s'il s'agit de la succession EBINA Daniel, monsieur EBINA Landry ne reproduit nullement aux débats, le titre ou mandat qui lui donne le droit d'agir en justice au nom de la succession EBINA ; Que faute de mandat, l'action intentée au nom de la succession EBINA Daniel sera simplement et purement irrecevable ; Que la LCB estime que les prétentions de la succession EBINA sont mal fondées par défaut d'une preuve de la dette rapportée par elle, le Tribunal rejettera ses prétentions ; MOTIFS DE LA DECISION : Attendu qu'après analyse des faits, moyens et prétentions des parties, le juge de céans devra statuer sur les questions ci-après : 1) SUR L'IRRECEVABILITE SOULEVEE PAR LA CCA Attendu que la Caisse Congolaise d'Amortissement, par l'intermédiaire de son conseil, maître Armand OKOKO a conclu à l'irrecevabilité de la procédure introduite par la succession EBINA aux motifs que la CCA étant est un établissement public, la succession EBINA a violé les dispositions des articles 396-2 et 399 du code de procédure civile, commerciale, administrative et financière ; Que la succession EBINA, dont les intérêts sont défendus par maître Annick MONGO soutient que la présente procédure est recevable car non seulement les dispositions légales auxquelles la CCA fonde son argumentation concernant les procédures administratives, mais aussi et surtout la créance réclamée par la succession EBINA ayant une nature commerciale et que les opérations passées entre la CCA et la Congolaise de Banque (LCB) constituant bel et bien les opérations de banque, la présente procédure a donc un caractère commercial et non administratif ; Qu'au regard de ce qui précède, le problème de droit qui se pose en l'espèce est celui de la recevabilité des actions portées contre un établissement public à caractère financier ; Qu'il résulte de ce problème juridique, les questions suivantes : devant quelle juridiction un établissement public à caractère financier est justiciable en ce qui concerne les contestations nées des opérations financières ? Le litige né de la contestation des opérations financières accomplies par un établissement public financier est-il du ressort du juge administratif ? Quelle est la nature juridique des opérations financières accomplies par un établissement public à caractère financier ? Attendu qu'aux termes de l'article 1er de la loi organique n° 062-001 du 05 février 2001 portant création de la Caisse Congolaise d'Amortissement : « il est créé un établissement public à caractère financier, doté de la personnalité morale et de l'autonomie, dénommé Caisse Congolaise d'Amortissement » ; Qu'il ressort clairement des dispositions de l'article précité que la Caisse Congolaise d'Amortissement est un établissement public à caractère financier ;
Qu'au regard de sa forme juridique définie par la loi, la CCA ne peut être classée parmi les établissements publics classiques régis par les règles du droit administratif et dont le contentieux relève normalement des juridictions administratives ; Qu'au contraire, la CCA est un établissement public dont le fonctionnement et le contentieux empruntent à la fois au droit public et au droit privé ; Que son contentieux relève des règles de droit public dans le cadre d'une activité classique de service public alors que le contentieux est privé lorsque les opérations accomplies par elle sont de nature civile ou plutôt relève des règles du droit privé ; Attendu que dans le cas d'espèce, la CCA est mise en cause pour la contestation d'une créance commerciale payée en faveur de la succession EBINA à travers la banque LCB, créance qui sera par la suite saisie par la LCB sur les instructions de la Caisse Congolaise d'Amortissement, en qualité de syndic liquidateur de l'ex UCB ; Qu'au regard des deux opérations accomplies par les deux structures, à savoir l'opération de paiement de la créance commerciale des établissements, ECGB par la CCA à travers la banque LCB et l'opération de saisie et retrait par la LCB de la même créance sur le compte des établissements ECGB, à la demande de la CCA, on peut dire, sans risque de se tromper, que le contentieux né de ces opérations n'a aucun caractère administratif, de manière à porter l'affaire devant le juge administratif ; Que toutes ces opérations constituent bel et bien des opérations de banque ; Qu'aux termes de l'article 3 alinéa 2 de l'acte uniforme sur le droit commercial général : « ont le caractère d'actes de commerce, notamment : les opérations de banque, de bourse, de change, de courtage, d'assurance et de transit » ; Qu'en plus, selon les dispositions de l'article 93 alinéa 3 de la loi n° 19-99 du 15 août 1999 modifiant et complétant certaines dispositions de la loi n° 022-92 du 20 août 1992 portant organisation du pouvoir judiciaire, les tribunaux de commerce sont juges de droit commun en première instance pour connaître toutes les contestations relatives aux actes de commerce entre toutes les personnes ; Que le terme personnes étant générique, il englobe aussi les actes de commerce accomplis par les personnes physiques que ceux accomplis par les personnes morales du droit privé ou droit public ; Que dans le cas d'espèce, les actes de commerce effectués par la CCA, personne morale du droit public, sont bel et bien du ressort du Tribunal de commerce ; Que d'ailleurs, il est des doctrines constantes qui estiment que les opérations effectuées par les établissements publics financiers, les banques publiques et les banques nationalisées sont des actes de commerce ; Qu'il convient donc de dire que les opérations accomplies par la CCA, dans le cas d'espèce, et surtout celles effectuées par la LCB étant des actes de commerce, sont donc de la compétence du Tribunal de commerce ; Attendu qu'ensuite, que la créance objet de la présente contestation étant une créance
commerciale, sa résolution ne peut se faire que devant le Tribunal de commerce ; Attendu enfin, qu'il est constant que la LCB a débité la somme de 8.700.000 francs CFA au profit de l'ex UCB sur les instructions de la CCA en sa qualité de syndic liquidateur de l'ex UCB ; Qu'il est constant et incontestable que toutes les contestations nées des procédures de faillite sont du ressort du Tribunal de commerce, en sa qualité du juge de droit commun des faillites conformément aux dispositions de l'article 97 de la loi n° 19-99 du 15 août 1999 portant organisation judiciaire ; Que dans le cas d'espèce, la CCA a ordonné, à travers la LCB, la saisie de la somme de 8.700.000 francs CFA appartenant à monsieur EBINA Daniel dans la cadre des opérations de réalisation de l'actif de l'ex UCB ; Que toutes les contestations nées de cette opération sont du ressort du Tribunal de commerce ; Attendu qu'au regard de tout ce qui précède, il convient de dire que la présente procédure qui oppose la succession EBINA et la Caisse Congolaise d'Amortissement et la Congolaise des Banques est bel et bien de la compétence du Tribunal de commerce ; Qu'ainsi, il n'est point question de respecter les règles de procédure établies par les dispositions des articles 396 alinéa 2 et 399 du code de procédure civile, commerciale, administrative et financière ; lesquelles règles sont réservées à la procédure devant les juridictions administratives ; Qu'il convient, en conséquence, de rejeter l'irrecevabilité de la procédure soulevée par la CCA ; 2) SUR L'IRRECEVABILITE SOULEVEE PAR LA LCB Attendu que la Congolaise de Banques soulève l'irrecevabilité de l'action intentée par monsieur EBINA Landry rock Martial au nom de la succession EBINA aux motifs que la succession étant un groupement dépourvue de la personnalité juridique et de la capacité juridique ne peut ester en justice ; Que la succession EBINA conclut au rejet de l'irrecevabilité et soutient que la présente action a été intentée par monsieur Martial Roch Landry EBINA au nom de la succession EBINA et en sa qualité de successible ; Que le problème de droit qui se dégage en l'espèce est celui de la condition de recevabilité d'une action en justice ; Qu'il résulte de ce problème de droit la question de savoir si une succession dispose-t-elle d'une personnalité juridique pour avoir la capacité d'ester en justice ; Attendu qu'aux termes de l'article 481 du code de procédure civile, commerciale, administrative et financière : « nul ne peut ester en justice s'il n'a qualité, capacité et intérêt à le faire » ;
Que si avoir la qualité d'agir en justice c’est justifier d'intérêt direct personnel, avoir la capacité c'est l'aptitude à acquérir et à exercer un droit ; Attendu que dans le cas d'espèce, la LCB estime que la succession EBINA n'ayant pas la personnalité juridique, n'a donc pas la capacité d'ester en justice ; Attendu que s'il est admis que la personnalité juridique se définit comme l'aptitude à être sujet de droit, une succession étant un simple groupement de personne ne peut se prévaloir d'une quelconque personnalité juridique ; Mais attendu que, dans le cas d'espèce, la succession EBINA n'agit pas en tant que groupement, mais elle est représentée à l'instance par monsieur Roch Martial EBINA, successible de monsieur Daniel EBINA ; Qu'en sa qualité de successible de Daniel EBINA, monsieur Roch Martial EBINA dispose de la qualité, de la capacité et justifie d'un intérêt direct et personnel pour agir en justice ; Qu'ayant reçu mandat de tous les héritiers de Daniel EBINA, monsieur Roch Martial EBINA agit au nom et pour le compte de la succession EBINA ; Qu'en agissant ainsi, monsieur Roch Martial EBINA n'a point violé les dispositions de l'article 481 du code de procédure civile, commerciale, administrative et financière ; Qu'il échet de rejeter l'irrecevabilité soulevée par la Congolaise des Banques ; 3) SUR L'EXCEPTION DE COMMUNICATION DES PIECES Attendu que dans ses conclusions en date du 27 décembre 2007, La Congolaise des Banques, par le biais de son conseil maître Prosper MABASSI, a soulevé une exception de procédure tirée de la communication des pièces ; Attendu qu'il ressort des écritures versées aux débats qu'en date du 10 mars 2008 la succession EBINA a communiqué les pièces à La Congolaise des Banques ; Que d'ailleurs, La Congolaise des Banques ne conteste pas cette allégation ; Qu'il échet de dire que l'exception de communication des pièces soulevée par La Congolaise des Banques n'a plus d'objet ; 4) SUR LA CONDAMNATION SOLIDAIRE DE LA CCA ET DE LA CONGOLAISE DES BANQUES AU PAIEMENT DE LA SOMME DE 8.700.000 F.CFA Attendu que la succession EBINA sollicite la condamnation de la CCA et de La Congolaise des Banques au paiement de la somme de 8.700.000 F.CFA débitée par La Congolaise des Banques sur le compte des établissements ECGB au profit de l'ex UCB sur les instructions de la CCA ; Attendu que la CCA mise en cause dans la présente procédure n'a conclu au fond ; Que de son côté, la LCB qui a conclu au fond, reconnaît, à la lecture de l'interrogatoire de
l'historique du compte n° 18924801001 versé aux débats, avoir débité la somme de 8.700.000 francs CFA au profit de l'ex UCB sur les instructions de la CCA ; Qu'elle refuse cependant d'engager sa responsabilité dans le paiement de la somme débitée aux motifs qu'elle n'estime pas avoir outrepassé ses pouvoirs en effectuant cette opération ; Qu'au regard de l'argumentaire des parties en cause, le problème de droit que se dégage est celui de la responsabilité ; Qu'il résulte de ce problème la question de savoir si la CCA et la LCB peuvent-elles être condamnées solidairement à l'occasion d'une opération de banque effectuée par la LCB ; en d'autres termes, dans quelles mesure intervient la responsabilité de chaque structure suscitée ; Attendu qu'il est constant et incontestable que la responsabilité peut être engagée qu'en cas de faute préjudiciable à autrui ; Attendu qu'il ressort tant des pièces versées aux débats et des écritures des parties que les établissements ECGB représentés par la succession EBINA disposent d'un compte auprès de la Congolaise de banque (LCB) ; Que entre le client et sa banque, il existe toujours une obligation de confiance réciproque ; Que la banque ne saurait effectuer une opération sur le compte de son client sans au préalable informer celui-ci ; Attendu que la LCB reconnaît avoir débité en date du 18 septembre 2006 la somme de 8.700.000 francs CFA sur le compte des établissements ECGB ; Qu'aucun élément du dossier n'est de nature à prouver que les établissements ECGB ont été informés de ladite opération ; Qu'en agissant ainsi, la LCB a privé son client de tout moyen de défense ; Que d'ailleurs, la LCB qui argue qu'il a agi sur instructions de la CCA est dans l'incapacité de verser aux débats la correspondance de la CCA lui autorisant de saisir et débitée les comptes des établissements ; Que ce défaut de prouver laisse à conclure que la LCB a procédé à une opération de saisie sans titre ni droit ; Que cette opération illicitement effectuée par la LCB engage sa responsabilité vis-à-vis de son client ; Qu'il échet, en conséquence, de condamner la LCB à payer la somme de 8.700.000 francs CFA débitée sur le compte des établissements ECGB ; Attendu par ailleurs que la CCA mise en cause par la succession EBINA n'a pas conclu au fond ; Qu'il ressort cependant des pièces versées aux débats que la somme de 8.700.000 francs CFA
a été bel et bien débitée du compte des établissements ECGB en remboursement de la dette de l'ex UCB ; Que malheureusement, en ce qui concerne cette opération, aucun lien n'existe entre la succession EBINA propriétaire des établissements ECGB et la CCA ; Que de ce fait la succession EBINA ne peut mettre en cause la CCA ; Qu'elle ne peut agir légalement que contre la LCB avec qui elle entretient un lien juridique à travers le compte LCB n° 18924801001 ; Que dans cette opération de saisie et de débit de la somme de 8.700.000 francs CFA sur le compte des établissements ECGB, seule la LCB peut se prévaloir d'une quelconque action contre la CCA ; Qu'au regard de ce qui précède, il échet de mettre hors de cause la CCA ; Qu'il convient d'exempter la CCA du paiement de la somme de 8.700.000 francs CFA ; 5) SUR LA CONDAMNATION SOLIDAIRE DE LA CCA ET DE LA LCB AU PAIEMENT DES DOMMAGES INTERETS Attendu que la succession EBINA sollicite la condamnation solidaire de la CCA et de la LCB au paiement de la somme de 6.000.000 francs CFA au titre des dommages intérêts ; Que de son côté, la LCB estime qu'ayant agi sur les instructions de la CCA, elle n'a commis aucune faute préjudiciable à la succession EBINA ; Attendu que les dommages intérêts ne sont dus qu'en réparation d'un préjudice causé par la faute de l'auteur du dommage ; Que dans le cas d'espèce, en débitant le compte des établissements ECGB sans titre ni même sans en informer le titulaire du compte saisi, la LCB agi avec une négligence fautive ; Que cette faute professionnelle a causé un grave préjudice à la succession EBINA, propriétaire du compte des établissements ECGB ; Qu'il sied donc de condamner la LCB à réparer ce préjudice subi par la succession EBINA ; Attendu par ailleurs que la CCA aurait ordonné la LCB de débiter la somme de 8.700.000 francs CFA sur le compte LCB des établissements ECGB, n'a pas conclu au fond ; Que d'ailleurs aucun lien direct ne la lie avec la succession EBINA notamment, en ce qui concerne cette opération du 18 février 2006 ; Que n'ayant aucune pièce de nature à établir sa responsabilité dans cette opération, qu'il convient de dire souverainement qu'aucune faute ne lui est imputable ; Qu'il échet donc d'exempter la CCA au paiement des dommages intérêts ; Attendu cependant que la somme de 6.000.000 francs CFA sollicitée par la succession
EBINA parait exagérée quant à son quantum ; Qu'en ramenant successivement cette somme à de justes proportions, le Tribunal condamne la LCB à payer la somme de 3.000.000 francs CFA à la succession EBINA au titre des dommages intérêts ; Qu'il échet de débouter la succession EBINA du surplus de sa demande ; 6) SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE Attendu que la LCB sollicite la condamnation de la succession EBINA au paiement de la somme de 5.000.000 francs CFA pour procédure abusive et vexatoire ; Que la succession EBINA estime que cette demande reconventionnelle est fantaisiste car la succession EBINA a agi en justice à bon droit ; Attendu que la procédure peut être qualifiée d'abusive et de vexatoire lorsque la partie requérante ne dispose d'aucun droit à engager une telle procédure ou ne justifie d'aucun intérêt réel et direct d'ester en justice ; Que dans le cas d'espèce, il ressort clairement que du fait d'une opération illicite effectuée par la LCB sur les instructions de la CCA, la succession EBINA a subi un préjudice financier ; Qu'en saisissant donc le juge, la succession EBINA n'a pas agi de façon abusive, mais bien au contraire, la justice étant la voie loyale de règlement des litiges auxquels les parties n'ont pu résoudre à l'amiable, la succession EBINA a agi à bon droit et dans la légalité ; Qu'il convient, en conséquence, de débouter la Congolaise de Banque (LCB) de sa demande reconventionnelle ; 7) SUR L'EXECUTION PROVISOIRE Attendu que la succession EBINA sollicite l'exécution provisoire de la décision à intervenir nonobstant toutes voies de recours ; Attendu qu'aux termes de l'article 58 du code de procédure civile, commerciale, administrative et financière : «l'exécution du jugement est ordonnée sans caution : pour la partie non contestée de la demande ; pour les condamnations présentant un caractère alimentaire ; s'il y a titre authentique ou autorité de la chose jugée» ; Que dans le cas d'espèce, la LCB ne conteste pas avoir débité la somme de 8.700.000 francs CFA sur le compte des établissements ECGB ; Qu'elle justifie simplement avoir effectué cette opération sur les instructions de la CCA, en sa qualité de syndic liquidateur de l'ex UCB ; Qu'il échet donc d'ordonner l'exécution provisoire de la décision, sans caution, nonobstant toutes voies de recours, pour la partie non contestée de la demande ; PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière commerciale et en premier ressort ; Sur la demande principale ; Reçoit la succession EBINA représentée par Landry Roch Martial EBINA en son action ; Dit et juge que l'exception de communication des pièces soulevée par la Congolaise de Banque (LCB) est sans objet ; Dit juste et bien fondée l'action de la succession EBINA ; Met hors cause la CCA ; En conséquence ; Condamne la LCB à payer à la succession EBINA les sommes de 8.700.000 francs CFA au principal et 3.000.000 francs CFA à titre de dommages intérêts ; Déboute la succession du surplus de sa demande ; Sur la demande reconventionnelle ; Reçoit la LCB en sa demande ; L'en dit mal fondée ; En conséquence, déboute la LCB de sa demande ; Ordonne l'exécution provisoire de la décision, sans caution, nonobstant toutes voies de recours, pour la somme non contestée de 8.700.000 francs CFA ; Condamne la LCB aux dépens.


Synthèse
Tribunal : Tribunal de commerce de brazzaville
Numéro d'arrêt : 036
Date de la décision : 26/04/2011

Analyses

DROIT COMMERCIAL GÉNÉRAL - CRÉANCE COMMERCIALE - PAIEMENT PAR VIREMENT BANCAIRE - BANQUE DU CLIENT - DÉBIT DU COMPTE AU PROFIT D'UN TIERS - TITULAIRE DU COMPTE - DÉFAUT D'AUTORISATION - SAISIE DE LA CRÉANCE - ORDONNANCE DE MAINLEVÉE - INEXÉCUTION - ASSIGNATION EN PAIEMENT EXCEPTIONS D'IRRECEVABILITÉ - ÉTABLISSEMENT PUBLIC À CARACTÈRE FINANCIER - ÉTABLISSEMENT PUBLIC CLASSIQUE (NON) - NATURE DES OPÉRATIONS - OPÉRATION DE PAIEMENT DE LA CRÉANCE - OPÉRATION DE SAISIE ET DE RETRAIT - CONTENTIEUX - OPÉRATIONS DE BANQUE (OUI) - ARTICLE 3 ALINÉA 2 AUDCG - CARACTÈRE D'ACTE DE COMMERCE - NATURE DE LA CRÉANCE - CRÉANCE COMMERCIALE - DÉBIT DU COMPTE - DONNEUR D'ORDRE - SYNDIC LIQUIDATEUR - OPÉRATIONS DE RÉALISATION DE L'ACTIF - CONTESTATIONS - COMPÉTENCE DU TRIBUNAL DE COMMERCE (OUI) - VIOLATION DES DISPOSITIONS DES ARTICLES 396-2 ET 399 CPCCAF (NON) - REJET DE L'IRRECEVABILITÉ CAPACITÉ D'ESTER EN JUSTICE - SUCCESSION - DÉFAUT DE PERSONNALITÉ JURIDIQUE - REPRÉSENTATION - MANDATAIRE - QUALITÉ DE SUCCESSIBLE - CAPACITÉ ET INTÉRÊT À AGIR (OUI) - VIOLATION DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 481 CPCCAF (NON) - REJET DE L'IRRECEVABILITÉ EXCEPTION DE COMMUNICATION DE PIÈCES - ABSENCE D'OBJET CRÉANCE DÉBITÉE - REMBOURSEMENT DE DETTE - DÉFAUT D'INFORMATION PRÉALABLE DU CLIENT - OPÉRATION DE SAISIE ET DE DÉBIT - DÉFAUT DE TITRE - INSTRUCTIONS DU SYNDIC - INEXISTENCE - DÉFAUT DE LIEN AVEC LA REQUÉRANTE - OPÉRATION ILLICITE - RESPONSABILITÉ DE LA BANQUE (OUI) - PAIEMENT DE LA CRÉANCE (OUI) - MISE HORS DE CAUSE DU SYNDIC PRÉJUDICE SUBI - DEMANDE DE DOMMAGES INTÉRÊTS - DÉBIT DU COMPTE - FAUTE PROFESSIONNELLE - AUTEUR DU DOMMAGE - PAIEMENT DE DOMMAGES INTÉRÊTS (OUI) DEMANDE RECONVENTIONNELLE - ACTION ABUSIVE ET VEXATOIRE (NON) - DEMANDE MAL FONDÉE - EXÉCUTION PROVISOIRE


Références :

Ohada.com/Unida


Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2017
Identifiant URN:LEX : urn:lex;cg;tribunal.commerce.brazzaville;arret;2011-04-26;036 ?
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