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23/04/2015 | CEDEAO | N°ECW/CCJ/JUD/05/15

CEDEAO | CEDEAO, Cour de justice de la communauté des etats de l'afrique de l'ouest, 23 avril 2015, ECW/CCJ/JUD/05/15


Texte (pseudonymisé)
COMMUNITY COURT OF JUSTICE, RTE ECOWAS
COUR DE JUSTICE DE LA COMMUNAUTE,
CEDEAO
TRIBUNAL DE JUSTIÇA DA COMMUNIDADE,
No. 10 DAR ES SALAAM CRESCENT,
OFF AMINU KANO CRESCENT,
WUSE II, ABUJA-NIGERIA.
PMB 567 GARKI, X
TEL/FAX:234-9-6708210/09- COUR DE JUSTICE DE LA COMMUNAUTE, CEDEAO
X — NIGERIA
Rôle Général: n° ECW/CCJ/APP / 20/14
Arrêtn- ECW/CCJ/ JUD/05/15 du 23 avril 2015 (Arrestation et détention arbitraire)
Monsieur Ah Constant B : DEMANDEUR
Contre
L’Etat du Bénin: DEFENDEUR> COMPOSITION DE LA COUR
Hon. Juge Jérôme TRAORE Président
Hon. Juge Hamèye F. M...

COMMUNITY COURT OF JUSTICE, RTE ECOWAS
COUR DE JUSTICE DE LA COMMUNAUTE,
CEDEAO
TRIBUNAL DE JUSTIÇA DA COMMUNIDADE,
No. 10 DAR ES SALAAM CRESCENT,
OFF AMINU KANO CRESCENT,
WUSE II, ABUJA-NIGERIA.
PMB 567 GARKI, X
TEL/FAX:234-9-6708210/09- COUR DE JUSTICE DE LA COMMUNAUTE, CEDEAO
X — NIGERIA
Rôle Général: n° ECW/CCJ/APP / 20/14
Arrêtn- ECW/CCJ/ JUD/05/15 du 23 avril 2015 (Arrestation et détention arbitraire)
Monsieur Ah Constant B : DEMANDEUR
Contre
L’Etat du Bénin: DEFENDEUR
COMPOSITION DE LA COUR
Hon. Juge Jérôme TRAORE Président
Hon. Juge Hamèye F. MAHALMADANE Juge Rapporteur
Hon. Juge Alioune SALL Membre
Assisté de Me Athanase ATANNON Greffier LA COUR DE JUSTICE DE LA COMMUNAUTE
a rendu, dans l'affaire Monsieur B
Ah Constant contre l'Etat du Bénin, en
arrestation et détention arbitraire, la décision
dont la teneur suit :
I- PARTIES
I.1- DEMANDEUR : Monsieur B Ah
Constant, Magistrat, habituellement, domicilié au lot 312, parcelle S à Ac, concession de feu Ak A, 03-BP-1412 Af Ae, actuellement détenu à la prison civile d’Ar Ao (République du Bénin) assisté de Maitres Alfred POGNON, Yves KOSSOU, Dieudonné Mamert ASSOBA, tous Avocats à la Cour d'Appel de Cotonou ayant élu collectivement domicile au Cabinet de Maître Yves KOSSOU sis à Gauhi, immeuble de Meideros derrière Ag At, 06 BP 1416 Cotonou, tél :(229)21 3124 18, fax 21 31 39 88, e-mail koss_y@yahoo.fr ;
II.2- DEFENDEUR L'Etat du Bénin, représenté légalement par l’Agent Judiciaire du Trésor, domicilié au Trésor du Bénin, route de l'aéroport, Cotonou, ayant élu domicile pour les besoins de la cause à X l'Ambassade du Bénin au Nigéria, située à Plot n° 2579 (à proximité de Ab Aa AnC Ap Al, Maïtama, X, défendu par Maître Hippolyte YEDE, Avocat à la Cour au Bénin, dont le cabinet est situé au : Parcelle T’ du lot 2157, rue pavée du As Ai, immeuble GBEDIGA, 03 BP : 338 Af
Ae, tél/fax :+229 21 38 01 83 ; mobile : +229 90 93 55 07/97 80 55 60 ; télécopie :+229 21 38 01 84, e-mail h.yede@yahoo.fr, cabinetavocatyede@yahoo.fr ;
II- FAITS ET PROCEDURE
II.1- Monsieur B Ah Constant a attrait l'Etat du Bénin devant la Cour de céans pour venir s'entendre :
- dire et juger que la rétention exercée sur sa personne du 16 au 17 juillet 2010 par la Commission Autonome d'Enquête Judiciaire est constitutive d'une arrestation arbitraire, ordonner en conséquence sa mise en liberté d'office ;
- constater qu'il sollicite le bénéfice des dispositions de l’article 9.5 du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques ;
- condamner à lui verser pour chaque jour de détention arbitraire subie depuis le 12 juillet 2010 jusqu’à la date de sa mise en liberté effective une somme d'argent que la Cour Communautaire voudra bien arbitrer en toute souveraineté dans son quantum ;
- et condamner aux entiers dépens ;
II.2-La requête de Monsieur B Ah
Constant date du 11 aout 2014 mais a été enregistrée au Greffe de la Cour le 23 septembre 2014;
Elle est accompagnée d’une autre requête, présentant les mêmes dates de rédaction et de dépôt, sollicitant que sa cause soit examinée en procédure accélérée ;
II.3- La requête introductive et celle à fin de procédure accélérée ont été notifiées au défendeur le 26/09/2014;
II.4- L'Etat du Bénin a produit un mémoire exceptionnel en date du 20 novembre 2014, un mémoire au fond et des observations relatives à la demande de procédure accélérée en date du 21 novembre 2014 mais tous enregistrés au Greffe de céans le 04 décembre 2014 ;
II.5- Les écritures du défendeur ont été, à leur tour, notifiées au requérant le 4 décembre 2014 ; Ce dernier a réagi par deux conclusions toutes en date du
21 novembre 2014 ;
L'Etat du Bénin a clôturé la phase d'instruction par une correspondance en date du 22 décembre 2014 reçue au greffe le 12 janvier 2015 ;
II.6- La cause a été retenue et débattue à l'audience hors siège de Bissau (République de Am Aj) du 23 mars 2015. Les parties n'étaient pas présentes mais ont écrit pour solliciter le jugement de la cause sur pièces ;
II.7- L'affaire a été mise en délibéré pour la décision rendue à X, siège de la Cour, le 23 avril 2015 ;
III- MOYENS ET PRETENTIONS
III.1- Le requérant a exposé que courant février 2010 une enquête judiciaire a été ouverte au niveau de la Brigade Economique et Financière sur plainte du Ministre de l'Economie et des Finances contre quatre structures de placement illégal de fonds dont ICCServices, qu'en ayant été fortuitement informé il a interpellé le Substitut assurant l'intérim du Procureur de la République et lui a enjoint de lui présenter le procès-verbal clôturant l'enquête aux fins de compte rendu à la hiérarchie, que le 03 mars 2010 conformément à ses instructions le Substitut lui a fait parvenir le procès-verbal établi par la Brigade Economique et Financière, que sans désemparer le même jour il a rendu compte au Ministre de la Justice en demandant la conduite à tenir, que ce dernier n'a pas réagi et le 17 mai 2010 il a instruit au Procureur de la République près le Tribunal de Première Instance d’Ad Aq d'ouvrir une enquête sur ICC- Services ;
III.2- Il a soutenu que cette décision a suscité une panique et une hostilité des plus hauts dignitaires du régime en place, que c'est en ce moment qu'il a appris que les autorités ont mis en place une Commission dite Autonome d'Enquête Judiciaire dont l’une des principales missions est de faire de lui le bouc émissaire du scandale politico-financier, que c'est dans ce cadre que ladite Commission a procédé arbitrairement à son arrestation et à sa garde à vue le 12 juillet 2010, que le 16 juillet 2010 la Commission a mis fin à la mesure policière de privation de liberté et l'a présenté au Procureur Général près la Cour Suprême qui a requis contre lui l'ouverture d'une information judiciaire devant la Chambre Judiciaire de ladite Cour, que le samedi 17 juillet 2010 le Président de la Chambre Judiciaire lui a notifié son placement
sous mandat de dépôt à compter de ce jour ;
III.3- Il à indiqué qu'il a saisi la Cour Constitutionnelle du Bénin par une requête en date du 14 septembre 2010 pour contester la régularité à la Constitution de ces actes notamment son arrestation et sa garde à vue, que deux (02)mois plus tard cette juridiction a rendu la Décision P-CC-10-140 en date du 23 novembre 2010 et sur la question de la garde à vue a disposé « Considérant qu’en outre, il est établi que Monsieur Ah Constant B a été gardé à vue dans les locaux de la Compagnie de Gendarmerie de Cotonou du 12 juillet 2010 à 23 heures au 16 juillet 2010 après une prorogation de quarante-huit heures de cette garde à vue le 14 juillet 2010 par le troisième Substitut du Procureur de la République près le Tribunal de Première Instance de Cotonou, qu’en conséquence, ladite garde à vue n’est pas abusive et ne constitue pas une violation de la Constitution », que la Haute Juridiction a clairement défini l'heure de l'arrestation et la durée de la garde à vue, que l'option de l'information judiciaire ayant été retenue le 16 juillet 2010 le mandat de dépôt dont il paraît avoir été l’objet aurait dû intervenir ce 16 juillet et non le 17 juillet 2010 tel que porté sur le mandat de dépôt, qu'il apparaît ainsi une période de rétention arbitraire allant du 16 juillet 2010 déclarée date de cessation de la garde à vue et le début de l'information judiciaire le 17 juillet 2010 soit vingt-quatre heures après la fin officielle de la garde à vue, que n'ayant pas été libéré dans cet intervalle de temps il se trouvait en état d'arrestation ou de détention arbitraire entre les mains des membres de la fameuse Commission
Autonome d'Enquête Judiciaire ;
III.4- Il a ajouté que sur le fondement de la Constitution et des conventions dûment ratifiées par l'Etat du Bénin, il a saisi la Cour Constitutionnelle d’une requête en date du 11 novembre 2013 déposée et enregistrée le 26 décembre 2013 pour voir statuer ce que de droit sur la violation qui le maintien en prison, que la Cour Constitutionnelle ne s'est pas prononcée bien que les délais impartis en cette
matière ne soient que de huit (08) jours ;
III.5- A l'appui de ses prétentions, il a invoqué la Charte Africaine des Droits de l'Homme et des Peuples, en ses articles 3 et 6, le Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques, la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, la Constitution du Bénin, en son article 18 alinéa 4, la Loi n° 91-009 du 31 mai 2001 portant Loi organique sur la Cour
Constitutionnelle, article 33 ;
III.6- Il à sollicité de la Cour de céans de :
- se déclarer compétente ;
- le déclarer recevable en son action ;
- dire et juger que la Cour Constitutionnelle du Bénin ayant déclaré par décision P-CC 10-140 du 23 novembre 2010 que sa garde à vue a duré du 12 juillet 2010 à 23 heures au 16 juillet 2010, la rétention exercée sur sa personne du 16 au 17 juillet 2010, par la Commission Autonome d’'Enquête Judiciaire ayant procédé à son arrestation, jusqu’ à la délivrance d’un mandat de dépôt par le Juge d'Instruction à son encontre, sans décision préalable du Procureur Général près la Cour Suprême est constitutive d’une arrestation arbitraire ;
- ordonner, en conséquence de cette évidence sa mise en liberté d'office ;
- constater qu'il sollicite le bénéfice des dispositions de l’article 9.5 du Pacte international relatif aux Droits Civils et Politiques ;
- condamner, en conséquence sur ce fondement l'Etat du Bénin à lui verser pour chaque jour de détention arbitraire subie depuis le 12 Juillet jusqu'à la date de sa mise en liberté effective, une somme d'argent que la Cour de céans voudra bien préciser;
- en outre, condamner l’Etat du Bénin aux dépens ;
III.7- L'Etat du Bénin a, d’abord dans un mémoire exceptionnel, développé l’irrecevabilité de la requête formulée par Monsieur B ;
III.8- Il a précisé que le requérant avait saisi la Cour de céans par requête en date du 25 avril 2012 reçue au greffe le 1% juin 2012, qu’au nombre des diverses violations y évoquées figuraient son arrestation, sa garde de vue et sa détention à la prison qu'il a qualifié toutes d'arbitraires, que cette instance connue sous le n° ECW/CCJ/APP/07/12 a été instruite et dénouée par l'arrêt en date du 06 mars 2014 qui d’ailleurs fait actuellement l’objet d’un recours à fin de réparation d’omission de statuer d’une part et d'un recours en interprétation d'autre part, que cet arrêt a acquis l’autorité définitive de la chose jugée ;
III.9- Le défendeur a sollicité, dans son mémoire exceptionnel, de la Cour de Céans de :
- constater qu'il y a autorité de chose jugée relativement = aux demandes nouvellement formulées par le requérant ;
- déclarer en conséquence la requête à fin de sanction d’'arrestation et de détention arbitraire en date du 11 aout 2014 irrecevable ;
- condamner le requérant aux dépens ;
III.10- Abordant le fond, l'Etat du Benin a soutenu que Monsieur B Ah Constant a été poursuivi et inculpé dans une procédure pénale devant la Chambre Judiciaire de la Cour Suprême du Bénin pour répondre des chefs de complicité d’escroquerie avec appel public à l'épargne, recel, complicité d'infraction à la règlementation des institutions mutualistes ou coopératives et de crédit, corruption, qu'après une garde à vue régulière du 12 au 16 juillet 2010 avec une prolongation, le 14 juillet 2010, de 48 heures il a été présenté au Procureur Général près la Cour Suprême le 17 juillet 2010, que ce dernier a requis contre lui l'ouverture d’une information judiciaire au cours de laquelle Monsieur B a fait l’objet d’un mandat de dépôt, que le requérant a estimé qu'il apparaîtrait une période de rétention allant du 16 juillet 2010 qui aurait été déclaré date de cessation de la garde à vue et le 17
juillet 2010 le début de l'information judiciaire soit vingt-quatre (24) heures ;
III.11- Le défendeur a expliqué que c'est conformément aux dispositions de l’article 51 du code de procédure pénale que Monsieur B a été présenté au Procureur Général près la Cour Suprême du Bénin le 17 juillet 2010, date à laquelle son mandat de dépôt lui a été notifié, que la procédure suivie a été conforme aux prescriptions de l’article 51 de l’ancien code de procédure pénale en vigueur lors de son arrestation, que Monsieur B n'a fait l’objet d'aucune rétention arbitraire et que son arrestation, sa garde à vue ainsi que sa détention ont toutes une base légale telle que l’avait déjà jugée la Cour de céans dans son arrêt du 06 mars 2014 ;
III.12- A l'appui de ses prétentions, il a invoqué la Constitution du Bénin, le Code de Procédure Pénale, et le Code Pénal ;
III.13- Au fond, il a sollicité de la Cour de :
- rejeter purement et simplement toutes les prétentions, fins et conclusions du requérant comme mal fondées ;
- condamner le requérant aux dépens.
IV- MOTIVATION
Sur la demande de procédure accélérée :
IV.1- Monsieur B Ah Constant a sollicité de la Cour de constater l'urgence et de dire et juger que sa requête sera soumise à la procédure accélérée prévue par l’article 59 du Règlement de la procédure de la Cour ;
Il a motivé l’urgence par le désir de bénéficier de soins spécialisés que nécessite son état de santé en
famille et de préférence hors du Bénin où sa sécurité ne parait plus garantie ;
IV.2- L'Etat du Bénin, dans ses observations formulées le 21 novembre 2014, a sollicité le rejet pur et simple de la demande en procédure accélérée introduite par le requérant ;
IV.3- L'article 59.1 du Règlement de la Cour de Justice de la Communauté - CEDEAO dispose que : « à la demande soit de la partie requérante, soit de la partie défenderesse, le président peut exceptionnellement, sur la base des faits qui lui sont présentés, l’autre partie entendue, décider de soumettre une affaire à une procédure accélérée dérogeant aux dispositions du présent règlement, lorsque l'urgence particulière de l'affaire exige que la Cour statue dans les plus brefs délais » ;
Le point 2 de l’article exige que la demande tendant à soumettre une affaire à une procédure accélérée soit présentée par acte séparé lors du dépôt de la requête ou du mémoire en défense ;
IV.4- La demande de procédure accélérée des requérants a été déposée au greffe de la Cour le 23 septembre 2014, en même temps que la requête introductive d'instance ;
Il apparait donc que la demande a été formulée dans les forme et délai exigés par le Règlement ;
Elle est alors recevable et la Cour aurait dû l’apprécier;
En effet, s'agissant de détention et d'état de santé, il y a toujours urgence de se prononcer sur la mesure sollicitée ;
une demande de procédure accélérée tend à faire juger la cause dans des délais relativement courts ;
En l'espèce, la cause, ayant été directement enrôlée sur le fond, a été débattue et mise en délibéré ;
Il s'ensuit alors que la demande de procédure accélérée est devenue sans objet ;
- Sur l’exception d'irrecevabilité de la requête formulée par le défendeur :
IV.5- L'Etat du Bénin, dans un « mémoire exceptionnel » en date du 20 novembre 2014 déposé en même temps que le mémoire au fond à savoir le même 04 décembre 2014, a opposé une fin de nonrecevoir à la requête de Monsieur B Ah Constant tirée de l'autorité de la chose jugée ;
IV.6- Il a précisé que la requête de Monsieur B est irrecevable pour la simple raison que la Cour de céans a déjà rendu le 06 mars 2014 un arrêt relativement à l'arrestation, la garde à vue et la détention du requérant dans le cadre de l'affaire ICC- Services entre les parties en la présente cause;
IV.7- Monsieur B a soutenu, dans ses conclusions en réplique en date du 30 décembre 2014, principalement, que les conclusions de l’Etat du Bénin en date du 20 novembre 2014 sont irrecevables pour violation et/ou inobservations des prescriptions des articles 33 et 35 du Règlement de la Cour et subsidiairement, que l'exception d'irrecevabilité est mal fondée ;
IV.8- L'article 33.2 du Règlement de la Cour de Justice de la Communauté fait obligation à faire élection de domicile au lieu où la Cour a son siège et à indiquer le nom de la personne qui est autorisée et qui a consenti à recevoir toutes les significations ;
L'examen du « mémoire exceptionnel » en date du 20 novembre 2014 de l'Etat du Bénin fait apparaitre que ledit document satisfait aux exigences de l’article 33.2 du Règlement de la Cour ;
En effet, il fait état de l'élection de domicile de l’Etat du Bénin à l'Ambassade du Bénin au Nigéria, située à Plot n° 2579 (à proximité de Ab Aa AnC Ap Al, Maïtama, à X, siège de la Cour;
IV.9- L'article 33.3 du Règlement de la Cour de Justice de la Communauté prévoit que « …la requête peut indiquer que l'avocat ou l'agent consent à ce que des significations lui soient adressées par télécopieur ou tout autre moyen technique de communication >» ;
En l'espèce, l'avocat de l'Etat du Bénin a indiqué son consentement à recevoir les significations par télécopieur et par e-mail ;
Il s'ensuit alors que la prescription de l’article a été satisfaite ;
D'ailleurs, au regard, de la rédaction de cette disposition, l'indication de ce consentement n’est que facultative ;
IV.10- L'article 35 du Règlement de la Cour de Justice de la Communauté indique le délai imparti au défendeur pour présenter son mémoire, le contenu du mémoire et la possibilité de proroger le délai de présentation ;
Le requérant a reproché au défendeur de n'avoir pas présenté son mémoire dans les délais prescrits et de n’avoir pas bénéficié d’une prorogation ;
L'analyse des pièces versées fait ressortir que la requête introductive et celle à fin de procédure accélérée ont été notifiées au défendeur le 26 septembre 2014 et que ce dernier n’a cru y répondre que seulement le 04 décembre 2014 ;
Il apparait que les écritures de l'Etat du Bénin ne sont pas intervenues dans les délais fixés par le Règlement;
Mais, le respect du principe du contradictoire exige que l’autre partie soit entendue ;
Ensuite, manifestement le dépôt tardif des écritures du défendeur n’a été source d'aucun préjudice au requérant dans la mesure où sa cause a été examinée dans les délais raisonnables ;
Pour toutes ces raisons, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de Monsieur B tendant à écarter les écritures de l'Etat du Bénin pour forclusion ;
- Sur la requête de Monsieur B
IV.11- Monsieur B Ah Constant a saisi la Cour de céans d'une requête tendant principalement à dire et juger que la rétention exercée sur sa personne du 16 au 17 juillet 2010 par la Commission Autonome d'Enquête Judiciaire est constitutive d’une arrestation arbitraire et ordonner en conséquence sa mise en liberté ;
IV.12- L'Etat du Bénin y a opposé une fin de non- recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée ;
IV.13- Il a soutenu que les griefs invoqués par Monsieur B contre l'arrêt du 06 mars 2014 à savoir les inexactitudes et l’omission de statuer auraient dû l’inciter à exercer les recours admis par le Règlement de la Cour, que l’arrêt n'ayant fait l’objet par les parties de recours approprié, a acquis l'autorité de la chose jugée;
IV.14- Monsieur B a soutenu qu'aucune autorité de la chose jugée ne saurait en l’état actuel de la procédure être reconnue à cet arrêt en raison des inexactitudes évidentes qu'il consacre et de l’omission de statuer sur des moyens d'ordre public ;
IV.15- Il ressort des propres écritures de Monsieur
B que la Cour de céans a rendu le 06 mars 2014 à sa requête contre l’Etat du Bénin un arrêt ;
IV.16- Il apparait donc de ce qui précède que
Monsieur B avait attrait l’Etat du Bénin
devant la Cour de Céans pour entendre statuer sur le caractère arbitraire de son arrestation, de sa garde à vue et de sa détention, qu'au terme de cette
procédure, la Cour a rendu le 06 mars 2014 l'arrêt
dont le dispositif est le suivant :
« Statuant publiquement, contradictoirement, en
matière de droits de l'Homme et en dernier ressort ;
En la forme :
- Dit que la Cour est compétente pour connaitre de la requête en violation de droits de l'homme présentée par Monsieur Constant B contre la République du Bénin, déclare en conséquence ladite requête recevable.
Au fond :
- Constate que l'Etat béninois n’a violé aucun droit de l'Homme au détriment de Monsieur Constant B.
- En conséquence rejette toutes les demandes présentées par le Requérant Constant B.
- Laisse les dépens de chaque partie à sa charge» ;
IV.17- Aux points 41 et 44 de sa motivation, la Cour conclut que ni l'arrestation du requérant, ni sa
détention ne sont arbitraires ;
IV.18- II est aisé de constater que cet arrêt a été rendu entre les mêmes parties à savoir Monsieur Constant B et l'Etat du Bénin, a porté sur la même cause c'est-à-dire l'affaire ICC-Services et a le même objet notamment l'arrestation, la garde à vue et la détention du requérant ;
IV.19- Les sollicitations du requérant dans la présente procédure ne sont pas nouvelles pour la Cour;
En effet, elles font parties de celles que la Cour a déjà appréciées en 2014 dans la procédure n° ECW/CCJ/APP/07/12 et pour lesquelles elle a eu à rendre l'arrêt en date du 06 mars 2014 ;
juridiction nationale, fut-elle la Cour Constitutionnelle, donne des faits sur lesquels la Cour de céans s’est déjà prononcée, ne s'imposent pas à elle au point de remettre en question sa jurisprudence ;
IV.21- Dès lors, il est légitime de se poser la question suivante : la Cour peut-elle connaitre d’une affaire qu'elle a déjà jugée ? Les règles générales de droit veulent que la réponse ne soit que négative, en dehors, dans le cas de la Cour de Justice de la Communauté - CEDEAO, des possibilités d'opposition, de tierce oppositon et de révision prévus respectivement aux articles 90, 91 et 92 du Règlement;
Or, l’action du requérant ne peut s'inscrire dans aucune de ces voies de recours ;
IV.22- Incontestablement, en l’espèce il y a autorité de la chose jugée ; or, ce principe interdit aux parties de renouveler devant le juge le différend qui a été déjà tranché ;
IV.23- Dans ces conditions il y a lieu de déclarer l’action de Monsieur B irrecevable ;
- Sur les dépens
IV.24- L'article 66.2 du Règlement de la Cour de Justice de la Communauté - CEDEAO dispose que « toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu dans ce sens » ;
En l’espèce, l’action du requérant ne va prospérer ; En outre, l'Etat du Bénin a expressément sollicité sa condamnation aux dépens ;
Il y a lieu donc de mettre les dépens à sa charge ;
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de violation des Droits de l'Homme et en premier et dernier ressort ;
Reçoit la demande de procédure accélérée formulée par Monsieur B ;
Dit qu’elle est devenue sans objet ;
Dit qu'il n’y a pas lieu à écarter les écritures de l'Etat du Bénin ;
Reçoit l'exception d'irrecevabilité tirée de l'autorité de la chose jugée présentée par l'Etat du Bénin ;
La déclare bien fondée ;
Déclare la requête, à fin de sanction d’arrestation et de détention arbitraire de Monsieur B, irrecevable ;
Met les dépens à sa charge ;
AINSI FAIT, JUGE ET PRONONCE EN AUDIENCE PUBLIQUE, AU SIEGE DE LA COUR, A X, CE JOUR 23 AVRIL 2015 ;
Y ONT PRIS PART :
- Honorable Juge Jérôme TRAORE, Président,
- Honorable Juge Hamèye Founé MAHALMADANE, Juge Rapporteur,
- Honorable Juge Alioune SALL, Membre ;
Assisté de Maître Athanase ATANNON, Greffier.


Synthèse
Numéro d'arrêt : ECW/CCJ/JUD/05/15
Date de la décision : 23/04/2015

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;cedeao;cour.justice.communaute.etats.afrique.ouest;arret;2015-04-23;ecw.ccj.jud.05.15 ?
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