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03/07/2020 | BULGARIE | N°2674-2019

Bulgarie | Bulgarie, Cour suprême de cassation, Chambre civile, deuxième section, 03 juillet 2020, 2674-2019


ARRET no. 54

Sofia, 03 juillet 2020

AU NOM DU PEUPLE

La Cour suprême de cassation de la République de Bulgarie, Chambre civile, Deuxième section, en l’audience du seize juin deux mille vingt, composée de :

Président : Kamelia Marinova
Membres : Vesselka Mareva, Emilia Donkova

en présence de la greffière Slavia Todorova, après avoir entendu l’affaire civile no. 2674/2019, rapportée par la juge Donkova, et avant de statuer, a considère ce qui suit :

La procédure est ouverte au titre de l’a

rt. 290 et suivants du CPC.

Par son ordonnance no. 30 du 20 janvier 2020, la CSC a déclaré recevable l...

ARRET no. 54

Sofia, 03 juillet 2020

AU NOM DU PEUPLE

La Cour suprême de cassation de la République de Bulgarie, Chambre civile, Deuxième section, en l’audience du seize juin deux mille vingt, composée de :

Président : Kamelia Marinova
Membres : Vesselka Mareva, Emilia Donkova

en présence de la greffière Slavia Todorova, après avoir entendu l’affaire civile no. 2674/2019, rapportée par la juge Donkova, et avant de statuer, a considère ce qui suit :

La procédure est ouverte au titre de l’art. 290 et suivants du CPC.

Par son ordonnance no. 30 du 20 janvier 2020, la CSC a déclaré recevable le pourvoi en cassation formé contre l’arrêt d’appel no. 95 du 18 mars 2019, rendu dans l’affaire civile no. 432/2018 par le Tribunal de grande instance de Sofia. Il est avancé dans le pourvoi que l’arrêt d’appel est erroné car prononcé en violation grave des règles de procédure, violation de la loi matérielle et insuffisance, et on sollicite par conséquent qu’il soit annulé et qu’un arrêt de cassation soit rendu sur le fond du litige en vue de rejeter l’action en revendication de propriété exercée à l’encontre du demandeur en cassation, ou que l’affaire soit renvoyée à la juridiction d’appel pour réexamen.

Le demandeur en cassation sollicite l’annulation de la décision attaquée comme étant erronée : moyen de cassation d’annulation au titre de l’art. 281, point 3 du CPC.

Le défendeur en cassation, par l’intermédiaire de son représentant ad litem, a exprimé en l’audience une position tirée du caractère infondé du pourvoi.

La Cour suprême de cassation de la République de Bulgarie, formation de jugement de la Deuxième section civile, a examiné les moyens avancés dans le pourvoi tendant à l’annulation de l’arrêt d’appel, et, avant de statuer, a considéré ce qui suit :

L’arrêt d’appel attaqué a confirmé le jugement no. 60 du 17 mai 2018, affaire civile no. 591/2015, du Tribunal d’instance de Svogué, reconnaissant comme établi par rapport à B.R.B., sur le fondement de l’art. 108 de la Loi sur la propriété, que V.M.G. est propriétaire d’un terrain no. * d’après le Plan des biens immeubles restitués, représentant un pâturage, terrain non cultivé, dans les communs de [ville], commune de S., lieu-dit K., d’une surface de 1 500 m2, avec les limites décrites, et condamnant le défendeur à lui remettre la possession du bien décrit ci-dessus.

La Cour suprême de cassation, formation de jugement de la Deuxième section civile, après avoir examiné le pourvoi et les moyens y invoqués, considère comme établi :

La procédure devant la juridiction d’instance a été ouverte à la suite d’une action en revendication du bien considéré, exercée par le demandeur à l’encontre du défendeur. Il est allégué dans la requête que le demandeur s’identifie comme propriétaire sur la base de l’héritage reçu de V.S. (Ts.), décédée en 2000. Le droit de la défunte (grand-mère) a été certifié par un acte notarié no. 40/10.02.1971, délivré sur le fondement de l’art. 483 du CPC (abrogé), lui reconnaissant également son droit de propriété sur un pré de 4 000 m2, ayant pour limites : héritiers de G.M., route, P.V. et D.K. Apres son décès, le demandeur a continué d’exercer un pouvoir de fait, le bien considéré faisant partie du bien immeuble décrit ci-dessus.

Le défendeur allègue qu’il a acquis le droit de propriété aux termes d’un contrat de vente conclu par acte notarié no. 17/03.10.2013. Les vendeurs se sont identifiés comme propriétaires en présentant un accord de partage judiciaire du 17 juin 1977, affaire civile no. 137/1975 du Tribunal d’instance de Svogué ; le bien leur a été attribué en tant qu’héritiers de S.P.S. : un pré situé dans les communs de [ville], lieu-dit K., de près de 1 500 m2, avec les limites décrites. Le défendeur avance des moyens selon lesquels la de cujus du demandeur avait perdu son droit de propriété à la suite de la nationalisation du bien immeuble au titre de l’art. 12 de la Loi sur la propriété (abrogé). La propriété du bien ne lui avait pas été restituée au titre du Décret no. 25/11.03.1975 du Conseil des ministres à cause d’une décision formelle du comité exécutif du Conseil populaire municipal, car ses revenus ne provenaient pas essentiellement d’une activité agricole, et, subsidiairement, le bien immeuble dépassait la surface autorisée que la défunte pouvait garder. Il y a eu également des obstacles empêchant son acquisition, provenant de l’art. 6 de la Loi sur les modalités de transfert de droits réels sur certains biens immeubles (publ., Izv., no. 90 du 11 novembre 1958), applicable à l’égard de la localité. Le bien n’a pas été déclaré pour restitution devant l’autorité chargée de la restitution de la propriété agricole. Afin de confirmer le jugement de la juridiction de première instance, la juridiction d’appel a admis que le droit de propriété n’avait pas été perdu par la de cujus du demandeur. La conclusion a été tirée selon laquelle le bien considéré ne lui avait pas été enlevé, qu’elle l’avait possédé de manière continue, paisible et sans être inquiétée durant la période de 1965 à 2000, et qu’ensuite c’est V.G. qui avait commencé à exercer le pouvoir de fait. Lors de l’examen de l’identité du bien immeuble, les conclusions des expertises ont été prises en compte. Des considérations ont été avancées selon lesquelles les biens immeubles, qui n’ont pas été expropriés à leurs propriétaires, ont été inclus dans un fonds au titre de l’art. 19 de la Loi sur la propriété et l’utilisation des terres agricoles. Il est indiqué que le défendeur n’a pas attesté le droit de propriété en faveur des auteurs de sa succession, étant donné l’identité non établie entre le bien, objet du contrat de vente, et le bien qui leur avait été attribué au titre de l’accord judiciaire. La conclusion est faite selon laquelle le contrat de vente, avec lequel le bien a été identifié, n’a pas produit d’effets réels.

Le pourvoi en cassation est déclaré recevable sur le fondement de l’art. 280, alinéa 1, point 1 du CPC, sur les questions suivantes : 1. La juridiction d’appel doit-elle, lors de la répartition de la charge de la preuve, prendre en compte les exceptions soulevées par le défendeur, et donner des instructions explicites sur le recueil des preuves concernées ? 2. Comment doit-on établir l’identité entre deux biens immeubles, durant des périodes de temps différentes, est-il suffisant d’admettre comme établie cette identité s’il existe une coïncidence entre deux limites ? 3. La propriété d’un bien immeuble agricole exproprié ou nationalisé peut-elle être restituée au titre de la Loi sur la propriété et l’utilisation des terres agricoles ?

A la première question de procédure ainsi posée, il faut apporter la réponse suivante :

La juridiction d’appel doit répartir la charge de la preuve entre les parties, y compris sur les exceptions invoquées par le défendeur, délimitant l’objet du litige. Elle doit en outre ordonner la collecte d’expertises comme éléments de preuve, lorsqu’il s’avère nécessaire d’établir l’identité du bien considéré. Cette obligation découle de l’arrêt interprétatif no. 1/09.12.2013, affaire interprétative no. 1/2013 de l’Assemblée générale des Chambres civile et commerciale de la CSC (point 3 de cet arrêt), où il est admis que lorsque le recours en appel contient un grief, tiré de la preuve d’un certain fait en violation des règles de procédure, il n’est pas nécessaire que l’appelant ait demandé une expertise en vue de son établissement. Dans cette hypothèse, le juge doit ordonner d’office une expertise en vue de l’établissement de ce fait.

Sur la deuxième question.

Dans son arrêt no. 672/07.03.2011, affaire civile no. 1584/2009, la CSC, première section civile, a admis que l’individualisation des biens immeubles est effectuée d’après leurs emplacement, limites, statut de zonage, surface, ainsi que d’après toute autre donnée ou preuve à l’appui, susceptible d’aider l’établissement de ce fait. Pour qu’on établisse l’identité entre deux biens immeubles, qui ont existé durant différentes périodes avec une différente individualisation, il suffit que ces biens coïncident d’après leurs emplacement et limites, cette dernière caractéristique étant liée aux limites spatiales du droit de propriété sur une partie donnée de la surface terrestre, lesquelles limites s’étendent jusqu’au commencement des biens de ses voisins et de leur droit de propriété. Si, durant les différentes périodes, les voisins (ou leurs héritiers) coïncident, on peut conclure que le bien immeuble enclavé entre eux n’a pas changé. La surface des biens immeubles et la référence d’après le plan, le cas échéant, ne sont pas des signes inhérents, car elles dépendent du mode de mesurage ou peuvent changer avec l’évolution du plan. Afin d’individualiser les biens immeubles et d’établir l’identité entre deux biens, on peut recourir à l’expertise en désignant des experts, y compris pour retracer les voisins des biens immeubles, et les comparer en fonction de ce qui est inscrit dans les différents plans, fiches descriptives et titres de propriété, ainsi que dans toute autre documentation disponible. En ce qui concerne le nom du lieu-dit, sont en outre admis les témoignages, car le nom du lieu-dit n’a pas de caractère officiel et les limites elles-mêmes ne sont pas définies avec précision, ce qui rend possible l’apparition de modifications au cours des années, ou, si les lieux-dits sont contigus, il est possible qu’ils se recoupent partiellement ou qu’ils soient désignés sous un nom commun. Dans son arrêt no. 30 du 30 janvier 2009, affaire civile no. 5601/2007, la CSC, deuxième section civile, a indiqué que la loi de procédure n’interdit pas l’établissement à l’aide de témoignages de l’identité d’un bien immeuble, y compris en retraçant les évolutions survenues au niveau de ses voisins au cours d’une certaine période de temps, et dès que la partie, à laquelle revient la charge d’établir l’identité du bien immeuble, a communiqué de telles preuves, le juge est tenu d’examiner celles-ci ensemble avec les éléments de preuve écrits afin de procéder à une appréciation globale des faits d’importance juridique. Dans son arrêt no. 25 du 06 juillet 2012, affaire civile no. 1035/2010, la CSC, première section civile, a également admis qu’on ne peut pas présumer de l’identité d’un bien immeuble seulement d’après la coïncidence dans le temps des noms de ses voisins. Le droit de propriété sur les biens voisins peut avoir été transféré à plusieurs reprises durant la période étudiée, en faveur de différentes personnes, mais cela n’influe pas sur l’identification du bien possédé. Le propriétaire d’un bien immeuble ou le titulaire d’un droit réel restreint sur un tel bien n’a pas l’obligation d’actualiser les documents identifiant ce bien en cas de changement des propriétaires des biens voisins, y compris dans les hypothèses où les limites du bien, par rapport auquel s’étendent ses droits, ont été décrites avec les noms des voisins. Voilà pourquoi dans un litige portant sur l’identité d’un bien immeuble, dont les limites sont décrites avec les noms des voisins, il y a lieu de prendre en compte l’ensemble des éléments de preuve concernant les changements survenus plus tard au niveau de la propriété des biens voisins, ainsi que tout autre élément de preuve susceptible de permettre de tirer des conclusions quant à son emplacement. La présente formation de jugement admet entièrement la jurisprudence citée ci-dessus.

Sur la troisième question.

Conformément à l’art. 10 et suivants de la Loi sur la propriété et l’utilisation des terres agricoles, sont restitués au titre de cette loi les droits des propriétaires ou de leurs héritiers sur des terres agricoles possédées par eux avant la création des coopératives agricoles de travail (TKZS) ou des exploitations agricoles d’Etat (DZS), qu’ils aient adhéré ou non à ces structures ou à d’autres entités créées sur leur base ; des terres agricoles nationalisées au titre de la disposition abrogée de l’art. 12 de la Loi sur la propriété ; des terres agricoles que les propriétaires ont cédées à titre gratuit aux TKZS ou à l’Etat ; ainsi que des terres agricoles expropriées de manière irrégulière, des terres agricoles reboisées ou gagnées par la forêt, y compris celles incluses dans le fonds de forêts de l’Etat. L’élément commun dans toutes ces hypothèses est que la Loi sur la propriété et l’utilisation des terres agricoles prévoit les modalités de restitution de la propriété de terres, qui ont eu initialement, avant la collectivisation, un statut agricole. Si les terres ont eu un autre statut au moment de la collectivisation, il faudra établir si elles ont été nationalisées au titre de la disposition abrogée de l’art. 12 de la Loi sur la propriété ou au titre d’une autre hypothèse d’expropriation, prévue dans l’art. 10 et suivants de la Loi sur la propriété et l’utilisation des terres agricoles, avant de pouvoir admettre que le droit de propriété a été restitué selon les modalités de cette loi. C’est aussi le sens de l’arrêt no. 183 du 01 novembre 2016, affaire civile no. 702/2016, de la Première section civile. La jurisprudence de la CSC (arrêt no. 218/29.09.2014, affaire civile no. 6670/2014, 1e section civile) admet que les biens immeubles, dont la possession a été maintenue dans des limites réelles parce que leurs propriétaires, devenus membres ou non des TKZS, ont gardé leurs droits de propriété dans des limites réelles, à hauteur de la surface et suivant les conditions prévues dans le Modèle de Statuts des TKZS, et n’ont pas été privés de fait de ces biens, ont gardé leur caractère de propriété privée dans leurs limites réelles et ne sont pas susceptibles de restitution au titre de la Loi sur la propriété et l’utilisation des terres agricoles. Cette interprétation est applicable aux hypothèses dans lesquelles, au moment de la collectivisation de la terre, le bien immeuble a eu un caractère urbanisé ou agricole et son propriétaire, respectivement son possesseur, n’a pas adhéré aux TKZS, a gardé la possession dans des limites réelles et cette possession dans des limites réelles a été encore réelle au moment de l’entrée en vigueur de la Loi sur la propriété et l’utilisation des terres agricoles, sans que le bien ait été entretemps exproprié de fait par l’Etat (arrêt no. 101 du 03 octobre 2018, affaire civile no. 4402/2017, Deuxième section civile). L’appréciation de savoir si le bien immeuble a été susceptible de restitution exige que soit établie la manière dont il a été exproprié : expropriation au profit de l’Etat (nationalisation) ou adhésion aux TKZS ou à une autre organisation agricole, qui doit être établie de fait au cas par cas. Dans la présente hypothèse, une telle expropriation n’a pas été établie. Le bien considéré est resté dans ses limites réelles, bien qu’il n’est pas certain qui a exercé la possession dans ces limites (la de cujus du demandeur ou les auteurs de la succession du défendeur).

Sur le pourvoi en cassation.

En l’espèce, la situation de fait suivante a été établie :

Il ressort de l’acte notarié de constatation no. 40/10.02.1971, établi sur le fondement de l’art. 483 du CPC (abrogé) en faveur de V.I.Ts., que le droit de propriété par prescription acquisitive lui a été reconnu sur un pré situé dans les communs de [ville], région de Sofia, lieu-dit K., d’une surface de 4 000 m2, ayant pour limites : héritiers de G.M., route, P.V. et D.K.

Par un contrat de vente, conclu par acte notarié no. 17/03.10.2013, B.R.B. a acquis un terrain no. * d’après le Plan des biens immeubles restitués, constitué d’un pâturage, terrain non cultivé, dans les communs de [ville], commune de S., lieu-dit K., d’une surface de 1 500 m2, dont les limites sont décrites. Les vendeurs d’après le contrat, N.P.P., A.P. et K.P., ont été identifiés comme propriétaires sur le fondement d’un accord de partage judiciaire du 17 juin 1977, effectué dans l’affaire civile no. 137/1975 par le Tribunal d’instance de Svogué. Il ressort de cet accord qu’un partage a été réalisé entre les héritiers d’I.S., à la suite duquel leur de cujus S.P.S. a reçu dans sa part un pré situé dans les communs de [ville], lieu-dit K., de près de 1 500 m2, ayant pour voisins : Z.P., héritiers de Sim.Т., L.P. et héritiers d’I.P. (troisième part, vol. 8). Les parts des autres copartageants contenaient également des près d’une surface identique (représentant des parts d’un plus grand bien immeuble), dont les voisins sont décrits.

D’après la conclusion de la principale expertise technique et judiciaire, entendue par la Cour, le bien a une vocation agricole, il figure sur le plan des biens immeubles restitués, élaboré en 1997. La conclusion est tirée que le bien no. * d’après le Plan des biens immeubles restitués, fait partie des biens, décrits dans l’acte notarié no. 40/1971, seulement sur la base de ce plan et du schéma des empiètements, élaboré en 2015 par le Service municipal « Agriculture », à la suite d’une demande d’exécution d’un levé du bien immeuble, déposée par les héritiers de V.S. Il est indiqué qu’il existe deux limites coïncidentes, dont l’une est une route de campagne et l’autre, G.M. L’expertise a été contestée par le représentant ad litem du défendeur, qui a demandé une triple expertise technique judiciaire. Cette expertise a conclu qu’il n’y a pas d’identité entre le bien immeuble, décrit dans l’accord judiciaire, et le bien considéré, mais cette conclusion n’a pas été étayée de preuves. Les limites, décrites dans les titres de propriété, n’ont pas été examinées et les preuves orales recueillies n’ont pas été prises en compte. En l’espèce, il est certain qu’aucun TKZS n’a été créé dans cette localité.

Le bien décrit dans l’acte notarié de constatation n’a pas été demandé en restitution (courrier du 12 mars 2016 du Service municipal « Agriculture », Svogué). Il a été inclus dans le fonds au titre de l’art. 19 de la Loi sur la propriété et l’utilisation des terres agricoles (décision et PV du 19 janvier 2009), mais par ordonnance du 25 juin 2015 du maire de la commune de Svogué, il a été radié de la liste de ce fonds. A la demande du demandeur, adressée en 2015 au Service municipal « Agriculture », Svogué, un levé a été exécuté du bien immeuble d’une surface de 4 026 m2, qui empiète entièrement sur le bien immeuble no. * d’après le Plan des biens immeubles restitués ; pour le reste de la surface du bien mesuré, des projets de biens immeubles dans le Plan des biens immeubles restitués et des plans de situation avec propriétaire inscrit V.S. (schéma d’empiètement) ont été élaborés.

Dans le rapport de la juridiction de première instance au titre de l’art. 146 CPC, la charge de la preuve n’a pas été répartie entre les parties et des instructions concrètes n’ont pas été données (il est seulement indiqué qu’au défendeur incombe la charge de prouver qu’il exerce légitimement la possession du bien immeuble ; des instructions n’ont pas été données sur les exceptions soulevées selon lesquelles le bien avait été nationalisé et comme tel, il a été susceptible de restitution par l’autorité chargée de la restitution agricole).

Dans son recours en appel, le défendeur, demandeur en cassation, a demandé à la juridiction de première instance de compléter ce rapport, en avançant des arguments selon lesquels les expertises recueillies n’avaient pas établi l’identité du bien immeuble. La juridiction d’appel, sur le fondement de l’art. 146, alinéa 1, point 5 du CPC, a réparti la charge de la preuve, en indiquant seulement au demandeur qu’il doit établir la période pendant laquelle sa de cujus a exercé la possession du bien. Des preuves orales ont été recueillies à la suite de l’audition d’un témoin pour chacune des parties.

D’après les dépositions de la témoin N., invitée par le demandeur et interrogée lors de la procédure devant les juridictions de première instance et d’appel, sa tante V.S. s’est occupé d’agriculture et a travaillé le pré situé dans le lieu-dit K., d’une surface de 4 000 m2, ayant pour voisins : route et la rivière d’Iskar. Apres son décès, le demandeur a continué de l’exploiter. Il ressort des dépositions des témoins I. et R., désignés par le défendeur, que durant la période de 1970 à 1980, le pré a été fauché par S. Ce pré se trouvait dans le lieu-dit Ch. (faisant partie du lieu-dit K.), situé dans les communs de [ville], direction [ville]. D’après les dépositions du premier témoin, ce pré avait pour limites une route et la rivière d’Iskar, et selon le deuxième témoin, un ravin et la route pour [ville]. Le bien n’a pas été clôturé (à l’instar des autres biens voisins).

Le juge n’a pas admis l’audition d’une expertise technique, susceptible d’établir l’identité du bien considéré, indépendamment du grief avancé dans le recours selon lequel cette identité ne peut pas être établie uniquement sur la base du levé, exécuté par l’autorité administrative à la demande des héritiers de V.S. En l’espèce, afin qu’on puisse clarifier les faits en cause, il est nécessaire d’établir cette identité. Vu les réponses apportées aux questions soulevées, sur lesquels le pourvoi en cassation a été déclaré recevable, il y a lieu de conclure que la juridiction aurait dû admettre d’office l’audition d’une expertise afin d’élucider l’identité entre le bien considéré et celui décrit dans l’acte notarié de constatation de la de cujus du demandeur, respectivement, entre le bien considéré et le bien décrit dans l’accord judiciaire de 1977, à la suite duquel ce bien s’est retrouvé dans la part attribuée aux auteurs de la succession du défendeur. L’examen de cette identité suppose de retracer les limites, telles que décrites dans les titres de propriété ou indiquées dans les dépositions des témoins, ainsi que les noms des lieux-dits. L’arrêt attaqué a été prononcé sans que la juridiction d’appel ait entrepris les actes de procédure nécessaires, consistant en l’admission d’une expertise technique judiciaire avec la mission formulée ci-dessus, ce qui le rend irrégulier parce que rendu en violation grave des règles de procédure, moyen de cassation d’annulation au titre de l’art. 281, point 3 en lien avec l’art. 293, alinéa 2 du CPC. L’arrêt d’appel doit être annulé et, sur le fondement de l’art. 293, alinéa 3 du CPC, l’affaire doit être renvoyée pour réexamen par une autre formation de jugement de la juridiction d’appel, qui doit admettre une expertise technique judiciaire avec pour mission de fournir une conclusion quant à l’identité du bien considéré, conformément aux éléments décrits ci-dessus.

Lors de ce réexamen de l’affaire, la juridiction d’appel devra se prononcer également sur les frais engagés devant la présente juridiction.

Sur ces motifs, la Cour suprême de cassation de la République de Bulgarie, formation de jugement de la Deuxième section civile,

A RENDU L’ARRET SUIVANT :

ANNULE l’arrêt d’appel no. 95 du 18 mars 2019, rendu sur l’affaire civile no. 432/2018 d’après le rôle du Tribunal de grande instance de Sofia.
RENVOIE l’affaire pour réexamen, dans la partie décrite, par une autre formation de jugement du Tribunal de grande instance de Sofia, conformément aux instructions données dans les motifs.

L’arrêt est définitif.


Synthèse
Formation : Chambre civile, deuxième section
Numéro d'arrêt : 2674-2019
Date de la décision : 03/07/2020
Type d'affaire : Arrêt

Origine de la décision
Date de l'import : 09/02/2021
Identifiant URN:LEX : urn:lex;bg;cour.supreme.cassation;arret;2020-07-03;2674.2019 ?
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