A R R Ê T
№ 14
Ae, le 14.02.2019
AU NOM DU PEUPLE
La Cour suprême de cassation de la République de Bulgarie, Première section civile, en audience du vingt-quatre janvier deux mille dix-neuf, formation de juges :
PRÉSIDENT : Ad Am
MEMBRES : Svetlana Kalinova
Galabina Guentcheva
en la présence du greffier Emilia Petrova,
après avoir entendu le rapport du juge Svetlana Kalinova, affaire № 953 de 2018,
pour statuer, a pris en considération ce qui suit :
La procédure est au titre des articles 290-293 du CPC.
Elle a été ouverte sur la base du pourvoi en cassation № 13870/22.12.2017, formé par Ap Aj Ab, représentée par Me Zvezdelina Rafaïlova, Barreau de Roussé, contre le jugement № 458/02.11.2017 rendu par le Tribunal régional de Roussé, Chambre civile, dans l’affaire civile № 648/2017, rectifié en vertu de l’article 247 du CPC par jugement № 1002/02.08.2017 prononcé dans la même affaire, confirmant la restitution de la réserve héréditaire de An Am Aj, Af Ak Aj et Ap Aj Ab de la succession de Ah Aq Ag, revenant à ¼ quote-part indivise de la masse successorale pour chacun d’eux, en réduisant le legs fait à Aa Ab Ag, ainsi que la réserve héréditaire de An Am Aj et Af Ak Aj de l’héritage de Aa Ab Ag, revenant à 1/3 quote-part indivise de la masse successorale, en réduisant le legs fait en faveur de Aa Ab Ag, ainsi que la réserve héréditaire de An Am Aj et Af Ak Aj de l’héritage de Aa Ab Aj revenant à 1/3 quote-part de la masse successorale par réduction des legs qu’il a faits en faveur de Ap Aj Ab par acte notarié .№179, tome I, enregistré sous le № 3569, dossier № 151/10.04.2014 ; acte notarié №181, tome I, enregistré sous le № 3627, dossier № 152/11.04.2014 ; acte notarié № 200, tome I, enregistré sous le № 3857, dossier № 171/17.04.2014 ; et
ordonnant le partage judiciaire du lot № 63427.2.2136.7.1 du bâtiment № 7, situé sur le terrain № 63427.2.2136, se trouvant à Roussé, rue Borissova № 51, entrée 4, étage 1, apt. I ??? - droits de propriété sur 9/24 parts indivises pour An Am Aj et Af Ak Aj, et sur 15/24 quote-parts indivises pour Ap Aj Ab ;
ordonnant le partage judiciaire du terrain № 046044, se trouvant sur le territoire de la ville de Marten, région de Roussé, dans le lieu-dit Ao, d’une superficie de 0,937 ha, droits sur 1/3 de quote-part indivise pour An Am Aj et Af Ak Aj, et 2/3 quote-parts indivises pour Ap Aj Ab ;
ordonnant le partage judiciaire de 500/1262 parts indivises d’une parcelle dans la ville de Marten, région de Roussé, d’une superficie globale de 1262 mètres carrés, constituant la parcelle XXIV-415, quartier 47 du plan de la ville, utilisation effective sur 500 mètres carrés du côté du voisin Ah As, donnant sur la rue – 7 mètres de façade, constituant la parcelle № 47336.0.802 sur laquelle est construit le bâtiment en torchis № 0.082.1, à un étage, superficie de 28 mètres carrés ; du terrain № 024065 se trouvant sur le territoire de la ville de Marten, dans le lieu-dit Al, surface de 0, 9657 ha ; du terrain № 008035, se trouvant dans le lieu-dit Zad Ac, surface de 0,770 ha ; du terrain № 056045, se trouvant sur le territoire de la ville de Marten, dans le lieu-dit Vehtite lozia, surface de 0,0994 ha ; du terrain № 042048, se trouvant sur le territoire de la ville de Marten, dans le lieu-dit Pachov kladenets, surface de 0,5549 ha - 5/12 quote-parts indivises pour An Am Aj et Af Ak Aj, et 7/12 quote-parts indivises pour Ap Aj Ab.
Par ordonnance № 479/22.10.2018 prononcée en l’espèce, le pourvoi en cassation est accueilli pour les questions suivantes :
1. La masse successorale doit-elle être constituée au titre de l’article 31 de la Loi sur la succession (LS), lorsque le de cujus a disposé de ses biens non pas par legs universel, mais par donations, et dans quels cas ?
2. La restitution de la réserve héréditaire peut elle-être réalisée moyennant l’application conjointe des voies prévues par les articles 32-34 et 36 de la LS ?
3. De quelle manière doit être effectuée la restitution de la réserve héréditaire des biens du de cujus dont il avait disposé par legs universel, dans l’hypothèse où après son décès, le légataire a disposé des biens légués par donations et est décédé avant l’introduction de la demande au titre de l’article 30 de la LS, et de quelle manière devrait se faire la restitution de la réserve héréditaire de la succession de ce dernier, si, de son vivant, il a disposé par donations, également de tous ses biens acquis sur une autre base légale, en faveur d’une personne qui a la qualité d’héritier réservataire des deux successions ?
Le demandeur au pourvoi maintient que la décision attaquée est irrecevable, éventuellement erronnée à cause de l’application erronnée de la loi matérielle, de violations substantielles des règles de procédure, et de son caractère mal fondé. Des considérations sont exposées qu’il y a prononciation sur une demande non introduite, car la demande est pour la réduction de la disposition testamentaire de Ah Aq Ag du 08.02.2001, alors que par son jugement le tribunal a restitué la réserve héréditaire de An Am Aj et Af Ak Aj de la succession de Ah Aq Ag en réduisant le legs du 08.02.2011, pour lequel il n’ a pas été établi en l’espèce qu’il avait été fait par Ah Aq Ag. Le requérant maintient également que le tribunal a jugé à tort que la procédure a été ouverte sur la base d’une action en partage, acceptant que la demande de partage était la demande principale, et que les demandes de restitution de la réserve héréditaire par la réduction des legs et donations étaient des demandes de décision préjudicielle. Selon le demandeur en cassation, la décision attaquée ne correspond pas à la situation factuelle et juridique réelle, car le tribunal n’a pas examiné toutes les pièces du dossier, isolément ou dans leur ensemble, ainsi que toutes les allégations et objections. Le requérant trouve que la juridiction d’appel a accepté à tort que l’hypothèse de la disposition de l’ensemble des biens par plusieurs donations successives est analogue à l’hypothèse d’une disposition par legs universel, dans laquelle la disposition de l’article 34 de la LS ne s’applique pas, négligeant ainsi complètement la volonté des deux de cujus, Ah Aq Ag et Aa Ab Ag, et assurant de cette manière une plus grande protection des droits des héritiers réservataires. Le demandeur en cassation demande l’invalidation de la décision attaquée, respectivement son annulation, que le litige soit réglé en rejetant l’action en partage et qu’il soit alloué aux réservataires lésés l’équivalent en argent de leur réserve héréditaire. Il demande le remboursement des dépens dans l’affaire.
Dans leur réponse écrite, envoyée dans le délai prévu par l’article 287, alinéa 1 du CPC, les défendeurs au pourvoi de cassation An Am Aj et Af Ak Aj, représentés par Me Elvira Mintcheva, ont exprimé leur position que le pourvoi est mal fondé pour les considérations développées dans la réponse. Ils demandent le remboursement des dépens dans l’affaire.
Après examen des arguments des parties concernant les moyens de cassation présentés et vérification de la décision attaquée conformément à l’article 290, alinéa 1 et l’article 293 du CPC, la Cour suprême de cassation a retenu ce qui suit : An Am Aj et Af Ak Aj ont introduit contre Ap Aj Ab des actions en restitution de leur réserve de l’héritage de Ah Aq Ag, ainsi que des actions en restitution de leur réserve de l’héritage de Aa Ab Ag et une action en partage des biens immobiliers décrits dans la requête, la copartageante Ap Aj Ab ayant formulé, en réponse à la requête, sa demande de restitution de sa réserve de l’héritage de Ah Aq Ag.
Les copartageants sont héritiers légaux de Ah Aq Ag, décédée le 15.08.2011, et de Aa Ab Ag, décédé le 05.05.2014, Ap Aj Ab est la fille des de cujus communs, et An Am Aj et Af Ak Aj sont les enfants de Au Aj Ab, fils des de cujus communs, décédé le 14.08.1998.
Par testament olographe du 08.02.2011 Ah Aq Ag a légué tous ses biens meubles et immeubles à Aa Ab Ag, qui, en 2014, moyennant quatre contrats avec Ap Aj Ab, a fait donation aussi bien des biens objet de la disposition testamentaire que des biens acquis sur une autre base juridique.
Par la décision attaquée la juridiction d’appel a jugé que la procédure a été ouverte sur la base de l’action en partage introduite par An Am Aj et Af Ak Aj, jointe aux actions en restitution de réserve héréditaire par réduction de legs et de donations, laquelle jonction est admissible, eu égard à la disposition expresse de l’article 343 du CPC, les demandes de réponse préjudicielle et l’objection soulevée par Ap Aj Ab ayant été été dûment intégrées dans l’objet du litige, la Cour doit se prononcer sur elles.
Des considérations sont exposées que l’action au titre de l’article 30, alinéa 1 de la LS vise la restitution de la réserve héréditaire atteinte par des transmissions de biens à titre gratuit (legs ou donations), le droit de restitution de la réserve héréditaire atteinte par des dispositions testamentaires ou par des donations étant un droit subjectif potestatif qui a un caractère patrimonial, alors que la réserve héréditaire, respectivement la quotité disponible, ne représente pas une partie en nature de l’héritage, bien que dans les articles 28 et 29 de la LS soient utilisées les expressions « partie de l’héritage » et « partie du patrimoine du de cujus », étant donné que le mode de détermination de la taille de la réserve héréditaire, conformémement à l’article 31 de la LS, impose la conclusion que la réserve héréditaire est une valeur numérique, une fraction d’une valeur qui est calculée en effectuant les opérations réglementées par la loi.
Pour se prononcer sur les questions litigieuses relatives à la manière dont doit être réalisée la restitution de la réserve de l’héritage de Ah Ag et de celle de l’héritage de Aa Ag, la juridiction d’appel a pris en compte le fait qu’en l’espèce il y a un legs universel (le testament de Ah AgA, et de ce fait elle a jugé qu’il ne faut pas former une masse selon les règles de l’article 31 de la LS, mais qu’elle doit être réduite proportionnellement, à concurrence de la taille de la réserve héréditaire du successeur, bien que, après le décès de la testatrice, le légataire ait disposé par contrats de donation, de l’ensemble des biens objet du legs.
Par rapport à la restitution de la réseve atteinte par les donations faites par Aa Ag, la juridiction d’appel a jugé que les règles des articles 32-34, ainsi que de l’article 36 de la LS ne s’appiquent que lorsque la transmission à titre gratuit est réalisée par un contrat de donation qui ne porte pas sur l’ensemble des biens du de cujus ; or, en l’espèce, le de cujus a disposé de tous ses biens et pour cette raison ces règles ne peuvent pas être appliquées et les donations doivent être réduites à concurrence de la taille de la réserve héréditaire.
La juridiction d’appel a jugé qu’en l’espèce la disposition de l’article 34 de la LS ne s’applique pas, car le droit du légataire de choisir, visé à l’article 34 de la LS, ne naît que lorsque plusieurs biens spécifiés sont légués ou donnés, mais pas dans le cas de legs ou de donation de l’ensemble des biens du de cujus.
Quant à la manière dont devrait se faire la restitution de la réserve héréditaire de l’héritage du de cujus ayant disposé de ses biens par legs universel, dans l’hypothèse où après son décès le légataire a disposé de l’ensemble des biens légués par voie de donation et est décédé avant l’introduction de la demande aux termes de l’article 30 de la LS, la présente formation de juges accepte qu’à l’héritier ayant exercé son droit de réclamer la restititution de sa réserve héréditaire, ne peut être alloué que l’équivalent en argent de sa réserve.
L’action en restitution de la réserve héréditaire a pour objet la restitution de l’équivalent de la réserve héréditaire du successeur y ayant droit, de l’ensemble des biens que le de cujus possédait au jour de son décès. L’accueil de cette demande n’est pas assorti d’allocation d’une quote-part indivise du bien spécifié par réduction de la quote-part indivise donnée ou léguée. (Dans ce sens est l’arrêt № 177/28.05.2011, affaire civile № 844/2010, rendu par la Deuxième section civile de la CSC, cette position étant maintenue de manière non contradictoire et cohérente dans la jurisprudence de la Cour). La demande est formée contre le bénéficiaire de la disposition testamentaire, la réserve pouvant être restituée par réduction du legs d’une fraction simple, correspondant à la réserve héréditaire, déterminée selon les règles de l’article 29 de la LS, respectivement par réincorporation du bien dans l’héritage conformément à l’article 36, alinéa 1 de la LS, uniquement si au jour de l’introduction de la demande, le bien légué fait toujours partie du patrimoine du légataire. Si le bénéficiaire de la disposition testamentaire a disposé du bien légué, il faut appliquer la règle établie par l’article 37 de la LS, selon laquelle les dispositions subséquentes du bien légué ne peuvent être annulées par demande du réservataire que si elles ont eu lieu au cours de l’année précédant la date de l’ouverture de la succession ou après l’inscription de la demande de réduction, uniquement si le réservataire ne peut pas compléter sa réserve héréditaire du patrimoine du légataire et si l’acquéreur n’a pas complété la réserve d’une somme d’argent. Le réservataire ne peut recevoir la quote-part indivise du bien correspondant à sa réserve héréditaire que si la disposition subséquente du bien légué (ou donné) est annulée.
Il est donc d’une importance substantielle pour la manière dont doit être effectuée la restitution, d’établir si le bénéficiaire de la disposition testamentaire a disposé du bien légué, et dans ce cas la Cour doit apprécier l’application de la règle énoncée dans l’article 37 de la LS (dans ce sens : Arrêt № 404/03.01.2012, rendu dans l’affaire civile № 995/201 par la Première section civile de la CSC), y compris l’hypothèse dans laquelle le bénéficiaire de la disposition testamentaire a disposé du bien légué par voie de donations et est décédé avant l’introduction de la demande au titre de l’article 30 de la LS. Et si l’annulation des dispositions subséquentes est impossible, puisque elles ont eu lieu un an après l’ouverture de la succesion et avant l’inscription de la demande de réduction, la restitution de la réserve héréditaire ne peut se faire qu’en argent et la demande de remboursement doit être adressée à l’acquéreur du bien, qu’il soit ou non héritier du de cujus, respectivement au cédant, à côté des personnes réclamant la restitution de la réserve héréditaire ou de tiers à la succession (dans ce sens : Arrêt № 130/21.12.2015, affaire civile № 1371/2015, Deuxième section civile de la CSC, et les Arrêts de la Première section civile qui y sont évoqués : № 655/29.06.2009, affaire civile № 1475/2008 et № 655/29.06.2009, affaire civile № 1475/2008, ainsi que l’Ordonnance № 540/18.11.2016, affaire civile № 4599/2016, prononcée par la Quatrière section civile de la CSC).
Au vu de la réponse ainsi formulée à la question relative à la manière dont doit se faire la restitution de la réserve en présence d’une disposition subséquente du bien légué, la décision attaquée est jugée erronnée dans sa partie relative à la restitution de la réserve héréditaire de An Am Aj, Af Ak Aj et Ap Aj Ab de la succession de Ah Aq Ag, à cause de l’application incorrecte de la loi matérielle (articles 32-37 de la LS).
En tenant compte du fait que le légataire Aa Ab Ag a disposé du patrimoine légué par voie de donations faites en 2014, c'est-à-dire plus de deux ans après la mort de la testatrice Ah Aq Ag, et qu’il est décédé avant l’introduction de la demande de restitution de la réserve héréditaire de la sucession de celle, il y a lieu de considérer que la réserve héréditaire de An Am Aj et Af Ak Aj doit être restituée en leur allouant son équivalent en espèces selon la valeur au moment de la réduction.
Au jour de son décès, la testatrice Ah Aq Ag possédait ½ part indivise du lot identifié sous le № 63427.2.2136.1, se trouvant dans le bâtiment N° 7, situé sur le terrain № 63427.2.2136, à Roussé, rue Borissova N° 51, étage 1, apt. I, acquis par elle et son époux Aa Ab Ag pendant le mariage, en leur qualité de copropriétaires de l’immeuble d’habitation « Gueorgui-Dimitrov » (acte notarié № 36, tome X, dossier № 4070/1972, établi le 22.12.1972), dont la valeur actuelle revient à 36 423 leva ; 500/1262 parts indivises d’une parcelle dans la ville de Marten, région de Roussé, d’une surface globale de 1262 mètres carrés, constituant la parcelle XXIV-415, quartier 47 du plan de la ville, ces parts correspondant au terrain № 47336.0.802, sur lequel se trouve le bâtiment № 47336.0.082.1, acquises par elle en vertu d’un contrat de donation conclu le 16.03.1974 (acte notarié № 36 47, tome II, dossier № 606/1974), dont la valeur se monte actuellement à 10496 leva ; terrains № № 024065, 008035 et 056045, 042048, se trouvant sur le territoire de la ville de Marten, acquis par elle par succession après la restitution des droits de propriété, en vertu de la Loi sur la propriété et l’utilisation des terres agricoles (ЗСПЗЗ), aux héritiers de Aq Ai At, et suite au contrat de partage du 30.12.1999 ; à ce jour le terrain 024065 valant 11084 leva, le terrain 008035 – 8453 leva, le terrain 056045 - 1201 leva, et le terrain 042048 ??? – 6092 leva. Soit, au total, la valeur des biens possédés par Ah Aq Ag au jour de son décès, objet de la disposition testamentaire du 08.02.2001, se monte à 73 748 leva.
La réserve des descendants de Ah Aq Ag doit être déterminée selon la règle prévue par l’article 29, alinéa 3 de la LS ; les héritiers légaux de la testatrice sont Ap Aj Ab, les descendants du fils Au Aj Ab (décédé en 1998) et le conjoint survivant Aa Ab Ag. Dans ce cas, la quotité disponible de la testatrice est égale à ¼, la réserve héréditaire du conjoint survivant, celle de la fille de la testatrice et celle des descendants du fils de la testatrice, décédé avant elle, étant aussi égales à ¼. La valeur de la réserve héréditaire des descendents de Au Aj Ag (sa fille An Am Aj et son fils Af Ak Aj) revient au total à 18 437 leva, soit 9 218.50 leva pour chacun d’eux. Pour restituer leurs réserves de l’héritage de Ah Aq Ag, Ap Aj Ab doit verser à chacun d’eux la somme de 9 218.50 leva.
Dans la mesure où le bénéficiaire du legs Aa Ab Ag a disposé de l’ensemble des biens légués en faveur de Ap Ap Aj Ab, à la suite de quoi il y a une fusion entre sa qualité de «personne ayant droit à une réserve de l’héritage de Ah Aq Ag » et celle d’ « acquéreur du bien légué » (débiteur), dans la prétention qu’elle a déclarée elle-même pour la restitution de la réserve héréditaire de la succession de Ah Aq Ag, l’équivalent en espèces de cette réserve à l’heure actuelle ne doit pas lui être alloué. D’autant plus qu’elle a reçu sa quote-part de l’héritage de Ah Aq Ag conformément aux donations faites par Aa Ab Ag en 2014.
Au vu de ce qui précède, la présente formation de juges de la Première section civile de la CSC estime qu’en vertu de l’article 293, alinéa 2 de la CSC, la décision attaquée doit être annulée dans sa partie relative aux prétentions de An Am Aj et Af Ak de restitution de leurs réserves de l’héritage de Ah Aq Ag, et qu’au lieu de cela il faut procéder à la restitution de leurs réserves héréditaires en condamnant Ap Aj Ab à payer 9 218.50 leva à chacun d’eux. Eu égard à l’interdiction de modifier la position du requérant établie par le CPC et compte tenu du fait qu’il a été alloué à Ap Aj Ab, par voie de restitution de sa réserve de l’héritage de Ah Aq Aj, une part indivise représentant ¼ des biens constituant la succession de cette dernière, biens qu’elle possède aussi en vertu des dispositions faites par Aa Ab Ag, la présente formation de juges estime que la décision attaquée doit être maintenue dans sa partie relative à la demande de Ap Aj Ab de restitution de sa réserve de l’héritage de Ah Aq Aj, cette circonstance devant être prise en considération en appréciant les biens à inclure dans la masse successorale lors de l’examen la demande de restitution des réserves héréditaires de la succession de Aa Ab Ag.
En appréciant la manière dont doit s’effectuer la restitution de la réserve de An Am Aj et Af Ak Aj de l’héritage de Aa Ab Ag, la position exprimée par la juridiction d’appel que la masse successorale ne doit pas être constituée conformément à l’article 31 de la LS, est en contradiction avec la jurisprudence de la CSC.
La CSC accepte de manière non contradictoire et cohérente dans sa jurisprudence qu’il faut procéder à la comparaison de la valeur des biens que le de cujus possédait au jour de son décès après déduction des dettes et augmentation de l’héritage (c'est-à-dire la constitution de la masse dans les conditions prévues à l’article 31 de la LS), et aussi en présence de plusieurs donations consécutives de biens spécifiés que le de cujus a faites, respectivement de plusieurs legs faits en faveur de différentes personnes, ainsi que dans l’hypothèse dans laquelle le de cujus a disposé aussi bien par des legs particuliers que par des donations, et si, après la réalisation des ces dispositions, il n’y a plus de biens disponibles, la constitution de la masse est indispensable au regard des exigences établies dans les articles 32, 33 et 34 de la LS, relatives à l’ordre des réductions (Arrêt № 57/07.05.2014, affaire civile № 5702/2013, Première section civile de la CSC et Arrêt № 82/16.03.2011, affaire civile № 221/2010, Première section civile de la CSC). La Cour a également accepté que dans les cas où le de cujus a procédé à des dispositions à titre gratuit de plus d’un bien immeuble, et dont, en vertu des règles de l’article 36 de la LS, peuvent être constituées des parts réelles correspondant à la valeur de la réserve héréditaire et de la quotité disponible, déterminés aux termes de l’article 31 de la LS, il est possible d’en arriver à l’application conjointe de l’article 34 et de l’article 36 de la LS – le légataire (ou le bénéficiaire de la donation) pourra choisir, conformément à l’article 34 de la LS, l’ordre dans lequel peut être réalisée la réduction des différents legs (ou donations), et, le cas échéant, s’il faut procéder à la réduction partielle de certains d’entre eux, celle-ci portera sur la fraction, ou se fera selon les règles de l’article 36 de la LS, lorsque la réduction de la fraction est impossible. En tenant compte du rang, conformément à l’article 34, des biens, dont la valeur ne dépasse pas de ¼ celle de la quotité disponible (ou la somme de la quotité disponible et de la réserve héréditaire) seront réservés au légataire (ou au bénéficiaire de la donation), le reste des biens (ou une partie d’eux, correspondant à la réserve de l’héritier qui a introduit la demande) retourneront à l’héritage (Arrêt № 104/24.06.2015, affaire civile № 5871/2014, Première section civile de la CSC).
Les juges de la présente formation partagent pleinement cette position et estiment qu’elle doit trouver application en l’espèce, car le de cujus Aa Ab Ag a disposé de ses biens en faveur de Ap Aj Ab, en procédant à plusieurs donations successives : le 10.04.2014, (acte notarié № 179, tome I, enregistré sous le № 3569, dossier № 151); le 11.04.2014 (acte notarié № 181, tome I, enregistré sous le № 3627, dossier № 152); le 11.04.2014 (acte notarié № 182, tome I, enregistré sous le № 3648, dossier №153) et le 17.04.2014г. (acte notarié № 200, tome I, enregistré sous le № 3857, dossier № 171).
La situation factuelle ayant été ainsi établie en l’espèce, la juridiction d’appel a jugé à tort que la masse au titre de l’article 31 de la LS ne doit pas être constituée, et qu’il ne faut pas accorder à la bénéficiaire de la donation Ap Aj Ab la possibilité de choisir la manière dont se ferait la réduction, respectivement lequel des biens donnés elle souhaite garder, et si elle veut garder tous les biens (si les conditions pour l’application de l’article 36 sont réunies).
Et comme pour la constitution de la masse aux termes de l’article 31 de la LS, ainsi que pour accorder à la bénéficiaire la possibilité de déclarer son choix, il faut engager la procédure judiciaire correspondante, la décision attaquée doit être annulée dans sa partie relative à la demande introduite pour la restitution de la réserve de An Am Aj et Af Ak Ag de l’héritage de Aa Ab Ag, et l’affaire doit être renvoyée à la juridiction d’appel pour réexamen par une autre formation de juges.
Lors du réexamen, le tribunal doit constituer la masse aux termes de l’article 31 de la LS, en n’y incluant que le patrimoine personnel du de cujus Aa Ab Ag (1/2 part indivise de l’appartement I, se trouvant à Roussé, rue Borissova N° 51, entrée 4, étage 1 ; le terrain № 046044, se trouvant sur le territoire de la ville de Marten, dans le lieu-dit Ao, acquis par succession et partage amiable des terres agricoles de Ab Ag ArA, ainsi que ¼ de part indivise des biens que lui avait légués Ah Aq Ag, représentant sa réserve de la sucession de cette dernière (puisque An Am Aj et Af Ak Aj avaient déjà reçu la valeur de leur réserve de l’héritage de Ah Aq Ag, ainsi que ¼ de part indivise pour chacun d’eux des biens lui ayant été légués par Ah Aq Ag, représentant la quotité disponible de la testatrice. La réserve de l’héritage de Ah Aq Ag revenant à Ap Aj Ab, qui lui a été restituée en vertu de la décision rendue en appel, ne doit pas être intégrée dans la masse conformément à l’article 31 de la LS. Après avoir procédé aux calculs de la masse succéssorale conformément à l’article 31 de la LS (prenant en considération qu’à la suite des donations faites il n’y a plus de biens disponibles pour que les héritiers ayant droit à la réserve héréditaire puissent la recevoir) et déterminé la valeur de la quotité disponible et des réserves des descendants du de cujus selon la règle de l’article 29, alinéa 1 de la LS, le tribunal doit apprécier la possibilité pour Ap Aj Ab de garder un bien immobilier spécifié, estimant dans quelle mesure la règle de l’article 34 de la LS, respectivement celle de l’article 36 de la même loi, doit être appliquée en l’espèce.
La décision attaqué doit être également annulée dans sa partie relative à la demande de partage qui a été introduite, car l’appréciation de l’existence de droits de copropriété, et sur quels biens, ne peut avoir lieu qu’après le règlement du litige portant sur la restitution de la réserve héréditaire de An Am Aj et Af Ak Aj, en fonction de la manière dont elle sera réalisée.
Les arguments de la requérante Ap Aj Ab, relatifs à l’irrecevabilité de la décision attaquée, sont infondés. Comme la juridiction d’appel l’a considéré à juste titre, les actions en restitution de la réserve héréditaire sont préjudicielles par rapport à l’action en partage et, bien que de par leur nature juridique ces actions soient constitutives, l’admissibilité de leur jonction objective avec l’action en partage est expressément prévue à l’article 343 du CPC. L’accueil de la demande de partage pour examen conjoint avec les demandes de restitution de la réseve héréditaire ne suppose pas de constatation de l’existence d’une copropriété, comme le maintient la requérante.
Et dans la mesure où le contentieux portant sur le mode de restitution des réserves héréditaires et la possibilité d’ordonner le partage des biens de la succession n’est pas définitivement réglé à ce jour, il convient d’accepter que les dépens en procédure de cassation ne doivent pas être alloués. La juridiction d’appel doit se prononcer sur les frais engagés par les parties conformément à l’article 294, alinéa 2 du CPC, lors du réexamen de l’affaire.
Par les motifs qui précèdent, la Cour suprême de cassation, formation de juges de la Première section civile
D É C L A R E E T A R R Ê T E :
ANNULE la décision № 458/02.11.2017 rendue en appel par le Tribunal régional de Roussé, Chambre civile, dans l’affaire № 648/2017, rectifiée aux termes de l’article 247 du CPC par décision № 1002/02.08.2017 prononcée dans la même affaire, dans sa partie confirmant le jugement de la juridiction de premier degré, par lequel est restituée la réserve héréditaire de An Am Aj et Af Ak Aj de la succession de Ah Aq Ag, estimée à ¼ de part indivise de la masse successorale, en réduisant le legs fait le 08.02.2001 en faveur de Aa Ab Ag, et au lieu de cela STATUE :
RESTITUE la réserve héréditaire de An Am Aj, NCU 7606215470, domiciliée à Roussé, rue Tsarkovna nezavisimost N° 3, at. 5, représentée par Me Elvira Mintcheva, de la succession de Ah Aq Ag, atteinte par le testament olographe fait par la testatrtice le 08.02.2001, par lequel Ah Aq Ag a légué à Aa Ab Ag l’ensemble de ses biens meubles et immeubles, en CONDAMNANT Ap Aj Ab, résidant à Roussé, rue Prof. Assen-Zlatarov N° 20, entrée 1, étage 3, apt. 7, NCU 6207065336, à verser à An Am Aj la somme de 9 218.50 leva (neuf mille deux cent dix-huit leva et 50 st.) et l’intérêt légal sur cette somme, à compter de l’entrée en vigueur de l’arrêt jusqu’à son paiement intégral.
RESTITUE la réserve héréditaire de Af Ak Aj, NCU 7809285462, domicilié à Roussé, rue Tsarkovna nezavisimost N° 3, at. 5, représenté par Me Elvira Mintcheva, de la succession de Ah Aq Ag, atteinte par le testament olographe fait par la testatrtice le 08.02.2001, par lequel Ah Aq Ag a légué à Aa Ab Ag l’ensemble de ses biens meubles et immeubles, en CONDAMNANT Ap Aj Ab, résidant à Roussé, rue Prof. Assen-Zlatarov N° 20, entrée 1, étage 3, apt. 7, NCU 6207065336, à verser à Af Ak Aj la somme de 9 218.50 leva (neuf mille deux cent dix-huit leva et 50 st.) et l’intérêt légal sur cette somme, à compter de l’entrée en vigueur de l’arrêt jusqu’à son paiement intégral.
MAINTIENT la décision № 458/02.11.2017 rendue en appel par le Tribunal régional de Roussé, Chambre civile, dans l’affaire № 648/2017, rectifiée aux termes de l’article 247 du CPC par décision № 1002/02.08.2017 prononcée dans la même affaire, dans sa partie confirmant le jugement de la juridiction de premier degré restituant la réserve héréditaire de An Am Aj et Af Ak Aj de la succession de Ah Aq Ag, estimée à ¼ de part indivise de la masse successorale, en réduisant le legs fait le 08.02.2001 en faveur de Aa Ab Ag.
ANNULE le jugement № 458/02.11.2017 rendu par le Tribunal régional de Roussé, Chambre civile, dans l’affaire civile № 648/2017, rectifié en vertu de l’article 247 du CPC par jugement № 1002/02.08.2017 prononcé dans la même affaire, dans la partie confirmant le jugement de la juridiction de premier degré qui restitue la réserve héréditaire de An Am Aj et Af Ak Aj de la succession de Aa Ab Ag, revenant à 1/3 quote-part indivise de la masse successorale, en réduisant les donations faites par ce dernier en faveur de Ap Aj Ab par acte notarié №179, tome I, enregistré sous le № 3569, dossier № 151/10.04.2014 ; acte notarié №181, tome I, enregistré sous le № 3627, dossier № 152/11.04.2014 ; act notarié №181, tome I, enregistré sous le № 3648, dossier №153/11.04.2014 et acte notarié № 200, tome I, enregistré sous le № 3857, dossier № 171/17.04.2014 ; et dans la partie
ordonnant le partage judiciaire du lot № 63427.2.2136.7.1 du bâtiment № 7, situé dans le terrain 63427.2.2136 à Roussé, rue Borissova № 51, entrée 4, étage 1, apt. I - 9/24 parts indivises pour An Am Aj et Af Ak Aj, et 15/24 parts indivises pour Ap Aj Ab ;
ordonnant le partage du terrain № 046044, se trouvant sur le territoire de la ville de Marten, région de Roussé, dans le lieu-dit Ao, d’une surface de 0,937 ha, droits sur 1/3 part indivise pour An Am Aj et Af Ak Aj, et 2/3 parts indivises pour Ap Aj Ab ;
ordonnant le partage de 500/1262 parts indivises d’une parcelle dans la ville de Marten, région de Roussé, d’une surface de 1262 mètres carrés, constituant la parcelle XXIV-415, quartier 47 du plan de la ville, utilisation effective sur 500 mètres carrés du côté du voisin Ah As, donnant sur la rue – 7 mètres de façade, constituant la parcelle № 47336.0.802, sur laquelle est construit le bâtiment en torchis № 0.082.1, à un étage, superficie de 28 mètres carrés ; du terrain № 024065 se trouvant sur le territoire de la ville de Marten,dans le lieu-dit Al, 0, 9657 ha ; du terrain № 008035, se trouvant dans le lieu-dit Zad Ac, 0,770 ha ; du terrain № 056045, se trouvant sur le territoire de la ville de Marten, dans le lieu-dit Vehtite lozia, 0,0994 ha ; du terrain № 042048, se trouvant sur le territoire de la ville de Marten, dans le lieu-dit Pachov kladenets, 0,5549 ha, 5/12 quote-parts indivises pour An Am Aj et Af Ak Aj, et 7/12 quote-parts indivises pour Ap Aj Ab ; et
RENVOIE l’affaire au Tribunal régional de Roussé pour réexamen de la décision dans la partie annulée par une autre formation.
L’Arrêt est définitif.
Président :
Membres :