Sofia, 21 mai 2015
AU NOM DU PEUPLE
LA COUR SUPREME DE CASSATION DE LA REPUBLIQUE DE BULGARIE, Troisième chambre pénale, à son audience publique de ce vingt-et-un avril deux mille quinze, composée de :
PRESIDENTE : DANIELA ATANASSOVA
MEMBRES :
KRASSIMIR CHEKERDJIEV
ANTOINETTA DANOVA
et la greffière Iliana Petkova, en la présence de la procureure du Parquet près la Cour suprême de cassation Madlena Velinova, après avoir entendu l’affaire pénale No 220/2015, rapportée par la juge DANOVA, et avant de statuer, a considéré ce qui suit :
La procédure a été ouverte sur le pourvoi formé par l’accusé S.B.A. par l’intermédiaire de son défenseur d’office, Me A., contre l’arrêt No 412 du 24 novembre 2014 rendu sur l’affaire pénale d’appel No 727/2014 d’après le rôle de la Cour d’appel de Sofia, Chambre pénale, sur le fondement de l’art. 348 alinéa 1 points 1 et 2 du Code de procédure pénale (CPP).
Il est affirmé dans le pourvoi que le fait principal qui aurait dû être prouvé dans le procès, à savoir si l’accusé était bien l’auteur des faits incriminés, est resté non prouvé et que les conclusions faites en ce sens par les juridictions du fond ne reposent que sur des hypothèses. L’analyse propre des attestations du témoin V. sert à tirer des conclusions factuelles, différentes de celles tirées par les instances du fond. On conteste la similarité entre le portrait-robot établi et les traits du visage de l’accusé en mettant l’accent sur les perceptions personnelles de la défense de l’accusé en ce qui concerne différents traits d’identification. A la suite de quoi on formule la conclusion selon laquelle il est impossible d’admettre de façon catégorique que le portrait-robot répond aux photographies étudiées montrant la partie faciale de la tête de l’accusé. Le grief tiré de la violation substantielle des règles de procédure utilise comme argument l’allégation d’une violation commise par la juridiction d’appel de la disposition de l’art. 14 du CPP et des règles de la logique formelle lors de l’évaluation des preuves qui a mené à l’altération de l’intime conviction du juge. Il est allégué que la cour d’appel a incorrectement donné crédit au témoignage du témoin V.H. dans la mesure où, d’après la défense, les attestations de celui-ci sont en contradiction avec les éléments contenus dans l’audition de la victime T.V. en ce qui concerne le fait de savoir si le témoin avait vu ou non les photographies de l’accusé avant sa visite chez H., à l’hôpital. Ensuite, il est affirmé que les moyens tirés de l’art. 29 alinéa 2 du CPP, concernant une récusation de la jurée Rosa I., étaient valables parce qu’elle avait également participé à la procédure du premier degré contre l’accusé pour atteinte contre le témoin V.H., et à cet égard, on déclare son désaccord avec les motifs de l’instance d’appel d’absence de lien ou de recoupement dans les faits sur lesquels l’accusation se fondait dans les deux affaires et dont l’examen aurait pu démontrer la partialité d’un membre de la formation de jugement. Il est indiqué que l’arrêt rendu par la cour d’appel n’est pas motivé. Il est demandé à la Cour de casser l’arrêt de la Cour d’appel de Sofia et de prononcer l’acquittement ou, alternativement, de renvoyer l’affaire pour qu’elle soit de nouveau jugée par une autre formation de jugement légitime.
Lors de l’audience devant la Cour suprême de cassation, le défenseur de l’accusé, Me A., soutient le pourvoi sur les moyens y avancés. Il indique qu’il n’a pas été prouvé sans ambiguïté qui est l’auteur des faits incriminés et que les seules preuves existant reposent sur le témoignage de la victime et la reconnaissance organisée avec elle ; qu’il y a des contradictions entre les attestations du témoin V. et du témoin H. qui sont concernés par l’issue de l’affaire parce que cherchant une réparation. Il met l’accent sur le grief tiré de la formation de jugement illégitime lors de l’examen de l’affaire par la juridiction du premier degré et invoque à cet égard un argument supplémentaire, à savoir le déport du juge V. qui avait jugé l’affaire en appel contre S.B.A., dans laquelle le témoin H. était la victime. Il demande que le pourvoi soit accueilli.
L’avocat de la partie civile constituée et accusateur privé T.V., Me S., considère que le pourvoi formé par l’accusé est infondé et demande qu’il soit rejeté et que l’arrêt de la cour d’appel soit confirmé. Il demande à la Cour d’accueillir la plainte de T.V., constitué partie civile.
Le représentant du Parquet près la Cour suprême de cassation considère que la loi matérielle a été correctement appliquée par les juridictions du fond ; que la procédure n’a pas été entachée de vices majeurs parce que, conformément à la règle de l’art. 14 du CPP, la juridiction d’appel a examiné en profondeur et de façon exhaustive l’ensemble des faits relevant de l’affaire et a correctement donné crédit aux témoignages de la victime après les avoir confrontés aux autres éléments de preuve recueillis dans le cadre de l’affaire ; que les moyens tirés de l’art. 29 alinéas 2 du CPP concernant la jurée Rosa I. n’étaient pas valables et que les conclusions tirées par l’instance d’appel à cet égard étaient correctes. Il exprime son désaccord vis-à-vis du moyen avancé par la défense selon lequel tous les éléments de preuve recueillis n’ont été appréciés qu’en faveur de la thèse de l’accusation et considère que la cour a effectué une analyse complète et approfondie de l’ensemble des preuves, ce qui lui a permis de tirer la seule conclusion possible concernant l’identification de l’auteur des faits incriminés en la personne de l’accusé. Enfin, il propose que soit rejeté le pourvoi formé par l’accusé.
Profitant de son droit à parler le dernier, l’accusé S.B.A. exprime son regret et son espoir de voir sa peine réduite. La Cour suprême de cassation, après avoir examiné les moyens avancés dans le pourvoi et les avis exprimés par les parties lors de l’audience et après avoir vérifié les éléments du dossier, dans les limites de ses compétences, a constaté ce qui suit :
Par un jugement du 15 mai 2014, rendu sur l’affaire pénale No 5676/2013, le Tribunal de grande instance de Sofia, Chambre pénale, a reconnu coupable l’accusé S.B.A. pour avoir le 27 mai 2013, à [ville], [rue], à la sortie du parking des Halles centrales, tenté de tuer intentionnellement T.Ts.V. en lui portant des coups de couteau sur plusieurs endroits du corps et du cou, cette tentative étant resté inachevée pour des raisons indépendantes de la volonté de l’auteur, et, sur le fondement de l’art. 115 en lien avec l’art. 18 alinéa 1 et de l’art. 54 du Code pénal (CP), l’a condamné à une peine privative de liberté d’onze ans.
Sur le fondement de l’art. 25 alinéa 1 en lien avec l’art. 23 alinéa 1 du CP, le juge a infligé à l’accusé une peine privative de liberté totale et correspondant à la plus lourde des peines infligées, à savoir onze ans de privation de liberté, dans le cadre du jugement en question et du jugement rendu sur l’affaire pénale No 218/2013 par le Tribunal d’instance d’Elhovo, ayant acquis autorité de chose jugée le 10 octobre 2013, cette peine devant être exécutée dans les conditions d’un régime initial strict, en prison.
Sur le fondement de l’art. 45 de la Loi des obligations et des contrats, l’accusé S.B.A. a été condamné à verser à T.Ts.V. la somme de BGN 60 000 à titre de réparation pour dommages immatériels, augmenté des intérêts légaux dus à partir de la date du préjudice jusqu’au paiement total de ce montant, la plainte avec constitution de partie civile ayant été rejetée pour son montant total de BGN 100 000.
Dans son jugement, le juge s’est prononcé sur les preuves matérielles et, d’autre part, a condamné l’accusé aux frais et dépens encourus dans la procédure.
A la suite d’un recours de l’accusé, introduit par l’intermédiaire de son défenseur devant la Cour d’appel de Sofia, une affaire pénale d’appel No 727/2014 a été ouverte qui s’est terminée par un arrêt No 412 du 24 novembre 2014 confirmant entièrement le jugement de la juridiction du premier degré et condamnant l’accusé également aux frais et dépens encourus dans la procédure d’appel.
Le pourvoi formé par l’accusé S.B.A. est INFONDÉ.
En premier lieu, on ne constate pas le bien-fondé de la prétention de la défense de l’accusé, fondée sur le moyen tiré de l’art. 348 alinéa 3 point 2 hypothèse 1 du CPP, à savoir l’absence de motifs de l’arrêt rendu par l’instance d’appel. La décision de la cour d’appel reflète en détail les constatations de fait établies et les conclusions de droit tirées. L’arrêt se caractérise par de la profondeur, une approche analytique et de la précision dans l’analyse des preuves ; il satisfait au maximum les exigences de l’art. 339 alinéas 1 et 2 du CPP. La cour a répondu de manière convaincante et argumentée à l’ensemble des exceptions soulevées par les parties.
Concernant le grief du pourvoi tiré de l’absence de preuves de la commission par l’accusé S.B.A. des faits incriminés, la CSC considère qu’il est nécessaire de relever que, de par sa nature, ce grief est tiré du mal-fondé de l’acte judiciaire, ce qui ne représente pas un moyen de cassation au titre de l’art. 348 alinéa 1 du CPP. Par conséquent, la cour de cassation ne peut ni le soumettre à son contrôle, ni se prononcer sur lui. Toujours à cet égard, il convient de souligner que la Cour suprême de cassation ne peut pas juger de nouveaux faits et que la vérification qu’elle effectue reste cantonnée dans les limites des faits établis par les juridictions du fond. Bien que la CSC ne puisse pas remplacer l’intime conviction du juge du fond, elle doit intervenir toujours quand elle constate une mauvaise approche dans la formation de cette conviction. En l’espèce, pour identifier les éléments matériels et psychologiques substantiels, constitutifs de l’infraction, dans le comportement de l’accusé, le juge a respecté les exigences de l’art. 13, de l’art. 14 et de l’art. 107 alinéa 5 du CPP et donc, il n’y a pas de vices susceptibles de mettre en question la bonne formation de l’intime conviction du juge. On ne relève pas de violations dans le travail de la juridiction d’appel en ce qui concerne l’appréciation des preuves et des moyens de preuve. La Cour d’appel de Sofia n’a pas surestimé certaines preuves au détriment d’autres, n’a pas omis de vérifier la crédibilité des preuves orales et son interprétation des preuves, consignée en détail dans l’arrêt, reflète le contenu réel de celles-ci. Concernant la question litigieuse de l’affaire, à savoir si l’auteur des faits est bien l’accusé, les juridictions du fond ont indiqué dans leurs décisions que cela a été établi de manière non ambiguë et catégorique, comme l’exige la règle de l’art. 303 alinéa 2 du CPP, et cette conclusion n’est pas fortuite, elle est le résultat d’une analyse sérieuse, attentive et approfondie de l’ensemble des éléments de preuve recueillis dans le cadre de l’affaire et examinés aussi bien individuellement que dans leur ensemble et leur connexion logique. Il est vrai que les principaux éléments de preuve quant à l’auteur des faits incriminés viennent des éléments factuels contenus dans le témoignage de la victime T.V. et des données du procès-verbal de reconnaissance de l’auteur. Dans son analyse des sources de preuve indiquées, la juridiction d’appel a correctement répondu à la question de savoir s’il faut leur donner du crédit ou non. La juridiction d’appel a correctement admis qu’il y avait lieu de donner du crédit aux témoignages du témoin V., aussi bien à ceux concernant les événements avant, pendant et après l’agression qu’à ceux concernant l’auteur, en raison de leurs bonne foi, enchaînement logique et impartialité. Indépendamment du fait que le témoin V. est une partie au procès (il s’est constitué partie civile et accusateur privé), ce fait à lui seul ne suffit pas pour admettre la présence d’une approche tendancieuse ou d’un parti pris dans les circonstances de fait décrites par lui, ni pour conclure automatiquement que son témoignage est compromis. Il n’y a aucun élément dans le dossier qui permette de douter de son objectivité. Au contraire, le lieu de l’agression (un endroit éclairé), la durée de l’acte (l’accusé a porté plusieurs coups de couteau sur le corps de la victime, ce qui prend du temps), la proximité immédiate des deux corps pendant l’attaque et la position de l’accusé par rapport à la victime (face à face) ont permis de façon objective au témoin V. de bien percevoir et mémoriser l’aspect extérieur de l’auteur et sa tenue vestimentaire.
Ensuite, il faut souligner que la victime, dès sa première audition lors du stade de l’enquête (procès-verbal du 03 juin 2013) avait décrit l’auteur et avait catégoriquement indiqué être sûr de le reconnaître se elle le voyait. La victime a soutenu la même position lors de son audition le 07 novembre 2013 et la description de l’auteur fournie par elle à cette date était identique avec sa description précédente. En outre, le procès-verbal de reconnaissance joint au dossier, que le juge a correctement admis comme un élément de preuve valable dans la mesure où ce procès-verbal est, d’une part, conforme aux exigences de l’art. 129 du CPP et, d’autre part, aux exigences de la règle de l’art. 171 alinéa 1 point 2 du CPP (la procédure de reconnaissance s’est déroulée en la présence de deux témoins et l’accusé a été identifié parmi trois autres personnes à aspect extérieur similaire), permet de voir que le témoin V. a identifié l’accusé S.B.A. en tant qu’auteur des faits incriminés notamment grâce aux signes qu’il avait lui-même décrits avant : taille, stature, yeux, regard. Le signe supplémentaire utilisé aux fins de l’identification et ne figurant pas dans la description de l’auteur parmi les éléments susceptibles de permettre de le reconnaître, à savoir les mains, ne compromet pas l’acte de reconnaissance. D’une part, il y a suffisamment d’autres signes individualisants, préalablement décrits, comme la taille, la stature et certains traits du visage, en l’occurrence « les yeux et le regard » (deux caractéristiques très prononcées qui individualisent toute personne), qui, évalués dans leur ensemble, servent d’argument à la crédibilité de la reconnaissance. D’autre part, lors de son audition devant la juridiction du premier degré, la victime a expliqué de façon tout à fait logique la raison pour laquelle elle ne pouvait pas confondre la main de l’auteur. Le fait qu’au moment de la reconnaissance effectuée, la victime n’a pas été sous l’influence des photographies de l’accusé publiées dans les médias, est prouvé par la description crédible qu’elle a fournie au moment de l’élaboration du portrait-robot, dès le stade de l’enquête, qui contenait des signes d’identification importants notamment du visage de l’accusé, ce qui n’aurait pas été possible si l’agresseur était une autre personne, différente de S.B.A. A cet égard, l’expertise d’identification du visage, ordonnée et admise par l’instance d’appel, joue un rôle important puisqu’elle démontre qu’en résultat de l’étude comparative réalisée entre le portrait-robot, élaboré d’après l’information fournie par la victime, et les photographies de l’accusé, on peut conclure que des signes importants d’identification (éléments du visage comme la ligne des cheveux, les sourcils, les ouvertures oculaires, le nez et la bouche) ont été reproduits de façon crédible pendant l’élaboration du portrait-robot.
Voilà pourquoi la conclusion de l’instance d’appel, selon laquelle la description de l’auteur fournie par la victime et utilisée en vue de l’élaboration du portrait-robot correspondait objectivement aux caractéristiques du visage de l’accusé, est bonne et elle est partagée par la présente formation de jugement. Me A., malgré ses critiques contre la juridiction du premier degré qui, selon elle, s’était permise d’argumenter ses conclusions, quant à la commission des faits incriminés par l’accusé, avec ses propres perceptions subjectives de similarité entre le portrait-robot et les traits du visage de S.B.A., a lui-même, dans son pourvoi, indiqué qu’il suffisait qu’un « homme de la rue regarde les photographies pour conclure que malgré la forme identique des cheveux, le front est différent ». Il est inadmissible non seulement pour le juge, mais aussi pour les autres parties au procès de faire des conclusions concernant l’identification (présence ou absence de similarité) sur la base d’informations visuelles perçues personnellement, ce type de conclusions n’étant que de la compétence des experts concernés qui disposent de connaissances spéciales. D’où la décision de l’instance d’appel d’ordonner l’expertise indiquée ci-dessus. Ensuite, un autre fait d’importance prioritaire pour l’établissement de la conclusion de l’objectivité du témoignage de V. pour l’identification de l’auteur est que V. ne s’était arrêté sur aucun autre visage dans les albums de photos qui lui étaient présentés par les enquêteurs, ce qui indique qu’il n’a pas été mû par un désir de dénoncer n’importe qui (soit pour assouvir son propre désir de châtiment, soit pour obtenir une réparation matérielle), mais qu’il a été guidé uniquement par le fait que l’auteur ne figurait pas parmi les photographies qu’on lui montrait. Ce comportement de la victime, comme l’a correctement indiqué le juge d’appel, exclut la possibilité pour le témoin d’avoir identifié plus tard l’accusé comme auteur des faits incriminés, motivé par un désir de voir quelqu’un répondre de l’acte d’agression contre lui. D’autre part, le fait que la victime et l’accusé ne se connaissaient pas avant et qu’il n’y avait eu aucune relation antérieure entre eux exclut définitivement l’hypothèse d’un intérêt possible chez V. d’identifier justement S.B.A. afin de lui nuire. Dans son témoignage, le témoin V. a indiqué qu’après avoir vu la photo de l’accusé diffusée par le ministère de l’Intérieur (après l’incident avec V.), il était persuadé que c’était aussi bien l’auteur de l’agression commise contre lui, mais qu’indépendamment de cela, sa conviction ne s’était confirmée de façon catégorique (à 100 %) que lors de leur entrevue réelle (lors de la procédure de reconnaissance). Ce témoignage montre que la victime s’est comportée de façon extrêmement sérieuse et responsable envers l’identification de l’agresseur et qu’elle a cherché, lors du face à face pendant la procédure de reconnaissance, d’atteindre la ferme et intime conviction que la personne des photos publiées par les médias était bien l’auteur, afin d’éliminer ainsi le moindre risque d’erreur.
Plus loin, concernant le témoignage des témoins V. et H. et le fait de savoir si, au moment de la visite de la victime chez le témoin à l’hôpital, elle avait déjà vu ou non les photos de l’accusé dans les médias, la présente juridiction considère ce qui suit : lors de l’audition devant la juridiction du premier degré, le témoin V. avait nié ce fait, à la différence de ce qu’il a déclaré pendant l’audition, dans le cadre de l’enquête judiciaire menée par le juge d’appel, sur la chronologie des événements (photo de l’accusé aperçue dans les médias, suivie par la visite chez V. à l’hôpital, suivie par la procédure de reconnaissance), en expliquant la raison pour laquelle il était impossible qu’il n’ait pas vu cette photo avant sa rencontre avec le témoin H. Ses attestations ont été complètement confirmées par les attestations du témoin H. selon lesquelles V. lui avait dit qu’il avait vu la photo de l’auteur à la télévision. D’une façon ou d’une autre, il a été établi sans ambiguïté dans le cadre de l’affaire qu’au moment de la procédure d’identification, objectivement consignée dans un procès-verbal, la victime avait déjà vu la photo de l’accusé dans les médias, mais que cette circonstance, étant donné les motifs formulés ci-dessus et les motifs détaillés présentés par l’instance d’appel (f. 142 du dossier) que la CSC partage complétement, ne compromet nullement la reconnaissance effectuée.
Nier une implication dans l’infraction est une position dans la procédure que l’accusé choisit à sa convenance et on ne peut pas conclure par la position choisie ni au détriment de l’accusé, ni en sa faveur, ce qui rend absolument inconsistants les propos du défenseur de S.B.A. selon lesquels « il est illogique sur le plan humain d’admettre que s’il avait commis les faits qui lui sont imputés, il aurait eu ce type de comportement (c.-à-d. nier), conscient du risque de se nuire à lui-même ».
La CSC considère également comme infondée la prétention de la défense selon laquelle l’affaire devant la juridiction du premier degré a été jugée par une formation de jugement illégitime en raison de la partialité de la jurée R.I. Il est vrai que des pièces écrites relevant de l’affaire permettent de constater qu’un juré avait également participé à la formation de jugement du premier degré qui avait statuée sur l’accusation contre l’accusé S.B.A. pour atteinte contre le témoin V.H. Cette circonstance a été examinée en détail par l’instance d’appel (f. 151 du dossier) qui a admis de façon motivée qu’en raison de l’absence d’éléments pertinents communs dans les accusations pour les faits incriminés, il n’y a pas lieu d’admettre que les deux instances du premier degré aient examiné, en vue de statuer aux termes de l’art. 301 alinéa 1 points 1 et 2 du CPP, les mêmes éléments de preuve. Pour se référer au moyen visé à l’art. 29 alinéa 2 du CPP, il faut qu’il y ait des faits à l’égard desquels le juge ou un juré soit considéré comme partial ou concerné par l’issue de l’affaire. Dans son arrêt Lindon, Otchakovsky-Laurens et July c. France, la Cour européenne des droits de l’homme a admis que l’impartialité d’un magistrat se présume jusqu’à preuve du contraire. A en juger par toute une série d’arrêts de la Cour européenne, cela signifie qu’il faut disposer de preuves (par exemple, présence de signes extérieurs de partialité ; un comportement dans la salle d’audience qui fait penser à une partialité ; propos tenus hors de la juridiction ; influence des commentaires dans les médias ; influence d’autres personnes) qui démontrent que la formation de jugement ou certains de ses membres n’ont pas été impartiaux. En l’occurrence, il n’y a pas de preuves démontrant que la jurée en question ait été influencée, au moment où le jugement était rendu par la juridiction du premier degré, par un parti pris personnel. Le seul fait que deux ou plusieurs procédures pénales sont en instance contre une même personne ne peut pas servir de motif pour conclure à la partialité de la formation du jugement. Si un membre de la formation estime avoir un autre motif subjectif, sous-tendant sa partialité personnelle et empêchant sa participation au jugement d’une deuxième affaire après la première, il est tenu de se récuser. Le fait que la jurée R.I. ne l’a pas fait montre qu’il n’y a pas eu de circonstances susceptibles de la faire penser qu’elle avait du parti pris ou qu’elle était concernée par l’issue de l’affaire.
Etant donné tous ces motifs, la présente formation estime que le moyen de cassation tiré de l’art. 348 alinéa 1 point 2 du CPP n’est pas valable.
L’instance de cassation ne constate pas de violations des dispositions de fond du CP. Les éléments factuels admis par l’instance d’appel, en ce qui concerne les actes de l’accusé S.B.A., ont été correctement intégrés comme éléments constitutifs de l’infraction pénale au titre de l’art. 115 en lien avec l’art. 18 alinéa 1 du CP.
Ont été établis par les modes de preuve respectifs tous les éléments matériels et psychologiques de l’infraction, engageant la responsabilité pénale de l’accusé.
Les motifs de droit de la cour d’appel sont extrêmement détaillés et approfondis (f. 146 du dossier) ; ils sont partagés par la présente instance et, étant donné leur exhaustivité, il n’y a pas lieu à les répéter.
Le pourvoi ne contenant pas de grief d’injustice manifeste de la peine infligée à l’accusé (indépendamment du fait que, dans sa dernière parole, S.B.A. avait demandé une remise de peine), il n’y a pas lieu d’examiner le moyen tiré de l’art. 348 alinéa 1 point 3 du CPP. La partie civile n’ayant pas attaqué le jugement du premier degré (l’instance d’appel a confirmé le jugement dans son volet condamnatoire et constitution de partie civile), la demande formulée par son défenseur lors de l’audience devant la CSC d’accueillir la plainte de la partie civile constituée (il s’agit peut-être d’attribuer le montant total) ne peut pas être satisfaite.
En considérant ce qui précède et en vertu de l’art. 354, alinéa 1, point 1 du CPP, la COUR SUPRÊME DE CASSATION, Troisième chambre pénale,
A RENDU L’ARRET SUIVANT :
MAINTIENT l’arrêt No 412 du 24 novembre 2014, rendu sur l’affaire pénale d’appel No 727/2014 г. d’après le rôle de la Cour d’appel de Sofia, Chambre pénale.
L’ARRET n’est pas susceptible de recours.
PRESIDENT :
MEMBRES :