Sofia, le 8 février 2013
AU NOM DU PEUPLE
LA COUR SUPRÊME DE CASSATION de la République de Bulgarie, Chambre commerciale, Section I, lors d’une séance tenue le vingt-six novembre deux mille douze; en composition suivante :
PRÉSIDENT : Tanya Raykovska
MEMBRES :
Daria Prodanova
Totka Kalcheva
en présence du greffier Krasimira Atanasova, après avoir entendu le rapport du juge Kalcheva sur l’affaire commerciale nº269 selon le registre de 2012, avant de statuer, a considéré ce qui suit :
La procédure tombe dans le champ d’application de l’article 290 du Code de procédure civile.
Elle est engagée sur pourvoi en cassation introduit par R. E. M., en sa qualité de [entreprise], [localité], contre l’arrêt nº102/18.11.2011, rendu sur l’affaire civile jugée par la deuxième instance nº231/11 de la Cour d’appel de Bourgas qui annule l’arrêt 259/29.07.2011 sur l’affaire civile nº704/11 du Tribunal de grande instance de Bourgas et constate la présence d’une créance contre le requérant d’un montant de 366785,60 BGN constituant l’aide financière non remboursable obtenue dans le cadre du programme S. aux termes du contrat nº964/19.12.2003, soumise à la restitution pour non-respect de l’article 4, point 17 du contrat, ainsi qu’une créance s’élevant à 16146,41 BGN correspondant à l’indemnisation de retard.
Le requérant soutient la thèse que le jugement est erroné et demande son annulation.
Le défendeur conteste le recours.
La cour suprême de cassation, Chambre commerciale, Section I, constate ce qui suit:
Pour rendre l’arrêt attaqué, la deuxième instance a considéré la présence de non-respect de l’obligation en vertu de l’article 4, point 17 du contrat d’attribution d’une aide financière non remboursable, se manifestant par l’augmentation du nombre de chambres équipées à accueillir des touristes dans l’hôtel familial du bénéficiaire, au détriment des locaux prévus par le projet financé pour le gérant de l’hôtel, les femmes de chambres, le jacuzzi, la salle de sports et la salle de jeux calmes. Le non-respect de cette obligation pendant la période de suivi aurait été un motif de restitution de l’aide attribuée. On expose les raisons que l’aide financière permet la réalisation des objectifs du Règlement (CE) nº1268/1999 du Conseil du 21 juin 1999.
Par son ordonnance nº478/15.06.2012, la Cour suprême de cassation, ouvre la procédure de renvoi en vertu de l’article 280, al.1, point 3 du Code de procédure civile, afin de se prononcer sur la question suivante: En cas d’interprétation des clauses d’un contrat de financement dans le cadre du programme S., les règles et les objectifs du Règlement (CE) nº1268/1999 du Conseil du 21 juin 1999 doivent-elles être prises en considération ?
L’avis de la présente chambre de la Cour suprême de cassation repose sur ce qui suit:
En vertu de la disposition de l’article 20 de la Loi sur les obligations et les contrats, dans la procédure d’interprétation des contrats pour établir la volonté commune réelle des parties, c’est aussi le but du contrat qui est indiqué en tant que critère d’interprétation des différentes conventions. Le contrat d’attribution d’aide financière non remboursable dans le cadre du programme spécial d’adhésion pour l’agriculture et le développement rural dans la République de Bulgarie (S.) est conclu par un organe spécial – ....... en application de l’article 12, al. 4 de la Loi sur le financement des agriculteurs, pour l’application de laquelle est délivrée l’Ordonnance nº15/18.05.2010 du ministre de l’agriculture et les forêts. L’Ordonnance régit les conditions et l’ordre du financement des projets de développement et de diversification des activités économiques et des revenus alternatifs dans le cadre du programme S. Le programme prévoit une aide assurée par l’UE pour le développement durable de l’agriculture et des zones rurales dans la période avant l’adhésion des pays candidats à l’adhésion à la Communauté, dont la République de Bulgarie.
Le Règlement (CE) nº1268/1999 du Conseil du 21 juin 1999 relatif à une aide communautaire à des mesures de préadhésion en faveur de l’agriculture et du développement rural dans les pays candidats d’Europe centrale et orientale, au cours de la période de préadhésion établit le cadre de l’aide communautaire et vise, en particulier, à contribuer à la mise en œuvre de l’acquis communautaire concernant la politique agricole commune et les politiques connexes et à résoudre les problèmes prioritaires et spécifiques d’adaptation à long terme du secteur de l’agriculture et des zones rurales des pays candidats (article 1). Sur la base des objectifs du programme le Règlement fixe les mesures de financement en prévoyant également l’appréciation, le suivi et l’évaluation de ces mesures. Le suivi continu du programme, assuré également par le pays candidat, est destiné à fournir une appréciation des résultats et incidences par rapport aux objectifs définis (article 5). La réduction, la suspension et la suppression du concours sont entreprises si la mise en œuvre d’une action semble ne justifier aucune part des crédits qui lui sont alloués, l’examen confirme l’existence d’une irrégularité ou d’une modification importante qui affecte la nature ou les conditions de mise en œuvre de l’action et pour laquelle l’approbation de la Commission a été [sic] obtenue (article 10).
Conformément au Règlement précité, l’Ordonnance nº15/18.05.2001 ordonne la mise en œuvre d’un suivi sur l’utilisation objective des investissements pour un délai de 5 ans – article 28. Le non-respect des conditions prévues par l’article 27 de l’Ordonnance a pour conséquence la restitution de l’aide financière attribuée. Les obligations aux termes de l’article 27 concernent également l’utilisation objective des actifs acquis sur la base de la conception approuvée.
Sur la base de la législation régissant l’aide financière dans le cadre du programme S., la chambre de la Cour suprême de cassation considère que lors du prochain suivi, visant à vérifier la conformité de la conception approuvée dont la réalisation fait l’objet du contrat, l’organisme de contrôle doit prendre en considération l’objectif de l’aide attribuée qui se rapporte à l’appréciation de l’utilisation appropriée de cette dernière. Le non-respect de l’obligation contractuelle est constaté par l’organisme de contrôle, mais en cas de litige relatif à l’appréciation du volume, au type d’investissement et à son utilisation appropriée pour le délai de contrôle, la cour doit interpréter les clauses du contrat. L’interprétation du contrat doit être conforme à la conception approuvée, tandis que les conclusions relatives à la désignation des investissements et à un écart éventuel de cette désignation, doivent être basées sur les principes et les objectifs ayant motivés l’attribution de l’aide, ce qui constitue une appréciation de l’objectif du contrat au sens de l’article 20 de la Loi sur les obligations et les contrats.
Sur la base de ces raisons, la chambre de la Cour suprême de cassation donne la réponse suivante à la question juridique soulevée: Lors de l’interprétation des clauses d’un contrat de financement dans le cadre du programme S., la cour pourrait considérer également les règles et les objectifs du Règlement (CE) nº1268/1999 du Conseil du 21 juin 1999, mais dans la mesure où ce règlement ne régit pas l’ordre et les conditions de conclusion du contrat concret entre l’État obtenant l’aide et la personne utilisant celle-ci, l’objectif du contrat au sens de l’article 20 de la Loi sur les obligations et les contrats ne peut reposer que sur le cadre commun de la désignation du financement, au regard de l’utilisation de l’aide, en liaison avec le degré et le type de non-respect éventuel.
Sur le fond du pourvoi en cassation.
Le recours en cassation est légitime dans la mesure où il invoque que la deuxième instance a violé les règles procédurales lors de l’examen des faits et des éléments recueillis – article 236, al. 2 du Code de procédure civile, la loi matérielle lors de l’interprétation du contrat – article 20 du Code de procédure civile, et a, en conséquence jugé à tort, ce qui représente une action erronée au sens de l’article 281, point 3 du Code de procédure civile.
En vertu de l’article 293, al. 1 du Code de procédure civile, la décision de la deuxième instance doit être annulée, mais la situation n’exigeant pas la répétition et le renouvellement de la procédure, la Cour suprême de cassation est tenue de statuer sur le fond.
L’objet du contrat d’attribution d’une aide financière non remboursable conclu le 19 décembre 2003 porte sur l’exercice d’activités suivant un plan d’affaire faisant partie du projet « Restructuration au cours de la construction d’un immeuble dans un hôtel familial avec restaurant, achèvement de la construction et équipement de celui-ci ». F. effectue le contrôle pour une période de 5 ans après le financement, le détenteur ayant assumé la responsabilité prévue par le point 4.17 d’utiliser les actifs acquis sur la base de l’investissement approuvé selon les modalités décrites dans le plan d’affaire.
Le plan d’affaire approuvé prévoit la construction de zones séparées – cuisine dans le restaurant et partie hôtelière, ainsi que des chambres et des locaux correspondant à une capacité totale de 17 chambres d’hôtel, et en mansarde – un local abritant le jacuzzi, le centre de fitness et une salle de jeux calmes. L’hôtel familial doit être ouvert à partir du début de mai jusqu’à la fin d’octobre. Le but principal du projet est présenté comme la construction d’un hôtel-restaurant pas très grand, par contre, garantissant à ses hôtes un confort contemporain, se distinguant d’une individualité optimale et fournissant des services se rapprochant au maximum du confort familial, tout en offrant des possibilité d’attractions dont la visite des curiosités historiques et des voyages en mer.
Les attentes d’un nombre croissant de touristes étrangers et plus particulièrement d’un intérêt accru aux valeurs naturelles et anthropogènes de la région offrant des possibilités de tourisme rural.
Le litige porte sur les constatations faites par la commission ayant effectué le 10 novembre 2009 un contrôle de l’utilisation appropriée de l’investissement. À la fin du contrôle le détenteur a signé la liste de contrôle où il a été mentionné que « l’investissement est utilisé conformément aux termes du projet ». Les témoignages des experts ayant effectué le contrôle permettent de constater qu’après la signature de la liste de contrôle, ceux derniers ayant procédé à la comparaison entre le plan d’affaire et l’inventaire dressé, ont noté que les chambres d’hôtes étaient au nombre de 32, au lieu de 23, le nombre indiqué dans le plan, par contre, il n’y avait pas de locaux pour les femmes de chambres, pour le directeur et pas de jacuzzi.
Le litige ne concerne pas le fait que la période de contrôle de 5 ans venait à son terme le 16 février 2010, que pendant le contrôle il n’y avait pas de personnes hébergées et que l’hôtel était en travaux de réparation pendant ce temps-là.
Le litige se rapporte au moyen de constatation de l’irrégularité entre le plan d’affaire et la liste de contrôle en ce qui concerne le nombre des chambres d’hôtel. Sur la bases des éléments écrits et verbaux, la cour considère que la mention supplémentaire du nombre des chambres dans la liste de contrôle n’a pas de force probante obligatoire. Étant donné que ces mentions ont été faites après la fin du contrôle effectué par les organismes de contrôle et la signature du document par le détenteur, elles ne sont pas opposables au document. D’autre part, on constate une divergence entre la liste de contrôle et l’inventaire fait à la main par les témoins ayant assisté au contrôle – selon l’inventaire manuscrit il y a 27 chambres et appartements, pas de chambres au rez-de-chaussée et en mansarde, tandis que dans la liste de contrôle sont notées 32 chambres dont 1 au rez-de-chaussée et 4 en mansarde. Les témoins D. et N. expliquent que les lits sont d’occasion, sont livrés en novembre 2009 pour le personnel de l’hôtel, on n’a pas installé des touristes dans les chambres qui ne sont pas équipées comme des chambres d’hôtel. Sur la base de ces faits et éléments, la conclusion de la deuxième instance sur le nombre des chambres d’hôtes est erronée à cause du fait qu’elle est établie uniquement sur la base des informations contenues dans la liste de contrôle.
En outre, comme la période de suivi par le fonds se terminait le 16 février 2010 et que le contrôle a été effectué en novembre 2009, c-à-d pendant une période en dehors de la saison touristique prévue au plan d’affaire, le changement éventuel d’usage des locaux n’a pas d’influence sur les objectifs fixés par le plan d’affaire. En dehors de la saison touristique le détenteur a entrepris des travaux de réparation et même si ces derniers avaient pour but le changement d’usage des locaux et la préparation à la prochaine saison touristique, cette modification prendrait effet après la fin de la période de suivi relative à l’investissement au sens de l’article 27 de l’Ordonnance nº15/18.05.2001. Lors des contrôles précédents on n’a pas constaté l’usage inapproprié de l’investissement.
L’aide financière a été obtenue sur la base de l’investissement approuvé, l’investissement a été utilisé de manière approprié dans le but de réaliser les objectifs du contrat. L’Ordonnance nº15/18.05.2001 et le contrat du 19 décembre 2003 ne prévoient pas la restitution de l’aide attribuée en cas de changement de l’usage d’une partie des locaux après la fin de la période de contrôle prévue dans le cadre de la réalisation du projet. Dans ce sens, l’investissement est utilisé de manière approprié conformément aux termes du projet approuvé, dont l’écart éventuel de cet usage pour une période qui se situe en dehors de la saison prévue pour l’utilisation effective de l’investissement, ne correspond pas à l’objectif du contrat en vertu de l’article 20 de la Loi sur les obligations et les contrats. Étant donné que le détenteur aux termes du contrat a agi en conformité, il n’est pas tenu de rembourser l’aide financière obtenue en vertu de l’article 30 de l’Ordonnance nº15/18.05.2010.
La demande visant à obtenir la constatation que.............. il existe une créance contre le requérant d’un montant de 366785,60 BGN constituant l’aide financière non remboursable obtenue dans le cadre du programme S. aux termes du contrat nº964/19.12.2003, soumise à la restitution pour non-respect de l’article 4, point 17 du contrat, ainsi qu’une créance s’élevant à 16146,41 BGN correspondant à l’indemnisation de retard, sont considérés infondés et doivent être rejetés.
En ce qui concerne les dépens. Vu l’issue du litige, le défendeur est tenu de supporter les dépens du requérant aux termes de la liste présentée en vertu de l’article 80 du Code de procédure civile, s’élevant à 12688,64 BGN.
Sur la base des motifs cités ci-dessus, la Cour suprême de cassation
A R R Ê T E:
ANNULE l’arrêt nº102/18.11.2011sur l’affaire civile jugée par la deuxième instance nº231/11 de la Cour d’appel de Bourgas, et STATUE:
REJETTE le recours, introduit par.......”, [localité], [rue], nº 136 visant la constatation que ............ il y a une créance contre R. E. M., en sa qualité de [entreprise], [localité], [rue], pour la somme de 366785,60 BGN constituant l’aide financière non remboursable obtenue dans le cadre du programme S. aux termes du contrat nº964/19.12.2003, soumise à la restitution pour non-respect de l’article 4, point 17 du contrat, ainsi qu’une créance s’élevant à 16146,41 BGN correspondant à l’indemnisation de retard.
CONDAMNE .............. [localité], [rue], à payer à R. E. M., en sa qualité de [entreprise], [localité], [rue], la somme de 12688,64 BGN /douze mille six cents quatre-vingt-huit lev, 64 stotinki/ – dépens afférents à la procédure.
La décision est définitive.
PRÉSIDENT :
MEMBRES :