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19/01/2021 | FRANCE | N°19/05576

France | France, Cour d'appel de Versailles, 13e chambre, 19 janvier 2021, 19/05576


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 53I



13e chambre



ARRET N°



CONTRADICTOIRE



DU 19 JANVIER 2021



N° RG 19/05576 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TLY3





AFFAIRE :





[D] [S]





C/





[M] [X]

...







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Juillet 2019 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre :

N° Section :

N° RG :

14/09870





Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 19/01/2021





à :



Me Mélina PEDROLETTI





Me Marie-christine DRAPPIER-VILLARD





Me Olivier FONTIBUS





TGI de VERSAILLES



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE ...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53I

13e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 19 JANVIER 2021

N° RG 19/05576 - N° Portalis DBV3-V-B7D-TLY3

AFFAIRE :

[D] [S]

C/

[M] [X]

...

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 02 Juillet 2019 par le Tribunal de Grande Instance de VERSAILLES

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 14/09870

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 19/01/2021

à :

Me Mélina PEDROLETTI

Me Marie-christine DRAPPIER-VILLARD

Me Olivier FONTIBUS

TGI de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX NEUF JANVIER DEUX MILLE VINGT ET UN,

La cour d'appel de Versailles a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

Monsieur [D] [S]

né le [Date naissance 2] 1963 à [Localité 10] (77)

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 7]

Représenté par Maître Mélina PEDROLETTI avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 626 - N° du dossier 24640 et par Maître Pierre-François GIUDICELLI avocat plaidant au barreau de AVIGNON

APPELANT

****************

Monsieur [M] [X]

né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 9]

de nationalité Française

[Adresse 5]

[Localité 8]

Représenté par Maître Marie-christine DRAPPIER-VILLARD avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 66 - N° du dossier 7532 et par la SCP BERNARD-HUGUES-JEANIN-PETIT-PUCHOL avocat au barreau de AIX EN PROVENCE

Monsieur [N] [I]

de nationalité Française

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représenté par Maître Olivier FONTIBUS avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 108 et par Maître Roger RIBAULT substitué par Maître Denis DELCOURT-POUDEX avocat plaidant au barreau de PARIS

INTIMES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 17 Novembre 2020 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Delphine BONNET, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente,

Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie PASQUIER-HANNEQUIN,

Dans le cadre d'un litige l'opposant à son ancien associé, M. [Z], devant le tribunal de grande instance de Nanterre, M. [D] [S] a, dans un premier temps, saisi de la défense de ses intérêts maître [J] Sers, qui a rédigé et signifié des conclusions en défense. Puis, à la suite de l'omission du barreau de celui-ci, il a confié ses intérêts à maître [N] [I], puis a sollicité maître [X] pour prendre sa suite.

Par jugement contradictoire du 4 février 2011, le tribunal de grande instance de Nanterre a condamné M. [S] à payer à M. [Z] la somme de 27 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 22 avril 2009, outre une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, étant précisé que le défendeur, M. [S], avait conclu mais n'avait pas déposé de dossier.

Soutenant notamment que maître [I] n'avait pas transmis son dossier à maître [X], par acte du 4 novembre 2014, M. [S] l'a assigné en responsabilité devant le tribunal de grande instance de Versailles pour obtenir, au visa de l'article 1147 du code civil, sa condamnation à lui verser 33 060,69 euros à titre de dommages et intérêts.

Par acte du 10 mars 2017, maître [I] a appelé en garantie maître [X].

Les affaires ont été jointes.

Par jugement contradictoire du 2 juillet 2019, le tribunal de grande instance de Versailles a :

- débouté M. [S] de l'ensemble de ses demandes,

- débouté maître [I] de sa demande indemnitaire reconventionnelle,

- condamné M. [S] aux dépens de l'instance,

- condamné M. [S] à verser à maître [I] une somme de 4000 euros sur le fondement de l'article 700 du code procédure civile,

- débouté maître [X] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 25 juillet 2019, M. [S] a relevé appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 21 juillet 2020, il demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté maître [I] de sa demande indemnitaire reconventionnelle et de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a débouté de l'ensemble de ses demandes, l'a condamné aux dépens de l'instance et à payer à maître [I] une somme de 4000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

statuant de nouveau,

- débouter maîtres [I] et [X] de l'ensemble de leurs demandes,

- condamner maître [I] à lui payer la somme 33 060,69 euros,

- condamner maître [I] à lui payer la somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- pour le surplus confirmer le jugement,

- condamner le même (sic) aux dépens de l'instance dont distraction au profit de maître Pedroletti conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 16 mars 2020, maître [I] demande à la cour de :

à titre liminaire,

- dire et juger que son action en intervention forcée n'est pas prescrite,

- rejeter la fin de non-recevoir tirée de la prescription,

à titre principal,

- constater qu'il n'a commis aucune faute professionnelle,

- constater que M. [S] ne démontre pas l'existence d'un préjudice réel, certain et actuel, ni d'un lien de causalité entre la faute alléguée et les préjudices invoqués,

- débouter M. [S] de l'ensemble de ses demandes,

- débouter maître [X] de ses demandes à son encontre,

à titre subsidiaire,

- constater les fautes commises par maître [X] en raison des carences dont il a fait preuve lors de la succession et dans le suivi de la procédure devant le tribunal de grande instance de Nanterre,

- dire et juger que les fautes commises sont la cause directe du préjudice de M. [S],

- condamner maître [X] à le relever et garantir de toutes indemnisations ou condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre au profit de M. [S], sans approbation des demandes principales,

reconventionnellement et en toute hypothèse,

- condamner M. [S] à lui payer la somme de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner tout succombant à lui payer la somme de 7 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner aux dépens de l'instance dont distraction au profit de maître Fontibus conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 7 août 2020, maître [X] demande à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [S] de l'ensemble de ses demandes, dit sans objet l'appel en garantie formé par maître [I] à son encontre et condamné M. [S] aux dépens de première instance,

- l'infirmer en ce qu'il l'a débouté de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

et statuant à nouveau :

- déclarer maître [I] irrecevable en ses demandes dirigées à son encontre en ce qu'elles sont manifestement prescrites,

- à défaut, dire et juger que maître [I] qui est demeuré constitué dans les intérêts de M. [S] est le seul susceptible de pouvoir se voir reprocher les griefs allégués par ce dernier dans le cadre de la présente instance ; débouter en conséquence maître [I] de l'ensemble de ses demandes dirigées à son encontre,

- à défaut, dire et juger que M. [S] n'apporte pas la triple démonstration, nécessaire pour engager la responsabilité d'un professionnel du droit, d'une faute en lien de causalité direct avec un préjudice né et certain ; débouter en conséquence M. [S] de l'ensemble de ses demandes,

- à défaut, dire et juger que la réparation de la perte de chance alléguée ne saurait être égale à l'avantage qu'aurait procuré cette chance si elle s'était réalisée,

- condamner reconventionnellement maître [I] et/ou M. [S] à lui payer la somme de 8 000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner reconventionnellement maître [I] et/ou M. [S] aux entiers dépens d'instance et d'appel, ces derniers distraits au profit de maître Drappier-Villard.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 octobre 2020.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie à leurs écritures conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

1) sur les demandes de M. [S]

M. [S] prétend que maître [I] a fait preuve de négligence dans l'accomplissement de sa mission et lui reproche de ne pas avoir respecté les règles de dessaisissement applicables entre avocats et de ne pas avoir indiqué au tribunal de grande instance de Nanterre sa nouvelle adresse.

Il indique que maître [I] avait la qualité de postulant et de plaidant, qu'il s'est constitué dans ce dossier et a pris des conclusions, qu'au mois d'août 2010, il a dessaisi son conseil de ses intérêts et saisi maître [X] auquel maître [I] n'a jamais transmis son dossier.

Invoquant l'article 19 du décret du 12 juillet 2005 et l'article 9 du Règlement intérieur national des avocats (RIN), il soutient que maître [I], bien qu'informé du nom et des coordonnées de son successeur, ne s'est pas assuré de ce que le dossier avait été reçu par maître [X] et partant qu'il était déchargé de la défense de ses intérêts et qu'il avait été régulièrement remplacé par un nouveau représentant constitué conformément à l'article 419 du code de procédure civile.

Il souligne qu'il résulte du jugement que maître [I] était toujours son représentant en sorte qu'il avait la charge des obligations procédurales et d'informations. Il estime qu'en ne déposant pas de dossier de plaidoirie contenant les pièces le jour de l'audience maître [I] a commis une faute engageant sa responsabilité, que par ailleurs il n'a pas porté à sa connaissance ni à celle de maître [X] le jugement. Il affirme que maître [I] ne s'étant pas dessaisi du dossier a commis une faute.

Il critique la motivation du jugement relevant que l'article 418 du code de procédure civile ne précise pas les conditions dans lesquelles un avocat constitué, dont le mandat a été révoqué par son client, peut s'estimer déchargé de son mandat de représentation lorsque celle-ci est obligatoire et que la lecture de l'alinéa 2 de l'article 419 du code de procédure civile montre que son application ne se limite pas à l'hypothèse d'une révocation par le mandataire.

Il réaffirme qu'à défaut de nouvelle constitution maître [I] est demeuré en charge de ses intérêts et estime qu'il aurait dû a minima dès le 16 septembre 2010 adresser au juge de la mise en état un message RPVA pour solliciter un renvoi impératif motivé par le différend existant avec son client et la nécessité de lui trouver un successeur.

Il relève que maître [I] ne démontre nullement avoir adressé à maître [X] la version papier du dossier.

Il soutient également que faute pour maître [I] d'avoir informé la juridiction de son changement d'adresse il n'a eu connaissance du jugement que lorsque celui-ci a été mis à exécution et qu'il est devenu définitif, ce qui est également fautif.

Puis, M. [S] fait des développements sur son préjudice et le lien de causalité.

Après avoir rappelé les dispositions des articles 411 du code de procédure civile et 13 du décret du 12 juillet 2005, maître [I] prétend avoir multiplié les diligences envers M. [S] dont il donne le détail dans ses écritures, évoquant notamment le dernier courrier qu'il lui a adressé par lettre recommandée avec accusé de réception du 16 septembre 2010 aux termes duquel il lui expliquait les enjeux de l'ordonnance de clôture, l'impossibilité de répliquer aux conclusions adverses dans des délais devenus très courts en raison de son absence de réaction et qu'en l'absence de règlement, malgré sa relance du 6 septembre, il ne plaiderait pas. Il prétend qu'il a pris les initiatives conformes aux intérêts de M. [S] et qu'il l'a parfaitement éclairé.

Il soutient que sa mission a pris fin au plus tôt le 18 août 2010 et au plus tard le 21 septembre 2010, les lettres adressées par maître [X] à ces dates consacrant sans ambiguïté la rupture des relations avec M. [S] et la fin de son mandat, indiquant que celui-ci a explicitement mandaté maître [X] le 18 août 2010 pour lui succéder, mandat accepté par maître [X] qui le lui a notifié le 21 septembre.

Il fait valoir qu'aucun texte ne prévoit la forme que doit revêtir la constatation de la fin de la mission ni n'exige que celle-ci se traduise par la restitution du dossier contre décharge. Il ajoute que M. [S] étant en possession de l'entièreté des pièces de procédure du dossier, il ne pouvait donc manquer de les transmettre à maître [X].

Il affirme que les dispositions de l'article 419 du code de procédure civile ne s'appliquent pas dès lors que la rupture de son mandat est intervenue à l'initiative de M. [S] et qu'il y a eu succession d'avocats, rappelant que celui-ci l'avait dessaisi, n'honorait pas ses factures et avait choisi un autre avocat.

Il soutient que révoqué et remplacé, il ne peut lui être reproché de ne pas avoir effectué à temps les démarches litigieuses.

S'agissant du changement d'adresse de M. [S], maître [I] soutient que celui-ci ne démontre pas l'avoir informé de son changement d'adresse définitif, ce que le tribunal a retenu à tort et il affirme qu'il ignorait jusqu'à son dessaisissement que l'adresse de M. [S] n'était plus valable en sorte qu'aucune faute ne peut lui être reprochée à cet égard.

Enfin, maître [I] conclut à l'absence de préjudice et de lien causal.

Après avoir rappelé les faits et la procédure à l'occasion desquels la responsabilité civile professionnelle de maître [I] et la sienne sont recherchées, et les échanges de courrier intervenus entre les parties, ainsi que les règles applicables en matière de dessaisissement lorsque la représentation est obligatoire, maître [X] soutient que pour pouvoir s'estimer déchargé des intérêts de M. [S] il appartenait à maître [I] en sa qualité d'avocat constitué d'aviser le juge et la partie adverse de la fin de sa mission et surtout de s'assurer qu'il avait été régulièrement remplacé par un nouveau représentant constitué, ce qu'il n'a pas fait en sorte qu'il est nécessairement demeuré le conseil de M. [S] jusqu'au terme de l'affaire. Il soutient que le fait qu'il se soit manifesté auprès de maître [I] ne pouvait, s'agissant d'une matière avec représentation obligatoire, marquer la fin de son mandat.

Il affirme qu'il n'a pas été mandaté par M. [S] pour succéder à maître [I] relevant qu'il n'a jamais reçu de M. [S] les pièces de son dossier, que maître [I] ne les lui a pas davantage adressées, qu'il a dû dans ces circonstances expliquer qu'il serait amené à appeler des honoraires provisionnels qui s'ajouteraient à ceux d'un avocat postulant, et qu'en conséquence M. [S] l'a avisé qu'il ne souhaitait pas lui confier le soin de représenter ses intérêts.

Enfin, maître [X] conclut à l'inexistence du préjudice.

L'engagement de la responsabilité d'un avocat, dans le cadre de son mandat, suppose que soient

mise en évidence l'existence d'une faute, d'un préjudice et d'un lien de causalité.

L'article 418 du code de procédure civile prévoit que 'la partie qui révoque son mandataire doit immédiatement soit pourvoir à son remplacement, soit informer le juge et la partie adverse de son intention de se défendre elle-même si la loi le permet, faute de quoi son adversaire est fondé à poursuivre la procédure et à obtenir jugement en continuant à ne connaître que le représentant révoqué'.

L'article 13 du décret n° 2005-790 du 12 juillet 2005 précise que l'avocat conduit jusqu'à son terme l'affaire dont il est chargé, sauf si son client l'en décharge ou s'il décide de ne pas poursuivre sa mission. Dans ce dernier cas, il en informe son client en temps utile pour que les intérêts de celui-ci soient sauvegardés.

En l'espèce, il résulte des pièces produites par les parties que :

- par mail du 29 juillet 2010, maître [I] a indiqué à M. [S] qu'une clôture était susceptible d'être prononcée le 27 septembre 2010 par le tribunal de grande instance de Nanterre, joignant à son courriel l'ensemble des conclusions et pièces échangées par les parties, ainsi que les dernières écritures signifiées pour son client et lui demandant de régler une somme de 3 750 euros HT d'honoraires ;

- maître [I] l'a relancé par courriel du 24 août 2010 dans les termes suivants : 'Je n'ai pas reçu de réponse à mon courriel du 29 juillet 2010 que tu trouveras en pièce jointe. Merci de me donner tes instructions' ;

- le 1er septembre 2010, faisant suite à un entretien téléphonique de la veille, maître [I] a de nouveau adressé à M. [S] un courriel, lui rappelant les courriels et le courrier restés sans réponse, l'urgence de la situation et lui signifiant l'opportunité d'un entretien téléphonique ;

- le 6 septembre 2010, maître [I] a écrit par mail à M. [S] : 'je reviens à notre conversation téléphonique de ce matin. Tu m'as demandé de t'adresser les facturations de mon cabinet pour les dossiers dont je m'occupe ; tu les trouveras en pièces jointes. (...). Je réitère ma demande d'un entretien téléphonique avec toi dans les meilleurs délais, compte tenu de l'audience du 27 septembre 2010. Convenons d'un rendez-vous téléphonique' ;

- maître [I] l'a encore relancé le 8 septembre suivant ;

- puis, par lettre recommandée avec accusé de réception du 16 septembre reçue le 18, il a écrit à M. [S] : 'malgré mes courriels des 29 juillet, 24 août, 1er et 8 septembre 2010, je n'ai reçu aucune instruction de votre part. Sans élément nouveau je suis dans l'impossibilité de répliquer aux conclusions de l'adversaire du 14 juin 2020. A l'audience du 27 septembre 2010, l'ordonnance de clôture sera vraisemblablement rendue ; après cette date, aucune conclusion ni pièces nouvelles ne pourront plus être déposées de votre part. En l'état, un jugement contradictoire peut être parfaitement rendu à bref délai.

Je constate ne pas avoir été provisionné à ce jour, bien que régulièrement constitué. Faute d'être provisionné par retour, je ne pourrai assurer l'audience de plaidoiries',

- le 21 septembre 2010, maître [I] a adressé de nouveau à M. [S] un mail en ces termes : 'je t'ai adressé un courrier recommandé le 16 septembre 2010 que tu as réceptionné le 18 septembre 2010. Tu le trouveras à toutes fins utiles en pièce jointe.

Je ne comprends pas ton attitude.

Ton silence me contraint à solliciter une ordonnance de taxe auprès de mon bâtonnier pour les honoraires dus à mon cabinet.(...)' ;

- par télécopies des 21 et 24 septembre 2010, maître [X] a informé maître [I] que M. [S] lui avait demandé de lui succéder dans le dossier qui l'oppose à M. [Z] devant le tribunal de grande instance de Nanterre et lui demandait : ' merci de me transmettre d'urgence l'entier dossier, le client m'ayant fait savoir qu'il y aurait une clôture imminente de l'instruction de ce dossier' ;

- le 27 septembre 2010, maître [I] a répondu à maître [X] lui rappelant les différentes correspondances envoyées à M. [S] restées sans réponse, l'informant qu'il n'avait pas été provisionné dans ce dossier et lui demandant de constituer un nouvel avocat devant le tribunal de Nanterre ;

- par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 octobre 2020, M. [S] a écrit à maître [I] : 'j'ai demandé à maître [X] de reprendre ce dossier et d'assurer ma défense par la suite. Ce qui, sauf erreur de ma part, a été notifié à votre cabinet par courriers des 25/08 puis 16/09 et fax des 21 et 24/09 en vue de l'audience du 27/09/2010. Je ne comprends pas votre résistance à vous dessaisir de ce dossier. Vous invoquez ne pas avoir été provisionné. C'est inexact : j'ai reçu une note d'honoraires de 2 392 euros pour ce dossier le 12/05/2009, réglée à maître Sers par chèque le 27/05/2009, couvrant les frais de toutes les audiences de mise en état et le suivi de la procédure. J'estime donc bien avoir provisionné votre cabinet.(...). Ainsi, je vous prie de donner suite aux demandes de maître [X] et de lui transmettre sans plus de délai ce dossier.' ;

- par lettre recommandée avec accusé de réception du 20 octobre 2010, maître [I] a adressé à maître [X] la version papier des éléments du dossier, précisant qu'il les avait déjà adressés à M. [S] le 29 juillet 2010 par voie électronique.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 27 septembre 2010 ; l'affaire a été plaidée le 13 décembre 2010 et le jugement rendu le 4 février 2011 sans que le défendeur ait déposé son dossier.

Compte tenu de l'historique des relances adressées par maître [I] à M. [S] restées sans réponse, des télécopies adressées par maître [X] à maître [I] les 21 et 24 septembre 2010 et du courrier adressé par M. [S] à maître [I] le 13 octobre 2010, c'est à juste titre que le tribunal a considéré que M. [S] avait révoqué le mandat donné à maître [I] de le représenter en justice en sorte qu'à compter du 21 septembre 2010 au plus tard, il n'était plus tenu d'effectuer aucun acte pour le compte de M. [S].

Contrairement à ce que soutient l'appelant, maître [I], déchargé par M. [S] de la défense de ses intérêts, n'avait ni à aviser le juge et la partie adverse de la fin de sa mission ni à s'assurer qu'il avait été régulièrement remplacé par un nouveau représentant constitué, les dispositions de l'article 419 n'étant pas applicables, M. [S] ayant lui-même à pourvoir au remplacement de son conseil, conformément aux dispositions de l'article 418 rappelées ci-dessus. Maître [I] n'avait pas davantage l'obligation de déposer le dossier de plaidoiries, étant souligné que dans sa lettre recommandée avec accusé de réception du 16 septembre 2010, il avait clairement informé M. [S] de la date de clôture et de ce que faute d'avoir reçu règlement d'une provision, il ne pourrait assurer l'audience de plaidoiries.

Si l'article 9.2 du Règlement intérieur national de la profession d'avocat -RIN- prévoit que l'avocat dessaisi, ne disposant d'aucun droit de rétention, doit transmettre sans délai tous les éléments nécessaires à l'entière connaissance du dossier, M. [S] ne peut utilement reprocher à maître [I] un manquement à cette règle de dessaisissement dès lors que celui-ci lui avait adressé le 29 juillet 2010 l'intégralité des conclusions échangées de part et d'autre ainsi que les pièces de la partie adverse, ce dont il a informé maître [X] par télécopie du 27 septembre 2010.

Aucune négligence ne peut donc être retenue à l'encontre de maître [I] dès lors que c'est M. [S] qui a mis fin à son mandat.

S'agissant de l'absence d'information au greffe du changement d'adresse de M. [S], si maître [I] avait effectivement connaissance de l'adresse de celui-ci à [Localité 8], tel que cela résulte de son mail du 1er septembre 2010 dans laquelle il écrivait 'je t'ai adressé plusieurs courriels et un courrier à ton adresse parisienne et à celle d'[Localité 8]' et de la lettre recommandée avec accusé de réception qu'il lui a adressée le 16 septembre 2010 à son adresse d'[Localité 8], M. [S] ne justifie cependant nullement avoir informé maître [I], avant le 21 septembre 2010, date de son dessaisissement effectif, de ce qu'il ne résidait plus en région parisienne et donc de son changement d'adresse définitif.

Et il ne justifie nullement, ayant souscrit un contrat de réexpédition définitive de son courrier à sa nouvelle adresse pendant un an, que maître [I] ait pu être alerté de ce qu'il ne recevait plus de courrier à son adresse en région parisienne. Aucune faute ne peut être retenue à l'encontre de maître [I] à ce titre, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal.

Il convient en conséquence, avec une substitution de motifs sur ce dernier point, de confirmer le jugement en toutes ses dispositions.

2) sur la demande reconventionnelle de maître [I]

Maître [I] soutient que M. [S] tente de lui faire supporter les conséquences de ses propres carences et sollicite à ce titre des dommages et intérêts.

M. [S] n'a pas répondu sur ce point.

C'est à juste titre que le tribunal a rejeté cette demande indemnitaire au motif que maître [I] ne justifiait d'aucun préjudice ; il convient de souligner également que maître [I] ne démontre nullement quelle serait la faute commise par M. [S] à l'origine du préjudice allégué.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Condamne M. [S] aux dépens de la procédure d'appel lesquels pourront être recouvrés directement par maîtres Fontibus et Drapier-Villard conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

Rejette les demandes formées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente et par Madame Sylvie PASQUIER-HANNEQUIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier,La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 13e chambre
Numéro d'arrêt : 19/05576
Date de la décision : 19/01/2021

Références :

Cour d'appel de Versailles 13, arrêt n°19/05576 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2021-01-19;19.05576 ?
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