La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/05/2023 | LUXEMBOURG | N°57/23

Luxembourg | Luxembourg, Cour administrative, 25 mai 2023, 57/23


N° 57 / 2023 du 25.05.2023 Numéro CAS-2022-00095 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, vingt-cinq mai deux mille vingt-trois.

Composition:

Théa HARLES-WALCH, conseiller à la Cour de cassation, président, Thierry HOSCHEIT, conseiller à la Cour de cassation, Anne-Françoise GREMLING, conseiller à la Cour d’appel, Caroline ENGEL, conseiller à la Cour d’appel, Laurent LUCAS, conseiller à la Cour d’appel, Viviane PROBST, greffier en chef de la Cour.

Entre PERSONNE1.), demeurant à L-ADRESSE1.), demandeur en

cassation, comparant par Maître Hanan GANA-MOUDACHE, avocat à la Cour, en l’étude d...

N° 57 / 2023 du 25.05.2023 Numéro CAS-2022-00095 du registre Audience publique de la Cour de cassation du Grand-Duché de Luxembourg du jeudi, vingt-cinq mai deux mille vingt-trois.

Composition:

Théa HARLES-WALCH, conseiller à la Cour de cassation, président, Thierry HOSCHEIT, conseiller à la Cour de cassation, Anne-Françoise GREMLING, conseiller à la Cour d’appel, Caroline ENGEL, conseiller à la Cour d’appel, Laurent LUCAS, conseiller à la Cour d’appel, Viviane PROBST, greffier en chef de la Cour.

Entre PERSONNE1.), demeurant à L-ADRESSE1.), demandeur en cassation, comparant par Maître Hanan GANA-MOUDACHE, avocat à la Cour, en l’étude de laquelle domicile est élu, et PERSONNE2.), demeurant à L-ADRESSE2.), défenderesse en cassation, comparant par la société à responsabilité limitée VOGEL AVOCAT, inscrite à la liste V du tableau de l’Ordre des avocats du barreau de Luxembourg, en l’étude de laquelle domicile est élu, représentée aux fins de la présente procédure par Maître Gaston VOGEL, avocat à la Cour.

Vu l’arrêt attaqué, numéro 135/22-I-DIV (aff.fam.), rendu le 22 juin 2022 sous le numéro CAL-2021-01188 du rôle par la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, première chambre, siégeant en matière d’appel des décisions rendues par le juge aux affaires familiales ;

Vu le mémoire en cassation signifié le 17 août 2022 par PERSONNE1.) à PERSONNE2.), déposé le 1er septembre 2022 au greffe de la Cour supérieure de justice ;

Vu le mémoire en réponse signifié le 6 septembre 2022 par PERSONNE2.) à PERSONNE1.), déposé le 14 septembre 2022 au greffe de la Cour ;

Vu le nouveau mémoire intitulé « mémoire en réplique » signifié le 17 octobre 2022 par PERSONNE1.) à PERSONNE2.), déposé le 4 novembre 2022 au greffe de la Cour, en ce qu’il répond à l’exception d’irrecevabilité opposée au pourvoi, et l’écartant pour le surplus, en ce qu’il ne remplit pas les conditions de l’article 17, alinéa 2 de la loi modifiée du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation ;

Sur les conclusions du premier avocat général Marie-Jeanne KAPPWEILER.

Sur la recevabilité du pourvoi La défenderesse en cassation soulève l’irrecevabilité du pourvoi pour ne pas avoir reproduit dans le mémoire en cassation le dispositif du jugement de première instance, confirmé par l’arrêt attaqué.

Aucune disposition légale ne faisant obligation au demandeur en cassation de reproduire dans son pourvoi le dispositif du jugement de première instance, fût-il confirmé par l’arrêt d’appel, le moyen d’irrecevabilité du pourvoi n’est pas fondé.

Le pouvoir, introduit dans les formes et délai prévus par la loi, est recevable.

Sur les faits Selon l’arrêt attaqué, le juge aux affaires familiales au tribunal d’arrondissement de Luxembourg, statuant dans le cadre du divorce entre le demandeur en cassation et la défenderesse en cassation, avait, entre autres, dit que le bien immobilier constitué par un terrain à bâtir, apporté en communauté d’acquêts par le demandeur en cassation, et par la maison d’habitation y érigée par la suite, financée à l’aide de fonds communs, constituait un bien commun et en avait ordonné la licitation. La Cour d’appel a confirmé ce jugement.

Sur le premier moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation sinon de la fausse interprétation, sinon encore de la fausse application des articles 1134, 552 et 553 du Code civil.

Attendu que l’article 1134 du Code civil prévoit que légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.

Elles doivent être exécutées de bonne foi. ».

Attendu que l'article 552 du Code civil prévoit que :

emporte la propriété du dessus et du dessous.

Le propriétaire peut faire au-dessus toutes les plantations et constructions qu'il juge à propos, sauf les exceptions établies au titre "des servitudes ou services fonciers".

Il peut faire au-dessous toutes les constructions et fouilles qu'il jugera à propos et tirer de ces fouilles tous les produits qu'elles peuvent fournir, sauf les modifications résultant des lois et règlements relatifs aux mines, et des lois et règlements de police ».

Attendu que l'article 553 du Code civil prévoit que plantations et ouvrages sur un terrain ou dans l'intérieur sont présumés faits par le propriétaire à ses frais et lui appartenir, si le contraire n'est prouvé ; sans préjudice de la propriété qu'un tiers pourrait avoir acquise ou pourrait acquérir par prescription soit d'un souterrain sous le bâtiment d'autrui, soit de toute autre partie du bâtiment ».

L’arrêt attaqué a violé ces dispositions légales à double titre, chacune des violations constituant une branche du moyen de cassation.

1ère branche du moyen Les termes du contrat de mariage sont explicites : le régime de la séparation des biens est le principe, et ne sont compris dans la société d’acquêts que les biens que le ou les époux déclare(nt) expressément vouloir acquérir pour compte de la société d’acquêts.

En conformité avec les stipulations du contrat de mariage, l’acte notarié du 27 octobre 1997 modifiant le contrat de mariage stipule en effet que Monsieur PERSONNE1.) déclare apporter le terrain à bâtir à la société d’acquêts, avec la précision que ce dernier l'a reçu en donation de ses parents par acte notarié préalable du même jour de Maître Frank BADEN.

Conformément à ce qui a été convenu entre les parties dans leur contrat de mariage, une maison d’habitation a été érigée sur le terrain à bâtir postérieurement à l’apport de ce dernier à la société d’acquêts.

Aux termes du contrat de mariage :

la séparation de biens une société ou communauté d'acquêts qui comprendra uniquement les biens meubles et immeubles que les époux déclarent expressément vouloir acquérir pour compte de la communauté d'acquêts, à l'exclusion de toute autre acquisition à quelque titre qu'elle soit. » La partie demanderesse en cassation a fait plaider que la maison construite sur le terrain apporté à la société d'acquêts n'entrait pas dans la communauté sur base de l'article 552 du Code civil.

Cependant, la Cour d’appel conclut civil, "la propriété du sol emporte la propriété du dessus et du dessous. Le propriétaire peut faire au dessus toutes les plantations et constructions qu'il juge à propos, sauf les exceptions établies au titre des 'servitudes ou services fonciers' et l'article 553 du même code poursuit que ‘toutes constructions, plantations et ouvrages sur un terrain ou dans l'intérieur sont présumés faits par le propriétaire à ses frais et lui appartenir, si le contraire n'est prouvé ; sans préjudice de la propriété qu'un tiers pourrait avoir acquise ou pourrait acquérir par prescription, soit d'un souterrain sous le bâtiment d'autrui, soit de toute autre partie du bâtiment".

Les époux ayant contracté en commun un prêt le 19 décembre 1997 pour financer la construction de la maison et le contrat de construction versé aux débats, daté du 9 octobre 1997 et établi au nom de PERSONNE1.) seul, n'étant pas signé, la présomption de l'article 553 du Code civil précitée ne se trouve pas renversée en l'occurrence.

Le terrain ayant appartenu à la communauté à l'époque de la construction de la maison, cette dernière doit-être considérée comme appartenant également à la communauté en vertu des dispositions de l'article 552 du Code civil.

C'est donc à juste titre que le juge aux affaires familiales a retenu que l'immeuble entier, situé à L-ADRESSE3.), appartenait à la communauté et est tombé en indivision suite à la dissolution du régime matrimonial ».

Cependant, c'est à tort, et contre les dispositions pourtant clairs du contrat de mariage que la Cour d'appel a confirmé le jugement de première instance en considérant que la maison construite sur le terrain apporté par le demandeur en cassation faisait également partie de la société d'acquêts.

Le contrat de mariage est rédigé d'une manière telle qu'il ne laisse aucune place à l'interprétation. En effet, il est clair que la volonté des parties excluait expressément que la maison puisse faire partie de la société d'acquêts.

L'article 552 du Code civil dispose que la propriété du sol emporte la propriété du dessus de telle sorte que la construction d’un bâtiment sur un terrain emporte que le bâtiment érigé sur son terrain est présumé appartenir au propriétaire du sol, si le contraire n’est prouvé (cf. article 553 du Code civil).

La présomption d’acquisition de la propriété par le propriétaire du sol découlant du mécanisme de l’accession est donc réfragable et le régime du droit d’accession du Code civil n’est que supplétif.

Le propriétaire du fond peut toujours renoncer à son droit d’accession.

En l'espèce, les stipulations du contrat de mariage reflètent clairement la volonté des parties de ne pas faire entrer la maison dans la société d'acquêts par le mécanisme de l'accession.

En effet, il est clair que la volonté des parties excluait expressément que la maison puisse faire partie de la société d'acquêts. Cette stipulation du contrat de mariage est donc rédigée d’une manière telle qu’à défaut de mention expresse de son acquisition pour compte de la société d’acquêts, un bien ne peut être intégré à la société d’acquêts. Vu le régime de la séparation de biens choisi par les époux, cette stricte limitation des biens qui entrent dans la société d’acquêts semble logique.

Ainsi, cette clause applicable à la société d’acquêts est à lire de telle façon qu’un bien acquis par un époux, voire par les deux époux ensemble, n’entre jamais dans la société d’acquêts, sauf mention expresse de la volonté du ou des époux que ce bien est acquis pour compte de la société d’acquêts (ou lui est apporté).

Par ailleurs, les termes titre qu'elle soit » sont explicites sur cette volonté des époux de limiter le plus strictement possible les biens acquis pour compte de la société d’acquêts, à savoir uniquement les biens faisant l’objet d’une mention expresse d’acquisition à ce titre.

Les termes de l’extrait précité doivent dès lors être interprétés de manière extensive et font obstacle à l’application de tout mécanisme juridique permettant à la société d’acquêts d’acquérir tout bien pour lequel il n’y a pas une manifestation expresse de volonté d’un ou des époux apportant en ce sens, comme c'est le cas pour l'accession.

Le mécanisme de l’accession impliquant une acquisition sans déclaration expresse de la volonté d’apporter à la société d’acquêts, cette dernière ne saurait pas acquérir la maison à ce titre. En l'espèce, les parties ont délibérément écarté l'article 552 du code civil et ont renoncé au droit d’accession au profit de la société d’acquêts.

Partant, s’agissant du terrain à bâtir, le contrat de mariage prévoit expressément une renonciation au droit d’accession dans le chef de la société d’acquêts. La maison n’ayant pas été expressément acquise pour le compte de la société d’acquêts, voire n’ayant pas été expressément apportée à la société d’acquêts, elle ne peut avoir été acquise par cette dernière au titre de l’accession.

En décidant le contraire, la cour d'appel a clairement violé l'article 1134 du Code civil, en ne respectant pas la volonté des parties.

En l'espèce, la Cour d'appel aurait dû rechercher si dans les termes clairs de leur contrat de mariage, les parties entendaient ou non faire entrer la maison dans la société d'acquêts.

Or, les parties ont expressément, dans des termes clairs et précis, écarté cette possibilité.

La jurisprudence a d'ailleurs retenue couvert d'interprétation, et quel que soit leur souci de justice ou d'équité, modifier une convention régulièrement passée, sous peine de méconnaissance de la force obligatoire du contrat consacrée par l'article 1134 du Code civil précité et de dénaturation des clauses claires et précises (Cass. 20 juillet 1876, Pas. 1, p. 215, 5 mai 1905, Pas. 7, p. 139 et JCL civil, art. 1188 à 1192, Fasc. 20: Contrat, Interprétation du contrat, La mise en œuvre: rôle respectif des juges du fond et de la Cour de cassation, n° 1 et 2). » CA 18/11/2020 rôle n°CAL-2020-00566.

En s'écartant de la volonté des parties, exprimée clairement dans leur contrat de mariage, les juges du fond ont fait une fausse application de l'article 1134 du Code civil.

L’arrêt attaqué a violé l’article 1134 du Code civil, cette violation constituant un moyen de cassation.

Dès lors, il est apparent que la Cour d’appel de Luxembourg a commis une violation sinon une fausse interprétation, sinon encore une fausse application de l’article 1134 du Code civil en ne reconnaissant pas la force obligatoire du contrat signé entre les parties.

L’arrêt doit encourir la cassation de ce chef.

2e branche du moyen La Cour d’appel a fait une application fausse et erronée des articles 552 et 553 du Code civil en retenant que la maison construite sur le terrain apporté à la société d'acquêts appartenait également à la communauté en vertu des dispositions des articles 552 et 553 du Code civil.

L'accession est un mécanisme juridique autonome qui n'est pas d'ordre public, et auquel les parties peuvent parfaitement déroger.

Aux termes du contrat de mariage des parties :

d'adjoindre à la séparation de biens une société ou communauté d'acquêts qui comprendra uniquement les biens meubles et immeubles que les époux déclarent expressément vouloir acquérir pour compte de la communauté d'acquêts, à l'exclusion de toute autre acquisition à quelque titre qu'elle soit. » Ainsi, la Cour d'appel a commis une erreur manifeste de droit en ne reconnaissant pas que la présomption tirée de l'article 553 du Code civil avait expressément été écartée par les parties.

La Cour d'appel a limité son analyse aux conditions d'application des articles 552 et 553 du Code civil, et à la question de savoir qui avait financé la construction de la maison en considérant que le 19 décembre 1997 pour financer la construction de la maison et le contrat de construction versé aux débats, daté du 9 octobre 1997 et établi au nom de PERSONNE1.) seul, n'étant pas signé, la présomption de l'article 553 du Code civil précitée ne se trouve pas renversée en l'occurrence ».

Dans l’analyse du contrat de mariage, la Cour d'appel se contente de relever que .

Cependant, la partie demanderesse en cassation avait invoqué les dispositions du contrat de mariage afin de faire reconnaître, dans un premier temps, que celui-ci lui confère un droit de superficie, mais également, dans un second temps, afin de faire reconnaître que les dispositions du contrat de mariage excluaient explicitement l'application des articles 552 et 553 du Code civil.

Or, si la Cour d'appel écarte la possibilité d'un droit de superficie en faveur de Monsieur PERSONNE1.), elle ne fait par la suite aucune analyse du contenu du contrat de mariage notamment sur la question de savoir si les articles 552 et 553 du Code civil pouvaient ou non s'appliquer en l'espèce en faveur de la société d'acquêts face aux dispositions pourtant claires du contrat de mariage.

Afin de déterminer si la présomption de l'article 553 du Code civil se trouve renversée ou non, la Cour d'appel aurait dû rechercher si cette présomption n'avait pas expressément été écartée par les parties dans leur contrat de mariage, et notamment au regard des dispositions du contrat précitées.

Dès lors, il est apparent que la Cour d’appel de Luxembourg a commis une violation sinon une fausse interprétation, sinon encore une fausse application des articles 552 et 553 du Code civil en ne recherchant pas si les parties n'avaient pas expressément écarté l'application de ces articles.

L’arrêt doit encourir la cassation de ce chef. ».

Réponse de la Cour Sur la première branche du moyen Sous le couvert du grief tiré de la violation de la disposition visée au moyen, celui-ci ne tend qu’à remettre en discussion l’appréciation, par les juges du fond, à défaut de précision du contrat de mariage quant au sort de la maison à construire sur le terrain apporté par le demandeur en cassation en communauté d’acquêts, des éléments de fait qui les ont déterminés à retenir que celle-ci participait en application du droit d’accession au caractère commun dudit terrain, appréciation qui relève de leur pouvoir souverain et échappe au contrôle de la Cour de cassation.

Il s’ensuit que le moyen, pris en sa première branche, ne saurait être accueilli.

Sur la seconde branche du moyen En convenant d’adjoindre à leur régime de séparation de biens une communauté d’acquêts et d’y apporter un terrain propre au demandeur en cassation, acquis pour l’avoir reçu par donation le même jour, pourvu de l’autorisation d’y construire une maison, et ayant précisé dans l’acte portant modification de leur régime matrimonial que le demandeur en cassation voulait y entamer sans retard la construction d’une maison, les parties avaient entendu conférer à la maison à construire le même caractère qu’au terrain existant apporté en communauté.

Les juges d’appel n’ont partant pas violé les dispositions visées au moyen.

Il s’ensuit que le moyen, pris en sa seconde branche, n’est pas fondé.

Sur le troisième moyen de cassation qui est préalable Enoncé du moyen « Tiré de la violation de l’article 89 de la Constitution et de l’article 249, alinéa 1er, du Nouveau Code de procédure civile.

Attendu que l’article 89 de la Constitution prévoit que être motivé. Il est prononcé en audience publique. ».

Et que l’article 249 alinéa 1er du Nouveau Code de procédure civile prévoit que .

La Cour d’appel a ainsi violé les articles 89 de la Constitution et 249 du Nouveau Code de procédure civile en ne répondant pas aux moyens invoqués par Monsieur PERSONNE1.).

Lesdits articles font obligation aux jugements d’être motivés sous peine de nullité.

La Cour de cassation française estime d’ailleurs que exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens. » (Arrêt du 9 avril 2014 (n° de pourvoi 12-25928) - Cour de cassation française - 1re chambre civile -ECLI:FR:CCASS:2014:C100407 ).

Ainsi, il incombe aux juges de motiver leurs décisions en répondant à tous les moyens exposés et toutes les prétentions invoquées par les parties.

Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motif qui est un vice de forme, de sorte que la lacune qui entache l’arrêt suffit à sa cassation.

Dans la présente affaire, la Cour d’appel a violé ce principe alors qu’elle n’a pas répondu aux moyens soulevés par Monsieur PERSONNE1.) quant au caractère prématuré d'une licitation en l'espèce.

Ainsi, au cours des plaidoiries, le demandeur en cassation a fait valoir :

de licitation tant que les opération de liquidation et de partage ne sont terminées.

Ainsi, avant de pouvoir procéder à la licitation de l'immeuble, il y a lieu, dans le cadre des opérations de liquidation, de répartir entre les parties les biens effectivement représentés à la liquidation de la communauté. Ce n'est que si lors des opérations de partage, la répartition des biens entres les parties devait s'avérer impossible, que la licitation doit être ordonnée.

Il a d'ailleurs été jugé dans un arrêt de la cour de cassation belge du 14 décembre 1967 "n'est pas légalement justifié l'arrêt qui ordonne la licitation, sans avoir recherché si, eu égard aux opérations de liquidation de la communauté, dont il constate qu'elles ne sont pas terminées, et à la formation des lots, il y a lieu en droit, et non en fait, au partage de l'immeuble".

Il a également été jugé que "lorsque le partage en nature, qui constitue la règle, s'avère malaisé, la loi impose la licitation des immeubles appartenant en indivision à deux époux divorcés. La jurisprudence considère que les immeubles ne sont pas commodément partageables lorsqu'ils ne sont pas d'égale valeur et qu'ils donnent lieu au paiement d'une soulte considérable ou lorsque le partage créerait une source de litige" Tribunal de première instance de Luxembourg 22 mars 1999.

En l'espèce, ce n'est nullement le cas. En effet, dans le cadre d'un partage, la partie appelante a droit à une récompense équivalente à la valeur du bien au moment du partage.

La partie concluante a également d'importantes créances à faire valoir à l'encontre de la partie intimée, de sorte que si une soulte devait être versée, elle ne représenterait qu'une petite partie de la valeur totale du bien immobilier, et serait tout à fait raisonnable.

Il a encore été jugé "Attendu que l'appelante peut être suivie en ce qu'elle fait valoir que le partage en nature constitue la règle, et que ce n'est que si le partage en nature s'avère malaisé que la loi impose, de manière impérative, la licitation des immeubles appartenant en indivision à deux conjoints divorcés ; Attendu que la vente de biens immeubles non commodément partageables n'implique pas nécessairement leur licitation préalablement à toutes autres opérations de liquidation et partage (Bruxelles 17 décembre 1986, Revue du notariat belge 1991, p. 298 et note P. De Page, et ‘Le partage judiciaire : quelques questions pratiques’, Revue op. cit. p.

238 ;; Qu'en disposant qu'il doit être procédé à la vente par licitation des biens indivis, notamment des immeubles, ‘s'ils ne sont pas commodément partageables’, les articles 827 du Code civil et 1211 du Code judiciaire entendent par les mots ‘pas commodément’ tant l'impossibilité matérielle d'un tel partage que toutes les autres circonstances de fait pouvant contribuer à cette absence de commodité (en ce sens Cass. 6 juin 1975, Pas., I, 1975, 963) ; Attendu que pour l'appréciation des biens commodément partageables il est concevable de procéder à la formation de lots à partager en tenant compte des montants d'une créance ; qu'il convient toutefois d'avoir égard au fait qu'un partage en nature suppose la constitution de lots de valeur presque égale qui ne doivent, le cas échéant, être équilibrés que par des soultes raisonnables (en ce sens Cass. 11 janvier 1985, Pas., I, 1985, 562) ; Que tel n'est pas le cas en l'espèce dès lors que l'appelante fait état d'une valeur de l'immeuble estimée en 1993 à 5 millions et demi et qu'elle ne vante qu'une créance de 206 203 francs à l'encontre de l'intimé CA Bruxelles 31 mai 1996." Partant, au regard de ce qui précède, il ne peut y avoir de licitation tant que les opérations de liquidation et de partage ne sont pas terminées. ».

Or, la cour d'appel n'a pas répondu aux moyens soulevés par la partie PERSONNE1.) dans le cadre de ses plaidoiries, et notamment à la demande à voir attendre que les opérations de liquidation et de partage soient terminées avant d'ordonner la licitation de l'immeuble.

La cour d'appel n'a pas non plus répondu à la demande de voir répartir au préalable entre les parties, dans le cadre des opérations de liquidation, les biens effectivement représentés à la liquidation de la communauté avant toute licitation.

La Cour d'appel ne prend également pas position sur la question de savoir si l’immeuble pouvait se partager commodément moyennant le paiement d'une soulte.

Dès lors, en ne répondant pas à ces arguments, la Cour d’appel a commis une violation des articles 89 de la Constitution et 249 du Nouveau Code de procédure civile.

L’arrêt attaqué a violé lesdites dispositions et doit donc être cassé. ».

Réponse de la Cour En tant que tiré de la violation de l’article 89 de la Constitution et de l’article 249, alinéa 1, du Nouveau Code de procédure civile, le moyen vise le défaut de motifs qui est un vice de forme.

Une décision judiciaire est régulière en la forme dès qu’elle comporte une motivation, expresse ou implicite, sur le point considéré.

En disant « Il se dégage des développements ci-dessus que l’immeuble d’habitation construit sur la parcelle sise à L-ADRESSE4.), forme un tout indivisible avec celle-

ci, de sorte qu’aucune partie de ce bien ne saurait faire l’objet d’un prélèvement à titre individuel.

Par ailleurs, le prélèvement n’est possible que dans la limite du montant de la créance de PERSONNE1.) qui, même restant encore à déterminer, sera nécessairement inférieur à la valeur totale de l’immeuble indivis que PERSONNE1.) évalue lui-même à 2,6 millions d’euros. Lorsque la valeur du bien à prélever est trop importante par rapport à la créance de l’époux, il convient de procéder à la licitation (CA Paris, 3 février 1969, D. 1969, somm. p. 97).

La demande de prélèvement en nature de PERSONNE1.) n’est donc pas fondée.

L’immeuble en question étant une maison unifamiliale, suivant autorisation de construire du 11 septembre 1997, et n’étant donc pas susceptible de partage en nature, le jugement du 27 octobre 2021 est à confirmer pour avoir ordonné la licitation de l’immeuble, avec construction, situé à L-ADRESSE4.). », les juges d’appel ont motivé leur décision.

Il s’ensuit que le moyen n’est pas fondé.

Sur le deuxième moyen de cassation Enoncé du moyen « Tiré de la violation des articles 826, 827, 1470 et 1476 du Code civil.

Attendu que l’article 826 du Code civil prévoit que cohéritiers peut demander sa part en nature des meubles et immeubles de la succession ; néanmoins, s'il y a des créanciers saisissants ou opposants, ou si la majorité des cohéritiers juge la vente nécessaire pour l'acquit des dettes et charges de la succession, les meubles sont vendus publiquement en la forme ordinaire. ».

Attendu que l'article 827 du Code civil prévoit que peuvent pas se partager commodément, il doit être procédé à la vente par licitation devant le tribunal. » Attendu que l'article 1470 du Code civil prévoit que compte présente un solde en faveur de la communauté, l'époux en rapporte le montant à la masse commune. S'il présente un solde en faveur de l'époux, celui-ci a le choix ou d'en exiger le paiement ou de prélever à son choix des biens parmi ceux qui sont entrés en communauté de son chef ce jusqu’à concurrence de la somme qui lui est due. » Attendu que l'article 1476 du Code civil prévoit que communauté pour tout ce qui concerne ses formes, le maintien de l'indivision et l'attribution préférentielle, la licitation des biens, les effets du partage, la garantie qui en résulte et les soultes, est soumis à toutes les règles qui sont établies au titre "Des successions" pour les partages entre cohéritiers ».

L’arrêt attaqué a violé ces dispositions légales à un triple titre, chacune des violations constituant une branche du moyen de cassation.

1re branche du moyen La cour d'appel a violé les articles 826, 827, 1470 et 1476 du Code civil en décidant que lorsque la valeur d'un bien à prélever est trop importante par rapport à la créance de l'époux, il convient de procéder à la licitation, sans rechercher si l'immeuble était commodément partageable au regard de l'intégralité des biens et créances des parties, et donc sans connaître la valeur de la créance de l'époux.

La cour d'appel a dans son arrêt du 22 juin 2022 violé les articles 826, 827, 1470 et 1476 du Code civil en décidant que Par ailleurs, le prélèvement n'est possible que dans la limite du montant de la créance de PERSONNE1.) qui, même restant encore à déterminer, sera nécessairement inférieur à la valeur totale de l'immeuble indivis que PERSONNE1.) évalue lui-même à 2,6 millions d'euros. Lorsque la valeur d'un bien à prélever est trop importante par rapport à la créance de l'époux, il convient de procéder à la licitation ».

Selon la jurisprudence partage des immeubles. Si ledit partage ne peut se faire commodément, il est procédé à la vente par licitation. Mises à part les particularités concernant l'attribution préférentielle et la viabilité économique d'une exploitation, la seule appréciation à faire par les juridictions est de savoir si les immeubles ne peuvent pas se partager commodément ». CA 2/07/2003 rôle n°23548-25652 La partie demanderesse en cassation a fait valoir que le partage commode ou non de l'immeuble devait se déterminer en fonction de l'intégralité des biens, meubles, immeubles, créances et dettes, représentés lors de la liquidation de la communauté.

Monsieur PERSONNE1.) avait ainsi fait valoir lors des plaidoiries que .

Il a d'ailleurs été jugé dans un arrêt de la Cour de cassation belge du 14 décembre 1967 .

En l'espèce, les opérations de liquidation et de partage n'ont même pas encore débutées, et la Cour d'appel, comme plaidé devant elle, aurait dû procéder à la nomination d'un notaire afin de procéder aux opérations de liquidation et de partage, et à la formation de lots à répartir.

Ce n'est que si le partage, et la formation de lots s'avèrent impossible, que la licitation doit-être ordonnée.

Dans ce même arrêt, il a été jugé que devait être procédé à la vente de cet immeuble, l'arrêt, sans décider préalablement s'il y a lieu de répartir entre les époux les biens effectivement représentés à la liquidation de la communauté, se borne à relever qu'étant le seul qui soit reproduit, ledit immeuble nécessairement ne peut se partager commodément ;

Attendu que l'arrêt a ainsi violé les articles 826, 827 et 1476 du Code civil. » Ainsi, avant d'ordonner la licitation de l'immeuble sis à L-ADRESSE3.), le juge aux affaires familiales, et la Cour d'appel, auraient dû vérifier s'il était possible de répartir entre les époux les biens, dettes, et créances des parties, représentés lors de la liquidation.

En l'espèce, le contrat de mariage prévoit une stipulation spécifique à la dissolution de la société d’acquêts : . (article 6 in fine) Par ailleurs, le jugement du 27 octobre 2021 fait remonter les effets du divorce au 1er septembre 2019. Or, à compter de cette date, Monsieur PERSONNE1.) est le seul à avoir procédé au remboursement du prêt immobilier, et de toutes les dépenses afférentes à la maison, faits non contestés par la partie adverse.

Monsieur PERSONNE1.) a encore d'autres créances à faire valoir à l'égard de Madame PERSONNE2.), notamment au titre de donations lui consenties durant le mariage.

Ainsi, Monsieur PERSONNE1.) peut faire valoir une créance comprenant la valeur totale de ses récompenses au moment du partage, qui devrait couvrir l'intégralité de l'immeuble, terrain et maison, sinon à minima la valeur du terrain au moment du partage et la moitié de la valeur de la construction, ainsi que les paiements faits après la séparation des parties le 1er septembre 2019, les dépenses effectuées pour l'entretien et l'amélioration de la maison, et les donations consenties à Mme PERSONNE2.).

En se bornant à prononcer la licitation de l'immeuble, sans vérifier si l'immeuble était commodément partageable au regard de l'intégralité des biens et créances des parties, la Cour d'appel a violé les articles 826, 827, 1470 et 1476 du Code civil.

L'arrêt doit encourir la cassation de ce chef.

2e branche du moyen Tiré de la violation de l'article 1470 du Code civil.

La cour d'appel a violé l'article 1470 du Code civil en décidant que lorsque la valeur d'un bien à prélever est trop importante par rapport à la créance de l'époux, il convient de procéder à la licitation, sans vérifier cependant la valeur du bien à prélever, ni le montant de la créance de PERSONNE1.).

Dans son arrêt du 22 juin 2022, la Cour d'appel a jugé que le prélèvement n'est possible que dans la limite du montant de la créance de PERSONNE1.) qui, même restant encore à déterminer, sera nécessairement inférieur à la valeur totale de l'immeuble indivis que PERSONNE1.) évalue lui-même à 2,6 millions d'euros. Lorsque la valeur d'un bien à prélever est trop importante par rapport à la créance de l'époux, il convient de procéder à la licitation ».

En statuant ainsi, la Cour d'appel ne tire pas les conséquences de ses propres constations.

En effet, on ne peut juger que lorsque la valeur d'un bien à prélever est trop importante par rapport à la créance de l'époux, il convient de procéder à la licitation, sans connaître ni la valeur du bien à prélever, ni le montant de la créance de l'époux.

La Cour d'appel ne pouvait décider que la valeur de la créance de Monsieur PERSONNE1.) sera nécessairement inférieure à la valeur totale de l'immeuble, sans statuer au préalable sur la valeur de l'immeuble, et le montant de la créance de Monsieur PERSONNE1.).

La Cour d'appel aurait dû, comme demandé par Monsieur PERSONNE1.), nommer un notaire afin de procéder aux opérations de liquidation et de partage, afin de déterminer le montant de la créance de Monsieur PERSONNE1.) au regard de la valeur de l'immeuble.

Dès lors, en ne vérifiant pas le montant de la créance de l'époux au regard de la valeur du bien indivis avant d’ordonner la licitation de l'immeuble, la Cour d'appel de Luxembourg a commis une violation, sinon une fausse interprétation, sinon encore une fausse application de l'article 1470 du Code civil, de sorte que l'arrêt du 22 juin 2022 encourt la cassation de ce chef.

3e branche du moyen La cour d'appel a violé les articles 827 et 1470 du Code civil en décidant que lorsque la valeur d'un bien à prélever est trop importante par rapport à la créance de l'époux, il convient de procéder à la licitation, sans rechercher si l'immeuble pouvait se partager commodément moyennant le paiement d'une soulte.

Ainsi, la Cour d'appel a jugé que civil "Si, balance faite, le compte présente un solde en faveur de la communauté, l'époux en rapporte le montant à la masse commune. S'il présente un solde en faveur de l'époux, celui-ci a le choix ou d'en exiger le paiement ou de prélever à son choix des biens parmi ceux qui sont entrés en communauté de son chef ce jusqu’à concurrence de la somme qui lui est due." Il se dégage des développements ci-dessus que l'immeuble d'habitation construit sur la parcelle sise à L-ADRESSE3.), forme un tout indivisible avec celle-

ci, de sorte qu'aucune partie de ce bien ne saurait faire l'objet d'un prélèvement à titre individuel.

Par ailleurs, le prélèvement n'est possible que dans la limite du montant de la créance de PERSONNE1.) qui, même restant encore à déterminer, sera nécessairement inférieur à la valeur totale de l'immeuble indivis que PERSONNE1.) évalue lui-même à 2,6 millions d'euros. Lorsque la valeur d'un bien à prélever est trop importante par rapport à la créance de l'époux, il convient de procéder à la licitation ».

En l'espèce, le contrat de mariage prévoit une stipulation spécifique à la dissolution de la société d’acquêts : . (article 6 in fine) Ainsi, comme développé dans la première branche du moyen, Monsieur PERSONNE1.) peut faire valoir une créance comprenant la valeur totale de ses récompenses au moment du partage, qui devrait couvrir l'intégralité de l'immeuble, terrain et maison, sinon à minima la valeur du terrain au moment du partage et la moitié de la valeur de la construction, ainsi que les paiement faits après la séparation des parties le 1er septembre 2019, les dépenses effectués pour l'entretien et l'amélioration de la maison, les donations consenties à Mme PERSONNE2.).

Contrairement à ce qui a été décidé par la Cour d'appel, la valeur de l'immeuble sis à L-ADRESSE3.) n'est pas trop importante au regard de la créance de l'époux.

Bien au contraire, ces deux valeurs sont égales, sinon se rapprochent et le partage du régime matrimonial ne nécessite aucunement la licitation de l'immeuble, mais le partage peut se faire moyennant le paiement d'une soulte, s'il y a lieu, correspondant à la part de Madame PERSONNE2.) dans le financement de la construction de la maison, déduction faite des montants revenant à Monsieur PERSONNE1.).

Il a également été jugé que règle, s'avère malaisé, la loi impose la licitation des immeubles appartenant en indivision à deux époux divorcés. La jurisprudence considère que les immeubles ne sont pas commodément partageable lorsqu'ils ne sont pas d'égale valeur et qu'ils donnent lieu au paiement d'une soulte considérable ou lorsque le partage créerait une source de litige” Tribunal de première instance de Luxembourg 22 mars 1999 ».

En l'espèce, afin de déterminer si l'immeuble est ou non commodément partageable, la Cour d'appel aurait dû vérifier si au regard des articles 872 et 1470 du Code civil, comme l'a fait valoir la partie demanderesse, le partage pouvait se faire moyennant le paiement d'une soulte, s'il y a lieu, dont la valeur est à déterminer en fonctions de l'intégralité des biens représentés à la liquidation, ainsi que des droits de chaque partie.

Dès lors, en statuant comme elle l'a fait, sans vérifier si le partage pouvait se faire moyennant le paiement d'une soulte, la Cour d'appel de Luxembourg a commis une violation sinon une fausse interprétation, sinon encore une fausse application des articles 872 et 1470, de sorte que l'arrêt du 22 juin 2022 encourt la cassation de ce chef. ».

Réponse de la Cour Sur les trois branches réunies du moyen Vu l’article 1470 du Code civil qui dispose « Si, balance faite, le compte présente un solde en faveur de la communauté, le conjoint en rapporte le montant à la masse commune.

S'il présente un solde en faveur du conjoint, celui-ci a le choix ou d'en exiger le paiement ou de prélever à son choix des biens parmi ceux qui sont entrés en communauté de son chef ce jusqu'à concurrence de la somme qui lui est due. » En se déterminant par les motifs reproduits dans le cadre de la réponse au troisième moyen pour rejeter la demande du demandeur en cassation en prélèvement du terrain apporté en communauté par lui et pour ordonner la licitation du bien immobilier constitué par le terrain à bâtir et la maison d’habitation, sans qu’il n’eût été procédé au préalable à l’établissement d’un compte des récompenses, les juges d’appel ont violé l’article 1470 du Code civil visé au moyen.

Il s’ensuit que l’arrêt encourt la cassation.

Sur la demande en allocation d’une indemnité de procédure La défenderesse en cassation étant à condamner aux dépens de l’instance en cassation, sa demande en allocation d’une indemnité de procédure est à rejeter.

PAR CES MOTIFS, la Cour de cassation casse et annule l’arrêt attaqué, numéro 135/22-I-DIV (aff.fam.), rendu le 22 juin 2022 sous le numéro CAL-2021-01188 du rôle par la Cour d’appel du Grand-

Duché de Luxembourg, première chambre, siégeant en matière civile, en ce qu’il a rejeté la demande en prélèvement en nature du terrain apporté en communauté d’acquêts par le demandeur en cassation et en ce qu’il a d’ores et déjà ordonné la licitation du bien immobilier constitué par ce terrain à bâtir et la maison d’habitation y érigée ;

dans cette mesure, déclare nuls et de nul effet ladite décision judiciaire et les actes qui s’en sont suivis, remet les parties dans l’état où elles se sont trouvées avant l’arrêt cassé et pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg, autrement composée ;

rejette la demande de la défenderesse en cassation en allocation d’une indemnité de procédure ;

la condamne aux dépens de l’instance en cassation avec distraction au profit de Maître Hanan GANA-MOUDACHE, sur ses affirmations de droit, ordonne qu’à la diligence du procureur général d’Etat, le présent arrêt soit transcrit sur le registre de la Cour d’appel du Grand-Duché de Luxembourg et qu’une mention renvoyant à la transcription de l’arrêt soit consignée en marge de la minute de l’arrêt annulé.

La lecture du présent arrêt a été faite en la susdite audience publique par le conseiller Théa HARLES-WALCH en présence de l’avocat général Bob PIRON et du greffier en chef Viviane PROBST.

Conclusions du Parquet Général dans l’affaire de cassation PERSONNE1.) contre PERSONNE2.) (CAS-2022-00095) Le pourvoi en cassation, introduit par PERSONNE1.) (ci-après PERSONNE1.)) par un mémoire en cassation signifié le 17 août 2022 à la défenderesse en cassation et déposé au greffe de la Cour Supérieure de Justice le 1er septembre 2022, est dirigé contre un arrêt n° 135/22 rendu par la Cour d’appel, première chambre, siégeant en matière civile, statuant contradictoirement, en date du 22 juin 2022 (n° CAL-2021-01188 du rôle). Cet arrêt a été signifié au demandeur en cassation en date du 4 juillet 2022.

La partie défenderesse en cassation a signifié un mémoire en réponse le 6 septembre 2022 et elle l’a déposé au greffe de la Cour le 14 septembre 2022.

Ayant été signifié et déposé au greffe de la Cour dans le délai de deux mois à compter du jour de la signification du mémoire en cassation, conformément aux articles 15 et 16 de la loi précitée du 18 février 1885, ce mémoire est à considérer comme recevable.

Le demandeur en cassation a signifié un nouveau mémoire le 17 octobre 2022 et l’a déposé au greffe de la Cour le 4 novembre 2022. Conformément à l’article 17 de la loi du 18 février 1885 sur les pourvois et la procédure en cassation, ce mémoire est recevable en ce qu’il a pris position sur l’irrecevabilité du pourvoi soulevée par le mémoire en réponse, mais irrecevable pour le surplus.

Sur les faits et antécédents :

Les parties ont contracté mariage le 20 juillet 1991. Par acte notarié du 11 juillet, ils ont adopté le régime matrimonial de la séparation de biens de droit luxembourgeois.

Par acte notarié du 27 octobre 1997, les parties ont modifié leur contrat de mariage par l’adjonction d’une communauté ou société d’acquêts. L’article 5 stipule que « les époux conviennent d’adjoindre à la séparation de biens une société ou communauté d’acquêts qui comprendra uniquement les biens meubles et immeubles que les époux déclarent expressément vouloir acquérir pour compte de la communauté d’acquêts, à l’exclusion de toute autre acquisition à quelque titre que ce soit ».

Aux termes de l’article 7 du contrat de mariage modificatif, le demandeur en cassation déclare apporter dans la société d’acquêts le terrain à bâtir qu’il vient d’acquérir de ses parents par acte de donation du même jour.

L’article 6 in fine dispose qu’«en cas de dissolution de de la société d’acquêts pour toute autre cause que le décès de l’un des époux, les biens faisant partie de la société d’acquêts seront partagés par parts égales entre les deux époux, sauf récompense au profit de l’époux qui a apporté un bien qui lui appartenait en propre dans la communauté d’acquêts pour la valeur du bien au jour du partage».

Un jugement contradictoire du 27 octobre 2021 rendu par le juge aux affaires familiales près le tribunal d’arrondissement de Luxembourg a dit la demande en divorce de PERSONNE2.) sur base de l’article 232 du code civil recevable et fondée; partant a prononcé le divorce entre PERSONNE2.) et PERSONNE1.); a dit qu’il sera procédé à la liquidation et au partage de l’indivision existant entre parties; a ordonné la licitation de l’immeuble indivis et a commis un notaire à ces fins.

Le demandeur en cassation a relevé appel de ce jugement suivant requête déposée au greffe de la Cour d’appel le 17 décembre 2021 et signifiée à la défenderesse en cassation par exploit d’huissier de justice du 3 janvier 2022.

Par arrêt du 22 juin 2022, la Cour d’appel :

« reçoit l’appel, dit qu’il n’y a pas lieu de verser des conclusions écrites, dit l’appel non fondé, confirme le jugement du 27 octobre 2021 dans la mesure où il est entrepris, condamne PERSONNE1.) aux frais et dépens de l’instance d’appel. » Cet arrêt fait l’objet du présent pourvoi.

Sur la recevabilité du pourvoi :

La défenderesse en cassation soulève l’irrecevabilité du pourvoi en cassation au motif que le demandeur en cassation ne soumettrait pas à Votre Cour le dispositif du jugement du 27 octobre 2021, qui a été intégralement confirmé par l’arrêt dont pourvoi.

Aucune disposition légale n’exige la production par la partie demanderesse en cassation de la décision de première instance confirmée en appel. L’arrêt attaqué reprend entièrement le dispositif du jugement de première instance1 et le demandeur en cassation verse le jugement de première instance dans sa farde de pièces.2 1 pages 1-2 de l’arrêt du 22 juin 2022 2 Pièce I.2 Le moyen d’irrecevabilité n’est pas fondé.

Sur le premier moyen de cassation :

Le premier moyen de cassation est tiré de la violation, sinon de la fausse interprétation, sinon encore de la fausse application des articles 1134, 552 et 553 du Code civil.

Le moyen est articulé en deux branches :

- La première branche est tirée de la violation sinon de la fausse interprétation, sinon encore de la fausse application de l’article 1134 du Code civil et reproche à la Cour d’appel de ne pas avoir reconnu la force obligatoire du contrat signé entre les parties - La deuxième branche est tirée de l’application fausse et erronée des articles 552 et 553 du Code civil et reproche à la Cour d’appel de ne pas avoir recherché si les parties n’avaient pas expressément écarté l’application de ces articles Sur les deux branches réunies:

Attendu que, sous le couvert du grief d’une violation des articles 1134, 552 et 553 du Code civil, les deux branches ne tendent qu’à remettre en discussion l’interprétation, par les juges du fond, des stipulations de l’acte notarié et leur application aux faits, en ce qu’ils ont décidé qu’il ne ressort pas des stipulations du contrat de mariage que l’accession au profit du patrimoine commun serait exclue et que le demandeur en cassation se verrait accorder un droit de superficie sur le terrain apporté en communauté.

Cette interprétation relève du pouvoir souverain des juges du fond et échappe au contrôle de la Cour de cassation, de sorte que les deux branches du moyen ne sauraient être accueillies.

Sur le deuxième moyen de cassation :

Le deuxième moyen de cassation est tiré de la violation des articles 826, 827, 1470 et 1476 du Code civil.

Le moyen est articulé en trois branches :

- La première branche est tirée de la violation articles 826, 827, 1470 et 1476 du Code civil et fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir ordonné la licitation de l’immeuble sans rechercher si celui-ci est commodément partageable, et plus particulièrement sans connaître la valeur de la créance du demandeur en cassation - La deuxième branche est tirée de la violation de l’article 1470 du Code civil et fait grief à l’arrêt entrepris d’avoir ordonné la licitation de l’immeuble sans avoir vérifié, ni la valeur du bien à prélever par le demandeur en cassation, ni le montant de sa créance - La troisième branche est tirée de la violation des articles 827 et 1470 du Code civil et reproche à l’arrêt dont pourvoi d’avoir ordonné la licitation de l’immeuble sans avoir recherché si l’immeuble pouvait se partager commodément moyennant le paiement d’une soulte Sur les trois branches réunies :

Le demandeur en cassation fait grief à l’arrêt entrepris d’avoir décidé que lorsque la valeur d’un bien à prélever est trop importante par rapport à la créance de l’époux, il convient de procéder à la licitation, sans rechercher si l’immeuble était commodément partageable au regard de l’intégralité des biens et créances des parties.

Dans l’arrêt dont pourvoi, les juges d’appel ont retenu que :

« il se dégage des développements ci-dessus que l’immeuble d’habitation construit sur la parcelle sise à […], forme un tout indivisible avec celle-ci, de sorte qu’aucune partie de ce bien ne saurait faire l’objet d’un prélèvement à titre individuel.

Par ailleurs, le prélèvement n’est possible que dans la limite du montant de la créance de PERSONNE1.) qui, même restant encore à déterminer, sera nécessairement inférieur à la valeur totale de l’immeuble indivis que PERSONNE1.) évalue lui-même à 2,6 millions d’euros. Lorsque la valeur du bien à prélever est trop importante par rapport à la créance de l’époux, il convient de procéder à la licitation (CA Paris, 3 février 1969, D. 1969, somm. p. 97).

La demande de prélèvement en nature de PERSONNE1.) n’est donc pas fondée.

L’immeuble en question étant une maison unifamiliale, suivant autorisation de construire du 11 septembre 1997, et n’étant donc pas susceptible de partage en nature, le jugement du 27 octobre 2021 est à confirmer pour avoir ordonné la licitation de l’immeuble, avec construction, situé à […] » La Cour d’appel n’a pas donc non seulement retenu que l’immeuble n’est pas susceptible de partage en nature, mais également que le montant de la créance de l’époux, même restant à déterminer, sera nécessairement inférieur à la valeur totale de l’immeuble indivis.

L’arrêt attaqué a donc bien pris en compte la créance de l’époux et la valeur du bien à prélever pour décider qu’il convenait d’ordonner la licitation de l’immeuble en question.

Le moyen n’est pas fondé.

Subsidiairement :

Sous le couvert de la violation des dispositions visées au moyen, le demandeur en cassation entend remettre en discussion l’appréciation pas les juges du fond du rapport existant entre la créance de l’époux et la valeur du bien à prélever.

Cette appréciation relève du pouvoir souverain des juges du fond et échappe au contrôle de la Cour de cassation, de sorte que les trois branches du moyen ne sauraient être accueillies.

Sur le troisième moyen de cassation :

Le troisième moyen de cassation est tiré de la violation des articles 89 de la Constitution et 249, alinéa 1er, du Nouveau code de procédure civile pour absence de réponse à conclusions.

Le moyen reproche à l’arrêt attaqué de ne pas avoir répondu aux moyens soulevés par le demandeur en cassation quant au caractère prématuré d’une licitation.

En tant que tiré de la violation de l’article 89 de la Constitution, et de l’article 249 du Nouveau Code de procédure le moyen vise le défaut de motif qui est un vice de forme.

Une décision judiciaire est régulière en la forme dès qu’elle comporte une motivation, expresse ou implicite, sur le point considéré.

Par les motifs cités au deuxième moyen, les juges d’appel ont clairement exposé pourquoi la licitation de l’immeuble s’imposait, même si le montant exact de créance de demandeur en cassation restait encore à déterminer.

La décision entreprise est partant motivée sur le point en question.

Le moyen n’est pas fondé.

Conclusion Le pourvoi est recevable, mais non fondé.

Pour le Procureur Général d’Etat, Le premier avocat général Marie-Jeanne Kappweiler 23


Synthèse
Numéro d'arrêt : 57/23
Date de la décision : 25/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/05/2023
Identifiant URN:LEX : urn:lex;lu;cour.administrative;arret;2023-05-25;57.23 ?

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award