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10/02/2022 | FRANCE | N°20-18938

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 10 février 2022, 20-18938


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 février 2022

Cassation partielle

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 188 F-D

Pourvoi n° Y 20-18.938

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 FÉVRIER 2022

M. [T] [P], domicilié [Adresse 4],

En prés

ence de :

1°/ M. [L] [P], domicilié [Adresse 1],

2°/ Mme [F] [P], épouse [X], domiciliée [Adresse 2],

a formé le pourvoi n° Y 20-18.938 contre l'arrê...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 2

LM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 10 février 2022

Cassation partielle

M. PIREYRE, président

Arrêt n° 188 F-D

Pourvoi n° Y 20-18.938

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 FÉVRIER 2022

M. [T] [P], domicilié [Adresse 4],

En présence de :

1°/ M. [L] [P], domicilié [Adresse 1],

2°/ Mme [F] [P], épouse [X], domiciliée [Adresse 2],

a formé le pourvoi n° Y 20-18.938 contre l'arrêt rendu le 23 juin 2020 par la cour d'appel de Poitiers (1re chambre civile), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société MAAF, société anonyme, dont le siège est [Adresse 5],

2°/ à la caisse primaire d'assurance maladie de la Charente-Maritime, dont le siège est [Adresse 3],

défenderesses à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Pradel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Le Bret-Desaché, avocat de M. [T] [P], M. [L] [P] et Mme [F] [P], de Me Le Prado, avocat de la société MAAF, après débats en l'audience publique du 4 janvier 2022 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Pradel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Leroy-Gissinger, conseiller doyen, et M. Carrasco, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 23 juin 2020), le 29 décembre 1998, le véhicule de M. [K], assuré auprès de la société MAAF a percuté celui conduit par M. [P].

2. M. [P] a saisi un tribunal de grande instance aux fins d'être indemnisé de ses préjudices.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. M. [P] fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande concernant sa perte de gains professionnels actuels, alors :

« 1°/ que victime d'un dommage doit être intégralement indemnisée de celui-ci ; qu'en ayant retenu pour rejeter la demande de réparation concernant la perte de gains professionnels actuels (ou temporaires que M. [P] ne rapportait pas la preuve de son affirmation selon laquelle il avait subi une perte de revenu alors qu'il était indéniable qu'il exerçait au moment de son accident une activité professionnelle d'agent de liaison pour un tour operator au titre d'un contrat à durée déterminée et qu'il avait subi une incapacité temporaire de travail de 120 jours puis un nouvel arrêt de travail de 15 jours à la suite d'une nouvelle intervention chirurgicale du 21 décembre 2013 d'où il résultait nécessairement la réalité d'un préjudice économique, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil devenu l'article 1240 du même code ;

2°/ qu'il résulte des propres constatations de la cour que le rapport d'expertise judiciaire du Docteur [S] de septembre 2010 (en réalité du 18 août 2010) mentionnait qu'un « document listant les rémunérations obtenues par M. [P] de 1995 à aujourd'hui » (en réalité 2008) « a été communiqué à l'expert » et figurait en annexe en pièce n° 6 ; qu'en énonçant cependant pour débouter M. [P] de ce chef de préjudice qu'il ne fournissait ni justificatif ni élément permettant d'apprécier le principe même de la perte de gains qu'il alléguait quand la cour a elle-même constaté que ces pièces avaient été communiquées à l'expert [S] et figuraient en conséquence dans le rapport soumis au tribunal, la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles 16 et 132 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

4. C'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel, qui a souverainement constaté que M. [P] ne fournissait aucun justificatif permettant d'apprécier les revenus qui étaient les siens avant l'accident, en a déduit qu'il ne pouvait prétendre à une indemnisation au titre du préjudice de perte de gains professionnels actuels.

5. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

6. M. [P] fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande concernant sa perte de gains professionnels futurs, alors :

« 1°/ que dans ses conclusions d'appel, M. [P] avait rappelé qu'il résultait du rapport d'expertise de [V] [D] du 10 février 2017 que celle-ci avait considéré qu'il ne pouvait plus travailler à plein temps ; qu'elle avait quantifié la réduction du temps de travail à 43 % ; qu'en effet son activité professionnelle devait être « adaptée à ses handicaps : déplacements limités, défaut de concentration et troubles de la thymie rendant les relations avec autrui plus difficiles » ; qu'en refusant toute indemnité au titre des pertes de gains professionnels futurs motifs pris qu'il n'était pas démontré que la reprise se serait faite à temps partiel ou à des conditions dégradées et en tout cas moins rémunératrices, sans répondre auxdites conclusions qui étaient de nature à démontrer que M. [P] était, preuve à l'appui, et en raison de l'aggravation des séquelles notamment cognitives de l'accident, dans l'incapacité actuelle d'exercer un travail à temps plein comme l'avait constaté l'expert judiciaire [D] dans son rapport du 10 février 2017 et dans son email du 20 juin 2017, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que dans ses conclusions d'appel, M. [P] avait fait valoir qu'entre la date de l'accident (28 décembre 1998) et celle de la consolidation, il s'était déroulé 15 ans au cours desquels les séquelles cognitives s'étaient aggravées en raison de son traumatisme crânien de telle sorte qu'il était totalement inopérant de prendre en compte sa situation professionnelle antérieure à 1998 ; qu'il fallait prendre en compte sa situation à compter de 2008 ; que l'expert judiciaire [D] avait quantifié dans son email du 20 juin 2017 la réduction du temps de travail de M. [P] à 43 % ; que ses avis d'imposition produit aux débats démontraient qu'il avait déclaré en moyenne 15.000 euros par an, bien au deçà de la rémunération annuelle d'un agent immobilier ; qu'en travaillant à son rythme, selon l'expert judiciaire [D], à 57 % du temps de travail légal d'heures travaillés, il subissait une perte annuelle de 11.315 euros par an, ce qui correspondait à une réduction du temps de travail de 43 % de telle sorte qu'il y avait lieu de se référer au barème de capitalisation de 2018 en retenant le taux de 33,713 applicable à un homme de 42 ans soit, 381 462,59 euros (11 315 x 33 713) ; qu'en se bornant à énoncer par des motifs inopérants que M. [P] ne fournissait aucun élément sur ses revenus avant l'accident sans répondre auxdites conclusions qui étaient de nature à influer sur la décision entreprise et à démontrer qu'en raison de l'aggravation de ses séquelles, M. [P] était dans l'incapacité désormais d'exercer une activité à temps plein, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ qu'en tout état de cause, il résulte des propres constatations de la cour que le rapport d'expertise judiciaire du Docteur [S] de septembre 2010 (en réalité du 18 août 2010) mentionnait qu'un « document listant les rémunérations obtenues par M. [P] de 1995 à aujourd'hui » (en réalité 2008) « a été communiqué à l'expert » et figurait en annexe en pièce n° 6 ; qu'en énonçant cependant pour débouter M. [P] de ce chef de préjudice qu'en l'absence de justificatifs de ses revenus antérieurs la preuve d'une perte de gains professionnels futurs qu'il alléguait n'était pas rapportée quand la cour a elle-même constaté que ces pièces avaient été communiquées à l'expert [S] et figuraient en conséquence dans le rapport soumis au tribunal, la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles 16 et 132 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

7. C'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, et qui a souverainement relevé que M. [P] ne justifiait pas de ses revenus antérieurs, et ne démontrait pas que la reprise de son activité professionnelle se serait faite à des conditions moins rémunératrices, en a déduit qu'il ne justifiait pas d'une perte de gains professionnels futurs.

8. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé.

Mais sur le troisième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

9. M. [P] fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande concernant son préjudice esthétique temporaire, alors « que le préjudice esthétique subi par la victime, lequel constitue un poste à part entière et est destiné à indemniser la rupture de son apparence physique, de sa gestuelle et de sa démarche, constitue bel et bien pour la période antérieure à la date de consolidation, et ce indépendamment des souffrances d'ordre moral subies par la victime du fait de son état, un préjudice de caractère objectif dont les juges ne peuvent refuser la réparation, dès lors qu'ils en constatent la réalité ; qu'en l'espèce, la cour a constaté l'existence d'une altération de l'apparence de la victime avant la date de la consolidation de son état de santé, à savoir une boiterie et des cicatrices dont deux au niveau de la face ; qu'en déboutant néanmoins M. [P] de sa demande d'indemnisation au titre du préjudice esthétique temporaire, motif pris que la boiterie et les cicatrices évoquées par la victime n'en relevaient pas la cour d'appel, qui a pourtant retenu une préjudice esthétique permanent, a violé l'article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 du code civil, et le principe de l'indemnisation de l'entier préjudice subi par la victime. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1240 du code civil, et le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime :

10. Pour rejeter la demande formée par M. [P] au titre d'un préjudice esthétique temporaire, l'arrêt énonce, par motifs propres et adoptés, que la boiterie et les cicatrices évoquées par la victime, qui sont toujours présentes après consolidation, ne relèvent pas de ce poste de préjudice.

11. En statuant ainsi, alors qu'elle constatait que M. [P] présentait une boiterie et des cicatrices avant la date de la consolidation, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte et le principe susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande de M. [T] [P] au titre du préjudice esthétique temporaire, l'arrêt rendu le 23 juin 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;

Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes ;

Condamne la société MAAF aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société MAAF et la condamne à payer à M. [T] [P] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix février deux mille vingt-deux.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Le Bret-Desaché, avocat aux Conseils, pour M. [T] [P]

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:

- Monsieur [T] [P] FAIT GRIEF A l'arrêt confirmatif attaqué de l'avoir débouté de sa demande concernant sa perte de gains professionnels actuels (ou temporaires)

1°)- ALORS QUE la victime d'un dommage doit être intégralement indemnisée de celui-ci ; qu'en ayant retenu pour rejeter la demande de réparation concernant la perte de gains professionnels actuels (ou temporaires que M. [P] ne rapportait pas la preuve de son affirmation selon laquelle il avait subi une perte de revenu alors qu'il était indéniable qu'il exerçait au moment de son accident une activité professionnelle d'agent de liaison pour un tour operator au titre d'un contrat à durée déterminée et qu'il avait subi une incapacité temporaire de travail de 120 jours puis un nouvel arrêt de travail de 15 jours à la suite d'une nouvelle intervention chirurgicale du 21 décembre 2013 (cf jugement p 3 rubrique Préjudice patrimoniaux temporaires) d'où il résultait nécessairement la réalité d'un préjudice économique, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil devenu l'article 1240 du même code ;

2°)- ALORS QUE il résulte des propres constatations de la cour (cf arrêt p 7 rubrique 1.2.2) que le rapport d'expertise judiciaire du Docteur [S] de septembre 2010 (en réalité du 18 août 2010) (pièce 8) mentionnait qu'un « document listant les rémunérations obtenues par M. [P] de 1995 à aujourd'hui » (en réalité 2008) « a été communiqué à l'expert » et figurait en annexe en pièce n° 6 ; (cf rapport précité p 2 et p 5 rubrique « sur le plan professionnel ») ; qu'en énonçant cependant pour débouter M. [P] de ce chef de préjudice qu'il ne fournissait ni justificatif ni élément permettant d'apprécier le principe même de la perte de gains qu'il alléguait quand la cour a elle-même constaté que ces pièces avaient été communiquées à l'expert [S] et figuraient en conséquence dans le rapport soumis au tribunal, la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles 16 et 132 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
:

Monsieur [T] [P] FAIT GRIEF A l'arrêt confirmatif attaqué de l'avoir débouté de sa demande concernant sa perte de gains professionnels futurs (1.2.2)

1°)- ALORS QUE dans ses conclusions d'appel (p 12 point 4.1.2), M. [T] [P] avait rappelé qu'il résultait du rapport d'expertise de [V] [D] du 10 février 2017 (pièce 14) que celle-ci avait considéré en raison qu'il ne pouvait plus travailler à plein temps ; qu'elle avait quantifié la réduction du temps de travail à 43 % (pièce 17 email de l'expert judiciaire [D]) ; qu'en effet son activité professionnelle devait être « adaptée à ses handicaps : déplacements limités, défaut de concentration et troubles de la thymie rendant les relations avec autrui plus difficiles » ; qu'en refusant toute indemnité au titre des pertes de gains professionnels futurs motifs pris qu'il n'était pas démontré que la reprise se serait faite à temps partiel ou à des conditions dégradées et en tout cas moins rémunératrices, sans répondre auxdites conclusions qui étaient de nature à démontrer que M. [P] était, preuve à l'appui, et en raison de l'aggravation des séquelles notamment cognitives de l'accident, dans l'incapacité actuelle d'exercer un travail à temps plein comme l'avait constaté l'expert judiciaire [D] dans son rapport du 10 février 2017 et dans son email du 20 juin 2017, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusion en violation de l'article 455 du code de procédure civile.

2°)- ALORS QUE dans ses conclusions d'appel (p 13), M. [T] [P] avait fait valoir qu'entre la date de l'accident (28 décembre 1998) et celle de la consolidation, il s'était déroulé 15 ans au cours desquels les séquelles cognitives s'étaient aggravées en raison de son traumatisme crânien de telle sorte qu'il était totalement inopérant de prendre en compte sa situation professionnelle antérieure à 1998 ; qu'il fallait prendre en compte sa situation à compter de 2008 ; que l'expert judiciaire [D] avait quantifié dans son email du 20 juin 2017 (pièce n° 17) la réduction du temps de travail de M. [P] à 43 % ; que ses avis d'imposition produit aux débats (pièce 15) démontraient qu'il avait déclaré en moyenne 15.000 € par an, bien au deçà de la rémunération annuelle d'un agent immobilier ; qu'en travaillant à son rythme, selon l'expert judiciaire [D], à 57 % du temps de travail légal d'heures travaillés, il subissait une perte annuelle de 11.315 € par an, ce qui correspondait à une réduction du temps de travail de 43 % de telle sorte qu'il y avait lieu de se référer au barème de capitalisation de 2018 en retenant le taux de 33,713 applicable à un homme de 42 ans soit, 381.462,59 € (11.315 x 33.713) ; qu'en se bornant à énoncer par des motifs inopérants que M. [P] ne fournissait aucun élément sur ses revenus avant l'accident sans répondre auxdites conclusions qui étaient de nature à influer sur la décision entreprise et à démontrer qu'en raison de l'aggravation de ses séquelles, M. [P] était dans l'incapacité désormais d'exercer une activité à temps plein, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°)- ALORS QUE et en tout état de cause, il résulte des propres constatations de la cour (cf arrêt p 7 rubrique 1.2.2) que le rapport d'expertise judiciaire du Docteur [S] de septembre 2010 (en réalité du 18 août 2010) (pièce 8) mentionnait qu'un « document listant les rémunérations obtenues par M. [P] de 1995 à aujourd'hui » (en réalité 2008) « a été communiqué à l'expert » et figurait en annexe en pièce n° 6 ; (cf rapport précité p 2 et p 5 rubrique « sur le plan professionnel ») ; qu'en énonçant cependant pour débouter M. [P] de ce chef de préjudice qu'en l'absence de justificatifs de ses revenus antérieurs la preuve d'une perte de gains professionnels futurs qu'il alléguait n'était pas rapportée quand la cour a elle-même constaté que ces pièces avaient été communiquées à l'expert [S] et figuraient en conséquence dans le rapport soumis au tribunal, la cour n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles 16 et 132 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
:

Monsieur [T] [P] FAIT GRIEF A l'arrêt confirmatif attaqué de l'avoir débouté de sa demande concernant son préjudice esthétique temporaire (2.1.3).

1°)- ALORS QUE le préjudice esthétique subi par la victime, lequel constitue un poste à part entière et est destiné à indemniser la rupture de son apparence physique, de sa gestuelle et de sa démarche, constitue bel et bien pour la période antérieure à la date de consolidation, et ce indépendamment des souffrances d'ordre moral subies par la victime du fait de son état, un préjudice de caractère objectif dont les juges ne peuvent refuser la réparation, dès lors qu'ils en constatent la réalité ; qu'en l'espèce, la cour a constaté l'existence d'une altération de l'apparence de la victime avant la date de la consolidation de son état de santé, à savoir une boiterie et des cicatrices dont deux au niveau de la face (cf arrêt p 8 point 2.1.3 et p 9 point 2.2.2) ; qu'en déboutant néanmoins M. [T] [P] de sa demande d'indemnisation au titre du préjudice esthétique temporaire, motif pris que la boiterie et les cicatrices évoquées par la victime n'en relevaient pas la cour d'appel, qui a pourtant retenu une préjudice esthétique permanent, a violé l'article 1382 du Code civil, devenu l'article 1240 du code civil, et le principe de l'indemnisation de l'entier préjudice subi par la victime ;

2°)- ALORS QUE les juges ne sont pas astreints à suivre les conclusions des experts ; qu'en déboutant M. [P] de sa demande au titre de son préjudice esthétique temporaire au motif inopérant qu'aucun des experts n'a retenu un préjudice à ce titre, la cour d'appel a violé l'article 246 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 20-18938
Date de la décision : 10/02/2022
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers, 23 juin 2020


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 10 fév. 2022, pourvoi n°20-18938


Composition du Tribunal
Président : M. Pireyre (président)
Avocat(s) : SARL Le Prado - Gilbert, SCP Le Bret-Desaché

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2022:20.18938
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