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11/07/2018 | FRANCE | N°18-10062

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 11 juillet 2018, 18-10062


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Paris, 30 octobre 2017), et les pièces de la procédure, que M. X..., ressortissant vénézuélien, est arrivé le 22 octobre 2017 à l'aéroport de Roissy, sans être autorisé à entrer sur le territoire national et a reçu notification, d'une part, d'un refus d'admission sur le territoire français, d'autre part, d'une décision de maintien en zone d'attente, prise sur le fondement des articles L. 221-3 et R. 221-1 du

code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESED...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Paris, 30 octobre 2017), et les pièces de la procédure, que M. X..., ressortissant vénézuélien, est arrivé le 22 octobre 2017 à l'aéroport de Roissy, sans être autorisé à entrer sur le territoire national et a reçu notification, d'une part, d'un refus d'admission sur le territoire français, d'autre part, d'une décision de maintien en zone d'attente, prise sur le fondement des articles L. 221-3 et R. 221-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ; que le juge des libertés et de la détention, statuant dans une salle d'audience attribuée au ministère de la justice, a ordonné le maintien de M. X... en zone d'attente pour une durée de huit jours, après avoir reçu les interventions volontaires présentées par le Syndicat des avocats de France, l'association Groupe d'information et de soutien des immigrés, l'association la Cimade, l'Association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers, le Syndicat de la magistrature et l'association Avocats pour la défense des droits des étrangers (les parties intervenantes) ;

Sur les premier et deuxième moyens réunis :

Attendu que M. X... et les parties intervenantes font grief à l'ordonnance de confirmer son maintien en zone d'attente, alors, selon le moyen :

1°/ que le droit pour tout justiciable d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial implique que la localisation d'une salle d'audience délocalisée du palais de justice garantisse son indépendance et son impartialité ou, à tout le moins, donne l'apparence d'une justice indépendante et impartiale ; que la localisation d'une salle d'audience sur une emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire où se situe également la zone d'attente dans l'enceinte de laquelle sont maintenus les ressortissants étrangers susceptibles d'être jugés dans cette salle d'audience délocalisée ne donne pas l'apparence d'une justice indépendante et impartiale ; qu'en considérant toutefois en l'espèce que l'audience délocalisée avait été tenue dans des conditions régulières et ordonné le maintien de M. X... en zone d'attente, le premier président de la cour d'appel a violé l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ensemble les articles 5 et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 14, § 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

2°/ que, s'il devait exister un doute sur l'interprétation de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux, il appartiendrait à la Cour de cassation, conformément à l'article 267 du TFUE, de renvoyer à la Cour de justice de l'Union européenne la question préjudicielle suivante : « l'article 47, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, aux termes duquel toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant et impartial, doit-il être interprété en ce sens qu'il s'oppose à ce qu'une disposition de droit national autorise la localisation d'une salle d'audience sur une emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire où se situe également la zone d'attente dans l'enceinte de laquelle sont maintenus les ressortissants étrangers susceptibles d'être jugés dans cette salle d'audience délocalisée ? » ;

3°/ que si une salle d'audience attribuée au ministère de la justice peut être spécialement aménagée sur une emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire, elle ne peut être située dans l'enceinte de la zone d'hébergement d'une zone d'attente ; que le premier président a relevé qu'une partie des locaux d'hébergement de la zone d'attente était située à l'aplomb de l'annexe judiciaire ; qu'en outre, il résulte des pièces de la procédure et de la décision n° 2017-211 du 6 octobre 2017 du défenseur des droits que l'annexe judiciaire dans laquelle se situe la salle d'audience est accolée et pour partie imbriquée au centre d'hébergement sis sur la zone d'attente ; qu'en énonçant toutefois, pour considérer que l'audience délocalisée avait été tenue dans des conditions légales et régulières, que l'annexe judiciaire du tribunal de grande instance de Bobigny était située à proximité des locaux de la zone d'attente et non pas dans leur enceinte, lors même qu'il résultait des énonciations de la décision attaquée, de la décision du 6 octobre 2017 du défenseur des droits et des pièces de la procédure qu'elle était située dans leur enceinte, le premier président de la cour d'appel a violé l'article L. 222-4 du CESEDA lu à la lumière de la décision du 20 novembre 2003 du Conseil constitutionnel ;

4°/ que si une salle d'audience attribuée au ministère de la justice peut être spécialement aménagée sur une emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire, elle ne peut être située dans l'enceinte de la zone d'hébergement d'une zone d'attente ; que le premier président a relevé qu'une partie des locaux d'hébergement de la zone d'attente est située à l'aplomb de l'annexe judiciaire ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, pour se déterminer sur la question de savoir si l'annexe dans laquelle se situe la salle d'audience est dans l'enceinte du centre d'hébergement sis sur la zone d'attente, si elle n'est pas imbriquée à ce dernier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 222-4 du CESEDA lu à la lumière de la décision du 20 novembre 2003 du Conseil constitutionnel ;

5°/ que si une salle d'audience attribuée au ministère de la justice peut être spécialement aménagée sur une emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire, à proximité immédiate d'une zone d'attente, elle ne peut être située dans l'enceinte d'une zone d'attente, sauf à violer le droit pour tout justiciable d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial ; qu'une salle d'audience est située dans l'enceinte d'une zone d'attente dès lors qu'elle est située dans le même bâtiment qu'une partie des locaux d'hébergement d'une zone d'attente ou dans un bâtiment accolé, imbriqué à ceux-ci, de sorte que l'étranger ne peut prendre conscience qu'il quitte un lieu de privation de liberté pour entrer dans un tribunal, peu important qu'il n'existe pas de voie de communication directe entre le centre d'hébergement et les salles d'audience et le parcours permettant d'accéder de l'un à l'autre ; qu'en retenant que l'absence de communication possible entre l'annexe judiciaire du tribunal de grande instance de Bobigny située sur l'emprise aéroportuaire de Roissy-Charles-de-Gaulle et les locaux de la zone d'attente et le parcours pour y accéder caractérisent une proximité immédiate exclusive d'une installation dans l'enceinte de la zone d'hébergement de la zone d'attente, le premier président de la cour d'appel a statué par des motifs impropres à justifier sa décision et a ainsi violé l'article L. 222-4 du CESEDA lu à la lumière de la décision du 20 novembre 2003 du Conseil constitutionnel ;

6°/ que si une salle d'audience attribuée au ministère de la justice peut être spécialement aménagée sur une emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire, c'est à la condition qu'elle soit sise à proximité, fut-elle immédiate, du centre d'hébergement de la zone d'attente, ce qui exclut qu'elle forme avec lui un ensemble commun ; qu'ainsi, la salle d'audience ne peut être imbriquée et accolée au centre d'hébergement sis sur la zone d'attente ; qu'il résulte des pièces de la procédure et de la décision n° 2017-211 du 6 octobre 2017 du Défenseur des droits que l'annexe judiciaire dans laquelle se trouve la salle d'audience est accolée et pour partie imbriquée au centre d'hébergement sis sur la zone d'attente et que ce dernier se situe à l'aplomb de l'annexe judiciaire ; qu'en jugeant toutefois que l'annexe judiciaire du tribunal de grande instance de Bobigny est située à proximité immédiate des locaux de la zone d'attente, le premier président de la cour d'appel a violé l'article L. 222-4 du CESEDA lu à la lumière de la décision du 20 novembre 2003 du Conseil constitutionnel ;

7°/ que le droit pour tout justiciable d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial implique que la localisation d'une salle d'audience délocalisée du palais de justice garantisse son indépendance et son impartialité ou, à tout le moins, donne l'apparence d'une justice indépendante et impartiale ; que la localisation sur une emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire d'une salle d'audience, accolée et imbriquée au centre d'hébergement, sis sur la zone d'attente, dans lequel sont maintenus les ressortissants étrangers susceptibles d'être jugés dans cette salle d'audience délocalisée ne donne pas l'apparence d'une justice indépendante et impartiale ; qu'il résulte des pièces de la procédure et de la décision n° 2017-211 du 6 octobre 2017 du Défenseur des droits que l'annexe judiciaire dans laquelle se trouve la salle d'audience est accolée et pour partie imbriquée au centre d'hébergement sis sur la zone d'attente et que ce dernier se situe à l'aplomb de l'annexe judiciaire ; qu'en considérant toutefois que l'audience délocalisée avait été tenue dans des conditions régulières, le premier président de la cour d'appel a violé l'article L. 222-4 du CESEDA, ensemble les articles 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 5 et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 14, § 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

8°/ que, s'il devait exister un doute sur l'interprétation de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux, il appartiendrait à la Cour de cassation, conformément à l'article 267 du TFUE, de renvoyer à la Cour de justice de l'Union européenne la question préjudicielle suivante : « l'article 47, § 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, aux termes duquel toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant et impartial, doit-il être interprété en ce sens qu'il s'oppose à ce qu'une salle d'audience délocalisée sur une emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire soit accolée et imbriquée au centre d'hébergement d'une zone d'attente, situé en aplomb de celle-ci, dans lequel les ressortissants étrangers susceptibles d'être jugés dans cette salle d'audience délocalisée sont privés de liberté ? » ;

9°/ que le droit pour tout justiciable d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial implique que les conditions d'accès à une salle d'audience délocalisée du palais de justice garantissent son indépendance et son impartialité ou, à tout le moins, donnent l'apparence d'une justice indépendante et impartiale ; qu'en se bornant à relever, pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance du droit pour tout justiciable d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial, que l'entrée dans l'annexe du tribunal de grande instance de Bobigny située sur l'emprise aéroportuaire de Roissy-Charles-de-Gaulle se fait, pour les personnes maintenues en zone d'attente, par une sortie obligatoire de cette zone internationale par un portail et un accès à la salle d'audience par un passage extérieur désigné par l'apposition de panneaux « Tribunal » traduit dans les six langues de l'ONU, sans rechercher, comme il y était invité, si ce parcours d'à peine cinq mètres permet aux maintenus de prendre conscience qu'ils pénètrent dans une enceinte judiciaire et confère ainsi au tribunal une apparence d'indépendance et d'impartialité, le premier président de la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 5 et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et de l'article 14, § 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

10°/ que le droit pour tout justiciable d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial implique que les conditions d'accès à une salle d'audience délocalisée du palais de justice garantissent son indépendance et son impartialité ou, à tout le moins, donnent l'apparence d'une justice indépendante et impartiale ; qu'en se bornant à relever, pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance du droit pour tout justiciable d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial, que la sécurité et la sûreté des audiences sont assurées par des compagnies républicaines de sécurité et, passé une certaine heure, par des effectifs de police ne dépendant pas organiquement de la police aux frontières, sans rechercher, comme il y était invité, si des agents de la police aux frontières n'étaient pas également présents pour surveiller l'accès à l'annexe judiciaire, conformément aux dispositions de l'article 5 du décret n° 2003-734 du 1er août 2003 mais en violation des exigences d'indépendance et d'impartialité de la justice, le premier président de la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 5 et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et de l'article 14, § 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

11°/ que le droit pour tout justiciable d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial implique que les conditions administratives et financières de fonctionnement d'une salle d'audience délocalisée du palais de justice garantissent son indépendance et son impartialité ou, à tout le moins, donnent l'apparence d'une justice indépendante et impartiale ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'il y était invité, si l'administration et le financement par le ministère de l'intérieur de l'annexe judiciaire du tribunal de grande instance de Bobigny située sur l'emprise aéroportuaire de Roissy-Charles-de-Gaulle n'était pas de nature à créer un doute légitime sur son indépendance et son impartialité, le premier président de la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 5 et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et de l'article 14, § 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'ordonnance constate que l'accès au bâtiment judiciaire ne peut se faire, pour le public, que par la porte principale au-dessus de laquelle figure en lettres majuscules la mention « TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BOBIGNY ANNEXE », et, pour les personnes maintenues en zone d'attente, par un passage extérieur situé en territoire français, conduisant à une porte signalée par l'inscription « TRIBUNAL » dans les six langues officielles de l'Organisation des Nations unies ; que le premier président en a exactement déduit que la proximité immédiate entre les locaux de la zone d'attente et la salle d'audience était exclusive d'une installation de celle-ci dans l'enceinte de la zone d'attente ;

Attendu, en deuxième lieu, qu'ayant relevé que cette salle était placée sous l'autorité fonctionnelle du ministère de la justice et, localement, des chefs de juridiction, seuls à décider des modalités du contrôle des entrées confié à des agents des compagnies républicaines de sécurité, il a légalement justifié sa décision sur ce point ;

Attendu, en troisième lieu, que l'ordonnance énonce que la localisation de la salle d'audience dans la zone aéroportuaire est prévue par la loi qui a été validée par la décision du Conseil constitutionnel n° 2003-484 DC du 20 novembre 2003 sous la réserve d'aménagement de la salle devant garantir la clarté, la sécurité, la sincérité et la publicité des débats et retient exactement que, dans ces conditions, l'installation de cette salle à proximité de la zone d'attente de l'aéroport de Roissy répond aux exigences légales de l'article L. 222-4 du CESEDA ;

Attendu, en quatrième lieu, qu'après avoir précisé que les avocats et les parties ont accès au dossier pour préparer la défense des personnes en zone d'attente dès l'ouverture de la salle, disposent de locaux garantissant la confidentialité des entretiens, ainsi que d'une salle de travail équipée qui leur est réservée, l'ordonnance retient à bon droit que les droits de la défense peuvent s'exercer effectivement ;

Attendu, en dernier lieu, qu'ayant apprécié les conditions d'exercice de la justice au regard de la nature de ce contentieux soumis à de brefs délais imposés par la loi, et estimé que rien n'établissait que ces conditions étaient meilleures au siège du tribunal, le premier président, constatant l'existence d'un juste équilibre entre les objectifs poursuivis par l'État et les moyens utilisés par ce dernier pour les atteindre, a exactement retenu que le juge, qui avait tenu l'audience dans la salle située à proximité de la zone d'attente, avait statué publiquement et dans le respect des prescriptions légales et conventionnelles ;

Et attendu qu'en l'absence de doute raisonnable sur l'interprétation des dispositions relatives à l'exercice d'une justice indépendante et impartiale prévues à l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, il n'y a pas lieu de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur les troisième et quatrième moyens, ci-après annexés :

Attendu que ces moyens ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé le onze juillet deux mille dix-huit par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour M. X..., le Syndicat des avocats de France, l'association Groupe d'information et de soutien des immigrés, le Syndicat de la magistrature, l'Association nationale d'assistance aux frontières pour les étrangers, l'association Avocats pour la défense des droits des étrangers et l'association La Cimade

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée

D'AVOIR rejeté les moyens de nullité et d'irrecevabilité invoqués par les appelants et autorisé le maintien de M. X... en zone d'attente à l'aéroport de Roissy Charles de Gaulle ;

AUX MOTIFS QUE « l'argumentation développée en recourant à la formulation générique « dans un lieu de justice situé dans le même ensemble architectural du lieu de privation de liberté ne saurait retirer à la salle dont il s'agit le caractère de salle d'audience, ainsi que le stipule expressément l'article L. 222-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, étant par ailleurs observé que le conseil constitutionnel dans sa décision 2003-484 du 20/11/2003 avait validé ledit article et le principe d'audience dans des salles spécialement aménagées à proximité immédiate des lieux de rétention sous condition d'aménagement de la salle devant garantir la clarté, la sécurité, la sincérité et la publicité des débats ; que sur les moyens tirés de l'atteinte au droit à une juridiction indépendante et impartiale et de la méconnaissance de l'article L. 222-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce que la salle d'audience est située au sein de la zone d'attente, que cette salle est placée sous l'autorité fonctionnelle du ministère de la justice, et localement des chefs de juridiction, qui seront les seuls à décider des modalités du contrôle d'entrée du public qui seront les mêmes que celle du tribunal de grande instance, ces contrôles étant confiés à des agents des compagnies républicaines de sécurités, si la salle d'audience est à proximité immédiate de la zone d'attente, elle n'en demeure pas moins qu'elle se trouve hors l'enceinte de celle-ci et hors toute communication avec la zone d'attente, l'entrée dans le bâtiment judiciaire ne pouvant se faire, pour le public, que par l'entrée principale portant la signalétique en majuscule au-dessus de l'entrée « TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BOBIGNY ANNEXE », et, pour les personnes maintenues en zone d'attente, par une sortie obligatoire de cette zone internationale par un portail et un accès à la dalle d'audience par un passage extérieur pour entrer dans l'annexe judiciaire située en territoire français, entrée désignée par l'apposition de panneaux « TRIBUNAL » traduits dans les 6 langues de l'ONU ; que dès lors cette absence de communication possible entre cette annexe judiciaire et les locaux de la zone d'attente, peu important que ceux ci comportent des zones d'hébergement, et le parcours pour y accéder susvisé établissent une proximité immédiate exclusive d'une installation dans l'enceinte des lieux de rétention ; quant à la localisation de cette salle d'audience dans la zone aéroportuaire elle est imposée par le texte légal, validé par le conseil constitutionnel sous les réserves spécifiées ci dessous ; qu'il en résulte que cette salle répond aux exigences légales de l'article L222-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, validé par la décision du conseil constitutionnel 2003-484 du 20 novembre 2003 » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'« il n'est pas soutenu que la juridiction de céans n'est pas indépendante, ni impartiale, mais qu'elle n'en a pas l'apparence compte tenu du lieu où se tient l'audience ; qu'aux termes de l'article L. 222-4 du CESEDA, « si une salle d'audience attribuée au ministère de la justice lui permettant de statuer publiquement a été spécialement aménagée sur l'emprise (
) aéroportuaire, (le juge des libertés et de la détention) statue dans cette salle » ; que la présente audience ne se tient pas dans la zone d'attente confiée à la garde de la Police aux Frontières, dont le directeur est partie à la présente instance, mais dans une annexe judiciaire du tribunal de grande instance, dépendant du Ministère de la Justice et placée sous la responsabilité des chefs de juridiction du tribunal de grande instance de Bobigny ; que la sécurité et la sûreté des audiences son assurées par des compagnies républicaines de sécurité, et, passé une certaine heure, par des effectifs de police ne dépendant pas organiquement de la Police aux Frontières ; que ces différents services sont aisément distinguables à leurs uniformes ; que la signalétique, tant pour accéder à ce bâtiment que sur le bâtiment lui-même (que ce soit côté public ou côté ZAPI) ne laisse aucun doute sur le fait qu'il s'agit de locaux judiciaires ; qu'il n'est pas nécessaire de passer par la zone d'attente pour accéder à l'annexe judiciaire ; que si une partie des locaux d'hébergement de la zone d'attente est effectivement située à l'aplomb de l'annexe, il n'existe pas de porte de communication entre les deux bâtiments ; que l'apparence d'indépendance et d'impartialité n'est donc pas remis en cause par des éléments objectifs » ;

1°) ALORS QUE le droit pour tout justiciable d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial implique que la localisation d'une salle d'audience délocalisée du palais de justice garantisse son indépendance et son impartialité ou, à tout le moins, donne l'apparence d'une justice indépendante et impartiale ; que la localisation d'une salle d'audience sur une emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire où se situe également la zone d'attente dans l'enceinte de laquelle sont maintenus les ressortissants étrangers susceptibles d'être jugés dans cette salle d'audience délocalisée ne donne pas l'apparence d'une justice indépendante et impartiale ; qu'en considérant toutefois en l'espèce que l'audience délocalisée avait été tenue dans des conditions régulières et ordonné le maintien de M. X... en zone d'attente, le premier président de la cour d'appel a violé l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ensemble les articles 5 et 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 14, paragraphe 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

2°) ALORS, en toute hypothèse, QUE, s'il devait exister un doute sur l'interprétation de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux, il appartiendrait à la Cour de cassation, conformément à l'article 267 du TFUE, de renvoyer à la Cour de justice de l'Union européenne la question préjudicielle suivante : « l'article 47, paragraphe 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, aux termes duquel toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant et impartial, doit-il être interprété en ce sens qu'il s'oppose à ce qu'une disposition de droit national autorise la localisation d'une salle d'audience sur une emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire où se situe également la zone d'attente dans l'enceinte de laquelle sont maintenus les ressortissants étrangers susceptibles d'être jugés dans cette salle d'audience délocalisée ? »

3°) ALORS, en tout état de cause, QUE si une salle d'audience attribuée au ministère de la justice peut être spécialement aménagée sur une emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire, elle ne peut être située dans l'enceinte de la zone d'hébergement d'une zone d'attente ; que le premier président a relevé qu'une partie des locaux d'hébergement de la zone d'attente était située à l'aplomb de l'annexe judiciaire ; qu'en outre, il résulte des pièces de la procédure et de la décision n° 2017-211 du 6 octobre 2017 du défenseur des droits que l'annexe judiciaire dans laquelle se situe la salle d'audience est accolée et pour partie imbriquée au centre d'hébergement sis sur la zone d'attente ; qu'en énonçant toutefois, pour considérer que l'audience délocalisée avait été tenue dans des conditions légales et régulières, que l'annexe judiciaire du tribunal de grande instance de Bobigny était située à proximité des locaux de la zone d'attente et non pas dans leur enceinte, lors même qu'il résultait des énonciations de la décision attaquée, de la décision du 6 octobre 2017 du défenseur des droits et des pièces de la procédure qu'elle était située dans leur enceinte, le premier président de la cour d'appel a violé l'article L. 222-4 du CESEDA lu à la lumière de la décision du 20 novembre 2003 du Conseil constitutionnel ;

4°) ALORS QUE, en tout état de cause, QUE si une salle d'audience attribuée au ministère de la justice peut être spécialement aménagée sur une emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire, elle ne peut être située dans l'enceinte de la zone d'hébergement d'une zone d'attente ; que le premier président a relevé qu'une partie des locaux d'hébergement de la zone d'attente est située à l'aplomb de l'annexe judiciaire ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, pour se déterminer sur la question de savoir si l'annexe dans laquelle se situe la salle d'audience est dans l'enceinte du centre d'hébergement sis sur la zone d'attente, si elle n'est pas imbriquée à ce dernier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 222-4 du CESEDA lu à la lumière de la décision du 20 novembre 2003 du Conseil constitutionnel ;

5°) ALORS, en toute hypothèse, QUE si une salle d'audience attribuée au ministère de la justice peut être spécialement aménagée sur une emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire, à proximité immédiate d'une zone d'attente, elle ne peut être située dans l'enceinte d'une zone d'attente, sauf à violer le droit pour tout justiciable d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial ; qu'une salle d'audience est située dans l'enceinte d'une zone d'attente dès lors qu'elle est située dans le même bâtiment qu'une partie des locaux d'hébergement d'une zone d'attente ou dans un bâtiment accolé, imbriqué à ceux-ci, de sorte que l'étranger ne peut prendre conscience qu'il quitte un lieu de privation de liberté pour entrer dans un tribunal, peu important qu'il n'existe pas de voie de communication directe entre le centre d'hébergement et les salles d'audience et le parcours permettant d'accéder de l'un à l'autre ; qu'en retenant que l'absence de communication possible entre l'annexe judiciaire du tribunal de grande instance de Bobigny située sur l'emprise aéroportuaire de Roissy Charles de Gaulle et les locaux de la zone d'attente et le parcours pour y accéder caractérisent une proximité immédiate exclusive d'une installation dans l'enceinte de la zone d'hébergement de la zone d'attente, le premier président de la cour d'appel a statué par des motifs impropres à justifier sa décision et a ainsi violé l'article L. 222-4 du CESEDA lu à la lumière de la décision du 20 novembre 2003 du Conseil constitutionnel ;

6°) ALORS, en toute hypothèse, QUE si une salle d'audience attribuée au ministère de la justice peut être spécialement aménagée sur une emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire, c'est à la condition qu'elle soit sise à proximité, fut-elle immédiate, du centre d'hébergement de la zone d'attente, ce qui exclut qu'elle forme avec lui un ensemble commun ; qu'ainsi, la salle d'audience ne peut être imbriquée et accolée au centre d'hébergement sis sur la zone d'attente ; qu'il résulte des pièces de la procédure et de la décision n° 2017-211 du 6 octobre 2017 du défenseur des droits que l'annexe judiciaire dans laquelle se trouve la salle d'audience est accolée et pour partie imbriquée au centre d'hébergement sis sur la zone d'attente et que ce dernier se situe à l'aplomb de l'annexe judiciaire ; qu'en jugeant toutefois que l'annexe judiciaire du tribunal de grande instance de Bobigny est située à proximité immédiate des locaux de la zone d'attente, le premier président de la cour d'appel a violé l'article L. 222-4 du CESEDA lu à la lumière de la décision du 20 novembre 2003 du Conseil constitutionnel ;

7°) ALORS QUE le droit pour tout justiciable d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial implique que la localisation d'une salle d'audience délocalisée du palais de justice garantisse son indépendance et son impartialité ou, à tout le moins, donne l'apparence d'une justice indépendante et impartiale ; que la localisation sur une emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire d'une salle d'audience, accolée et imbriquée au centre d'hébergement, sis sur la zone d'attente, dans lequel sont maintenus les ressortissants étrangers susceptibles d'être jugés dans cette salle d'audience délocalisée ne donne pas l'apparence d'une justice indépendante et impartiale ; qu'il résulte des pièces de la procédure et de la décision n° 2017-211 du 6 octobre 2017 du défenseur des droits que l'annexe judiciaire dans laquelle se trouve la salle d'audience est accolée et pour partie imbriquée au centre d'hébergement sis sur la zone d'attente et que ce dernier se situe à l'aplomb de l'annexe judiciaire ; qu'en considérant toutefois que l'audience délocalisée avait été tenue dans des conditions régulières, le premier président de la cour d'appel a violé l'article L. 222-4 du CESEDA, ensemble les articles 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 5 et 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 14, paragraphe 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

8°) ALORS QUE, s'il devait exister un doute sur l'interprétation de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux, il appartiendrait à la Cour de cassation, conformément à l'article 267 du TFUE, de renvoyer à la Cour de justice de l'Union européenne la question préjudicielle suivante : « l'article 47, paragraphe 2, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, aux termes duquel toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal indépendant et impartial, doit-il être interprété en ce sens qu'il s'oppose à ce qu'une salle d'audience délocalisée sur une emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire soit accolée et imbriquée au centre d'hébergement d'une zone d'attente, situé en aplomb de celle-ci, dans lequel les ressortissants étrangers susceptibles d'être jugés dans cette salle d'audience délocalisée sont privés de liberté ? »

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée

D'AVOIR rejeté les moyens de nullité et d'irrecevabilité invoqués par les appelants et autorisé le maintien de M. X... en zone d'attente à l'aéroport de Roissy Charles de Gaulle;

AUX MOTIFS QUE « l'argumentation développée en recourant à la formulation générique « dans un lieu de justice situé dans le même ensemble architectural du lieu de privation de liberté ne saurait retirer à la salle dont il s'agit le caractère de salle d'audience, ainsi que le stipule expressément l'article L. 222-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, étant par ailleurs observé que le conseil constitutionnel dans sa décision 2003-484 du 20/11/2003 avait validé ledit article et le principe d'audience dans des salles spécialement aménagées à proximité immédiate des lieux de rétention sous condition d'aménagement de la salle devant garantir la clarté, la sécurité, la sincérité et la publicité des débats ; que sur les moyens tirés de l'atteinte au droit à une juridiction indépendante et impartiale et de la méconnaissance de l'article L. 222-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ce que la salle d'audience est située au sein de la zone d'attente, que cette salle est placée sous l'autorité fonctionnelle du ministère de la justice, et localement des chefs de juridiction, qui seront les seuls à décider des modalités du contrôle d'entrée du public qui seront les mêmes que celle du tribunal de grande instance, ces contrôles étant confiés à des agents des compagnies républicaines de sécurités, si la salle d'audience est à proximité immédiate de la zone d'attente, elle n'en demeure pas moins qu'elle se trouve hors l'enceinte de celle-ci et hors toute communication avec la zone d'attente, l'entrée dans le bâtiment judiciaire ne pouvant se faire, pour le public, que par l'entrée principale portant la signalétique en majuscule au-dessus de l'entrée « TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BOBIGNY ANNEXE », et, pour les personnes maintenues en zone d'attente, par une sortie obligatoire de cette zone internationale par un portail et un accès à la dalle d'audience par un passage extérieur pour entrer dans l'annexe judiciaire située en territoire français, entrée désignée par l'apposition de panneaux « TRIBUNAL » traduits dans les 6 langues de l'ONU ; que dès lors cette absence de communication possible entre cette annexe judiciaire et les locaux de la zone d'attente, peu important que ceux ci comportent des zones d'hébergement, et le parcours pour y accéder susvisé établissent une proximité immédiate exclusive d'une installation dans l'enceinte des lieux de rétention ; quant à la localisation de cette salle d'audience dans la zone aéroportuaire elle est imposée par le texte légal, validé par le conseil constitutionnel sous les réserves spécifiées ci dessous ; qu'il en résulte que cette salle répond aux exigences légales de l'article L222-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, validé par la décision du conseil constitutionnel 2003-484 du 20 novembre 2003 » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'« il n'est pas soutenu que la juridiction de céans n'est pas indépendante, ni impartiale, mais qu'elle n'en a pas l'apparence compte tenu du lieu où se tient l'audience ; qu'aux termes de l'article L. 222-4 du CESEDA, « si une salle d'audience attribuée au ministère de la justice lui permettant de statuer publiquement a été spécialement aménagée sur l'emprise (
) aéroportuaire, (le juge des libertés et de la détention) statue dans cette salle » ; que la présente audience ne se tient pas dans la zone d'attente confiée à la garde de la Police aux Frontières, dont le directeur est partie à la présente instance, mais dans une annexe judiciaire du tribunal de grande instance, dépendant du Ministère de la Justice et placée sous la responsabilité des chefs de juridiction du tribunal de grande instance de Bobigny ; que la sécurité et la sûreté des audiences son assurées par des compagnies républicaines de sécurité, et, passé une certaine heure, par des effectifs de police ne dépendant pas organiquement de la Police aux Frontières ; que ces différents services sont aisément distinguables à leurs uniformes ; que la signalétique, tant pour accéder à ce bâtiment que sur le bâtiment lui-même (que ce soit côté public ou côté ZAPI) ne laisse aucun doute sur le fait qu'il s'agit de locaux judiciaires ; qu'il n'est pas nécessaire de passer par la zone d'attente pour accéder à l'annexe judiciaire ; que si une partie des locaux d'hébergement de la zone d'attente est effectivement située à l'aplomb de l'annexe, il n'existe pas de porte de communication entre les deux bâtiments ; que l'apparence d'indépendance et d'impartialité n'est donc pas remis en cause par des éléments objectifs » ;

1°) ALORS QUE le droit pour tout justiciable d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial implique que les conditions d'accès à une salle d'audience délocalisée du palais de justice garantissent son indépendance et son impartialité ou, à tout le moins, donnent l'apparence d'une justice indépendante et impartiale ; qu'en se bornant à relever, pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance du droit pour tout justiciable d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial, que l'entrée dans l'annexe du tribunal de grande instance de Bobigny située sur l'emprise aéroportuaire de Roissy Charles de Gaulle se fait, pour les personnes maintenues en zone d'attente, par une sortie obligatoire de cette zone internationale par un portail et un accès à la salle d'audience par un passage extérieur désigné par l'apposition de panneaux « Tribunal » traduit dans les six langues de l'ONU, sans rechercher, comme il y était invité, si ce parcours d'à peine 5 mètres permet aux maintenus de prendre conscience qu'ils pénètrent dans une enceinte judiciaire et confère ainsi au tribunal une apparence d'indépendance et d'impartialité, le premier président de la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 5 et 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et de l'article 14, paragraphe 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

2°) ALORS QUE le droit pour tout justiciable d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial implique que les conditions d'accès à une salle d'audience délocalisée du palais de justice garantissent son indépendance et son impartialité ou, à tout le moins, donnent l'apparence d'une justice indépendante et impartiale ; qu'en se bornant à relever, pour écarter le moyen tiré de la méconnaissance du droit pour tout justiciable d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial, que la sécurité et la sûreté des audiences sont assurées par des compagnies républicaines de sécurité et, passé une certaine heure, par des effectifs de police ne dépendant pas organiquement de la police aux frontières, sans rechercher, comme il y était invité, si des agents de la police aux frontières n'étaient pas également présents pour surveiller l'accès à l'annexe judiciaire, conformément aux dispositions de l'article 5 du décret n° 2003-734 du 1er août 2003 mais en violation des exigences d'indépendance et d'impartialité de la justice, le premier président de la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 5 et 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et de l'article 14, paragraphe 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

3°) ALORS QUE le droit pour tout justiciable d'être jugé par un tribunal indépendant et impartial implique que les conditions administratives et financières de fonctionnement d'une salle d'audience délocalisée du palais de justice garantissent son indépendance et son impartialité ou, à tout le moins, donnent l'apparence d'une justice indépendante et impartiale ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'il y était invité, si l'administration et le financement par le ministère de l'intérieur de l'annexe judiciaire du tribunal de grande instance de Bobigny située sur l'emprise aéroportuaire de Roissy Charles de Gaulle n'était pas de nature à créer un doute légitime sur son indépendance et son impartialité, le premier président de la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 5 et 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et de l'article 14, paragraphe 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée

D'AVOIR rejeté les moyens de nullité et d'irrecevabilité invoqués par les appelants et autorisé le maintien de M. X... en zone d'attente à l'aéroport de Roissy Charles de Gaulle ;

AUX MOTIFS QUE « sur le moyen tiré de la publicité des débats, le lieu est bien desservi par les transports en commun, station de bus desservie par 6 lignes et située à une distance d'environ 200 à 250 m de la salle, soit à une distance inférieure à celle séparant le tribunal de grande instance de la gare routière de Bobigny ou de la station de métro qui desservent cette juridiction, et accès au RER B situé à 2 stations de bus ainsi que par la voie routière, signalée par des panneaux de signalisation provisoirement recouverts à la suite de l'abandon du projet en 2013, et qui sont maintenus pleinement visibles » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « la salle d'audience a été « spécialement aménagée » pour recevoir du public, dans les limites, évidemment, d'une occupation acceptable au regard des normes de sécurité incendie ; qu'elle ne se situe pas, contrairement à ce qui est prétendue, « à l'intérieur de la clôture générale de la zone d'attente » ; qu'elle est accessible tant par les véhicules de tourisme et les taxis que par les bus ; qu'elle est indiquée par des panneaux ; qu'elle est accessible par six lignes de bus, avec une fréquence qui n'est généralement pas supérieure à dix minutes ; que le public n'est pas placé dans une situation plus défavorable que celle de justiciable habitant en province, dans des hameaux ou villages éloignés des palais de justice ; que l'annexe est sur l'emprise d'installations aéroportuaires du premier ou deuxième aéroport européen, à proximité d'une zone d'attente où les parents ou amis des personnes maintenus viennent déjà, ou ont vocation à se rendre ; que le grief tiré de l'absence de publicité des débats est donc inopérant » ;

ALORS QUE le droit pour tout justiciable à ce que sa cause soit entendue publiquement implique qu'une salle d'audience délocalisée du palais de justice soit accessible tant aux parties qu'à leurs conseils, à leurs proches et, plus largement, à tout citoyen ; qu'une salle d'audience située sur une emprise aéroportuaire, éloignée de toute habitation et de tout commerce, insuffisamment signalée et desservie, et dont l'accès est contrôlé, n'est pas suffisamment accessible pour que soit garantie la publicité des débats ; qu'en se bornant à énoncer que l'annexe du tribunal de grande instance de Bobigny sur l'emprise aéroportuaire de Roissy Charles de Gaulle est desservie par des lignes de bus, signalée par des panneaux et accessible par véhicule, sans rechercher, ainsi qu'il y était invité, si la localisation de cette annexe sur une emprise aéroportuaire, éloignée de toute habitation et de tout commerce, insuffisamment signalée et desservie, et dont l'accès est contrôlé, est suffisamment accessible pour que soit garantie la publicité des débats, le premier président de la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 222-4 du CESEDA et des articles 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 5, 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 14, paragraphe 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et 10 de la Déclaration universelle des droits de l'homme.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'ordonnance attaquée

D'AVOIR rejeté les moyens de nullité et d'irrecevabilité invoqués par les appelants et autorisé le maintien de M. X... en zone d'attente à l'aéroport de Roissy Charles de Gaulle ;

AUX MOTIFS QUE « sur le moyen tiré d'une atteinte aux droits de la défense, s'il ressort des débats que les conditions d'exercice des droits de la défense sont perfectibles notamment par la dématérialisation des procédures manifestement non acquise à ce jour, il n'en demeure pas moins que les avocats et les parties ont accès au dossier papier pour préparer la défense des personnes en zone d'attente dès l'ouverture de la salle, disposent de boxes d'entretien garantissant la confidentialité des entretiens, mais encore d'une salle de travail qui leur est réservée, et équipée d'armoires et casiers, et qu'il n'est toutefois pas démontré, notamment quant à l'absence de dématérialisation déplorée qu'il en serait différemment lors des audiences tenues en la matière au siège du tribunal de grande instance de Bobigny ; que ces conditions manifestement perfectibles d'exercice de la justice, sans qu'il ne soit au surplus établi qu'elles seraient meilleures au siège du tribunal quant à la dématérialisation des procédures qui ne serait pas davantage en vigueur à ce jour, dans un contentieux d'urgence au vu des délais imposés par la loi, permettent néanmoins au juge des libertés et de la détention dont les garanties statutaires ont été au surplus récemment renforcées par sa nomination désormais par décret, de statuer publiquement dans le respect formel des prescriptions légales et conventionnelles notamment de l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « la dématérialisation des procédures, les moyens modernes de communication, la qualité du réseau routier, la mise à disposition des avocats de salles où la confidentialité de leurs entretiens avec leurs clients sont assurés, constituent des garanties suffisantes des droits de la défense, d'un procès équitable et de l'égalité des armes » ;

1°) ALORS QUE le droit pour tout justiciable à un procès équitable implique que la localisation d'une salle d'audience délocalisée du palais de justice garantisse le respect du principe de l'égalité des armes ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'il y était invité, si la localisation de l'annexe du tribunal de grande instance de Bobigny sur l'emprise aéroportuaire de Roissy Charles de Gaulle et les conditions d'accès à celle-ci ne sont pas de nature à priver les maintenus en zone d'attente susceptibles d'y être jugés de la possibilité de se voir transmettre les documents propres à justifier la régularité de leur présence sur le territoire français, en méconnaissance du principe de l'égalité des armes, le premier président de la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 5 et 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et 14, paragraphe 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

2°) ALORS QUE le droit pour tout justiciable à un procès équitable implique que la localisation d'une salle d'audience délocalisée du palais de justice garantisse le respect du principe de l'égalité des armes ; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'il y était invité, si la localisation de l'annexe du tribunal de grande instance de Bobigny sur l'emprise aéroportuaire de Roissy Charles de Gaulle n'est pas de nature à priver les maintenus en zone d'attente d'une défense concrète et effective en raison des contraintes de temps et de déplacement qu'elle impose aux défenseurs, le premier président de la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, 5 et 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et 14, paragraphe 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 18-10062
Date de la décision : 11/07/2018
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

CONVENTION DE SAUVEGARDE DES DROITS DE L'HOMME ET DES LIBERTES FONDAMENTALES - Article 6, § 1 - Tribunal - Impartialité - Domaine d'application - Etrangers - Rétention dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire - Prolongation de la rétention - Conditions - Brefs délais imposés par la loi - Salle d'audience aménagée à proximité immédiate du lieu rétention - Proportionnalité

Ayant apprécié les conditions d'exercice de la justice au regard de la nature du contentieux du maintien en zone d'attente soumis à de brefs délais imposés par la loi, estimé que rien n'établissait que ces conditions étaient meilleures au siège du tribunal, et constaté l'existence d'un juste équilibre entre les objectifs poursuivis par l'Etat et les moyens utilisés par ce dernier pour les atteindre, le premier président retient exactement que le juge, qui tient l'audience dans la salle située à proximité de la zone d'attente, statue publiquement et dans le respect des prescriptions légales et conventionnelles


Références :

Sur le numéro 1 : N4 articles 5 et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'union européenne

article L. 222-4 du code de l'entrée et du séjour des é
Sur le numéro 1 : trangers et du droit d'asile.

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 30 octobre 2017

N1 N5 A rapprocher : 1re Civ., 12 octobre 2011, pourvoi n° 10-24205, Bull. 2011, I, n° 167 (rejet)

arrêt cité.N3 Sur les conditions de la tenue d'une audience dans une salle située sur l'emprise ferroviaire, portuaire ou aéroportuaire, cf. :Cons. const., 20 novembre 2003, décision n° 2003-484 DC, Loi relative à la maîtrise de l'immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 11 jui. 2018, pourvoi n°18-10062, Bull. civ.Bull. 2018, I, n° 133.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2018, I, n° 133.

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat(s) : SCP Zribi et Texier, SCP Foussard et Froger, SCP Thouin-Palat et Boucard

Origine de la décision
Date de l'import : 19/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:18.10062
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