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28/10/2015 | FRANCE | N°14-15114

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 28 octobre 2015, 14-15114


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. X... et à la société MMA IARD du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. Y... ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, suivant acte reçu le 12 juin 2001 par M. X..., notaire, Mmes Nicole Y... veuve Z... et Nathalie Z... (le vendeur) ont vendu à M. Y... (l'acquéreur) un bien immobilier que ce dernier a été contraint de délaisser après qu'un créancier du vendeur, titulaire d'une hypothèque judiciaire inscrite, le 22 juillet 2001, en vertu d'un précédent juge

ment de condamnation, entre la date de l'acte de vente et celle de sa publica...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Donne acte à M. X... et à la société MMA IARD du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. Y... ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, suivant acte reçu le 12 juin 2001 par M. X..., notaire, Mmes Nicole Y... veuve Z... et Nathalie Z... (le vendeur) ont vendu à M. Y... (l'acquéreur) un bien immobilier que ce dernier a été contraint de délaisser après qu'un créancier du vendeur, titulaire d'une hypothèque judiciaire inscrite, le 22 juillet 2001, en vertu d'un précédent jugement de condamnation, entre la date de l'acte de vente et celle de sa publication, intervenue le 7 août 2001, eut exercé son droit de suite et obtenu la vente forcée du bien ; que, condamnés à indemniser l'acquéreur des conséquences dommageables de la perte de l'immeuble, le notaire et son assureur, la société MMA IARD (l'assureur), se prévalant du bénéfice de la subrogation légale de l'article 1251, 3° du code civil, ont exercé l'action en garantie d'éviction contre le vendeur ;
Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties conformément aux dispositions de l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu l'article 1626 du code civil, ensemble l'article 2123 du même code, ce dernier dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006, applicable en la cause ;
Attendu que la garantie d'éviction du fait d'un tiers est due si le trouble subi par l'acheteur est un trouble de droit, existant au moment de la vente, non déclaré et ignoré de l'acheteur ;
Attendu que, pour rejeter le recours subrogatoire du notaire et de l'assureur, l'arrêt retient qu'en indemnisant l'acquéreur, ceux-ci n'ont pas assumé la garantie d'éviction du vendeur dès lors que sa seule condamnation envers un tiers n'emporte aucune restriction à la disposition de ses droits sur l'immeuble et que le trouble juridique à la jouissance de ce bien n'a été créé qu'après la vente, du fait de l'inscription de l'hypothèque par le créancier ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la constitution de l'hypothèque judiciaire prévue par l'article 2123 du code civil sur les biens du débiteur résulte non de son inscription mais du jugement de condamnation qui lui donne naissance, de sorte que le trouble de droit qui en résultait existait au moment de la vente, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur la troisième branche du moyen unique :
Vu l'article 1251, 3° du code civil ;
Attendu que le débiteur qui s'acquitte d'une dette qui lui est personnelle peut néanmoins prétendre bénéficier de la subrogation s'il a, par son paiement, libéré envers leur créancier commun celui sur qui doit peser la charge définitive de la dette ;
Attendu que, pour statuer comme il le fait, l'arrêt relève encore, par motifs adoptés, que l'assureur ne peut être subrogé que dans les droits de son assuré, et non dans ceux de l'acquéreur, qui, de surcroît n'est pas créancier du vendeur ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de M. X... et de la société MMA dirigées contre Mme Nicole Z... et Mme Nathalie Z..., l'arrêt rendu le 30 janvier 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Condamne Mme Nicole Z... et Mme Nathalie Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit octobre deux mille quinze.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour la société MMA IARD et M. X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté M. X... et les MMA de leurs demandes dirigées contre Mme Nicole Y..., veuve Z..., et contre Mme Nathalie Z... ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'en acquittant les sommes réclamées par M. Y..., le notaire et son assureur n'assument pas la garantie d'éviction due par le vendeur ; qu'en effet, la seule condamnation du vendeur envers un tiers n'emportait aucune restriction à la disposition de ses droits sur l'appartement en question et le trouble juridique à la jouissance de ce bien n'a été créé qu'après la vente par la prise de l'inscription par le créancier ; que les conditions de la garantie d'éviction ne sont donc pas réunies ; qu'il en résulte que le recours formé à l'encontre de Mmes Nicole et Nathalie Z... par le notaire ne peut être accueilli ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE l'article 1251 alinéa 3 du Code civil prévoit que la subrogation a lieu de plein droit au profit de celui qui, étant tenu avec d'autres au payement de la dette, avait intérêt à l'acquitter ; que la subrogation nécessite l'existence d'une dette ; que la MMA IARD ne peut être subrogée que dans les droits de son assuré, Maître Henry et ne saurait prétendre à l'application de l'article 1251 alinéa 3 pour les droits de Monsieur Y... qui de surcroit n'est pas créancier de Madame Nicole Z... ou de Mademoiselle Nathalie Z... ; qu'en conséquence la société MMA IARD est déboutée de sa demande en subrogation ;
1°) ALORS QUE le vendeur doit garantir l'acquéreur de toute éviction due à son fait ; qu'en relevant, pour écarter le recours formé par le notaire et son assureur, fondé sur leur subrogation dans les droits de M. Y..., contre Mmes Z..., que ces dernières n'étaient pas tenues à garantir l'éviction de M. Y... dès lors que le trouble juridique à la jouissance de l'immeuble acquis n'avait été créé qu'après la vente, bien que la cause de ce trouble, résultant d'une inscription hypothécaire prise de leur chef, leur soit imputable, de sorte qu'elles devaient le garantir, la Cour d'appel a violé l'article 1626 du Code civil ;
2°) ALORS QUE le vendeur doit garantir l'acquéreur de toute éviction due à son fait ; qu'en relevant, pour écarter le recours formé par le notaire et son assureur, fondé sur leur subrogation dans les droits de M. Y..., contre Mmes Z..., que la condamnation de ces dernières envers un tiers n'avait emporté aucune restriction à la disposition de leurs droits sur l'immeuble vendu, quand elles devaient répondre de l'éviction de l'acquéreur qui leur était imputable, peu important que leurs propres droits sur l'immeuble vendu n'aient pas été remis en cause par l'inscription hypothécaire, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant et violé l'article 1626 du Code civil ;
3°) ALORS QUE celui qui s'acquitte d'une dette personnelle peut prétendre bénéficier de la subrogation s'il a, par son paiement, libéré envers leur créancier commun celui sur qui doit peser la charge définitive de la dette ; qu'en affirmant que le notaire et les MMA ne pouvaient prétendre être subrogés dans les droits de l'acquéreur contre le vendeur, bien qu'en indemnisant l'acheteur des conséquences de la mise en oeuvre de l'hypothèque inscrite sur l'immeuble acquis, en garantie d'une dette des vendeurs, l'officier ministériel et son assureur aient acquitté une dette dont les cédants devaient, en vertu de la garantie d'éviction, supporter la charge finale, la Cour d'appel a violé l'article 1251-3° du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 14-15114
Date de la décision : 28/10/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

VENTE - Garantie - Eviction - Fait du tiers - Conditions - Trouble de droit - Caractérisation - Cas - Hypothèque judiciaire - Constitution antérieure à la vente - Inscription postérieure - Portée

SURETES REELLES IMMOBILIERES - Hypothèque - Hypothèque judiciaire - Constitution antérieure à la vente - Inscription postérieure - Portée

La constitution de l'hypothèque judiciaire prévue par l'article 2123 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006, résulte non de son inscription mais du jugement de condamnation qui lui donne naissance. Il s'ensuit que l'acquéreur d'un immeuble, contraint de le délaisser après qu'un créancier du vendeur, titulaire d'une telle hypothèque, eut exercé son droit de suite et obtenu la vente forcée de ce bien, subit un trouble de droit, donnant lieu à la garantie d'éviction du fait d'un tiers, dans les conditions de l'article 1626 du code civil, dès lors que le jugement de condamnation qui a donné naissance à cette sûreté réelle existait au moment de la vente


Références :

articles 1626 et 2123 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2006-346 du 23 mars 2006

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 30 janvier 2014


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 28 oct. 2015, pourvoi n°14-15114, Bull. civ. 2016, n° 838, 1re Civ., n° 399
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2016, n° 838, 1re Civ., n° 399

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat général : M. Cailliau
Rapporteur ?: Mme Verdun
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Bénabent et Jéhannin

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.15114
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