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11/07/2023 | FRANCE | N°23/01138

France | France, Cour d'appel de Versailles, 13e chambre, 11 juillet 2023, 23/01138


COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES





Code nac : 4HA



13e chambre



ARRET N°



REPUTE CONTRADICTOIRE



DU 11 JUILLET 2023



N° RG 23/01138

N° Portalis DBV3-V-B7H-VWEA



AFFAIRE :



S.A.R.L. CULTURE & EVASION



C/



LE PROCUREUR GENERAL

....







Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Février 2023 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE

N° Chambre :

N° Section :

RG : 2022L01827



Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :



Me Dan ZERHAT



MP



TC PONTOISE





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



LE ONZE JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versaill...

COUR D'APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 4HA

13e chambre

ARRET N°

REPUTE CONTRADICTOIRE

DU 11 JUILLET 2023

N° RG 23/01138

N° Portalis DBV3-V-B7H-VWEA

AFFAIRE :

S.A.R.L. CULTURE & EVASION

C/

LE PROCUREUR GENERAL

....

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 03 Février 2023 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 2022L01827

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Dan ZERHAT

MP

TC PONTOISE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE ONZE JUILLET DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d'appel de Versailles, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

S.A.R.L. CULTURE & EVASION

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentant : Me Dan ZERHAT de l'AARPI OHANA ZERHAT CABINET D'AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 731 - N° du dossier 23078028

Représentant : Me Jean-Marc BENHAMOU, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0849

APPELANTE

****************

LE PROCUREUR GENERAL

POLE ECOFI - COUR D'APPEL DE VERSAILLES

[Adresse 3]

[Localité 4]

S.C.P. [E] prise en la personne de Me [S] [E], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société CULTURE & EVASION

[Adresse 1]

[Localité 5]

Défaillante

INTIMES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 12 Juin 2023 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller faisant fonction de Président, chargé du rapport et Madame Delphine BONNET, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller faisant fonction de Président,

Madame Delphine BONNET, Conseiller,

Madame Florence SCHARRE, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine NOLIN,

En la présence du Ministère Public, représenté par Monsieur Fabien BONAN, Avocat Général dont l'avis du 03/03/2023 a été transmis le 06/03/2023 au greffe par la voie électronique.

Par jugement du 5 décembre 2022, le tribunal de commerce de Pontoise a ouvert, sur déclaration de cessation des paiements, une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la Sarl Culture & évasion, dirigée par Mme [W] [P], actionnaire à 50 % et ayant pour activité depuis le mois d'octobre 2018, la commercialisation dématérialisée de jouets, livres et cosmétiques.

La date de cessation des paiements a été fixée provisoirement au 23 novembre 2022 et la Selarl V&V, prise en la personne de maître [G] [B] et la SCP [E], prise en la personne de maître [S] [E], ont été respectivement désignées en qualité d'administrateur et de mandataire judiciaires.

Par requête reçue le 1er février 2023, la Selarl V&V, ès qualités, a demandé au tribunal de convertir la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire ; à la même date, l'administrateur judiciaire a établi le bilan économique et social de la société et son rapport sur le déroulement de la procédure.

Par jugement réputé contradictoire assorti de l'exécution provisoire du 3 février 2023, le tribunal de commerce de Pontoise a :

- mis fin à la période d'observation ;

- prononcé la liquidation judiciaire de la société Culture & évasion ;

- dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

Par déclaration du 16 février 2023, la société Culture & évasion a interjeté appel du jugement. Sa déclaration d'appel a été signifiée le 7 mars 2023, par acte remis à personne habilitée, à la société [E], ès qualités, laquelle n'a pas constitué avocat.

Par conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 27 mars 2023, puis signifiées le 29 mars 2023 à la société [E], ès qualités, par acte remis à personne habilitée, la société Culture & évasion demande à la cour de :

- la recevoir en ses écritures et la dire bien fondée ;

- infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

- ordonner l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à son égard avec fixation d'une période d'observation de six mois et désignation du juge-commissaire ainsi que des organes de la procédure ;

- statuer ce que de droit quant aux dépens.

L'appelante fait valoir que malgré la demande de renvoi de son conseil qui ne pouvait être présent à l'audience du 3 février 2023, le tribunal, alors qu'elle n'a pas comparu, a retenu l'affaire de sorte qu'elle n'a pas été en mesure de faire valoir ses moyens de défense.

Si elle admet avoir un passif important, elle soutient que cependant le montant du passif déclaré et non encore vérifié permet de démontrer qu'elle sera en mesure de respecter un plan.

Elle prétend établir qu'à la date du jugement ouvrant la procédure collective, elle disposait d'un chiffre d'affaires lui permettant d'envisager un plan au regard de l'activité enregistrée avec 'Amazon', que l'état de l'actif prévisionnel permet de faire face aux charges courantes ainsi qu'à l'apurement du passif et qu'elle peut trouver des solutions pour acquitter ses obligations de sorte que son redressement est manifestement possible. Elle indique, in fine de ses écritures, produire sous sa pièce 11 'les documents comptables permettant de démontrer ses capacités de financement du plan de redressement'.

Dans son avis notifié par RPVA le 6 mars 2023, le ministère public demande à la cour de confirmer le jugement aux motifs que l'appelante refuse de collaborer avec les organes de la procédure, et a produit des liasses fiscales comportant le cachet d'un expert-comptable qui n'a jamais été missionné. Il observe

qu'en outre aucune exploitation n'a eu lieu depuis l'ouverture de la procédure, ni de flux de trésorerie, et qu'enfin le commissaire-priseur désigné n'a pu effectuer sa mission, aucune suite n'ayant été donnée à ses demandes par l'appelante. Il rappelle qu'un contrôle fiscal est en cours et que la dirigeante de la société était absente le jour de l'audience devant les premiers juges, bien que régulièrement convoquée.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 juin 2023.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens de l'appelante, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

L'article L. 631-15 du code de commerce prévoit qu'à tout moment de la période d'observation, le tribunal, à la demande du débiteur, de l'administrateur, du mandataire judiciaire, d'un contrôleur, du ministère public ou d'office, peut ordonner la cessation partielle de l'activité ou prononce la liquidation judiciaire si le redressement est manifestement impossible.

Lors de l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société Culture & évasion, le tribunal a indiqué qu'il résultait des pièces produites et des informations recueillies en chambre du conseil que:

- l'actif disponible est inexistant,

- le passif exigible s'élève à 630 000 suros et le chiffre d'affaires annuel, à 2 187 550 euros,

- la société emploie deux salariés.

Considérant que la situation de la société permettait alors d'envisager l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire afin d'étudier la possibilité d'un plan de redressement, le tribunal a ouvert une période d'observation de six mois, le 5 décembre 2022.

L'administrateur judiciaire, en conclusion du bilan économique et social de la société et de son rapport sur le déroulement de la procédure, daté du 27 janvier 2023, déposé en parallèle de la requête et transmis à la cour par le tribunal de commerce, a sollicité, sur le fondement de l'article L.631-15 II du code de commerce, la conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire ; après avoir indiqué que selon la dirigeante de l'entreprise les difficultés financières seraient liées à un déménagement en mai 2022 dans des locaux qui se sont avérés inadaptés et trop coûteux, il a souligné que :

- alors que les liasses fiscales présentées par la société comportent le cachet d'un expert-comptable, celui-ci a confirmé ne pas avoir été missionné pour la tenue ou la supervision de la comptabilité de cette société ;

- après s'être rendu sur les lieux où la société dispose d'un entrepôt de stockage, le commissaire-priseur qui a interrogé plus d'une dizaine de salariés des société voisines et indiqué être resté environ trois heures sur place, n'a pas pu identifier les locaux de la société dont la dirigeante n'a pas donné suite à ses sollicitations de sorte qu'il n'a pu réaliser son inventaire ;

- la dirigeante n'a justifié d'aucune activité sur la période d'observation ni de flux de trésorerie.

Dans le corps du bilan économique et social, il est précisé que :

- il a été déclaré dans la déclaration de cessation des paiements des stocks valorisés à 800 000 euros ;

- le passif privilégié déclaré s'élève à la somme de 330 000 euros dont 150 000 euros dus à la société bailleresse, étant précisé que l'actionnaire d'une autre société dont Mme [W] [P] est également la gérante, lequel a indiqué avoir apporté la somme de 300 000 euros à la société débitrice, n'avait pas encore déclaré sa créance à la date du rapport ;

- la trésorerie n'a pas été déposée sur le compte ouvert à la banque Thémis bien que la société ait été avisée de l'ouverture d'un compte destiné à recevoir les flux de la période d'observation et à régler les charges courantes ; aucune demande de règlement de fournisseur n'a été formulée  depuis l'ouverture de la période d'observation ;

- la SCP [E] a été avisée, par courrier reçu le 21 décembre 2022 de l'administration fiscale, d'une vérification de comptabilité en cours depuis le 12 septembre 2022 et portant sur les exercices écoulés à compter de l'année 2019 ; l'administration fiscale a précisé à cette occasion que tous les avis, mises en demeure et mises en garde d'opposition à contrôle fiscal ainsi que le procès-verbal d'opposition à contrôle fiscal daté du 15 novembre 2022, adressés à la société et pour certains également à sa dirigeante, sont revenus avec la mention 'pli avisé et non réclamé' ;

- lors du rendez-vous du 12 janvier 2023 auquel Mme [P] s'est rendue accompagnée d'un salarié de la société, ont été communiqués les statuts et le bail commercial de la société ainsi qu'une attestation d'assurance datée du 4 mars 2022 mais il n'a été remis aucun élément relatif aux salariés, en particulier l'attestation du nombre de salariés au jour de l'ouverture de la procédure ; il a été déclaré que tous les salariés portés sur la déclaration de cessation des paiements avaient démissionné à la date de l'ouverture de la procédure ;

- lors de ce rendez-vous, la dirigeante a évoqué oralement un chiffre d'affaires réalisé en décembre 2022 de 60 000 euros alors que d'après le prévisionnel remis lors de l'ouverture de la procédure, non certifié par un expert-comptable, il était prévu un chiffre d'affaires de 722 700 euros sur le mois de décembre, période d'intense d'activité d'après la dirigeante de la société ; ce chiffre d'affaires est bien inférieur au chiffre d'affaires le plus bas prévu dans ce prévisionnel qui était, pour le mois de février 2023, de 195 000 suros ;

- ce prévisionnel qui prévoyait un effectif de six salariés plus deux salariés manutentionnaires, en contrat de travail à durée déterminée, évalue le montant des charges mensuelles, avant impôt, entre 146 031 euros au plus bas et 415 495 euros, au mois de décembre lorsque l'activité était la plus dense.

Il n'est ni établi ni au demeurant allégué qu'un arrêt de l'exécution provisoire du jugement dont appel aurait été sollicité.

Le conseil de la société appelante, au titre des justificatifs allégués dans ses écritures, pour démontrer ses capacités de financement, a communiqué, sous sa pièce 11 dénommée 'justificatifs', le projet de bilan économique et social daté du 16 janvier 2023, un état établissant qu'au 24 novembre 2022, ni privilèges ni gages n'étaient inscrits à l'égard de la société Culture & évasion et enfin la liasse fiscale de l'exercice 2021 sur laquelle figure le tampon de expert-comptable qui a indiqué n'avoir jamais établi les comptes de la société.

S'il ressort du projet de bilan économique et social que l'administrateur judiciaire a conclu à la poursuite de l'activité, il ne peut en être tiré de conséquence dans la mesure où il ne s'agit que d'un projet dont les conclusions n'ont pas été confirmées d'autant que le contenu de ce projet qui comporte les mêmes informations que le bilan définitif à la seule exception des précisions relatives au contrôle fiscal en cours, ne démontre pas que l'établissement d'un plan soit possible, quand bien même aucune inscription de privilège n'avait été prise à l'égard de la société en novembre 2022 ; en effet le chiffre d'affaires donnés en dernier lieu par la dirigeante, bien inférieur à ceux envisagés dans le prévisionnel pour permettre de faire face aux charges de la société, démontrent qu'avec le chiffre d'affaires effectivement réalisé, la société est dans l'impossibilité, notamment pendant la période d'observation, de payer ses charges courantes.

En outre, la société appelante a justifié que le bail des locaux dans lesquels elle exploitait son activité a été résilié par ordonnance du 10 janvier 2023 qui a constaté l'acquisition de la clause résolutoire et a ordonné l'expulsion de cette dernière.

La cour, au regard de ces seuls éléments recueillis au début de la période d'observation, ne peut que constater, comme le tribunal, que le redressement de la société débitrice, qui n'exploite plus son activité depuis plusieurs mois désormais, est manifestement impossible.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt réputé contradictoire,

Confirme le jugement du 3 février 2023 ;

Dit que les dépens de la procédure d'appel seront recouvrés en frais privilégiés de la procédure collective de la société Culture & évasion.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller faisant fonction de Président, et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Conseiller faisant fonction de Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Versailles
Formation : 13e chambre
Numéro d'arrêt : 23/01138
Date de la décision : 11/07/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-07-11;23.01138 ?
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