REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 10
ARRÊT DU 18 MARS 2024
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 23/06713 - N° Portalis 35L7-V-B7H-CHN7I
Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 Mars 2023 - Tribunal de Commerce de PARIS RG n° 2022059788
APPELANTE
S.A.S. LOCAM LOCATION AUTOMOBILES MATERIELS,
représentée par son représentant légal domicilié es-qualité audit siège.
Ayant son siège social
[Adresse 3]
[Localité 2]
N° SIRET : 310 880 315
Représentée par Me Guillaume MIGAUD de la SELARL ABM DROIT ET CONSEIL AVOCATS E.BOCCALINI & MIGAUD, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC129
INTIMEE
S.A.R.L. B.A.D.Y. exerçant sous l'enseigne [4]
Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de STRASBOURG,
N° SIRET : 499 648 509
Agissant poursuite et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège
Ayant son siège social
[Adresse 1]
[Localité 5]
Défaillant
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 08 Janvier 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :
Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente
Monsieur Jacques LE VAILLANT, Conseiller
Madame Sylvie CASTERMANS, Magistrate honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MOLLÉ
ARRÊT :
- Réputé contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente et par Sylvie MOLLÉ, Greffier, présent lors de la mise à disposition.
FAITS ET PROCEDURE
La société Locam a pour activité la location d'équipements pour les professionnels. La société B.A.D.Y. (ci-après dénommée Bady) exerçant sous l'enseigne [4], exploite une affaire de restauration rapide à [Localité 5].
Par contrat en date du 3 juillet 2020, la société Bady a donné à la société Viatelease mandat pour rechercher un bailleur de matériel téléphonique, pour 63 loyers mensuels de 127,02 € HT (152,42 € TTC), avec possibilité pour Viatelease de se porter contrepartie au contrat de location. La société Viatelease a exercé cette possibilité, puis a cédé le contrat de location à la société Locam le 9 septembre 2020. Le matériel a été réceptionné par la société Bady le 21 juillet 2020.
Constatant des impayés à compter de l'échéance du 30 décembre 2021, la société Locam a mis en demeure la société Bady de payer sous huit jours, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 24 mars 2022. Cette dernière ne s'étant pas exécutée, la société Locam a prononcé la résolution du contrat puis a assigné en paiement la société Bady devant le tribunal de commerce de Paris.
Par jugement du 29 mars 2023, le tribunal de commerce de Paris a statué comme suit :
- Se déclare incompétent au profit de la chambre commerciale du tribunal judiciaire de Strasbourg ;
- Dit que le greffe procédera à la notification de la présente décision par lettre recommandée avec accusé de réception adressée exclusivement aux parties ;
- Dit qu'en application de l'article 84 du code de procédure civile, la voie de l'appel est ouverte contre la présente décision dans le délai de quinze jours à compter de ladite notification ;
- Dit qu'à défaut d'appel dans ce délai, le dossier sera transmis à la juridiction susvisée dans les conditions de l'article 82 du code de procédure civile ;
- Condamne la société Locam aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 110,12 € dont 18,14 € de TVA.
Par déclaration du 14 avril 2023, la société Locam a interjeté appel de ce jugement.
Par ordonnance du 21 avril 2023, la société Locam a été autorisée à assigner la société Bady à comparaître à l'audience du lundi 8 janvier 2024 à 14 heures.
Par conclusions signifiées avec le 11 juillet 2023, la société Locam demande à la cour, au visa de la clause attributive de juridiction, de la juger recevable et bien fondée en l'ensemble de ses demandes et d'infirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Paris en date du 29 mars 2023, en ce qu'il s'est déclaré incompétent au profit de la chambre commerciale du tribunal judiciaire de Strasbourg et de juger que le tribunal de commerce de Paris était compétent pour connaître du présent litige et, en conséquence, de renvoyer l'affaire devant le tribunal de commerce de Paris pour qu'il soit statuer sur le fond.
Elle sollicite la condamnation de la société Bady au paiement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de la présente instance.
La société Bady n'a pas constitué avocat.
SUR CE,
Le tribunal a estimé que la clause attributive de compétence figurant en page 5 des conditions générales du contrat de location Viatelease était rédigée en caractères de petite taille strictement identiques à ceux utilisés pour les autres clauses et ne saurait être considérée comme étant " spécifiée de façon très apparente " comme l'exige l'article 48 du code de procédure civile et qu'en outre les conditions générales du contrat n'avaient pas été signées par la société Bady.
La société Locam fait valoir que, par acte sous seing privé en date du 3 juillet 2020, la société Bady a mandaté la société Viatelease à effet de conclure notamment avec tout établissement financier aux conditions générales et particulières convenues entre elles un contrat de location longue durée du matériel désigné au bon de commande et prévoyait expressément : " Le Client donne, par les présentes, expressément et irrévocablement mandat à la Société Viatelease à l'effet de conclure avec tout établissement financier, aux Conditions Générales et Particulières ci-après, dont le Client/Locataire déclare avoir pris connaissance et les approuver, un contrat de location longue durée du matériel désigné au Bon de Commande conclu ce jour également annexé, étant précisé que le Mandataire/Loueur pourra se porter contrepartie au présent mandat à charge pour elle d'en respecter strictement les conditions. "
Il est également expressément convenu que Viatelease pourra se substituer à toute autre société du groupe dont elle dépend à l'effet d'exécuter le mandat et en respecter strictement les conditions. A défaut pour le Mandataire/Loueur d'exécuter le mandat dans les termes et conditions ci-après convenus et ce dans un délai de trois mois compter de la signature du Bon de Commande, le contrat de fourniture sera caduc et le mandat sera dès lors sans objet.
Elle fait valoir également que le contrat a été signé selon les dispositions des articles 1366 et 1367 du code civil, sous le contrôle de la société Docapost, tiers digne de confiance et qu'elle produit aux présentes le certificat de signature.
Elle expose que le contrat prévoit expressément en son article 20 : " Tous les litiges auxquels peut donner lieu l'exécution du présent contrat sont réglés selon le droit de la République française et soumis au Tribunal de commerce de PARIS y compris en cas d'appel en garantie ou de pluralité de défendeurs. " et soutient qu'il est le dernier article des conditions générales de location de sorte qu'il n'est pas noyé au milieu des autres clauses et est suffisamment apparent au sens de l'article 48 du code de procédure civile. Elle précise que la société Bady a reconnu avoir reçu et approuvé les conditions générales dont la clause attributive de compétence.
Les articles 1366 et 1367 disposent : " L'écrit électronique a la même force probante que l'écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu'il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l'intégrité.
La signature nécessaire à la perfection d'un acte juridique identifie son auteur. Elle manifeste son consentement aux obligations qui découlent de cet acte. Quand elle est apposée par un officier public, elle confère l'authenticité à l'acte.
Lorsqu'elle est électronique, elle consiste en l'usage d'un procédé fiable d'identification garantissant son lien avec l'acte auquel elle s'attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu'à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l'identité du signataire assurée et l'intégrité de l'acte garantie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. "
Ceci étant exposé, en application de l'article 85 du code de procédure civile, l'appel d'une décision statuant sur la compétence est instruit comme en matière de procédure à jour fixe si les règles applicables à l'appel des décisions rendues par la juridiction dont émane le jugement frappé d'appel impose la constitution d'avocat, ce qui est le cas en l'espèce.
L'article 920 du code de procédure civile dispose que " L'appelant assigne la partie adverse pour le jour fixé. Copie de la requête, de l'ordonnance du premier président, et un exemplaire de la déclaration d'appel visé par greffier ou une copie de la déclaration d'appel dans le cas mentionné au troisième alinéa de l'article 919, sont joints à l'assignation.
L'assignation informe l'intimé que faute de constituer avocat avant la date d'audience, il sera réputé s'en tenir à ses moyens de première instance.
L'assignation indique à l'intimé qu'il peut prendre connaissance au greffe de la copie des pièces visées dans la requête et lui fait sommation de communiquer avant la date d'audience les nouvelles pièces dont il entend faire état. "
L'assignation délivrée à la requête de la société Locam à l'encontre de la société Bady en date du 15 juin 2023 par dépôt de l'acte en l'étude du commissaire de justice mentionne la remise des éléments suivants :
. déclaration d'appel et de son annexe faite au greffe de la cour d'appel de Paris le 14.04.2023 contenant appel d'un jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 29 mars 2023,
. conclusions déposées au soutien de l'appel,
. pièces telles que visées in fine des conclusions.
L'acte de signification ne comporte ni la copie de la requête ni de l'ordonnance portant autorisation d'assigner à jour fixe.
L'acte de signification produit aux débats ne comporte pas la copie des pièces mentionnées ni le nombre de pages de l'acte de sorte que la cour est dans l'impossibilité de s'assurer de la signification de ces documents et alors au surplus, qu'il n'a pas été indiqué à l'intimé la possibilité de prendre connaissance de la copie des pièces au greffe.
En outre, il fait état de manière erronée aux articles 902, 909 et 910 du code de procédure civile.
Enfin, l'acte donne assignation à la société Bady de comparaitre devant la chambre 10 du pôle 5 de la cour d'appel de Paris " dans le délai de quinze jours " sans préciser la date d'audience du 8 janvier 2024 telle que fixée par l'ordonnance du 21 avril 2023 portant autorisation d'assigner à jour fixe.
C'est pourquoi, la cour ordonne la réouverture des débats et invite la société Locam à conclure sur les moyens soulevés d'office par la cour tirés d'une part de l'irrecevabilité de l'appel et d'autre de la nullité de l'assignation.
L'affaire sera renvoyée à l'audience du 9 septembre 2024 à 14h00.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
ORDONNE la réouverture des débats,
INVITE la société Locam à conclure sur les moyens soulevés d'office par la cour tirés d'une part de l'irrecevabilité de l'appel et d'autre de la nullité de l'assignation ;
RENVOIE l'affaire à l'audience du 9 septembre 2024 à 14h00
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT
S.MOLLÉ C.SIMON-ROSSENTHAL