Ordonnance N°23/389
N° RG 23/00417 - N° Portalis DBVH-V-B7H-IZOC
J.L.D. NIMES
26 avril 2023
[M] alias [P]
C/
LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE
COUR D'APPEL DE NÎMES
Cabinet du Premier Président
Ordonnance du 27 AVRIL 2023
Nous, M. Michel SORIANO, Conseiller à la Cour d'Appel de NÎMES, conseiller désigné par le Premier Président de la Cour d'Appel de NÎMES pour statuer sur les appels des ordonnances des Juges des Libertés et de la Détention du ressort, rendues en application des dispositions des articles L 742-1 et suivants du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit de l'Asile (CESEDA), assisté de Mme Emmanuelle PRATX, Greffière,
Vu l'arrêté de M. Le Préfet des Bouches du Rhone portant obligation de quitter le territoire national en date du 24 avril 2023 notifié le même jour, ayant donné lieu à une décision de placement en rétention en date du 24 avril 2023, notifiée le même jour à 15h30 concernant :
M. [B] [M] alias [P]
né le 02 Février 2002 à [Localité 2] (MAROC)
de nationalité Marocaine
Vu la requête reçue au Greffe du Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal Judiciaire de Nîmes le 24 avril 2023 à 14h56, enregistrée sous le N°RG 23/2102 présentée par M. le Préfet des Bouches du Rhone ;
Vu l'ordonnance rendue le 26 Avril 2023 à 11h59 par le Juge des Libertés et de la Détention du Tribunal de NÎMES, qui a :
* Rejeté l'exception de nullité soulevée ;
* Ordonné pour une durée maximale de 28 jours commençant 48H après la notification de la décision de placement en rétention, le maintien dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, de M. [B] [M] alias [P];
* Dit que la mesure de rétention prendra fin à l'expiration d'un délai de 28 jours à compter du 26 avril 2023 à 15h30,
Vu l'appel de cette ordonnance interjeté par Monsieur [B] [M] alias [P] le 26 Avril 2023 à 15h00 ;
Vu l'absence du Ministère Public près la Cour d'appel de NIMES régulièrement avisé ;
Vu la présence de Monsieur [R] [Z], représentant le Préfet des Bouches du Rhone, agissant au nom de l'Etat, désigné pour le représenter devant la Cour d'Appel en matière de Rétention administrative des étrangers, entendu en ses observations ;
Vu l'assistance de Monsieur [S] [C] interprète en langue arabe inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel de Nîmes,
Vu la comparution de Monsieur [B] [M] alias [P], régulièrement convoqué ;
Vu la présence de Me Fahd MIHIH, avocat de Monsieur [B] [M] alias [P] qui a été entendu en sa plaidoirie ;
MOTIFS
Vu la requête du Préfet des Bouches du Rhône reçue au greffe du juge des libertés et de la détention de Nîmes le 25 avril 2023 à 14h56 en prolongation d'une première période de rétention administrative de M. [B] [M],
Vu l'ordonnance rendue le 26 avril 2023 par le juge des libertés et de la détention de Nîmes qui a ordonné la prolongation de la rétention administrative de M. [B] [M] pour une durée maximale de 28 jours,
Vu l'appel interjeté par M. [B] [M] le 26 avril 2023 à 15h00,
M. [B] [M] a fait l'objet d'un arrêté pris le 24 avril 2023 par le préfet des Bouches du Rhône portant obligation de quitter le territoire français sans délai avec interdiction de retour de deux ans qui lui a été notifié le jour même.
Au soutien son appel, M. [B] [M] invoque l'irrégularité de la requête au motif que le signataire de la requête de prolongation n'est pas compétent.
L'avocat de M. [B] [M] soulève l'irrégularité de la retenue pour vérification du droit au séjour au motif d'un avis tardif au procureur de la République. M. [M] a été interpelé à 09h30 et l'avis au procureur de la République a été fait à 10h20, soit 50 minutes après son interpellation. La tardiveté n'est pas justifiée par des circonstances exceptionnelles.
Les deux avis figurant au dossier ne concernent pas la retenue.
Le Préfet requérant soutient que :
- l'intéressé a été interpellé à 09h30 et le procureur de la République a été avisé sur sa fiche d'interdiction du territoire à 09h50. La notification du placement en retenue a été faite à 10h05 et l'avis au procureur de la République à 10h20.
- M. [M] est connu sous différentes identités et s'est soustrait à plusieurs mesures d'éloignement.
- le consultat d'Algérie a été avisé le 24 avril 2023.
Sur la recevabilité de l'appel
L'appel interjeté le 26 avril 2023 à 15h00 par M. [B] [M] à l'encontre d'une ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Nîmes prononcée en sa présence le 26 avril 2023 à 11h59 a été relevé dans les délais légaux et conformément aux dispositions des articles L743-21, R743-10 et R743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Il est donc recevable.
Sur l'information du procureur de la République dès le début de la retenue
L'article L.813-4 du Ceseda dispose que « Le procureur de la République est informé dès le début de la retenue et peut y mettre fin à tout moment. »
M. [M] a été interpellé à 9h25 et conduit auprès de l'officier de police judiciaire de permanence à 9h40 aux fins d'être placé en retenue administrative afin de vérifier sa situation.
Il a été placé en retenue, et après avoir requis un interprète, ses droits lui ont été notifiés à 10h05, avec effet rétroactif à 9h30 moment de son contrôle d'identité.
Le magistrat de permanence au parquet était informé pour sa part à 9h50.
L'avis donné au procureur de la République de la mesure de retenue dont il fait l'objet a été effectué à 10h20.
Ainsi, tenant compte du temps nécessaire pour procéder au contrôle de l'intéressé et du temps de trajet pour le présenter à l'officier de police judiciaire de permanence, et de l'avis à parquet moins de 20 minutes après le placement effectif en rétention et 40 minutes après la remise à l'officier de police judiciaire et moins d'une heure après l'interpellation, durée n'apparaissant pas disproportionnée en raison des circonstances ci- dessus décrites,
En conséquence, l'ordonnance entreprise est confirmée en ce qu'elle a rejeté cette exception de nullité.
Sur les moyens nouveaux et élément nouveaux en cause d'appel
L'article 563 du code de procédure civile dispose : « Pour justifier en appel les prétentions qu'elles avaient soumises au premier juge, les parties peuvent invoquer des moyens nouveaux, produire de nouvelles pièces ou proposer de nouvelles preuves. »
L'article 565 du même code précise : « Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent ».
Sauf s'ils constituent des exceptions de procédure, au sens de l'article 74 du code de procédure civile, les moyens nouveaux sont donc recevables en cause d'appel.
A l'inverse, pour être recevables en appel, les exceptions de nullité relatives aux contrôle d'identité, conditions de la garde à vue ou de la retenue et d'une manière générale celles tenant à la procédure précédant immédiatement le placement en rétention doivent avoir été soulevées in « limine litis » en première instance.
En l'espèce, tous les moyens soulevés par M. [B] [M] sont recevables, ce qui n'est au demeurant pas contesté.
Sur la recevabilité de la requête en prolongation
M. [B] [M] soutient qu'il appartient au juge judiciaire de vérifier la compétence du signataire de la requête en prolongation et la mention des empêchements éventuels des délégataires de signature.
Il soulève ainsi l'incompétence du signataire de la requête en prolongation.
Toutefois, le Préfet des Bouches du Rhône a joint à la requête litigieuse un arrêté préfectoral en date du 13 avril 2023 portant délégation de signature à M. [I] [H] [D].
L'apposition de sa signature sur la requête présuppose l'empêchement des autres personnes ayant reçu délégation par préférence, M. [B] [M] ne démontrant pas le contraire alors qu'en application de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à ce dernier d'apporter la preuve de ses allégations.
Le moyen d'irrecevabilité doit ainsi être écarté.
Sur le fond
L'article L.611-1 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose des cas dans lesquels un étranger peut faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français et/ou l'article L.612-6 du même code d'une interdiction de retour sur le territoire français tandis que l'article L611-3 du même code liste de manière limitative les situations dans lesquelles de telles mesures sont exclues.
L'article L.741-3 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précise qu'en tout état de cause «un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration doit exercer toute diligence à cet effet.»
L'article L.742-3 du même code prévoit que le prolongation court pour une période de 28 jours à compter de l'expiration du délai de 48 heures mentionné à l'article L.741-1 du même code.
En l'espèce, la cour considère que c'est par une analyse circonstanciée et des motifs particulièrement pertinents qu'il convient d'adopter que le premier juge a statué sur les moyens de fond soulevés devant lui et repris devant la cour, aucun élément nouveau n'étant produit par l'intéressé.
M. [B] [M] a fait l'objet d'un arrêté préfectoral en date du 24 avril 2023 portant obligation de quitter le territoire national sans délai avec interdiction de retour pour deux ans.
Il ne peut dès lors prétendre se maintenir sur le territoire français.
L'intéressé ne dispose d'aucun domicile, d'aucune source de revenus ni possibilité de financement pour assurer son retour dans son pays.
Il ne peut en outre justifier d'aucune attache sur le territoire national.
M. [M] s'est par ailleurs déjà soustrait à plusieurs mesures d'éloignement.
L'administration a dès lors procédé aux diligences nécessaires pour assurer l'éloignement de l'intéressé dans les plus brefs délais.
Il s'en déduit que la prolongation de sa rétention administrative demeure justifiée et nécessaire aux fins qu'il puisse être procédé effectivement à son éloignement.
Il convient par voie de conséquence de confirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions.
PAR CES MOTIFS
Statuant publiquement, en matière civile et en dernier ressort,
Vu l'article 66 de la constitution du 4 octobre 1958,
Vu les articles L.741-1, L.742-1 à L.743-9 ; R.741-3 et R.743-1 à R.743-19, L.743.21 du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
DÉCLARONS recevable l'appel interjeté par Monsieur [B] [M] alias [P] ;
CONFIRMONS l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;
RAPPELONS que, conformément à l'article R.743-20 du Code de l'Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d'Asile, les intéressés peuvent former un pourvoi en cassation par lettre recommandée avec accusé de réception dans les deux mois de la notification de la présente décision à la Cour de cassation [Adresse 1].
Fait à la Cour d'Appel de NÎMES,
le 27 Avril 2023 à
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
' Notification de la présente ordonnance a été donnée ce jour au Centre de rétention administrative de [Localité 3] à M. [B] [M] alias [P], par l'intermédiaire d'un interprète en langue arabe.
Le à H
Signature du retenu
Copie de cette ordonnance remise, ce jour, par courriel, à :
- Monsieur [B] [M] alias [P], par le Directeur du centre de rétention de [Localité 3],
- Me Fahd MIHIH, avocat
(de permanence),
- M. Le Préfet des Bouches du Rhone
,
- M. Le Directeur du CRA de [Localité 3],
- Le Ministère Public près la Cour d'Appel de NIMES
- Mme/M. Le Juge des libertés et de la détention,