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24/04/2024 | FRANCE | N°24/00052

France | France, Cour d'appel de Chambéry, Première présidence, 24 avril 2024, 24/00052


COUR D'APPEL DE CHAMBERY

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Première Présidence







ORDONNANCE



STATUANT SUR L'APPEL D'UNE ORDONNANCE DU JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DÉTENTION EN MATIERE DE SOINS PSYCHIATRIQUES





du Mercredi 24 Avril 2024







N° RG 24/00052 - N° Portalis DBVY-V-B7I-HOW2



Appelante

Mme [W] [D]

née le 20 Septembre 1945 à [Localité 10] (69)

[Adresse 2]

[Localité 5]

hospitalisée au Centre Hospitalier d'[9]

assistée de Me Delphine

MONTOYA, avocate désignée d'office inscrite au barreau de CHAMBERY



Appelés à la cause

CENTRE HOSPITALIER [9]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 6]

non comparant



Association ATMP HAUTE SAV...

COUR D'APPEL DE CHAMBERY

----------------

Première Présidence

ORDONNANCE

STATUANT SUR L'APPEL D'UNE ORDONNANCE DU JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DÉTENTION EN MATIERE DE SOINS PSYCHIATRIQUES

du Mercredi 24 Avril 2024

N° RG 24/00052 - N° Portalis DBVY-V-B7I-HOW2

Appelante

Mme [W] [D]

née le 20 Septembre 1945 à [Localité 10] (69)

[Adresse 2]

[Localité 5]

hospitalisée au Centre Hospitalier d'[9]

assistée de Me Delphine MONTOYA, avocate désignée d'office inscrite au barreau de CHAMBERY

Appelés à la cause

CENTRE HOSPITALIER [9]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 6]

non comparant

Association ATMP HAUTE SAVOIE - mandataire spécial (ordonnance de sauvegarde de justice rendue par le juge des tutelles d'Annecy en date du 29 août 2023)

[Adresse 3]

[Localité 7]

non comparant

M. [U] [P]-tiers demandeur à l'admission (fils)

[Adresse 4]

[Localité 8]

non comparant

Partie Jointe :

Le Procureur Général - Cour d'Appel de CHAMBERY - Palais de Justice - 73018 CHAMBERY CEDEX - dossier communiqué et réquisitions écrites

*********

DEBATS :

L'affaire a été débattue publiquement, à l'audience du mercredi 24 avril 2024 à 10h devant Madame Isabelle CHUILON, conseillère à la cour d'appel de Chambéry, déléguée par ordonnance de Madame la première présidente, pour prendre les mesures prévues aux dispositions de la loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de prise en charge, assistée de Madame Sophie Messa, greffière

L'affaire a été mise en délibéré au mercredi 24 avril 2024 après-midi,

****

EXPOSE DES FAITS, DE LA PROCEDURE, DES PRETENTIONS ET MOYENS :

Mme [D] [W] a été admise en soins psychiatriques sans consentement, sous la forme d'une hospitalisation complète au sein des unités de psychiatrie adultes du [9], à la demande d'un tiers (son fils M. [P] [U]) en urgence, sur décision du directeur du Centre hospitalier [9] du 29 mars 2024 à 14h00.

Cette décision a été prise sur la base d'un certificat médical du Docteur [C] [A], exerçant au Centre hospitalier [9], faisant état, en date du 29 mars 2024 à 11h30 des éléments suivants :'Elle présente des troubles du comportement au domicile ainsi que des idées délirantes de persécution. Contexte de rupture de traitement. Patiente récemment hospitalisée sur les unités de psychiatrie, long séjour qui a pris fin début février, avec recrudescence rapide des troubles. À l'entretien ce jour, contact méfiant et quasi hostile, délire de persécution au premier plan avec participation affective marquée. Pas de critique du délire. Absence de conscience du caractère pathologique de ses troubles. Refus des soins psychiatriques'.

Le certificat médical de 24 heures du Docteur [X] [O], psychiatre au CH [9], indiquait le 30 mars 2024 à 11h30 : ' Ce jour, la patiente tient un discours délirant florid à mécanisme interprétatif, se dit persécutée pour des raisons 'politiques', que les familles lui feraient des signes sur le parking. Contact moyen, réticence. Déni des troubles. Refus des soins.'.

Le certificat médical de 72 heures du Docteur [Z], psychiatre au CH [9], mentionnait en date du 1er avril 2024 à 11h00 :'Ce jour, la patiente reste calme avec une instabilité motrice. Son discours est incohérent avec des persévérations. Elle exprime des fausses reconnaissances. Il persiste des idées délirantes de persécution centrées sur ses voisins. Aucune critique. La patiente n'a pas conscience de ses troubles. Maintien en hospitalisation'.

Par décision du 1er avril 2024, le directeur du Centre hospitalier [9] a ordonné la poursuite des soins psychiatriques de Mme [D] [W] pour une durée d'un mois sous la forme d'une hospitalisation complète.

Par avis motivé du 4 avril 2024, rédigé par le Docteur [Y] [G], psychiatre au CH [9], en vue de la saisine du JLD, il était indiqué : ' Patiente de 78 ans admise en SDT pour la prise en charge de troubles du comportement compliquant un trouble psychotique connu dans un contexte de mauvaise observance thérapeutique. La patiente est sortie d'hospitalisation en février dernier. À domicile, les prises de traitement sont aléatoires, le maintien à domicile se complexifie du fait des troubles du comportement et de sa perte d'autonomie. Depuis son admission dans le service, les échanges restent compliqués du fait d'une importante méfiance, la patiente est réticente à se livrer et se montre hermétique. Le discours est de tonalité persécutoire. La prise des traitements reste compliquée, la patiente est dans le déni de ses troubles. La patiente nécessite de rester hospitalisée afin de poursuivre le temps d'observation, de reprendre un traitement adapté et de réfléchir au projet de vie. Par conséquent les soins sous contrainte restent justifiés et à maintenir sous la forme d'une hospitalisation complète.'.

Par ordonnance du 09 avril 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire d'Annecy a autorisé la poursuite de l'hospitalisation complète de Mme [D] [W] au sein des unités d'hospitalisation de psychiatrie adultes du Centre hospitalier [9].

Mme [D] [W] a rédigé un courrier transmis par le CH d'[9] le 12 avril 2024 à 09h24 au greffe de la Cour d'Appel, précisant qu'il s'agissait d'une demande d'appel de l'intéressée.

Suivant réquisitions écrites du 16 avril 2024, le Procureur général près la Cour d'appel de Chambéry s'est prononcé en faveur d'une confirmation de la décision du juge des libertés et de la détention d'Annecy du 9 avril 2024.

L'avis motivé du 22 avril 2024, rédigé par le Docteur [G] [Y], psychiatre au CH [9], mentionne : ' Patiente de 78 ans admise en SDTU pour la prise en charge de troubles du comportement compliquant un trouble psychotique connu dans un contexte de mauvaise observance thérapeutique. La patiente est sortie d'hospitalisation en février dernier, son état psychique s'est progressivement dégradé à domicile avec des prises de traitements aléatoires. Le maintien à domicile se complexifie en parallèle d'une perte d'autonomie. Depuis son arrivée dans le service, la patiente est calme, le contact est correct. En entretien, la patiente se montre méfiante et réticente à se libérer, le discours est imprécis et flou avec des éléments de persécution. La patiente est dans le déni de ses troubles. L'adhésion aux soins et l'alliance thérapeutique restent fragiles. Par conséquent, les soins sous contrainte restent justifiés et à maintenir sous la forme d'une hospitalisation complète.'.

Lors de l'audience publique du 24 avril 2024, Mme [D] [W] a confirmé vouloir faire appel de la décision rendue le 9 avril 2024 par le juge des libertés et de la détention d'Annecy, devant lequel il ne lui avait pas été donné la possibilité de comparaître du fait qu'elle avait été conduite, le jour du débat contradictoire, à une consultation médicale post-opératoire. Elle a sollicité la mainlevée de sa mesure d'hospitalisation sous contrainte, exposant qu'il était prévu qu'elle bénéficie, dans deux jours, d'une sortie d'essai à son domicile. Elle a répondu qu'elle respectait l'avis du corps médical, en qui elle avait confiance, mais qu'elle n'était, toutefois, pas d'accord avec le fait d'avoir été hospitalisée sans son consentement, considérant cette procédure comme abusive et indiquant : 'je ne pense pas avoir déliré d'aucune manière'. Elle a indiqué bénéficier, en milieu ouvert, d'un suivi infirmier permettant de s'assurer de la prise quotidienne de son traitement (Risperdal) ainsi que d'aides à domicile. Elle a, par ailleurs, fait état de 'problèmes de voisinage récurrents', liés au fait, notamment, qu'elle avait pu 'squatter les couloirs pour mieux respirer', évoquant, en outre, les paroles d'une voisine qui lui avait dit de 'se méfier', raison pour laquelle elle souhaitait déménager dans une autre résidence où l'environnement serait 'plus sain'. Enfin, elle a fait part de sa volonté de ne 'plus être dans la ligne de mire'.

Son avocate, Maître Montoya Delphine, a été entendue en ses observations. Elle a soulevé une irrégularité procédurale, liée au fait que le certificat médical initial ne caractériserait pas l'urgence et le risque grave d'atteinte à l'intégrité de la malade. Par ailleurs, elle a fait observer que Mme [D] [W] adhérant aux soins prodigués, la question se posait de savoir si les conditions de son hospitalisation sans consentement étaient réunies.

Le parquet général n'a pas comparu, mais ses réquisitions écrites ont été mises à la disposition des parties avant l'audience et portées à la connaissance de la personne hospitalisée lors du débat contradictoire.

L'association ATMP Haute-Savoie, désignée en qualité de mandataire spécial dans le cadre d'une mesure de sauvegarde de justice, par ordonnance du juge des contentieux de la protection d'Annecy statuant en qualité de juge des tutelles par ordonnance du 29 août 2023, n'a pas comparu, bien que régulièrement avisée.

Le directeur d'établissement et le tiers demandeur n'ont point comparu, bien que régulièrement avisés.

L'affaire a été mise en délibéré au 24 avril 2024 après-midi.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l'appel

Lors de l'audience du 24 avril 2024, Mme [D] [W] a confirmé qu'elle avait souhaité, à travers son courrier transmis par le CH d'[9] le 12 avril 2024, relevé appel à l'encontre de la décision rendue le 9 avril 2024 par le juge des libertés et de la détention d'Annecy.

Dès lors, il convient de considérer que la personne hospitalisée a régulièrement relevé appel, dans les délais et les formes prescrits par les articles R.3211-18 et R.3211-19 du code de la santé publique, et que celui-ci est recevable.

Sur la régularité et le bien-fondé de la mesure de soins psychiatriques sans consentement

L'office du juge des libertés et de la détention (et du premier président de la Cour d'appel ou de son délégué) consiste à opérer un contrôle de la régularité de l'hospitalisation complète sous contrainte, puis de son bien-fondé.

Il peut relever d'office tout moyen d'irrégularité à condition de respecter le principe du contradictoire.

En raison de la règle de purge des nullités, le premier président de la Cour d'appel ou son délégué ne saurait apprécier la régularité des procédures antérieures ayant donné lieu à un contrôle du juge des libertés et de la détention à travers une décision définitive.

L'appréciation du bien-fondé de la mesure doit s'effectuer au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués, dont le juge ne saurait dénaturer le contenu, son contrôle supposant un examen des motifs évoqués, mais ne lui permettant pas de se prononcer sur l'opportunité de la mesure d'hospitalisation complète sous contrainte et de substituer son avis à l'évaluation faite, par le corps médical, des troubles psychiques du patient et de son consentement aux soins.

Il résulte de l'article L.3212-1 du code de la santé publique que :

'I.-Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l'objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° Son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d'une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l'article L. 3211-2-1.

II.-Le directeur de l'établissement prononce la décision d'admission :

1° Soit lorsqu'il a été saisi d'une demande présentée par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l'existence de relations avec le malade antérieures à la demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celui-ci, à l'exclusion des personnels soignants exerçant dans l'établissement prenant en charge la personne malade. Lorsqu'elle remplit les conditions prévues au présent alinéa, la personne chargée, à l'égard d'un majeur protégé, d'une mesure de protection juridique à la personne peut faire une demande de soins pour celui-ci.

La forme et le contenu de cette demande sont fixés par décret en Conseil d'Etat.

La décision d'admission est accompagnée de deux certificats médicaux circonstanciés datant de moins de quinze jours, attestant que les conditions prévues aux 1° et 2° du I du présent article sont réunies.

Le premier certificat médical ne peut être établi que par un médecin n'exerçant pas dans l'établissement accueillant le malade ; il constate l'état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins. Il doit être confirmé par un certificat d'un second médecin qui peut exercer dans l'établissement accueillant le malade. Les deux médecins ne peuvent être parents ou alliés, au quatrième degré inclusivement, ni entre eux, ni du directeur de l'établissement mentionné à l'article L.3222-1 qui prononce la décision d'admission, ni de la personne ayant demandé les soins ou de la personne faisant l'objet de ces soins ;

2° Soit lorsqu'il s'avère impossible d'obtenir une demande dans les conditions prévues au 1° du présent II et qu'il existe, à la date d'admission, un péril imminent pour la santé de la personne, dûment constaté par un certificat médical établi dans les conditions prévues au troisième alinéa du même 1°. Ce certificat constate l'état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins. Le médecin qui établit ce certificat ne peut exercer dans l'établissement accueillant la personne malade ; il ne peut en outre être parent ou allié, jusqu'au quatrième degré inclusivement, ni avec le directeur de cet établissement ni avec la personne malade.

Dans ce cas, le directeur de l'établissement d'accueil informe, dans un délai de vingt-quatre heures sauf difficultés particulières, la famille de la personne qui fait l'objet de soins et, le cas échéant, la personne chargée de la protection juridique de l'intéressé ou, à défaut, toute personne justifiant de l'existence de relations avec la personne malade antérieures à l'admission en soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celle-ci.

Lorsque l'admission a été prononcée en application du présent 2°, les certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 3211-2-2 sont établis par deux psychiatres distincts'.

L'article L.3212-3 du code de la santé publique prévoit que :

'En cas d'urgence, lorsqu'il existe un risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade, le directeur d'un établissement mentionné à l'article L. 3222-1 peut, à titre exceptionnel, prononcer à la demande d'un tiers l'admission en soins psychiatriques d'une personne malade au vu d'un seul certificat médical émanant, le cas échéant, d'un médecin exerçant dans l'établissement. Dans ce cas, les certificats médicaux mentionnés aux deuxième et troisième alinéas de l'article L. 3211-2-2 sont établis par deux psychiatres distincts.

Préalablement à l'admission, le directeur de l'établissement d'accueil vérifie que la demande de soins a été établie conformément au 1° du II de l'article L. 3212-1 et s'assure de l'identité de la personne malade et de celle qui demande les soins. Si la demande est formulée pour un majeur protégé par son tuteur ou curateur, celui-ci doit fournir à l'appui de sa demande un extrait de jugement de mise sous tutelle ou curatelle'.

Suivant les dispositions de l'article L.3211-12-1 du code de la santé publique :

'I.-L'hospitalisation complète d'un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l'établissement lorsque l'hospitalisation a été prononcée en application du chapitre II du présent titre ou par le représentant de l'Etat dans le département lorsqu'elle a été prononcée en application du chapitre III du présent titre, de l'article L. 3214-3 du présent code ou de l'article 706-135 du code de procédure pénale, ait statué sur cette mesure :

1° Avant l'expiration d'un délai de douze jours à compter de l'admission prononcée en application des chapitres II ou III du présent titre ou de l'article L. 3214-3 du même code. Le juge des libertés et de la détention est alors saisi dans un délai de huit jours à compter de cette admission ;

2° Avant l'expiration d'un délai de douze jours à compter de la décision modifiant la forme de la prise en charge du patient et procédant à son hospitalisation complète en application, respectivement, du dernier alinéa de l'article L. 3212-4 ou du III de l'article L. 3213-3. Le juge des libertés et de la détention est alors saisi dans un délai de huit jours à compter de cette décision ;

3° Avant l'expiration d'un délai de six mois à compter soit de toute décision judiciaire prononçant l'hospitalisation en application de l'article 706-135 du code de procédure pénale, soit de toute décision prise par le juge des libertés et de la détention en application du présent I ou des articles L.3211-12, L. 3213-3, L. 3213-8 ou L. 3213-9-1 du présent code, lorsque le patient a été maintenu en hospitalisation complète de manière continue depuis cette décision. Toute décision du juge des libertés et de la détention prise avant l'expiration de ce délai en application du 2° du présent I ou de l'un des mêmes articles L.3211-12, L.3213-3, L.3213-8 ou L.3213-9-1, ou toute nouvelle décision judiciaire prononçant l'hospitalisation en application de l'article 706-135 du code de procédure pénale fait courir à nouveau ce délai. Le juge des libertés et de la détention est alors saisi quinze jours au moins avant l'expiration du délai de six mois prévu au présent 3°'.

'II.-La saisine mentionnée au I du présent article est accompagnée de l'avis motivé d'un psychiatre de l'établissement d'accueil se prononçant sur la nécessité de poursuivre l'hospitalisation complète'.

'III.-Le juge des libertés et de la détention ordonne, s'il y a lieu, la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète.

Lorsqu'il ordonne cette mainlevée, il peut, au vu des éléments du dossier et par décision motivée, décider que la mainlevée prend effet dans un délai maximal de vingt-quatre heures, afin qu'un programme de soins puisse, le cas échéant, être établi en application du II de l'article L. 3211-2-1. Dès l'établissement de ce programme ou à l'issue du délai mentionné à la première phrase du présent alinéa, la mesure d'hospitalisation complète prend fin'.

'V.-Lorsque le juge des libertés et de la détention n'a pas statué avant l'expiration du délai de douze jours prévu aux 1° et 2° du I ou du délai de six mois prévu au 3° du même I, la mainlevée de la mesure d'hospitalisation complète est acquise à l'issue de chacun de ces délais.

Si le juge des libertés et de la détention est saisi après l'expiration du délai de huit jours prévu aux 1° et 2° du I ou du délai de quinze jours prévu au 3° du même I, il constate sans débat que la mainlevée de l'hospitalisation complète est acquise, à moins qu'il ne soit justifié de circonstances exceptionnelles à l'origine de la saisine tardive et que le débat puisse avoir lieu dans le respect des droits de la défense'.

L'article L.3211-12-2 I alinéa 2 du code de la santé publique rend obligatoire l'audition par le juge des libertés et de la détention, saisi en application des articles L.3211-12 ou L. 3211-12-1, de la personne faisant l'objet de soins psychiatriques au cours d'un débat contradictoire, sauf si, au vu d'un avis médical motivé, des motifs médicaux font obstacle, dans son intérêt, à son audition, la personne étant alors représentée par un avocat.

En l'espèce, la décision frappée d'appel a bien été rendue avant l'expiration du délai de 12 jours prévu à l'article L.3211-12-1 I 1° du code de la santé publique.

Les pièces visées à l'article R.3211-12 du code de la santé publique ont été communiquées antérieurement aux débats.

Le greffe a également été destinataire, au plus tard quarante-huit heures avant l'audience, de l'avis rendu par un psychiatre de l'établissement d'accueil de la personne admise en soins psychiatriques sans consentement se prononçant sur la nécessité de poursuivre l'hospitalisation complète, conformément à l'article L.3211-12-4 du code de la santé publique.

Il ressort des pièces fournies que la procédure relative aux soins psychiatriques de Mme [D] [W] apparaît régulière, au regard des textes précédemment rappelés, et que les certificats et avis médicaux présents au dossier sont motivés conformément aux exigences légales.

Sur les difficultés soulevées à l'audience, il y a lieu d'observer que, s'il est regrettable que Mme [D] [W] n'ait pas comparu en 1ère instance devant le juge des libertés et de la détention, figure, toutefois, au dossier un certificat médical du 09 avril 2024 mentionnant qu'elle n'était pas auditionnable, ni transportable, au regard de son état clinique, du fait de la réalisation de soins somatiques hors psychiatriques, en l'occurrence d'un rendez-vous en chirurgie orthopédique non décalable, ce qui s'analyse comme un motif médical faisant obstacle, dans son intérêt, à son audition.

D'autre part, il convient de considèrer que la mention, dans le certificat médical de demande d'admission en soins psychiatriques à la demande d'un tiers en cas d'urgence du 29 mars 2024, d'un 'délire de persécution au 1er plan avec participation affective marquée' imposant 'des soins immédiats assortis d'une surveillance constante ou régulière en milieu hospitalier conformément aux dispositions de l'article L.3212-3 du code de la santé publique', est suffisante pour caractériser l'urgence et l'existence d'un risque grave d'atteinte à l'intégrité de la personne malade.

Quant au bien-fondé de la mesure, il apparait que Mme [D] [W], connue pour un trouble psychotique, a été hospitalisée sans son consentement le 29 mars 2024, alors qu'elle sortait d'une hospitalisation récente sur les unités de psychiatrie long séjour ayant pris fin début février, en raison d'une recrudescence rapide de ses troubles du comportement avec idées délirantes de persécution au premier plan, dans un contexte de rupture de traitement.

Si, depuis son admission, le corps médical observe une amélioration clinique, en ce qu'elle est, désormais, calme avec un contact correct, celle-ci n'est, toutefois, pas encore suffisante, du fait d'un discours, voire d'un comportement, traduisant la persistance d'éléments de persécution.

Lors de l'audience du 24 avril 2024, il a pu être constaté, comme relevé dans le dernier avis motivé du 22 avril 2024, que Mme [D] [W], même si elle soutient faire confiance aux médecins, n'a pas réellement conscience de ses troubles et de ses besoins actuels, étant dans une posture de déni de sa pathologie psychiatrique.

En outre, son adhésion aux soins, compte tenu de sa fragilité psychique actuelle, n'est pas assez solide, étant précisé qu'à l'issue de sa dernière hospitalisation en milieu psychiatrique en février dernier, son état psychique s'était rapidement dégradé lors du retour à domicile, en raison, notamment, d'une mauvaise observance thérapeutique.

Compte tenu de l'absence de stabilisation suffisante de son état de santé psychique, et des aléas existant quant au respect de ses soins, le risque d'une mise en danger personnelle ou d'autrui apparait non négligeable, de sorte qu'il convient, pour l'instant, de maintenir l'hospitalisation sous contrainte dont elle fait l'objet.

Mme [D] [W] souffrant de troubles mentaux entravant son consentement et son état mental imposant des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale constante, il convient de confirmer la décision du juge des libertés et de la détention d'Annecy du 9 avril 2024, qui a autorisé la poursuite de son hospitalisation complète, mesure qui lui procure, actuellement, l'apaisement et le cadre sécurisant dont elle a besoin.

PAR CES MOTIFS

Nous, Isabelle Chuilon, conseillère à la Cour d'appel de Chambéry, déléguée par ordonnance de Mme la Première Présidente, statuant le 24 avril 2024, après débats en audience publique, et par ordonnance contradictoire, au siège de ladite Cour d'appel, assistée de Sophie Messa, greffière,

Déclarons recevable l'appel de Mme [D] [W],

Confirmons l'ordonnance du juge des libertés et de la détention d'Annecy du 09 avril 2024,

Laissons les dépens à la charge du Trésor Public.

Disons que la notification de la présente ordonnance sera faite sans délai, par tout moyen permettant d'établir la réception, conformément aux dispositions de l'article R.3211-22 du code de la santé publique.

Ainsi prononcé le 24 avril 2024 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Isabelle CHUILON, conseillère à la cour d'appel de Chambéry, déléguée par Madame la première présidente et Mme Sophie MESSA, greffière.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Chambéry
Formation : Première présidence
Numéro d'arrêt : 24/00052
Date de la décision : 24/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-24;24.00052 ?
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