COUR D'APPEL DE BORDEAUX
TROISIÈME CHAMBRE CIVILE
--------------------------
ARRÊT DU : 09 MARS 2023
F N° RG 21/00344 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-L4TZ
[R] [D]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 33063/02/21/2065 du 04/02/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)
Association ATINA
c/
[V] [M]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 33063/02/21/3817 du 04/03/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BORDEAUX)
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats :
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 16 juillet 2020 par Juge aux affaires familiales de LIBOURNE (cabinet , RG n° 19/01229) suivant déclaration d'appel du 21 janvier 2021
APPELANTS :
[R] [D] représenté par sa curatrice Madame [N]
né le 29 Décembre 1982 à [Localité 5]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 2]
Association ATINA Curateur de Monsieur [R] [D],
demeurant [Adresse 7]
Représentés par Me Nicolas DROUAULT, avocat au barreau de LIBOURNE
INTIMÉE :
[V] [M]
née le 21 Janvier 1986 à [Localité 4]
de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]
Représentée par Me HAMON subsituant Me Sophie BAILLOU-ETCHART, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 912 du cpc, l'affaire a été débattue le 26 janvier 2023 hors la présence du public, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Françoise ROQUES, Conseiller chargée du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Président : Hélène MORNET
Conseiller : Isabelle DELAQUYS
Conseiller : Françoise ROQUES
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Florence Chanvrit
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 al. 2 du code de procédure civile.
De l'union de M.[D] et Mme [M] sont nées deux enfants à [Localité 3] :
* [K], le 23 juin 2008,
* [I], le 28 juin 2011.
Par jugement du tribunal de grande instance de Bordeaux du 14 mars 2013 prononçant le divorce des époux, les mesures suivantes ont été fixées :
- exercice conjoint de l'autorité parentale,
- résidence des enfants au domicile de la mère,
- droit de visite et d'hébergement au profit du père, un dimanche sur deux, de 14 heures à 16 heures, à l'issue de cette période de trois mois et à condition d'avoir exercé son droit de visite selon les conditions précitées, un dimanche sur deux, de 11 heures à 18 heures,
- contribution du père à l'entretien et à l'éducation des enfants à la somme de 80 euros par mois et par enfant, soit 160 euros au total.
Par jugement du tribunal d'instance de Bordeaux du 24 octobre 2019, M.[D] a été placé sous une mesure de curatelle renforcée.
Par jugement en date du 16 juillet 2020, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Bordeaux a :
- dit que l'autorité parentale s'exercera conjointement sur les enfants mineurs,
- fixé la résidence habituelle des enfants mineurs au domicile de leur mère,
- dit que M.[D] exerce un droit de visite sur les enfants, à raison d'un samedi après midi par mois pendant six mois, dans les locaux du Point-rencontre de [Localité 6], en présence des accueillants et sans possibilité de sortie,
- condamné le père à verser à la mère la somme de 80 euros par mois et par enfant soit 160 euros au titre de sa contribution alimentaire au total, et dit que cette pension sera payable selon les modalités et l'indexation usuelles,
- rejeté toute autre demande,
- condamné M.[D] aux dépens.
Procédure d'appel :
Par déclaration d'appel en date du 21 janvier 2021, M.[D] a formé appel du jugement de première instance en ce qu'il a fixé sa contribution à l'entretien et l'éducation à la somme de 160 euros et l'a condamné aux dépens. Mme [M] a formé appel incident.
Selon dernières conclusions du 13 juillet 2021, M.[D] demande à la cour d'infirmer partiellement le jugement entrepris et de :
- constater son impossibilité matérielle à respecter son obligation d'entretien et d'éducation envers ses filles [K] et [I],
- le dispenser de toute contribution alimentaire envers Mme [M],
- débouter Mme [M] de l'intégralité de ses demandes,
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a dit que l'autorité parentale s'exercera conjointement sur les enfants mineurs,
- condamner Mme [M] aux dépens de première instance et à titre subsidiaire ordonner le partage des dépens,
- condamner en tout état de cause Mme [M] aux dépens d'appel.
Selon dernières conclusions en date du 19 décembre 2022, Mme [M] demande à la cour de :
- débouter M.[D] de ses demandes,
- et statuant à nouveau, dire que l'autorité parentale sera exercée de manière exclusive par Mme [M],
- condamner M.[D] à lui verser la somme de 1 500 euros à titre d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
L'ordonnance de clôture est en date du 12 janvier 2023.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l'autorité parentale exclusive :
Le premier juge, visant le fait que Mme [M] ne justifiait pas d'être empêchée dans la prise de décisions portent sur l'éducation ou la santé des mineures et estimant qu'il était opportun que le père ait la possibilité d'exercer ses devoirs bien qu'il se soit montré défaillant ces dernières années, a maintenu l'exercice conjoint de l'autorité parentale sur les enfants communs.
L'autorité parentale qui se définit au sens de l'article 371-1 du Code civil comme un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l'intérêt de l'enfant, appartient au père et mère jusqu'à la majorité ou l'émancipation de l'enfant dans le but de le protéger dans sa sécurité, sa santé et sa moralité, pour assurer son éducation et permettre le développement de sa personne. Il est de principe qu'elle s'exerce conjointement.
En application de l'article 373-2-1 du Code civil, le juge peut confier son exercice à l'un des deux parents si l'intérêt de l'enfant le commande.
M.[D], au delà de ses difficultés personnelles (alcoolisme, insultes sur les réseaux sociaux etc) et de son instabilité le conduisant à un placement sous curatelle renforcée, n'a pas repris le moindre contact avec ses filles, et ce y compris par l'intermédiaire du point rencontre tel que fixé par le premier juge.
Ces écritures aux termes desquelles il prétend que Mme [M] l'empêche d'entretenir toute relation avec ses filles, mettent en évidence l'absence de conscience des besoins des enfants de la part de M.[D].
Il convient par conséquent d' infirmer le jugement entrepris qui a maintenu l'autorité parentale conjointe. Il échet d' attribuer à la mère l'autorité parentale exclusive sur les enfants communs compte-tenu du véritable abandon matériel et moral dont elles font l'objet de la part de leur père depuis plus de dix années.
Sur la contribution paternelle à l'entretien des mineures :
Relevant que M.[D] a disposé, d'après son avis d'impôts 2019, un revenu annuel de 18 873 € soit 1 572 €/mois en 2018 et qu'il ne doit pas être tenu compte des crédits à la consommation invoqués par le débiteur d'aliment, le premier juge a fixé la contribution paternelle à la somme de 80 €/mois et par enfant.
Il résulte des articles 371-2 et 373-2-2 du code civil, qu'en cas de séparation entre les parents, le juge fixe la contribution à l'entretien et l'éducation de l'enfant sous la forme d'une pension alimentaire, à proportion des ressources de l'un et l'autre des parents et des besoins de l'enfant.
Il y a lieu de rappeler que la contribution alimentaire est une obligation d'ordre public en raison de son caractère essentiel et vital et que cette contribution doit être satisfaite en priorité avant l'exécution de toute autre obligation civile de nature différente.
Quand bien même M.[D] invoque un accident du travail survenu le 10 octobre 2018, ce dernier a perçu des indemnités journalières à raison de 1 145 euros par mois en 2019 et à hauteur de 1 170 €/mois en 2020, complétées par une rente accident du travail de 61,92 €/mois.
En considération de l'ensemble de ces éléments et d'une prise en charge des enfants à plein temps par Mme [M], laquelle perçoit des revenus très modestes de l'ordre de 400 €/mois, il y a bien lieu d'approuver l'arbitrage du premier juge quant au montant de la contribution paternelle fixé. Le jugement sera confirmé de ce chef.
Sur les frais et dépens :
Il n' y a pas lieu de revenir sur l'arbitrage du premier juge concernant les dépens de première instance. M.[D] qui succombe supportera la charge des dépens d'appel.
Il n' y a pas lieu d'allouer à Mme [M] une indemnité fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile puisqu'elle est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle totale.
PAR CES MOTIFS
La cour, après rapport fait à l'audience et dans les limites de l'appel ;
Confirme le jugement entrepris, sauf en ce qui concerne l'exercice de l'autorité parentale ;
Statuant à nouveau de ce seul chef,
Confie l'exercice exclusif de l'autorité parentale sur les mineures, [K], née le 23 juin 2008, et [I], née le 28 juin 2011, à leur mère ;
Rejette la demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Dit que conformément aux dispositions de l'article 467 du code civil, copie du présent arrêt sera transmise à l'association ATINA, curatrice de M.[D] ;
Condamne M.[D] aux dépens d'appel.
Signé par Hélène MORNET, Présidente de la chambre et par Florence CHANVRIT, AAP Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière La Présidente