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14/05/2024 | FRANCE | N°21NT00131

France | France, Cour administrative d'appel de NANTES, 5ème chambre, 14 mai 2024, 21NT00131


Vu la procédure suivante :



Par un arrêt n° 21NT00131 du 7 mars 2023, la cour a sursis à statuer sur la requête d'appel de la société civile immobilière (SCI) du Bois de la Roche et de M. B... A... dirigée contre le jugement n° 1900032 du 19 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 juillet 2018 par lequel le préfet du Morbihan a enregistré l'installation de méthanisation et de combustion exploitée par la société par actions simplifiée (SAS) Méthasserin sur le territoire

de la commune de Néant-sur-Yvel, jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois,...

Vu la procédure suivante :

Par un arrêt n° 21NT00131 du 7 mars 2023, la cour a sursis à statuer sur la requête d'appel de la société civile immobilière (SCI) du Bois de la Roche et de M. B... A... dirigée contre le jugement n° 1900032 du 19 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 juillet 2018 par lequel le préfet du Morbihan a enregistré l'installation de méthanisation et de combustion exploitée par la société par actions simplifiée (SAS) Méthasserin sur le territoire de la commune de Néant-sur-Yvel, jusqu'à l'expiration d'un délai de quatre mois, imparti pour permettre à l'Etat et à la société Méthasserin de produire devant la cour un arrêté modificatif régularisant le vice tiré de ce que le public n'a pas été suffisamment informé quant aux incidences du projet en litige sur la zone Natura 2000 " Forêt de Paimpont " et quant à sa compatibilité avec le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) du bassin Loire-Bretagne et le schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) Vilaine.

Par un courrier enregistré le 29 juin 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires produit devant la cour l'arrêté du 23 juin 2023 par lequel le préfet du Morbihan a modifié l'arrêté préfectoral du 23 juillet 2018 portant enregistrement de l'installation de méthanisation exploitée par la société Méthasserin au lieu-dit Le Vausserin sur le territoire de la commune de Néant-sur-Yvel.

Par des mémoires, enregistrés les 29 juin, 20 septembre et 16 novembre 2023 (ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué), la société Méthasserin, représentée par Me Gandet, conclut au rejet de la requête de la SCI du Bois de la Roche et de M. A... ou, à titre subsidiaire, au sursis à statuer en vue d'une régularisation sur le fondement de l'article L. 181-18 du code de l'environnement et demande à la cour de mettre à la charge des requérants le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient dans le dernier état de ses écritures que :

- l'arrêté modificatif du préfet du Morbihan en date du 23 juin 2023 régularise l'arrêté litigieux du 23 juillet 2018 ;

- les moyens invoqués par les requérants ont déjà été écartés par la cour ou constituent des moyens qui ne peuvent pas être examinés à ce stade de la procédure ;

- aucun des moyens invoqués par les requérants n'est fondé.

Par des mémoires enregistrés les 4 et 28 août et 26 octobre 2023, la société civile immobilière (SCI) du Bois de la Roche et M. B... A..., représentés par Me Theallier, demandent à la cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rennes du 19 novembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 23 juin 2023 par lequel le préfet du Morbihan a modifié l'arrêté préfectoral du 23 juillet 2018 portant enregistrement de l'installation de méthanisation exploitée par la société Méthasserin au lieu-dit Le Vausserin sur le territoire de la commune de Néant-sur-Yvel, la décision implicite par laquelle le préfet a rejeté leur recours gracieux formé le 4 août 2023, ainsi que l'arrêté préfectoral du 23 juillet 2018 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent, dans le dernier état de leurs écritures, que :

- l'installation de méthanisation litigieuse, autorisée par l'arrêté du 23 juillet 2018 modifié, présente des risques de pollution des sols et du cours d'eau de l'Yvel ;

- l'installation devait être soumise à une procédure d'évaluation environnementale en raison du principe de précaution ;

- les mesures de protection des bassins versants sont imprécises ;

- la clause de sauvegarde des dispositions de l'article L. 512-7-2 du code de l'environnement ne respecte pas la directive 2011/92/UE du Parlement européen et du Conseil du 13 décembre 2011 concernant l'évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l'environnement ;

- une question préjudicielle devra être transmise à la Cour de justice de l'Union européenne concernant l'interprétation des articles 2 et 4 de la directive 2011/92/UE du 13 décembre 2011 pour savoir si les critères liés à la localisation et au cumul des incidences avec d'autres installations de la même zone prévus à l'article L. 512-7-2 du code de l'environnement sont suffisants pour exclure la nécessité d'une étude d'impact environnementale dans le cadre d'un projet d'installation de méthaniseur ;

- la distance entre l'installation litigieuse et le cours d'eau de l'Yvel n'a été mesurée, ni par rapport au lit majeur de la rivière, ni en tenant compte des facteurs de pente, en violation de l'article 6 de l'arrêté ministériel du 12 août 2010 relatif aux prescriptions générales applicables aux installations classées de méthanisation ;

- la viabilité économique du projet et les capacités techniques et financières du pétitionnaire doivent être réexaminées compte tenu des modifications intervenues en cours d'instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Ody,

- les conclusions de M. Frank, rapporteur public,

- et les observations de Me Delmotte, substituant Me Gandet, représentant la société Méthasserin.

Considérant ce qui suit :

1. Par l'arrêt du 7 mars 2023 visé ci-dessus, la cour, après avoir écarté les autres moyens invoqués par la SCI du Bois de la Roche et M. A... contre l'arrêté du 23 juillet 2018 par lequel le préfet du Morbihan a enregistré l'installation de méthanisation et de combustion exploitée par la société par actions simplifiée (SAS) Méthasserin sur le territoire de la commune de Néant-sur-Yvel, a décidé, en application de l'article L. 181-18 du code de l'environnement, de surseoir à statuer pour permettre à l'Etat et à la société Méthasserin de produire devant la cour un arrêté modificatif régularisant le vice tiré de ce que le public n'a pas été suffisamment informé quant aux incidences du projet en litige sur la zone Natura 2000 " Forêt de Paimpont " et quant à sa compatibilité avec le SDAGE du bassin Loire-Bretagne et le SAGE Vilaine.

Sur la régularisation du vice relevé par l'arrêt avant-dire droit du 7 mars 2023 :

2. Aux termes de l'article L. 181-18 du code de l'environnement : " I. - Le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre une autorisation environnementale, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés : / 1° Qu'un vice n'affecte qu'une phase de l'instruction de la demande d'autorisation environnementale, ou une partie de cette autorisation, peut limiter à cette phase ou à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et demander à l'autorité administrative compétente de reprendre l'instruction à la phase ou sur la partie qui a été entachée d'irrégularité ; / 2° Qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé par une autorisation modificative peut, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation. Si une telle autorisation modificative est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. / (...) ".

3. À compter de la décision par laquelle le juge recourt à l'article L. 181-18 du code de l'environnement, seuls des moyens dirigés contre la mesure de régularisation notifiée, le cas échéant, au juge peuvent être invoqués devant ce dernier. À ce titre, les parties peuvent, à l'appui de la contestation de l'acte de régularisation, invoquer des vices qui lui sont propres et soutenir qu'il n'a pas pour effet de régulariser le vice que le juge a constaté dans sa décision avant dire droit. Elles ne peuvent en revanche utilement soulever aucun autre moyen, qu'il s'agisse de moyens déjà écartés par la décision avant dire droit ou de moyens nouveaux, à l'exception de ceux qui seraient fondés sur des éléments révélés par la procédure de régularisation.

4. D'une part, il résulte de l'instruction qu'à la suite de l'arrêt avant-dire droit du 7 mars 2023, la société Méthasserin a déposé en préfecture le 14 avril 2023 un dossier de porter-à-connaissance traitant spécifiquement de la compatibilité du projet avec les documents de planifications en matière d'eau que sont le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) 2022-2027 du bassin Loire-Bretagne et le schéma d'aménagement et de gestion des eaux (SAGE) Vilaine ainsi que des incidences du projet sur la zone Natura 2000 " Forêt de Paimpont ". Par un arrêté du 19 avril 2023, le préfet du Morbihan a procédé à l'ouverture d'une consultation complémentaire du public sur le dossier de porter-à-connaissance, qui s'est tenue du 11 mai au 8 juin 2023 et dont la régularité n'est pas contestée par la SCI du Bois de la Roche et M. A.... Par un courrier du 29 juin 2023, le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires a produit devant la cour un arrêté du 23 juin 2023 par lequel le préfet du Morbihan a délivré à la société Méthasserin un arrêté modifiant l'arrêté initial du 23 juillet 2018 afin de prendre en compte cette procédure de consultation complémentaire du public sur le porter-à-connaissance du 14 avril 2023. Il résulte ainsi de l'instruction que le vice retenu par l'arrêt avant-dire droit du 7 mars 2023 a été régularisé par la mise en œuvre de la procédure de consultation du public en application des dispositions de l'article L. 512-7-1 du code de l'environnement et selon les modalités définies aux articles R. 512-46-12 à R. 512-46-14 du code de l'environnement et énoncées dans l'arrêt avant-dire droit.

5. D'autre part, aucun des moyens invoqués par la SCI du Bois de la Roche et M. A..., n'est fondé sur des vices propres à l'arrêté du 23 juin 2023 ou fondé sur des éléments révélés par la procédure de régularisation.

6. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions à fin d'annulation, présentées dans la requête n° 21NT00131 par la SCI du Bois de la Roche et M. A..., dirigées contre l'arrêté du 23 juillet 2018 tel que modifié par l'arrêté du 23 juin 2023, doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

7. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à la charge des parties les frais qu'elles ont chacune exposés pour l'instance et qui ne sont pas compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société civile immobilière du Bois de la Roche et de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société Méthasserin sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière du Bois de la Roche, à M. B... A..., à la société Méthasserin et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet du Morbihan.

Délibéré après l'audience du 18 avril 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Degommier, président,

- Mme Ody, première conseillère,

- Mme Dubost, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 mai 2024.

Le rapporteure,

C. ODYLe président,

S. DEGOMMIER

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 21NT00131


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANTES
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21NT00131
Date de la décision : 14/05/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. DEGOMMIER
Rapporteur ?: Mme Cécile ODY
Rapporteur public ?: M. FRANK
Avocat(s) : SELARL P & A

Origine de la décision
Date de l'import : 19/05/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-05-14;21nt00131 ?
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